En cours au Siège de l'ONU

CS/2049

LE CONSEIL DE SECURITE PROROGE JUSQU'AU 15 DECEMBRE 2000 LE MANDAT DE LA MISSION DE L'ONU EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

13 octobre 2000


Communiqué de Presse
CS/2049


LE CONSEIL DE SECURITE PROROGE JUSQU’AU 15 DECEMBRE 2000 LE MANDAT DE LA MISSION DE L’ONU EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

20001013

Le Conseil de sécurité a adopté ce matin, à l’unanimité, la résolution 1323 (2000) par laquelle il décide de proroger jusqu’au 15 décembre 2000 le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC).

Des délégations ont apporté un soutien modéré à la résolution en insistant sur la poursuite des combats sur le terrain, le manque de volonté dont font preuve les parties au conflit dans l'application des Accords de Lusaka - base d'une paix durable - ainsi que sur les problèmes auxquels est confronté le personnel des Nations Unies déjà déployé. D'aucuns ont posé la question de savoir si les conditions du déploiement d’une mission de la paix sont toujours réunies en République démocratique du Congo et ont exprimé le souhait de voir le Conseil de sécurité examiner les autres moyes à sa disposition pour contraindre les parties à rechercher un règlement pacifique au conflit.

Le représentant du Canada a souligné qu’il incombe au Gouvernement congolais de faire progresser le processus de paix en permettant à la MONUC de s’acquitter de son mandat et de bénéficier d’une liberté totale de mouvement sur le terrain. Le représentant des Etats-Unis a estimé pour sa part qu'il ne peut y avoir de déploiement supplémentaire du personnel des Nations Unies en République démocratique du Congo aussi longtemps que les affrontements se poursuivront. Il a expliqué que la paix ne peut être instaurée dans le pays aussi longtemps que la MONUC restera la cible d’une propagande négative conduite par le Gouvernement congolais.

Les représentants des pays suivants ont pris la parole: Canada, Royaume-Uni, Argentine, Pays-Bas, France, Etats-Unis.

Au titre de l’examen de cette question, le Conseil de sécurité était saisi d’un rapport du Secrétaire général (S/2000/888).

La situation concernant la République démocratique du Congo

Projet de résolution S/2000/979

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 1291 (2000) du 24 février 2000, 1304 (2000) du 16 juin 2000 et 1316 (2000) du 23 août 2000, la déclaration adoptée à l’issue de sa réunion au sommet du 7 septembre 2000 (S/PRST/2000/28), ainsi que l’ensemble des autres résolutions et des déclarations de son Président concernant la République démocratique du Congo,

Réaffirmant la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance politique de la République démocratique du Congo et de tous les États de la région,

Déplorant la poursuite des hostilités dans la République démocratique du Congo, le manque de coopération avec l’Organisation des Nations Unies, et l’absence de progrès dans le dialogue intercongolais,

Prenant note du rapport du Secrétaire général daté du 21 septembre 2000 (S/2000/888) et de ses recommandations, ainsi que des observations figurant aux paragraphes 82 et 85,

Réaffirmant qu’il est prêt à aider le processus de paix, en particulier grâce à la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), conformément à la résolution 1291 (2000),

Se déclarant profondément préoccupé par les conséquences désastreuses du conflit pour la situation humanitaire et les droits de l’homme ainsi que par des informations concernant l’exploitation illégale des ressources naturelles de la République démocratique du Congo,

1.Décide de proroger jusqu’au 15 décembre 2000 le mandat de la MONUC;

1. Décide de rester activement saisi de la question.

Quatrième rapport du Secrétaire général sur la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (S/2000/888)

Le présent rapport, soumis en application de la résolution 1316 (2000) en date du 23 août 2000, reflète l’évolution de la situation en République démocratique du Congo (RDC) depuis le 12 juin 2000.

Depuis trois mois, et en particulier depuis l’adoption de la résolution 1316 (2000), les efforts pour relancer le processus de paix se sont intensifiés. Le dévouement et la persévérance des dirigeants de la région, qui ont œuvré sans relâche à la réalisation de cet objectif, méritent d’être salués. Toutefois, regrette le Secrétaire général, les progrès dans l’application de l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka ont été minimes, voire nuls. Le cessez-le-feu a été systématiquement violé et les combats entre les forces gouvernementales, les factions rebelles et les forces armées ougandaises ont repris de plus belle dans

le Nord de la province de l’Equateur. Les hostilités ont non seulement mis en péril le processus de paix en RDC mais ont aussi débordé au-delà des frontières en République du Congo et en République centrafricaine. Extrêmement préoccupées par l’impact négatif du conflit sur la sécurité, l’économie et la situation humanitaire dans leur pays, les autorités congolaises et centrafricaines ont demandé l’appui de la communauté internationale en vue de rétablir la situation. Par ailleurs, la situation explosive qui sévit dans le Nord et le Sud-Kivu, où des affrontements fréquents et violents opposent les troupes du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD)/Armée populaire rwandaise (APR) et les groupes armés, demeure un vif sujet de préoccupation.

La mise en œuvre du plan de désengagement adopté à Kampala le 8 avril 2000 est bloquée depuis la fin du mois de juillet, au moment où le Gouvernement de la RDC s’est retiré des délibérations que le Comité militaire mixte a consacrées à cette question. L’Accord s’est encore trouvé affaibli en raison du regain d’hostilités, du recrutement et de l’entraînement massif de soldats et l’achat d’armes et de munitions. Au cours de la période à l’examen, les mouvements rebelles ont redoublé d’efforts pour constituer un front uni contre le Gouvernement de la RDC. Parallèlement, les efforts déployés par les Nations Unies pour aider les parties à appliquer l’Accord de Lusaka ont été contrecarrés par les restrictions imposées à la liberté de mouvement de la Mission, par le non-respect des dispositions de l’Accord sur le statut des forces et jusqu’à une date toute récente, par l’opposition du Gouvernement au déploiement de Casques bleus. De plus, la campagne de propagande qui a été dirigée contre la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) fait craindre encore davantage pour la sécurité du personnel de la Mission. A la suite de la visite de l’Envoyé spécial du Secrétaire général – Le général nigérian, M. Abdulsalami Abubakar -, le Gouvernement de la RDC a autorisé le déploiement de contingents des Nations Unies dans certaines localités sous son contrôle et annoncé un assouplissement de certaines restrictions imposées à la liberté de mouvement de la Mission. Ces concessions demeurent toutefois insuffisantes et, jusqu’à présent, leur application laisse beaucoup à désirer.

Par ailleurs, le Gouvernement de la RDC a remis en question la validité de l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka et demande qu’il soit révisé. Soulignant qu’il incombe aux parties signataires de convenir une révision de l’Accord, le Secrétaire général rappelle toutefois que l’Accord est la base de toutes les résolutions du Conseil de sécurité autorisant la présence de la MONUC en RDC. En dépit de difficultés, on observe toutefois certains progrès. Conformément au paragraphe 3 de la résolution 1304 (2000), les forces rwandaises et ougandaises se sont retirées de Kisangani, bien que l’on ne sache pas encore si elles ont ou non été redéployées vers d’autres zones de combat. La libération des prisonniers de guerre, à laquelle les parties ont procédé, en application de l’une des principales dispositions de l’Accord de Lusaka, est une importante mesure de confiance. Le Gouvernement rwandais a pour sa part proposé un plan de désengagement des forces rwandaises et des forces du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) au Kasai. Il serait souhaitable que le Comité militaire mixte et le Comité politique, qui devaient se réunir à la fin du mois de septembre, fassent le point de la situation et examinent la proposition rwandaise, ainsi que d’autres propositions qui ont été formulées dans le contexte du processus de paix. Lors de ces réunions, il faudra aussi aborder, à titre prioritaire, la question des violations incessantes du cessez-le-feu. La détérioration de la situation sur

le plan humanitaire et sur celui des droits de l’homme dans tout le pays est un autre motif de préoccupation. Le lourd tribut que les civils continuent de payer au conflit est inacceptable. La poursuite des hostilités et l’insécurité généralisée aggravent encore la situation des enfants et c’est pourquoi, il faut qu’une action énergique soit menée pour les protéger et sauvegarder leurs droits.

A la lumière de ces informations, le Secrétaire général recommande au Conseil de sécurité d’étendre le mandat de la MONUC pour une période de deux mois. Ainsi, l’ONU pourra témoigner de son attachement au processus de paix en RDC tout en indiquant aux parties qu’elles seraient bien avisées de mettre ce délai à profit pour prouver qu’elles sont résolues à faire progresser le processus de paix et à créer les conditions nécessaires au déploiement de la phase II de la MONUC. L’ONU poursuivra quant à elle les préparatifs en vue du déploiement. Dans un tel contexte, on ne saurait sous-estimer l’importance du dialogue intercongolais. C’est pourquoi, les parties congolaises doivent redoubler d’efforts pour surmonter les réticences qui empêchent tout progrès en faveur d’un règlement durable. L’impasse du dialogue intercongolais pourrait bien se traduire par la fragmentation du pays, avec toutes les conséquences que cela supposerait pour la région tout entière. Des nouvelles alarmantes continuent de parvenir à l’Organisation concernant l’exploitation illégale des ressources naturelles en RDC. Les profits tirés de ces activités n’ont pas seulement pour effet d’exacerber le conflit mais aussi d’enrichir ceux qui ont tout intérêt à voir l’affrontement se poursuivre. A cet égard, le Secrétaire général se félicite de la création du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses en RDC. Les parties sont invitées à mettre sagement à profit cette prorogation du mandat de la Mission pour relancer le processus de paix car le succès des opérations des Nations Unies en RDC dépend avant tout de leur coopération.

Explications de vote

M. MICHEL DUVAL (Canada) a rappelé que c'est la troisième fois que le Conseil de sécurité se réunit pour proroger le mandat de la Mission de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC). L'Accord de cessez-le-feu que la MONUC était chargée de mettre en œuvre continue de faire l'objet de violations par toutes les parties. Ces mêmes parties continuent de saper le déploiement de la MONUC. Les éléments politiques principaux de l'Accord ne sont toujours pas mis en œuvre, car le Gouvernement de la RDC n'honore pas ses engagements concernant sa participation à un véritable dialogue intercongolais et les forces étrangères, essentiellement rwandaises et ougandaises, qui sont toujours stationnées sur le territoire congolais en violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. La communauté internationale, et en particulier nos partenaires en Afrique, doivent constater que le Conseil de sécurité n'a épargné aucun effort pour encourager et exhorter les signataires de l'Accord de Lusaka à s'acquitter des engagements pris, a souligné M. Duval. Depuis janvier dernier, les efforts inlassables et louables du Secrétaire général et de son Représentant spécial ont été soutenus dans le cadre de sessions spéciales du Conseil de sécurité avec les signataires et le Comité politique de la Commission mixte militaire, avec une délégation du Conseil qui s'était rendue dans la région des Grands Lacs; dans le cadre de nombreuses réunions extraordinaires et plus récemment avec la participation de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, le Général Abubakr.

A ce jour, les signataires de l'Accord de Lusaka n'ont pas saisi l'engagement du Conseil de sécurité comme une occasion propice visant à mettre fin à ce conflit dévastateur.

Il est regrettable que les principales parties à l'Accord n'aient pas fait preuve d'un engagement ferme en faveur d'un règlement pacifique du conflit. Les attaques préméditées suggèrent que la force, et non pas le dialogue, demeure le moyen préféré des échanges. Tant que des changements ne seront pas intervenus, le Conseil de sécurité peut difficilement agir pour stabiliser la situation en RDC ou pousser les pays de la région à comprendre la nécessité d'une paix.

A présent, la MONUC ne peut être déployée dans la région de la RDC où sa présence est nécessaire. Tout d'abord, il incombe au Gouvernement de la RDC de faire progresser le processus de paix en honorant ses engagements afin de permettre à la MONUC la liberté totale de mouvement. Tandis que le Canada appuie tous les efforts déployés par le Secrétariat et le Conseil de sécurité visant à amener le Gouvernement de la RDC à autoriser le déploiement inconditionnel de la Mission, il souhaite que les alliés de la RDC contribuent à ce que le Gouvernement accepte une présence substantielle des Nations Unies et à exercer leur influence à cette fin. A cet égard, la délégation canadienne encourage le Secrétariat à explorer tous les efforts diplomatiques y compris au niveau régional, pour garantir la coopération du Gouvernement. Toutefois, il incombe à toutes les parties de reconnaître que la présence des Nations Unies est nécessaire et ne peut être secondaire à des spéculations stratégiques. Les signataires de l'Accord de Lusaka doivent réaliser que le Conseil de sécurité ne consentira pas à un processus qui impose des conditions à la coopération avec la MONUC ou avec la Commission mixte militaire, ou qui vise à légitimer les gains par une agression armée. Tout en encourageant les parties à poursuivre les discussions bilatérales en marge de l'Accord de Lusaka, M. Duval a réaffirmé que l'Accord demeure la base centrale de l'appui du Canada en faveur d'un rôle de maintien de la paix des Nations Unies en RDC.

M. ALISTAIR HARRISON (Royaume-Uni) a déclaré que son pays est favorable à la MONUC et au fait que son mandat soit étendu en République démocratique du Congo. Le véritable problème est que la mission n’est pas en mesure de faire son travail aujourd’hui. Il ne faut pas que la situation sur place se détériore davantage. Il faudrait enregistrer des progrès concrets pendant cette période de deux mois, correspondant à la prorogation du mandat, a estimé le représentant. Au cas où il n’y aurait pas d’avancée, l’avenir de la MONUC même serait remis en question et les conséquences pourraient être terribles pour la RDC, son peuple et la région. Les parties au conflit doivent décider si elles veulent la paix ou la guerre maintenant, a conclu le représentant.

M. ARNOLDO M. LISTRE (Argentine) a estimé que la prorogation de la MONUC est nécessaire mais cela ne peut être consenti de manière indéfinie. Tant que les signataires de l'Accord de Lusaka ne s'acquittent pas des engagements pris, le Conseil de sécurité ne peut autoriser le déploiement de la prochaine phase de la Mission. Il est essentiel de trouver toutes les formules nécessaires visant à garantir la mise en œuvre de l'Accord de cessez-le-feu de Lusaka.

M. ADRIAAN KOOIJMANS (Pays-Bas) a déclaré que les Pays-Bas votaient en faveur de la prorogation du mandat de la MONUC pour une période de deux mois, en tenant compte du fait que les Accords de Lusaka restent la base viable d’un règlement du conflit dans la région. Le représentant a demandé au Gouvernement congolais, en particulier, de faciliter le déploiement de la MONUC et de se résoudre à dialoguer avec les autres parties au conflit. Les Pays-Bas demandent que tous les belligérants commencent à retirer leurs troupes et mettent fin à leur offensive militaire en République démocratique du Congo.

M. PASCAL TEIXEIRA DA SILVA (France) a déclaré qu'en dépit de nombreux efforts déployés par la communauté internationale, la mise en œuvre de la MONUC reste bloquée. La résolution 1304 (2000) du Conseil de sécurité avait exigé que l'Ouganda et le Rwanda retirent toutes leurs forces du territoire de la République démocratique du Congo (RDC). Elle appelait également les autorités de la RDC à coopérer avec les Nations Unies pour assurer le déploiement de la MONUC. A ce jour, aucun de ces appels n'a été entendu. L'Accord de Lusaka prévoit notamment la cessation des hostilités et l'engagement en faveur d'un dialogue intercongolais. Il appartient maintenant à tous les belligérants de se conformer à ces engagements. Les Nations Unies ne peuvent se substituer à eux, a souligné M. Teixeira da Silva. Les graves violations à l'encontre de la population civile, essentiellement dans la partie orientale du pays, continuent d'être commises. Les victimes de la situation humanitaire grave qui sévit dans le pays se comptent par centaines de milliers. Il est temps que l'on mette fin à cette situation.

M. MARC C. MINTON (Etats Unis-d’Amérique) a déclaré que les Etats-Unis soutiennent la décision du Conseil de sécurité de proroger le mandat de la MONUC en République démocratique du Congo jusqu’au 15 décembre. Cependant, ce soutien est tempéré par les graves inquiétudes concernant les efforts internationaux en matière de maintien de la paix dans la région et au vu de la résistance des parties de se conformer aux Accords de Lusaka. Il ne peut y avoir de déploiement supplémentaire de personnel des Nations Unies tant que des affrontements entre les parties au conflit se poursuivent. Selon le représentant des Etats-Unis, les efforts collectifs pour restaurer la paix et la stabilité en RDC sont de plus affectés par les restrictions imposées au personnel de la MONUC déjà déployé dans la région. Le Gouvernement de la République démocratique du Congo doit encore accepter que les responsables des Nations Unies puissent se déplacer sans restriction. Il ne peut y avoir de paix tant que la MONUC restera la cible d’une propagande négative fomentée par le Gouvernement congolais, a encore ajouté le représentant.

Il est impossible de répondre correctement à la situation humanitaire critique du pays malgré les efforts collectifs fournis dans ce domaine, tant que les organes humanitaires se verront refuser la sécurité et l’accès nécessaires à toutes les régions du pays, y compris à l’Est. Selon le représentant, l’aide d’urgence aux 1,8 million de Congolais déplacés et aux 16 millions de personnes qui ont un besoin immédiat de nourriture ne peut se faire dans les conditions actuelles. Toutes les parties au conflit doivent donc permettre un accès complet et sans danger à tout le personnel humanitaire pour éviter d’autres souffrances humaines et une nouvelle tragédie.

* *** *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.