LA CONFERENCE DU DESARMEMENT TIENT LA DERNIERE SEANCE DE SA SESSION DE 2000: ELLE ADOPTE SON RAPPORT A L'ASSEMBLEE GENERALE
Communiqué de Presse
CD/G/476
LA CONFERENCE DU DESARMEMENT TIENT LA DERNIERE SEANCE DE SA SESSION DE 2000: ELLE ADOPTE SON RAPPORT A L'ASSEMBLEE GENERALE
20000921La Fédération de Russie, les États-Unis, lAlgérie, le Costa Rica et lÉquateur font des déclarations
Genève, le 21 septembre -- La Conférence du désarmement a tenu, ce matin, la dernière réunion de sa session de 2000 en adoptant son rapport à l'intention de l'Assemblée générale. Un communiqué de presse concernant la session de 2000 de la Conférence du désarmement est également disponible.
Dans le rapport de la Conférence, il est notamment recommandé que le Président et son successeur mènent des consultations au cours de la période intersession, et fassent des recommandations qui pourraient aider à ce que la Conférence commence tôt en 2001 ses travaux sur plusieurs points de l'ordre du jour.
Dans une déclaration de clôture, le Président de la Conférence, M. Petko Draganov de Bulgarie, a noté que, afin d'être en mesure de s'entendre sur quoi que ce soit s'agissant du programme de travail, il semble que la Conférence doive s'entendre sur tout. Il a noté que deux questions, le désarmement nucléaire et la prévention de la course aux armements dans l'espace, doivent continuer de faire l'objet d'efforts. M. Draganov a estimé que si les États membres font preuve de suffisamment de volonté politique, la Conférence pourrait être très proche du compromis tant souhaité et du commencement de travaux de fond.
La Conférence a par ailleurs entendu la Fédération de Russie qui, tout en reconnaissant que la décision du Président des États-Unis de ne pas prendre de mesures en vue du déploiement d'un système national antimissile constitue une attitude réfléchie et responsable, fait remarquer que les programmes de mise au point d'un tel système n'ont pas été interrompus. Le Traité sur la limitation des missiles antimissile (Traité ABM) sous-tend l'ensemble du système actuel d'accords de limitation des armements et son affaiblissement menacerait les régimes de non- prolifération des armes de destruction massive et pourrait entraîner des changements dans les positions de plusieurs pays en ce qui concerne le désarmement nucléaire.
La Chine a pour sa part réitéré que toute tentative de modifier le Traité ABM en vue de permettre le déploiement du système national antimissile irait à l'encontre du but du Traité et menacerait la paix et la sécurité. Il faut donc s'opposer à un tel amendement. En réponse à cette intervention, les États-Unis ont regretté que le représentant de la Chine ait fait une présentation fallacieuse des projets et des intentions des États-Unis.
- 2 - CD/G/476 21 septembre 2000
L'Algérie, au nom du Groupe des 21 (pays non alignés membres de la Conférence du désarmement) a regretté la position intransigeante de certains États nucléaires en ce qui concerne les questions relatives au désarmement nucléaire et à la prévention de la course aux armements dans l'espace. Le Groupe rappelle que le désarmement nucléaire demeure la question prioritaire de la Conférence et souligne que l'espace extra-atmosphérique est le patrimoine de l'humanité; la prévention de son utilisation à des fins militaires exige des mesures urgentes.
La Conférence a en outre entendu le Costa Rica qui a demandé son admission en tant que membre de la Conférence du désarmement, ainsi que l'Équateur.
M. Abdelkader Bensmail, Secrétaire général adjoint de la Conférence du désarmement et Directeur du Service de Genève des Affaires du désarmement, qui participait à ce titre à sa dernière séance de la Conférence du désarmement, a rappelé que des périodes d'inactivité et de blocage se sont déjà produites par le passé et que le potentiel de la Conférence pour mener de nouvelles négociations multilatérales est intacte. Néanmoins, la poursuite du blocage actuel est une source de préoccupation pour tous. Il faut une volonté commune de tous les membres de la Conférence en tirant pleinement parti de la souplesse de ses mécanismes et de son savoir-faire afin de mettre au point un programme de travail équilibré et opérationnel qui tienne compte des priorités et préoccupations de tous.
Les représentants de la France, de l'Égypte, de la Chine, de l'Algérie, de l'Inde, de la République de Corée (au nom du groupe occidental), de la Roumanie (au nom du groupe d'Europe orientale) et de l'Ukraine, ainsi que le Président de la Conférence, au nom de tous ses membres, ont rendu hommage à la contribution de M. Bensmail aux travaux de la Conférence du désarmement.
La prochaine séance plénière de la Conférence du désarmement se tiendra le mardi 23 janvier 2001.
Aperçu des déclarations
MME NORA RUIZ DE ANGULO (Costa Rica) a rappelé que, tout au long de son histoire, la diplomatie costaricienne s'est caractérisée par une tradition pacifiste et un rejet du recours à la force comme moyen de régler les conflits. Le pays a maintenu des relations de paix et d'amitié avec les pays voisins et continue de participer à de nombreuses activités et accords internationaux visant la réduction des armes classiques et des armes de destruction massive. Le pays, qui a aboi l'armée en 1949, a fait dès 1958 la première proposition concrète de limitation des armes classiques et d'interdiction des armes nucléaires dans le cadre de l'Organisation des États américains. Le pays s'est fermement engagé dans les efforts des Nations Unies en faveur de la préservation de la paix et de la sécurité internationales. Il prône la création de zones exemptes d'armes nucléaires, le désarmement nucléaire total, la concrétisation des résultats de la quatrième session des Nations Unies consacrée au désarmement et l'élargissement du registre des armes classiques.
- 3 - CD/G/476 21 septembre 2000
Le Costa Rica estime en outre qu'il faut interdire le transfert de matériel et de personnel militaires ou d'appui financier et logistique aux États dont les forces militaires ou paramilitaires ou dont les forces de sécurité participent aux violations des droits de l'homme ou y contribuent. Mme Ruiz de Angulo a également attiré l'attention sur le rôle du Costa Rica dans le domaine du contrôle des armes légères et de petit calibre et sa proposition d'un code international de conduite sur le transfert des armes. Elle a également souligné le rôle du pays dans le domaine des efforts de désarmement au sein de l'Organisation des États américains et a rappelé les instruments dans le domaine du désarmement auxquels le pays est partie.
Le Costa Rica accorde la plus haute importance aux instances internationales, consacrant ses efforts dans le domaine de la sécurité au renforcement des accords de sécurité collective tant sur le plan régional qu'international, et appuyant des solutions pacifiques aux conflits par la promotion de mesures de désarmement. Compte tenu qu'une partie des efforts du Costa Rica en faveur de la sécurité et le bien-être de la société costaricienne sont liés au développement du droit international et sa protection effective, le pays doit s'assurer d'être représenté dans les instances internationales. C'est pourquoi le Gouvernement du Costa Rica réitère aujourd'hui sa demande d'être admis comme membre de la Conférence du désarmement.
M. VASILY SIDOROV (Fédération de Russie) s'est dit fermement convaincu que le Traité sur la limitation des missiles antimissile (Traité ABM) demeure la clef de voûte de la stabilité stratégique et qu'il continue d'être un élément fondamental pour des réductions futures d'armes stratégiques offensives. L'importance et le rôle historique du Traité ABM ne se limitent pas aux seules relations entre la Russie et les États-Unis. Il sous-tend l'ensemble du système actuel d'accords de limitation des armements et son affaiblissement porterait atteinte à tout un ensemble d'accords dans le domaine du désarmement élaborés au cours des trente dernières années. Il existe par conséquent une réelle menace d'érosion des régimes de non-prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs. La mise au point et le déploiement du système national antimissile par les États-Unis ne pourrait que fortement favoriser la prolifération de missiles et le transfert de la technologie dans ce domaine. Ceci entraînerait des changements dans les positions de plusieurs pays en ce qui concerne le désarmement nucléaire.
M. Sidorov a noté que ceux qui s'opposent à l'idée de préserver le Traité ABM en l'état affirment souvent que des amendements mineurs visant à le rendre conforme aux réalités actuelles n'auraient pas de conséquences. Ils suggèrent que le Traité soit amendé de façon à permettre le déploiement d'un système «limité» de défense antimissile du territoire national. Une telle approche est en flagrante contradiction avec la disposition qui est au coeur de l'article 1, qui est l'essence même du Traité. Une telle modification du Traité créerait un précédent dans les pratiques en matière de désarmement en permettant qu'un ajout ou un amendement apporté à un accord limitant la mise au point d'armes plus avancées revienne en fait à permettre le renforcement de capacités militaires. Une telle logique ne saurait être admise. La décision du Président des États-Unis de ne pas prendre de mesures en vue du déploiement d'un système national antimissile constitue une attitude réfléchie et responsable. M. Sidorov a toutefois fait remarquer que les programmes de mise au point d'un système tel n'ont pas été interrompus.
- 4 - CD/G/476 21 septembre 2000
Le représentant russe a souligné qu'il est difficile d'imaginer un système antimissile des États-Unis qui ne porte pas atteinte, à la fois, à la force de dissuasion russe et aux limites imposées par le Traité ABM. Objectivement, les conséquences de la mise en place d'un système national de défense antimissile seraient un coup porté à la stabilité stratégique actuelle, une réduction de la capacité stratégique de la Russie et la garantie d'une supériorité militaire unilatérale des États-Unis.
M. NOR-EDDINE BENFREHA (Algérie), au nom du Groupe des 21 (pays non alignés membres de la Conférence du désarmement), a déclaré que le Groupe regrette que la Conférence du désarmement, en tant qu'unique instance de négociation multilatérale sur les questions de désarmement, se soit encore avérée incapable de s'entendre sur un programme de travail. Ceci s'explique par la position intransigeante de certains États nucléaires en ce qui concerne les questions relatives au désarmement nucléaire et à la prévention de la course aux armements dans l'espace. Le Groupe rappelle que le désarmement nucléaire demeure la question prioritaire de la Conférence et souligne qu'il faut établir un comité spécial sur le désarmement nucléaire. Le Groupe rappelle en outre que l'espace extra-atmosphérique est le patrimoine de l'humanité et que la prévention de son utilisation à des fins militaires est urgente du fait des préoccupations légitimes qui portent à penser que les instruments juridiques actuels sont insuffisants pour prévenir le placement d'armes dans l'espace extra-atmosphérique. Les 21 appellent les États parties au Traité ABM à respecter leurs engagements.
Par ailleurs, le Groupe des 21 prie instamment les autres groupes d'États membres de la Conférence pour que ses travaux puissent commencer tôt l'an prochain et pour parvenir un accord sur un programme de travail qui satisfasse aux préoccupations de tous les États.
M. HU XIAODI (Chine) a noté que la raison pour la mise au point et le déploiement d'un système national antimissile serait qu'un tel système servirait à se défendre contre la menace posée par certains «pays suscitant des inquiétudes». Le représentant chinois a toutefois souligné qu'il est connu de tous que la capacité militaire, la technologie et la puissance de tels pays ne sauraient constituer une menace pour le pays le plus puissant du monde. En outre, aucun petit pays ne se risquerait à attaquer le pays le plus puissant au monde avec des armes de destruction massive à moins de souhaiter le suicide. Avancer de telles motivations pour le projet antimissile n'est pas convaincant, c'est une piètre excuse.
M. Hu a reconnu que les traités adoptés peuvent être amendés pour tenir compte de nouvelles réalités, à condition toutefois de respecter leurs principes et l'objectif de renforcer la paix et la sécurité internationales. Toute tentative de modifier le Traité sur la limitation des missiles antimissile (ABM) en vue de permettre le déploiement du système national antimissile irait à l'encontre du but du Traité et menacerait la paix et la sécurité. Il faut donc s'opposer à un tel amendement.
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Le pays qui possède la technologie spatiale la plus avancée a toujours poursuivi son plan de mettre au point des armes spatiales et a explicitement affirmé une volonté de supériorité dans l'espace. La mise au point d'armes spatiales a été accélérée et le projet de système national antimissile fait partie de cet effort. Des systèmes spatiaux deviendront des éléments essentiels du système national antimissile, qui n'en est qu'à la première phase d'un système plus global. L'espace deviendra un champ de bataille de ces systèmes. Le risque de militarisation et de course aux armements dans l'espace est donc bien réel et il faut que la communauté internationale s'y oppose.
S'agissant du programme de travail de la Conférence, la Chine a déploré qu'un accord n'ait pu être trouvé sur cette question. Une délégation insiste pour négocier une question qu'elle estime prioritaire sans tenir compte des questions qui sont importantes pour d'autres délégations. C'est cette insistance par une délégation qui empêche la Conférence d'avancer dans ses travaux. Les négociations sur un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ne sont pas la priorité de la Chine mais elle ne s'y oppose pas. Néanmoins, toute formule prévoyant de négocier un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires et pas la question de la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique serait inacceptable. La Chine espère qu'à l'avenir, toutes les questions seront abordées de façon juste et équitable.
M. ROBERTO BÉTANCOURT (Équateur) a rappelé que la Conférence du désarmement a pour objet la concertation sur les questions de sécurité pour parvenir à une évolution positive dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales. Il a estimé que les difficultés actuelles pourraient être surmontées si les membres de la Conférence écoutaient les appels de la communauté mondiale, coopéraient davantage et favorisaient, par exemple, un consensus permettant d'arrêter le programme de travail dont a besoin la Conférence. La Conférence doit commencer le millénaire par un programme qui permette d'engager un processus de désarmement et de non-prolifération qui soit clair et qui suscite l'espoir de toute l'humanité.
M. ROBERT T. GREY (États-Unis) a regretté que le représentant de la Chine ait fait une présentation fallacieuse des projets et des intentions des États- Unis. Il a rappelé qu'il a déjà répondu la semaine dernière aux déclarations du représentant de la Chine. Pour remettre la Conférence au travail, il faut procéder dans la direction proposée par les trois Présidents précédents qui se sont succédés, a déclaré le représentant des États-Unis, qui a assuré que sa délégation est disposée à le faire, à l'instar de la majorité des membres de la Conférence.
M. ABDELKADER BENSMAIL, Secrétaire général adjoint de la Conférence du désarmement et Directeur du Service de Genève des Affaires du désarmement, a fait une déclaration d'adieu dans laquelle il a rappelé qu'il a participé à la naissance de la Conférence du désarmement en 1978 et qu'il avait fait partie, en 1979, de la délégation de l'Algérie, la première à présider la Conférence du désarmement. Il a ensuite rejoint le Secrétariat des Nations Unies en 1980.
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M. Bensmail a souligné qu'il a connu les heures de gloire la Conférence avec les négociations qui ont abouti à la conclusion de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques en 1992 et du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires en 1996. Il a également partagé la frustration des délégations devant l'incapacité de la Conférence à engager des travaux de fond sur les points de son ordre du jour.
M. Bensmail a toutefois souligné que les questions de désarmement exigent que des solutions soient recherchées par toutes les voies disponibles, que ce soit sur le plan bilatéral ou multilatéral. Il a également rappelé que des périodes d'inactivité et de blocage se sont déjà produites par le passé. Il a néanmoins souligné que, s'il est généralement reconnu que la Conférence est une institution qui a bien servi la communauté internationale et que son potentiel pour mener de nouvelles négociations multilatérales est intacte, la poursuite du blocage actuel est une source de préoccupation pour tous. Il faut une volonté commune de tous les membres de la Conférence en tirant pleinement parti de la souplesse de ses mécanismes et de son savoir faire afin de mettre au point un programme de travail équilibré et opérationnel qui tienne compte des priorités et préoccupations de tous.
Selon M. Bensmail, les difficultés auxquelles la Conférence est actuellement confrontée ne sont pas le résultat de ce que certains considèrent comme la rigidité de son règlement et de ses méthodes de travail. Elles traduisent plutôt la complexité et la dynamique des relations internationales d'aujourd'hui. C'est pourquoi tous les efforts devraient se concentrer sur la création d'un environnement politique à même d'exploiter au mieux les atouts de la Conférence en tant qu'instance de négociation : il faudra en particulier restaurer un minimum d'harmonie entre les principaux acteurs dans le domaine du désarmement.
M. PETKO DRAGANOV (Bulgarie), Président de la Conférence, dans une déclaration de clôture, a indiqué qu'il s'était fixé deux objectifs en tant que dernier Président de la session : poursuivre les efforts pour parvenir à un compromis sur le programme de travail et faciliter l'adoption du rapport de la Conférence à l'Assemblée générale. En ce qui concerne le rapport adopté ce matin, il s'en tient aux faits et décrit les activités de la Conférence en 2000. Quant au premier objectif, les consultations menées par le Président jusqu'à présent confirment que la Conférence n'est pas encore parvenue au consensus sur le programme de travail.
Bien qu'il existe, dans une large mesure, accord sur la plupart des éléments de ce programme, deux questions, le désarmement nucléaire et la prévention de la couse aux armements dans l'espace doivent continuer de faire l'objet d'efforts. Afin d'être en mesure de s'entendre sur quoi que ce soit s'agissant du programme de travail, il semble que la Conférence doive s'entendre sur tout. Le Président a toutefois souligné qu'il y avait eu des signes encourageants au cours des quatre dernières semaines. Sur les deux questions en suspens, celle concernant le désarmement nucléaire semble plus proche aujourd'hui d'une convergence des positions qu'il y a un an.
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Dans le rapport, il est recommandé au Président et à son successeur de mener des consultations au cours de la période intersession, et de faire des recommandations, si possible, qui pourraient aider à ce que la Conférence commence tôt en 2001 ses travaux sur plusieurs points de l'ordre du jour. Ces consultations tiendront compte des propositions et vues présentées et des débats qui ont eu lieu au cours de la session de 2000. Le Président a précisé qu'il comptait que ces consultations soient marquées par l'ouverture, le pragmatisme et la coopération, dans le seul but de préparer un bon début de session en 2001.
M. Draganov a estimé que si les États membres sont en mesure de démontrer suffisamment de volonté politique, la Conférence pourrait être très proche du compromis tant souhaité et du commencement de travaux de fond.
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