AG/1060

DES DELEGATIONS EN FAVEUR D'UN MANDAT ELARGI POUR LE CONSEIL DE SECURITE DANS LE REGLEMENT DES CONFLITS INTERNES

16 septembre 2000


Communiqué de Presse
AG/1060


DES DELEGATIONS EN FAVEUR D'UN MANDAT ELARGI POUR LE CONSEIL DE SECURITE DANS LE REGLEMENT DES CONFLITS INTERNES

20000916

L'Albanie rend le régime de Slobodan Milosevic responsable des tensions et des conflits dans la région des Balkans

Plusieurs conflits internes ont été évoqués lors de la poursuite du débat général de l’Assemblée du millénaire cet après-midi. Il a notamment été question de la situation actuelle au Kosovo qui, selon le Ministre des affaires étrangères de l’Albanie, contredit, de manière éclatante, les opinions exprimées par ceux que l'intervention militaire de l'OTAN et la mise en place d'une administration de l'ONU dans la région avaient laissé sceptiques. L’Albanie appelle la communauté internationale dans son ensemble à exercer la pression la plus forte sur le régime de M. Milosevic pour veiller à ce que les élections présidentielles et législatives, qui doivent se tenir en Serbie la semaine prochaine, ne soient pas entachées d’irrégularités. La région des Balkans continue d'être le foyer de tensions et de conflits dont le Ministre albanais a attribué la responsabilité au régime de M. Milosevic.

Les guerres qui sévissent en Afrique ont également été au cœur des allocutions prononcées. Ainsi, le Ministre des affaires étrangères de l’Angola a regretté le manque de volonté manifesté par certains Etats pour soutenir les efforts des Nations Unies que l'on tient, à tort, responsables de la persistance des crises dans certaines régions du monde et notamment en Afrique. Le Ministre a évoqué le mécanisme de maintien de la paix qui a souvent fait défaut par manque d’engagement des Etats; il a salué la publication du rapport du Groupe d’experts indépendants sur les opérations de maintien de la paix - Rapport Brahimi - bien qu’il juge nécessaire d’aller au-delà de ce texte et que des mesures soient prises afin de limiter l’influence des trafics d’armes et de diamants sur les conflits en Afrique en général et en Angola en particulier. L’UNITA tirant son arsenal de guerre de la libre circulation des armes légères et du commerce illégal de diamants, l’absence de règles internationales en la matière favorise la perpétuation des conflits. Concernant la situation en Afrique centrale, l’Angola a attiré l’attention de la communauté internationale sur la situation en République démocratique du Congo qui menace de déstabiliser davantage toute la sous-région.

(à suivre 1a)

Le Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République démocratique du Congo a, de son côté, demandé la mise en œuvre des deux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité appelant au retrait sans délai et sans condition des troupes étrangères présentes en RDC, à savoir les forces ougandaises, burundaises et rwandaises. Poursuivi pour incitation à la haine raciale par la justice belge, le Ministre a nié le droit à la Belgique de poursuivre quiconque pour des actes qui n’ont pas été commis sur son territoire. Le Ministre a qualifié les propos incriminés de langage patriotique légitime dans le cadre d’une agression armée.

Comme ébauche de solution aux conflits africains, le Ministre des affaires étrangères du Gabon a réaffirmé la nécessité d’un passage d’une culture de guerre à une véritable culture de paix, d’un retour à des préceptes traditionnels dans la mesure où la paix n’est le plus souvent pas menacée de l’extérieur du territoire mais de l’intérieur. Il convient, selon lui, d’adapter la Charte de l’ONU à ces nouveaux cas de figure notamment en élargissant le mandat du Conseil de sécurité sur les crises internes et en renforçant les dispositifs régionaux de sécurité permettant de résoudre les conflits par le dialogue et la négociation.

Ont également pris la parole les Ministres des affaires étrangères de la République démocratique populaire lao, du Brunei Darussalam, du El Salvador, du Cap Vert et le Représentant permanent du Luxembourg.

L’Assemblée du millénaire reprendra son débat général lundi 18 septembre 2000 à 10 heures.

Suite du débat général

M. HUBERT WURTH, Représentant permanent du Luxembourg: La globalisation est une source de performances et de préoccupations. Ambivalente, elle requiert des instruments adéquats pour la gérer et l’orienter vers le développement équitable. Sans la définition en commun de règles juridiques appropriées elle pourrait provoquer amertume et révolte. L’usage de la violence peut à lui seul compromettre la marche vers le développement. Il est inquiétant que les ventes d’armes dans le monde soient en hausse constante depuis 96. Mais plus parlant que des statistiques est le fait encourageant que les processus de négociation se sont multipliés avec souvent à la clef des formules inédites en vue de réaliser la coexistence pacifique là où prévalait blocages et ressentiment. Le Timor oriental, la Conférence entre Somaliens à Djibouti, le nouveau dialogue intra- coréen ne sont que des exemples récents. L’ensemble de ces évolutions constructives malgré les difficultés flagrantes, montre que la prévention des conflits est une stratégie en marche. Il s’agit de la consolider en vue de démontrer que c’est aussi une stratégie qui produit des résultats durables.

La grande responsabilité de l’Organisation est de ne pas décevoir ceux qui ont directement besoin d’aide: les victimes, les personnes déplacées ou réfugiées, ceux à qui est déniée la protection de l’Etat de droit, voire les moyens de subsistance tout simplement. Le crime ne doit pas payer. Ce concept passera de la théorie à la pratique à l’époque de la globalisation. Stable mais non figé, transparent et se soumettant au contrôle démocratique, l’Etat de droit est incontestablement l’un des piliers les plus fiables du développement dans le monde. Pour que le monde fasse sa mue à travers la globalisation et que le développement devienne solide, la communauté internationale et son expression politique qu’est l’ONU auront à s’attaquer à d’autres piliers que celui du droit pour édifier une architecture que la violence et la pauvreté ne menaceront plus. Permettez-moi d’évoquer le devoir de mémoire, le respect de la légalité, la volonté de la prévention et l’ouverture à la coopération.

Le Conseil de sécurité a accordé beaucoup de temps à l’Afrique pendant toute l’année 2000, reconnaissant la gravité du phénomène de la prise en otage de portions de pays entières par des forces qui ne sauraient prétendre à être davantage que des exploiteurs, des trafiquants ou des criminels tout court. Il convient de mentionner les problèmes en Angola, en Sierra Leone et en République démocratique du Congo. Le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale auront à unir leurs efforts pour infléchir les choses. J’espère que la 55ème session de l’Assemblée pourra décider des mesures énergiques et concrètes pour mettre en œuvre les recommandations du Comité d’experts sur les opérations de paix sous la conduite de M. BRAHIMI. Le manque de moyens financiers ne devrait pas être un obstacle insurmontable. Par ailleurs, il est approprié d’inscrire la question des barèmes des quotes-parts pour les opérations de maintien de la paix à l’ordre du jour de cette session. Afin de pouvoir assumer ses responsabilités, le Luxembourg entend créer un corps d’action civil avec l’objectif de disposer d’un réservoir de personnel qualifié pour des missions dans le contexte humanitaire et du développement humain.

M. SOMSAVAT LENGSAVAD, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la République démocratique populaire lao: En entrant dans le XXIème siècle, nous avons le devoir de répondre à l’urgence de certaines situations critiques de la planète. Nous devons essentiellement nous pencher sur la définition d’une véritable politique de coopération internationale en vue de favoriser le développement. De nombreuses conférences des Nations Unies ont eu lieu ces dernières années, ayant pour but de résoudre les problèmes sociaux, environnementaux, les violations des droits de l’homme, les questions de développement économique, autant de problèmes qui minent les relations internationales à l’aube de ce nouveau millénaire. Mais ces rencontres n’ont pas apporté de réponses satisfaisantes aux problèmes des pays pauvres.

Aujourd’hui, le nouvel enjeu est celui de la globalisation qui a engendré de nouveaux défis. Le Sommet du Groupe des 77 et la Chine, qui s’est tenu à la Havane en avril dernier, a identifié les aspects positifs et négatifs de la globalisation pour les pays en développement. Le déséquilibre des termes de l’échange entre pays du Nord et pays du Sud devrait amener la communauté internationale à jeter les bases pour une meilleure coopération qui permettrait aux pays du Sud de bénéficier davantage de la globalisation. Nous pensons que si les bénéfices de la globalisation étaient mieux redistribués, le fossé entre les pays du Nord et les pays du Sud se réduirait. En effet, les questions d’accès à l’éducation, le développement social, l’égalité entre les hommes et les femmes pourraient trouver des réponses concrètes, favorisant ainsi le développement. En matière de développement, les pays du Sud demeurent marginalisés et ne peuvent bénéficier des progrès technologiques. Aussi, il y a urgence à privilégier la protection d’un environnement propice au développement humain. Les Nations Unies peuvent jouer ce rôle en favorisant la coopération internationale et la coexistence pacifique entre les peuples.

M. PASKAL MILO, Ministre des affaires étrangères de l'Albanie: Un an après le conflit qui a ensanglanté Kosova et compromis la paix et la stabilité dans la région des Balkans, l'Albanie est convaincue que la situation s'est nettement améliorée grâce à la mise en œuvre de la résolution 1244 du Conseil de sécurité, au déploiement de la SFOR et au travail de l'Administration transitoire des Nations Unies. La situation actuelle à Kosova contredit, de manière éclatante, les opinions exprimées par les sceptiques et autres nihilistes contre l'intervention militaire de l'OTAN et la mise en place d'une administration de l'ONU. Les souvenirs persistants des évènements de Kosova nous rendent désormais conscients du caractère catastrophique que peuvent revêtir les conséquences d'une politique chauviniste et totalitaire. Les Albanais, plus que tout autre peuple de la région, souhaitent et prônent la démocratisation de la Serbie parce que, historiquement, ils ont souffert plus que les autres du nationalisme serbe. La réalité étant souvent très éloignée de nos vœux, nous devons faire preuve de réalisme.

A Kosova, l'Albanie désire la pleine participation au processus électoral de la communauté serbe et des autres minorités, conformément à son adhésion à l'idée d'un territoire multiethnique et multiculturel. L'Albanie appelle la communauté internationale dans son ensemble à exercer la pression la plus forte sur le régime de Milosevic pour le forcer notamment à libérer les 7 000 prisonniers politiques albanais détenus dans ses geôles et à travailler à la consolidation des

organes judiciaires de lutte contre les crimes à Kosova. La région des Balkans continue d'être le foyer de tensions et de conflits dont les conséquences pèsent sur tous les pays de la région et bien au-delà. Le régime de Milosevic en est le seul responsable. Non content d'avoir provoqué personnellement des conflits catastrophiques dans l'ex-Yougoslavie, Milosevic veut maintenant détruire la Serbie et ce qui reste de la Yougoslavie. Les élections présidentielles et législatives qui doivent se tenir en Serbie la semaine prochaine, n'ont aucune chance de se dérouler dans la liberté et la justice. A l'instar de l'ensemble de la communauté internationale, l'Albanie attend en Serbie l'avènement de forces véritablement démocratiques. Elle condamne, par ailleurs, les tentatives de Milosevic de déstabiliser le Monténégro avec laquelle elle entretient des relations de bon voisinage.

Aujourd'hui, les pays de la région se sont déjà engagés dans un processus irréversible qui est celui de l'intégration dans l'Europe. Les pays des Balkans, mais aussi ceux de l'Europe occidentale, ont fini par réaliser le danger d'une Europe divisée et la menace que pourrait représenter une région des Balkans non intégrée. L'intégration n'est pas un processus facile et il exige des pays des Balkans qu'ils renoncent à l'extrémisme nationaliste parce que l'"Européanisation" suppose la coopération, la tolérance et l'intégration. Dans ce contexte, le Pacte pour la stabilité de l'Europe du Sud-Est a été la meilleure réponse à la crise des Balkans. Il faut espérer que la volonté politique exprimée par Sarajevo, à l'issue du conflit de Kosova, sera suivie de la volonté d'apporter l'appui financier à la mise en œuvre rapide des projets liés au Pacte. L'Albanie espère aussi que les institutions de l'Union européenne approuveront, dans un avenir proche, le rapport qu'elle a présenté il y a sept mois. Une telle décision ouvrirait la voie aux négociations sur un accord d'association et de stabilité entre l'Albanie et l'Union européenne. Le Gouvernement albanais a d'ailleurs accueilli avec satisfaction l'initiative de la France d'organiser en novembre, au nom de l'Union européenne, un sommet régional à Zagreb. Il s'agit là d'un autre témoignage de la volonté d'accélérer les processus de démocratisation et d'intégration de la région et la consolidation de la sécurité et de la stabilité.

M. MOHAMMED BOLKIAH, Ministre des affaires étrangères du Brunéi Darussalam: Un nombre important de questions auxquelles nous devons accorder notre attention autant que nos ressources ne datent pas d’aujourd’hui, mais sont le triste héritage du XXème siècle. Ce qui ne signifie pas qu’elles ne sont pas importantes, chacune d’entre elles ayant des conséquences tragiques sur la vie des citoyens, bien qu’elles relèvent de la responsabilité des gouvernements et des organisations régionales. Plus elles dominent l’attention des Nations Unies, plus elles nous empêchent de nous concentrer sur les problèmes de base des nations en développement. Ce sont ces problèmes qui sont vraiment d’actualité. Il a même fallu leur trouver un nouveau nom, à savoir, les «questions transnationales».

Chacune possède un titre académique: il y a les problèmes techniques, les problèmes démocratiques, les problèmes socioéconomiques, les problèmes environnementaux. Mais si l’on évite les fioritures de langage, ils se résument à une réalité toute simple: ce sont des questions trop importantes pour que les gouvernements ou même les organisations régionales puissent les régler seuls. Il est illusoire de penser que la solution à ces problèmes se trouve dans les marchés financiers. En fait, la mondialisation économique et des marchés n’a fait qu’allonger la liste et créer de nouveaux problèmes. Si les Nations Unies veulent

résoudre ces problèmes nous devons concentrer nos efforts sur les moyens nécessaires à déployer pour accomplir cette tâche. En d’autres mots, l’ONU ne doit pas être otage du XXème siècle. Elle doit s’attacher à travailler pour les nations en développement. Il faut s’assurer que les mots «nations en développement» eux-mêmes deviennent autre chose qu’un euphémisme.

M. JOAO BERNARDO DE MIRANDA, Ministre des affaires étrangères de l’Angola: Les priorités fixées par les chefs d’Etat et de gouvernement au cours du Sommet du millénaire répondent aux enjeux actuels auxquels est confrontée la communauté internationale. Le rôle central des Nations Unies a été réaffirmé, de même que l’engagement de favoriser le maintien de la paix et du bien-être des peuples. Cependant, nous devons faire évoluer cette institution afin qu’elle s’adapte à son temps. Les Nations Unies ont organisé ces dernières années un certain nombre de rencontres afin de trouver des solutions mondiales consensuelles sur les questions des guerres, du développement, mais dans la plupart des cas, ces problèmes persistent ou ont même empiré.

Il importe aujourd’hui de revitaliser les organes des Nations Unies, à commencer par le Conseil de sécurité, ceci afin de les rendre plus efficaces. Dans certaines régions, la persistance des crises n’est pas imputable uniquement aux Nations Unies, mais aussi au manque de volonté des Etats de soutenir les efforts de l’Organisation. Nous pensons ici au mécanisme de maintien de la paix qui a souvent fait défaut par manque d’engagement des Etats et nous tenons à saluer la publication du rapport Brahimi. Au-delà de ce rapport, des mesures devraient être prises afin de limiter l’influence des trafics d’armes et de diamants sur les conflits en Afrique en général et en Angola en particulier. L’UNITA s’est constitué un arsenal de guerre grâce à la vente libre des armes légères et au commerce illicite des diamants. L’absence de règles internationales en la matière favorise la perpétuation des conflits. La lutte contre la pauvreté, et en faveur du développement social et du respect des droits de l’homme peut garantir la prévention des conflits. Le Gouvernement angolais fait tout ce qui est en son pouvoir pour libérer de la guerre les populations civiles. Des efforts de démobilisation, de démilitarisation et de reconstruction ont été poursuivis dans le respect du Protocole de Lusaka. Les Nations Unies et la communauté internationale jouent un rôle central dans ce processus, notamment par l’application de sanctions contre l’UNITA et nous nous réjouissons de la désignation d’un comité de suivi des sanctions par le Secrétaire général des Nations Unies.

Concernant la situation en Afrique centrale, l’Angola entend attirer l’attention de la communauté internationale sur la situation en République démocratique du Congo qui menace de déstabiliser davantage toute la sous-région. L’Angola appuie les Accords de Lusaka et souhaite que la communauté internationale soutienne le processus en cours, notamment en reconnaissant la légitimité du régime en place à Kinshasa. Nous appuyons également l’initiative des Nations Unies de créer un tribunal international pour juger les crimes commis en Sierra Leone. Enfin, l’Angola attire l’attention de la communauté internationale sur la situation économique du continent africain, victime du fossé grandissant entre pays du Nord et pays du Sud et des conséquences de la mondialisation. Les programmes d’ajustement structurel devraient tenir compte des situations des différents pays afin de soulager les souffrances des populations.

Mme MARIA EUGENIA BRIZUELA DE AVILA, Ministre des affaires étrangères de El Salvador : Le processus de paix au El Salvador a été un travail ardu rendu possible par la volonté politique du Gouvernement et le désir de changement du peuple salvadorien. Le pays se trouve maintenant à une nouvelle étape dans laquelle la jouissance des libertés économiques nécessite un appui renouvelé de la communauté internationale. Aujourd'hui, tous les secteurs du pays bénéficient d'une paix dans la démocratie, arme indispensable à l'élimination des disparités économiques et sociales. Dans ce contexte, la pauvreté, phénomène structurel, bénéficie de toute l'attention du Gouvernement salvadorien. La communauté internationale doit, pour sa part, contribuer à la création d'un contexte international favorable au développement des pays concernés. Une énorme tâche attend le pays qui demande, dans ce contexte, l'appui des institutions internationales aux efforts tendant à consolider la paix. Il est important de réaffirmer que les pays de l'Amérique ont confirmé leur engagement de faire de la région un cadre de paix, de développement et de respect des droits de l'homme. Les progrès réalisés au niveau régional sont une preuve de la volonté des gouvernements de renforcer l'unité face à la division. Dans un contexte mondialisé, la viabilité de l'Amérique centrale dépendra des efforts conjoints pour réaliser les objectifs communs. Les pays de la région ont été particulièrement sensibles aux dispositions de la Déclaration politique du Sommet du millénaire relatives au développement et à l'élimination de la pauvreté.

Le renforcement des Nations Unies est un thème qui mérite une attention particulière d'autant que l'Organisation fait face à une crise de confiance. Des changements de fond sont donc devenus nécessaires comme l'ont reconnu les Etats Membres. La situation internationale, qui de nos jours est complexe, justifie l'existence de l'ONU. El Salvador souligne donc le besoin de procéder à une réforme totale de tous les organes du système de l'ONU pour éviter les contradictions et assurer un fonctionnement démocratique et transparent. Il faut donc reprendre les négociations pour relancer le mandat important des Nations Unies qui est celui du développement économique et social auquel doit être liée la prévention des conflits. Ainsi la transformation du Conseil économique et social, sur le modèle du Conseil de sécurité pour les questions économiques, serait la bienvenue. Il faut également songer au renforcement de l'Assemblée générale en lui donnant une plus grande responsabilité dans le processus de prise de décisions. En ce qui concerne la réforme du Conseil de sécurité, il est désolant de voir qu'après sept années de négociations, il soit toujours impossible de parvenir à un consensus. Une telle situation mine la confiance dans le système de sécurité collective. El Salvador comprend les demandes tendant à faire en sorte que le Conseil reflète au mieux la configuration de la composition des Nations Unies. Le pays adhère à la proposition visant à limiter l'exercice du droit de veto aux décisions liées au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Les Nations Unies ne sauraient, en outre, rester fermées à certains Etats comme c'est le cas pour la République de Chine de Taïwan. El Salvador reconnaît le devoir de la communauté internationale de réaliser les aspirations justes d'un peuple qui vit, depuis longtemps, dans un contexte de démocratie.

M. JEAN PING, Ministre d’Etat et Ministre des affaires étrangères de la coopération et de la Francophonie (Gabon): Nous reconnaissons qu’il est difficile de créer pour le plus grand nombre, des conditions de mieux-être dans un environnement où règnent le chaos et le désordre. A cet égard, le cas de l’Afrique est particulièrement révélateur. Alors que le monde semble évoluer avec la fin de la guerre froide vers une situation prometteuse en raison de la diminution graduelle des conflits inter-étatiques, le continent africain s’est trouvé soudain en proie à des affrontements armés d’une violence inouïe. De vieux antagonismes en sommeil se sont réveillés, avec comme moyens d’expression privilégiés, le fracas des armes et un mépris pour les normes humanitaires. Le Conseil de sécurité a montré ses limites devant l’ampleur des crises notamment en Afrique.

La très grande majorité de nos pays et de nos peuples reste encore désespérément pauvre. Cette pauvreté est aggravée notamment par la propagation rapide de la pandémie du sida, autre fléau qui ravage, endeuille, divise et décime des familles entières en Afrique et dans le monde. Dans certains pays africains, le sida est même devenu la principale cause de mortalité. L’ONU et le système multilatéral n’ont pas aujourd’hui les moyens suffisants pour relever les grands défis actuels.

Nous avons le devoir de redonner la force nécessaire à notre action d’abord en passant d’une culture de guerre à une véritable culture de paix. Nous devons opérer un retour aux sources, c’est-à-dire revenir à des préceptes traditionnels dans la mesures où la paix n’est le plus souvent pas menacée de l’extérieur du territoire mais de l’intérieur. Il convient d’adapter la Charte de l’ONU à ces nouveaux cas de figure notamment en aménageant le mandat du Conseil de sécurité sur les crises internes et en renforçant les dispositifs régionaux de sécurité permettant de résoudre les conflits par le dialogue et la négociation.

Nous devons ensuite renforcer la lutte contre la pauvreté et instaurer une nouvelle coopération au service du développement. Le continent africain est acquis au fait que la responsabilité de son redressement économique lui incombe au premier chef et que cette tâche est tributaire de ses propres efforts. Mais au moment où le monde entame le virage du XXIème siècle, l’Afrique marginalisée est en proie à la misère et à la pauvreté. Les Nations Unies doivent également envisager le renforcement de la protection de l’environnement et l’allègement du fardeau de la dette des pays en développement. Il ne s’agit pas d’une démarche de mendicité mais de fortifier le système d’échanges international pour le bénéfice commun de manière à ce que la mondialisation devienne une force positive pour l’humanité tout entière. La solution aux problèmes auxquels est confrontée l’Organisation passe aussi par l’accroissement de l’aide publique au Développement, la protection des populations vulnérables et la lutte contre le VIH/sida.

M. RUI ALBERTO DE FIGUEIREDO SOARES, Ministre des affaires étrangères du Cap Vert: L’Assemblée du millénaire est l’occasion de traiter d’un certain nombre de problèmes qui menacent la cohésion de la communauté internationale, particulièrement celle des disparités entre le Nord et le Sud. Si elle veut atteindre les objectifs de justice, de développement, de paix et de sécurité, la communauté internationale doit contribuer à développer un système plus équitable

de répartition des richesses dans un esprit de bonne gouvernance et de bonne coopération internationales. Les effets du Sommet du millénaire ne seront probablement pas immédiats, mais nous sommes confiants quant à la détermination des dirigeants de la planète à s’engager à lutter pour un monde plus juste, plus viable. En effet, dans un monde de plus en plus interdépendant, il semble illusoire de penser au développement du Nord en oubliant de partager les richesses et les progrès technologiques avec les pays en développement.

Le Sommet du millénaire a été l’occasion de redéfinir le rôle de l’Organisation des Nations Unies pour le XXIème siècle et nous pensons que celle- ci doit jouer son rôle de catalyseur du concept de communauté internationale en s’attelant à résoudre les déséquilibres entre le Nord et le Sud. Un tel rôle pour les Nations Unies, dans un monde interdépendant, suppose que soient associés les gouvernements, les parlements, les organisations non gouvernementales, la société civile, le secteur privé et les médias. Les Nations Unies doivent être au cœur du dialogue entre les Etats afin de définir un cadre conceptuel propice au développement. Sur le continent africain, les efforts doivent être déployés par les pays développés afin de lutter contre la pauvreté, d’accroître le taux de scolarisation, de développer l’accès aux soins de santé publique ainsi que le développement des infrastructures. Par ailleurs, la question de la dette, la question de l’accès aux marchés internationaux pour les produits des pays en développement de même que l’accès plus important des pays africains au monde globalisé demeurent des questions prioritaires.

Enfin, dans un contexte mondial caractérisé par la perpétuation de conflits - au Sierra Leone, en Angola, au Timor oriental - la communauté internationale se doit d’accorder la priorité à la dignité humaine dans la recherche de solutions aux conflits et de déployer des efforts supplémentaires afin de trouver des solutions durables aux maux qui menacent notre planète.

M. YERODIA ABDOULAYE NDOMBASI, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République démocratique du Congo (RDC): Nos envahisseurs, Rwandais et Ougandais, sont toujours dans le pays et la RDC entend en parler, aujourd'hui dans l'esprit et la lettre de la vérité. A ce propos, il faut espérer que les Nations Unies apporteront un jour une solution au problème de l'agression et de l'occupation de la RDC par des gens qui donnent dans l'imposture. Comment l'Ouganda peut-il affirmer qu'il est en RDC pour régler les problèmes des Congolais ? Il est surprenant de voir des envahisseurs, qui ont franchi nos frontières pour occuper le territoire, s'arroger aujourd'hui le droit de dicter la manière aux Congolais de régler leurs problèmes. C'est peut-être, pour participer à la solution du problème congolais, que ces prétendus pacifistes massacrent, égorgent et enterrent des femmes vivantes. C'est donc une imposture que d'entendre le chef d'Etat d'un des pays agresseurs «gambader» dans la ville de New York et déclarer «nous ne partirons pas de la RDC». Le pays attend l'application des deux résolutions pertinentes adoptées par le Conseil de sécurité. J'attends des représentants ici présents qu'ils rapportent à leur gouvernement ce qu'ils entendent aujourd'hui parce que c'est la vérité. Le mensonge des agresseurs est là, eux qui ont l'outrecuidance de dire qu'ils ne partiront pas alors que des résolutions du Conseil les exhortent à quitter le pays

sans délai et sans condition. La RDC rejette les allégations selon lesquelles la situation dans le pays est complexe. La situation ne l'est pas. Que les agresseurs rentrent chez eux et la paix sera rétablie. Où sont les génocidaires qui justifient soi-disant leur présence en RDC? Que font-ils à 2000 kilomètres de leurs frontières si la raison véritable de leur présence en RDC est de sécuriser leurs frontières? La vraie raison est qu'il s'agit d'une guerre de rapines puisque, aujourd'hui, les envahisseurs sont devenus exportateurs de biens précieux qu'ils ne possèdent pas.

Le Rwanda, agresseur de la RDC, a eu l'audace de m'accuser de crimes contre l'humanité parce que j'ai osé tenir un langage de patriote lors de son agression. Ayant annexé la province congolaise du Kivu, le Rwanda continue pourtant de faire valoir son attachement à l'intégrité territoriale de la RDC. Le Rwanda a été aidé, dans sa tâche, par un pays et un juge inculte qui s'arroge le droit d'être un juge universel chargé de poursuivre une personne prétendument responsable d'actes qui n'ont pas été commis sur son territoire. Plutôt que de me poursuivre, ce juge ferait mieux de poursuivre ses compatriotes qui ont avoué leur implication dans le meurtre de Lumumba, le père de l'indépendance de la RDC. Les Etats Membres doivent clairement indiquer que le pays, dont le juge est originaire, outrepasse ses droits. Quant aux allégations selon lesquelles la RDC s'oppose au déploiement des forces des Nations Unies, le pays tient à expliquer qu'il s'agissait plutôt d'une crainte fondée sur les actions de l'ONU en 1960. Aujourd'hui, tout est rentré dans l'ordre et la RDC a autorisé l'ONU à se déployer. La RDC appelle à la vigilance et à la mise en oeuvre des résolutions des Nations Unies. Il est temps que les Nations Unies fassent appliquer leurs résolutions et la seule manière de le faire serait d'encourager le retrait des forces ougandaises et rwandaises. La RDC est disposée à terminer la guerre, mais par des pourparlers comme cela s'est fait jusqu'ici pour toutes les guerres.

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