AG/1051

PLAIDOYER DE KOFI ANNAN POUR QUE L'ONU SOIT DOTEE DES MOYENS DE REPONDRE AUX ATTENTES DE CEUX QUI PLACENT LEUR CONFIANCE EN ELLE

12 septembre 2000


Communiqué de Presse
AG/1051


PLAIDOYER DE KOFI ANNAN POUR QUE L’ONU SOIT DOTEE DES MOYENS DE REPONDRE AUX ATTENTES DE CEUX QUI PLACENT LEUR CONFIANCE EN ELLE

20000912

L’Assemblée du millénaire qui coïncide avec la cinquante-cinquième session de l’Assemblée générale des Nations Unies, a ouvert ce matin ses travaux de fond, sous la présidence de M. Harri Holkeri de la Finlande. L’Assemblée a d’abord entendu le Secrétaire général, M. Kofi Annan présenter son rapport annuel sur l’activité de l’Organisation. A cette occasion, M. Kofi Annan a déclaré qu’il voyait en cette nouvelle session le moment où “nous retroussons nos manches pour mettre en œuvre les engagements pris par les chefs d’Etat et de gouvernement à l’issue du Sommet du millénaire”. Prenant acte ainsi de la Déclaration politique adoptée par ce qu’il convient d’appeler le plus grand rassemblement de dirigeants du monde, le Secrétaire général a exhorté l’Assemblée à faire en sorte que les Nations Unies ne se retrouvent plus jamais sans les moyens de protéger “ceux qui ont été encouragés à mettre leur confiance en elles”... Le consensus est souhaitable mais il ne signifie pas l’unanimité absolue des 189 Etats Membres sur chaque sous-point, a dit le Secrétaire général qui a invité la minorité des Etats Membres à s’abstenir de retenir son consentement de “façon déraisonnable”. M. Kofi Annan a, par ailleurs, encouragé les Etats Membres à permettre aux parlementaires, au secteur privé, aux ONG et à la société civile d’apporter leur contribution aux activités de l’ONU. L’Organisation, a-t-il précisé, ne peut qu’y gagner. Pour être en mesure de faire entendre la voix de tous, de former des coalitions pour le changement et le maintien de la paix, l’Organisation doit devenir une Organisation ouverte, souple, efficace, représentative de tous les peuples du monde et revêtir, à leurs yeux, toute légitimité.

Le débat général qui a suivi l’intervention du Secrétaire général a permis aux délégations de faire valoir ce qui, pour elles, doit être accompli pour rendre l’ONU capable de relever les défis du XXIe siècle. Le Ministre des affaires étrangères de la France et Président du Conseil de l’Europe a évoqué le renforcement des activités des Nations Unies dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a assuré que sa délégation participera activement à l’examen des recommandations contenues dans le rapport du Groupe de haut niveau sur les opérations de maintien de la paix, dit rapport “Brahimi”. L’Union européenne, a ajouté le Ministre des affaires étrangères, estime nécessaire de discuter des modalités de sa coopération étroite avec l’ONU en la matière. Il a expliqué que l’Union a décidé de se doter des moyens d’être un acteur politique majeur et de jouer pleinement son rôle sur la scène internationale. Il a estimé que les organes mis en place permettront à l’Union européenne d’intervenir, de manière rapide et crédible, dans la gestion des crises internationales.

(à suivre 1a)

La pauvreté et l’exclusion sociale ayant été reconnues par le Sommet du millénaire comme les causes originelles des conflits, le Ministre des affaires étrangères du Népal a souhaité un renforcement du Conseil économique et social des Nations Unies pour en faire un véritable conseil de sécurité des affaires économiques et le charger de coordonner les activités des fonds et programmes des Nations Unies avec celles des activités des institutions de Bretton Woods, de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et des autres organismes extérieurs à l’ONU. A l’instar du Secrétaire général, la Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères des Etats-Unis a reconnu qu’en l’absence de ressources adéquates, les Nations Unies ne seront pas en mesure de remplir leurs mandats. Les Etats Membres dont le mien doivent n’épargner aucun effort pour apporter leur quote-part à l’Organisation, a-t-elle dit en plaidant néanmoins pour un réexamen des méthodes de fixation de ces quotes-parts. Un système plus équitable, a estimé la Secrétaire d’Etat devrait permettre d’établir des bases plus prévisibles de financement, de réduire les trop grandes attentes de l’ONU par rapport aux Etats-Unis et de débloquer les quelques 600 millions de dollars que le pays doit à l’Organisation.

Le Président de Djibouti a évoqué le succès du processus de paix en Somalie et a indiqué que le 26 août 2000 a été une date mémorable qui restera à jamais gravée dans le cœur et l’esprit des somaliens. Ce jour-là, le Parlement provisoire somalien a élu Abdiquassim Salad Hassan, le Premier Président du pays après un vide institutionnel de plus de dix ans.

Outre le Vice-Président du Guatemala, les Ministres des affaires étrangères du Brésil et de Malte ont également pris la parole.

L’Assemblée générale reprendra son débat général cet après-midi à 15 heures.

Rapport du Secrétaire général sur les travaux de l’organisation : présentation par le Secrétaire général de son rapport annuel sur les travaux de l’Organisation (A/55/1)[10]

Les évènements de l’année écoulée montrent que la communauté internationale n’est pas encore près d’atteindre l’objectif visant à rehausser l’existence des laissés pour compte. C’est ce qu’affirme le Secrétaire général dans son rapport de 51 pages qui traite de la paix et de la sécurité; des missions humanitaires; de la coopération au développement; de l’ordre juridique international et des droits de l’homme ainsi que de la gestion du changement. Le Secrétaire général illustre ses propos en citant certains conflits armés, nouveaux ou anciens, les catastrophes naturelles, le Sida, la baisse de l’aide publique au développement ou encore la prédation des gouvernements ou des factions politiques.

A propos des conflits et de la capacité de l’ONU à les résoudre, le Secrétaire général évoque la parution du rapport du Groupe de haut niveau qui avait été chargé de formuler des recommandations qui pourraient conférer aux opérations de paix davantage d’efficacité. Ces recommandations sont réalistes affirme M. Kofi Annan qui souligne que le Secrétariat ne dispose pas à l’heure actuelle des moyens nécessaires pour appuyer adéquatement les opérations de maintien de la paix. Il indique par ailleurs que le coût estimatif de toutes les opérations menées en 2000 ne représente que moins de 0,5% des quelque 800 milliards de dollars que les Etats membres auront affectés cette année à la défense nationale.

Liant la sécurité à l’existence de marchés prospères, le Secrétaire général invoque la situation dans le monde pour expliquer que l’intégration dans l’économie mondiale ne saurait garantir à elle seule un développement rapide. Il plaide pour des mesures supplémentaires sur les plans intérieur et international pour assurer à tous les bienfaits de la mondialisation. Il importe, à cet égard, estime-il, que la gouvernance mondiale, à savoir la gestion solidaire des affaires mondiales, soit plus efficacement assurée. Le Secrétaire général précise que la gouvernance ne passe pas forcément par les institutions, la réglementation ou les mécanismes d’application officiels; elle peut aussi être le fruit du dialogue et de la coopération qui peuvent y concourir ainsi que les accords auxquels elle donne lieu en mettant en jeu des intervenants non étatiques au même titre que les gouvernements. Bon nombre d’associations à caractère non officiel s’étant constituées en vue de résoudre des problèmes communs en matière de coopération, le Secrétaire général estime que par sa vocation à l’universalité, sa légitimité et l’ampleur de ses mandats, l’ONU a un rôle de premier plan à jouer dans le cadre de ces coalitions pour le changement.

Le Secrétaire général rappelle, dans ce contexte, sa proposition d’instituer un Pacte mondial par lequel les sociétés privées s’engageraient à adhérer aux meilleures pratiques en matière de droits de l’homme, de travail et d’environnement. La première réunion des partenaires du Pacte s’étant déroulée en juillet dernier, M. Kofi Annan explique que le Pacte mondial n’a pas pour objet de se substituer aux accords internationaux ou à l’action des gouvernements mais bien de les compléter. Se félicitant de ce que ses propositions du rapport du Millénaire “Nous les peuples” aient été si favorablement accueillies, le Secrétaire général déclare qu’il s’attend que les Etats tirent parti de l’occasion de l’Assemblée du millénaire pour passer résolument des bonnes intentions aux actes.

Abordant ensuite la question de la paix et la sécurité, le Secrétaire général invoque encore le rapport du Millénaire pour revenir notamment sur ce qu’il appelle “le dilemme de l’intervention”. Il remarque que reconnaître que de nombreux Etats ont formulé des réserves légitimes au sujet de l’intervention ne répond pas à la question de savoir si l’intervention humanitaire constitue une atteinte inadmissible à la souveraineté et comment réagir face à des situations comme celles du Rwanda ou de Srebrenica, devant des violations flagrantes, massives et systématiques des droits de l’homme. Parmi d’autres questions, le Secrétaire général évoque aussi la capacité de dissuasion dont doit nécessairement disposer l’ONU comme l’a montré la situation en Sierra Leone. Il renvoie, à cet égard, aux recommandations du groupe d’experts sur les opérations de maintien de la paix qui préconise la mise à la disposition de l’ONU d’un nombre plus élevé de soldats mieux équipés et mieux entraînés; le renforcement des capacités des pays en développement; et le recours plus efficace au système de moyens en attente de l’ONU.

Dans le chapitre consacré aux missions humanitaires, le Secrétaire général revient notamment sur la question des ressources insuffisantes à laquelle l’ONU est confrontée. Il indique ainsi que pour l’instant, la réponse aux appels globaux interorganisations pour l’an 2000 demeure décevante. Au 30 juin 2000, seuls 34% du montant total des sommes nécessaires avaient été obtenus, soit un pourcentage moins élevé que les contributions annoncées à la même époque l’an dernier, et ce, alors que les appels sont notoirement mieux conçus. Il indique aussi que les appels globaux pour 2000 tenaient compte pour la première fois des besoins de sécurité, 8.5 millions de dollars étant demandés pour des activités liées à la sécurité dans des pays ou des régions. Le détail des besoins de sécurité sera désormais compris dans les appels globaux, indique le Secrétaire général.

Au titre de la coopération au développement, le Secrétaire général fait remarquer que pour les Nations Unies, l’objectif le plus important doit demeurer l’élimination de la pauvreté et pour ce faire le moyen le plus efficace est la promotion d’une croissance durable et équitable qui, à son tour, suppose des marchés ouverts et des institutions stables offrant aux marchés le cadre légal et réglementaire nécessaire à leur expansion. Le Secrétaire général indique d’ailleurs qu’il a demandé au G-8 de s’engager à assurer la stabilité financière, de définir des politiques encourageant la croissance économique durable et favorable aux pauvres, de consacrer des investissements plus importants à la santé, à l’éducation et aux services sociaux, et d’inciter à une plus large ouverture au commerce, un meilleur accès aux marchés et une diffusion plus efficace de la technologie ainsi que des connaissances et de la capacité de les utiliser. Il a également demandé au G-8 de réaffirmer leur volonté d’enrayer le déclin de l’aide et d’atteindre les objectifs arrêtés au niveau mondial, à savoir consacrer 0,7% de leur PNB à l’aide publique au développement, 0,5% du PNB étant alloué aux pays les moins avancés.

Abordant le chapitre de l’ordre juridique et des droits de l’homme, le Secrétaire général indique que la capacité de l’ONU de maintenir un code des droits de l’homme continue de se renforcer sur les plans international et national et, les stratégies mises au point par le Haut Commissaire aux droits de l’homme en vue de promouvoir la coopération avec des organisations régionales et sous- régionales et avec les institutions financières internationales y sont pour beaucoup. Le Haut Commissaire a resserré ses liens avec le Département des

opérations de maintien de la paix, ce qui a permis de renforcer l’efficacité des missions des Nations Unies. Citant des éléments nouveaux, le Secrétaire général annonce la création d’une instance permanente sur les questions autochtones en tant qu’organe subsidiaire du Conseil économique et social et l’adoption par la Commission des droits de l’homme de deux résolutions sur la bonne gestion des affaires publiques et les droits fonciers des femmes.

Terminant sur la nécessité de gérer le changement, le Secrétaire général indique que si l’ONU veut bénéficier d’un vaste soutien à l’échelon mondial, elle doit communiquer efficacement et en temps réel. En 2000, le Département de l’information a pris une série de mesures novatrices et a initié notamment la campagne “Les Nations Unies travaillent pour tous” menée au niveau du système pour expliquer comment l’ONU s’attaque aux principaux problèmes du XXIe siècle. La fréquentation du site Web de l’ONU continue de s’accroître à un rythme extraordinaire : le nombre de connexions dépassent maintenant 400 millions par an. Par ailleurs, le nombre des opérations de maintien de la paix continuant d’augmenter en même temps que leur ampleur, le besoin d’informer le public et de communiquer avec les populations locales s’est accru en conséquence. L’information a tenu une place déterminante au Kosovo et au Timor oriental, et pour ce qui est des nouvelles missions, le Département joue un rôle actif dès le départ. Grâce à la création d’équipes d’information prêtes à être déployées rapidement dans les nouvelles missions, l’ONU est mieux à même de réaliser ses objectifs sur le terrain.

Le succès des importantes nouveautés qu’a entreprises le Département de l’information dépendra, prévient le Secrétaire général, de la mesure dans laquelle le Secrétariat pourra résoudre les problèmes d’adaptation que pose la révolution numérique. Le but est de mettre en place une infrastructure télématique qui permette à l’Organisation de transmettre du texte, des images et du son presque n’importe où dans le monde. De gros investissements seront nécessaires si l’on veut éviter que l’ONU ne se retrouve marginalisée dans le nouveau monde de l’information. Des investissements sont également nécessaires pour le remplacement de l’infrastructure de communications décrépite du Siège dont une grande partie est vieille de 50 ans.

Déclaration du Secrétaire général

M. KOFI ANNAN, Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies : Ce moment, qui vient après le Sommet du millénaire et qu’on pourrait prendre comme un anticlimax, je préfère le voir comme celui où nous retroussons nos manches pour mettre en œuvre les engagements que viennent de prendre les chefs d’Etat et de gouvernement. Cette année, je n’ai pas essayé de présenter un thème en filigrane dans le rapport annuel puisque je l’ai fait dans le Rapport du millénaire dans lequel j’ai présenté ce qui, pour moi, sont les défis principaux qui se posent à l’humanité et à l’Organisation au début de ce nouveau siècle. Je suis très heureux que nombre des engagements et des objectifs présentés dans ce Rapport aient été adoptés par les chefs d’Etat et de gouvernement dans la Déclaration politique adoptée à l’issue du Sommet du millénaire, vendredi dernier. A l'évidence un consensus existe sur ce qui doit être fait, un consensus plus large que celui qu’on aurait pu attendre d’une Organisation si grande et si diverse. Ce qui est essentiel maintenant, c’est de convenir des moyens à utiliser et de s’équiper des instruments nécessaires. Il est essentiel que l'ONU soit en mesure

de jouer le rôle que les peuples du monde en attendent. Les Nations Unies doivent être un instrument plus efficace pour donner corps aux priorités qui viennent d’être précisées comme la lutte pour le développement, la lutte contre l’injustice, la lutte contre la violence, la terreur, le crime, et la lutte contre la dégradation de l’environnement. Je ne veux pas dire que l’ONU doit être à même de livrer seule ces batailles. Le XXe siècle nous a en effet appris qu’un système de gouvernement vaste et centralisé ne fonctionne pas. Certainement pas à l’échelle nationale et encore moins à l’échelle internationale. Les gouvernements peuvent susciter le changement non pas en agissant seuls mais en œuvrant avec d’autres acteurs comme le secteur privé et la société civile.

Les chefs d’Etat et de gouvernement ont réaffirmé le rôle central de l’Assemblée générale comme organe délibérateur, décideur et représentatif des Nations Unies et ils ont décidé de lui donner les moyens de jouer ce rôle efficacement. Il vous revient de prendre des décisions qui traduisent la volonté de la grande majorité des Etats Membres et de les prendre lorsqu’elles sont nécessaires. Le consensus est souhaitable mais il ne doit pas signifier qu’il faut attendre l’unanimité absolue entre 189 Etats Membres pour chaque sous-point. La minorité, et souvent une très petite minorité, ne doit pas retenir son consentement de façon déraisonnable. Le veto du Conseil de sécurité n’a pas sa place à l’Assemblée générale et nous ne pouvons plus nous permettre de travailler avec le plus petit dénominateur commun et le plus lent. Il revient aussi de parachever la réforme du Conseil de sécurité qui, comme l’ont demandé les chefs d’Etat et de gouvernement, doit devenir représentatif et plus légitime mais aussi plus efficace. A cet égard, j’appelle votre attention sur la demande adressée par les chefs d’Etat et de gouvernement d’examiner rapidement les recommandations du Groupe d’étude sur les opérations de maintien de la paix. Ces recommandations visent à rendre l’ONU plus efficace dans sa tâche première de maintien de la paix. Certaines recommandations relèvent de la compétence du Conseil de sécurité et d’autres relèvent des prérogatives du Secrétaire général. J’ai déjà commencé à travailler avec mes collaborateurs pour les mettre en œuvre. Mais le plus grand nombre des recommandations demandent des décisions de l’Assemblée générale parce que, et la raison est d’importance, elles ont des incidences budgétaires. Je vous présenterai bientôt un plan de mise en œuvre dans l’espoir que des changements interviennent dans l’année qui suit. Les Nations Unies ne doivent plus jamais se retrouver sans les moyens de protéger ceux qui ont été encouragés à mettre sa confiance en elles. L’ONU doit disposer, en temps voulu et sur une base prévisible, des ressources nécessaires pour réaliser ses mandats. Il vous revient de définir des règles et des procédures claires qui permettront au Secrétariat d’utiliser au mieux les ressources. Il vous revient d’allouer ces ressources de façon à refléter vos priorités actuelles plutôt que de condamner les Nations Unies à opérer avec un budget gelé dans le temps.

D’abord et avant tout, nous devons utiliser au mieux les ressources humaines. Il est essentiel que nous attirions le personnel le plus qualifié et que nous lui donnions la possibilité de faire la démonstration de son talent. Il est encore plus essentiel de lui donner une meilleure protection quand il sert la cause de l’humanité dans des situations de conflit ou de dangers. J’ai l’intention de vous présenter des propositions pour améliorer les choses dans ces deux domaines. Il vous revient aussi de faire en sorte que l’ONU soit logée dans des locaux dignes d’elles. Aujourd’hui, le Siège a besoin d’être remis en état et modernisé d’urgence. Nous ne pouvons continuer indéfiniment à parer au plus

pressé, ce qui serait une solution plus coûteuse. J’ai proposé un plan directeur dans lequel plusieurs solutions sont examinées ainsi que des formules de financement. Il en ressort très clairement que les travaux de modernisation seront très coûteux, mais que si rien ne change, les dépenses ne tarderont pas à être plus lourdes.

Il vous revient enfin de faire en sorte que les parlementaires, le secteur privé, les ONG, et la société civile en générale aient davantage l’occasion d’apporter leur contribution aux activités de l’ONU, à la réalisation de ses objectifs et à l’exécution de ses programmes. Depuis la présentation de mon Rapport du millénaire, nous avons progressé dans les propositions spécifiques concernant de nouveaux partenariats. Nous mettons les technologies de l’information au service d’un grand nombre de personnes dans les pays en développement et nous allons utiliser ces technologies pour transmettre le savoir médical là où il est le plus nécessaire et nous le faisons en partenariat avec des volontaires, des sociétés et des fondations philanthropiques. Mais il y a beaucoup plus à faire dans ce partenariat. Un des rôles de l’ONU est d’être l’instance où les normes internationales sont promues et promulguées et où toutes les voix peuvent se faire entendre. Notre rôle est aussi de former des coalitions pour le changement.

Mais, bien sûr, notre rôle est encore celui que les pères fondateurs de l’ONU lui ont assigné, à savoir maintenir la paix. Quel type d’organisation peut jouer tous ces rôles? Une Organisation ouverte, souple, efficace, représentative de tous les peuples du monde et qui dispose de la légitimité à leurs yeux. Telles sont les qualités que j’ai tâché de cultiver dans notre organisation depuis que je suis devenu Secrétaire général. Mais les décisions-clés dépendent de vous.

Ouverture du débat général

M. LUIZ FELIPE LAMPREIA, Ministre des affaires étrangères du Brésil : Le XXe siècle a été perturbé par des contradictions fondamentales. Nous avons tous vu une abondance croissante des ressources matérielles et intellectuelles qui auraient dû créer plus de convergences d’opportunités et d’attentes, de même que des rapprochements dans les modes de vie des différents peuples du monde. Mais nous avons aussi constaté l’absence de mobilisation de la volonté politique nécessaire à la traduction de ces extraordinaires possibilités en une réalité partagée par tous. La mondialisation est asymétrique parce qu’elle est le fait de sociétés nationales qui sont elles-mêmes déséquilibrées. Si la démocratie et la liberté doivent s’enraciner dans nos pays, nous devons avoir en partage un sens réel de la solidarité qui se manifeste sous forme d’actions concrètes. C’est à cette condition que nous pourrons construire un ordre international conduisant à la préservation de la paix et qui puisse fonctionner comme le moteur d’une croissance soutenue. Il est inacceptable que des questions mondiales majeures et des campagnes en faveur de la solidarité internationale soient manipulées et exploitées pour déguiser la protection d’intérêts particuliers étriqués. C’est malheureusement ce qui se passe dans le domaine du commerce international. Il y a en premier lieu une inconsistance entre la rhétorique sur la liberté des échanges et le recours sans cesse à des politiques protectionnistes de toutes sortes par les pays développés. Comme je l’ai dit lors du Sommet de l’OMC à Seattle, le nom de ce jeu est: “discrimination”. Et quand elle s’exerce contre les plus faibles, la discrimination est une négation absolue de la solidarité.

Nous devons corriger les graves distorsions qui existent dans le domaine du commerce international, et spécialement en ce qui concerne les produits agricoles. Il est inadmissible que les pays les plus prospères, dont les économies se fondent essentiellement sur les produits et services industriels, soient autorisés à légalement restreindre l’accès des produits agricoles étrangers à leurs marchés nationaux. Ils le font alors qu’en même temps ils exigent la libre circulation des produits pour lesquels ils bénéficient d’avantages comparatifs énormes. Il est de même absolument intolérable que ces pays soient autorisés, comme c’est le cas en ce moment, à subventionner la production et l’exportation de produits agricoles à hauteur de sommes qui s’élèvent à des dizaines de milliards de dollars.

De nos jours, les nations doivent de plus en plus s’adapter et reconnaître leurs différences de réalités et de vues tout en reconnaissant ce qui leur est commun et leurs affinités. Elles doivent explorer et élargir leurs différents domaines de convergences et d’opportunités en vue de coopérer, vaincre les méfiances, les soupçons et les disputes. De nos jours, c’est grâce à l’intégration régionale que ce processus d’apprentissage se déroule, et pour la plupart des pays, cette coopération régionale ouvre la porte à une participation plus rationnelle aux affaires internationales. En Amérique latine, nous nous sommes fermement engagés dans cette direction, et les pays de la région s’intègrent de plus en plus les uns aux autres et au monde. Il y a quelques jours à Brasilia, à l’initiative du Président Fernando Henrique Cardozo, s’est tenue, pour la première fois dans l’histoire, une réunion des chefs d’Etats d’Amérique du Sud. Cette réunion visait à rassembler les dirigeants autour des défis communs auxquels nous avons à faire face du fait de notre proximité et de notre géographie communes. Les chefs d’Etat ont pris des décisions concrètes en vue d’atteindre la pleine intégration. Ils ont réaffirmé leur engagement en faveur de la démocratie et ont décidé que leurs réunions à venir mettront l’accent sur la préservation de la règle du droit et le plein respect des procédures et des valeurs démocratiques. En matière commerciale, les chefs d’Etat se sont engagés à entamer des négociations en vue de la création d’une zone de libre-échange entre le Mercosur et la Communauté andine, qui devrait voir le jour avant le mois de janvier 2002. Cette zone devrait être ensuite transformée en zone économique couvrant toute l’Amérique du Sud, y compris le Chili, le Guyana et le Surinam.

MME MADELEINE ALBRIGHT, Secrétaire d’Etat des Etats Unis d’Amérique : Comme le Sommet du millénaire l’a montré, nous n’allons pas manquer d’objectifs valables. Chaque gouvernement se doit de respecter les normes internationales en matière de droits de l’homme et de sauvegarde de la règle de droit, de combattre la corruption et de prendre conscience du danger que représente le VIH/sida. Cependant, au XXIe siècle, aucune nation ne peut protéger et servir son peuple en agissant seule. C’est pourquoi nous devons profiter du renforcement des organes régionaux tels que l’OAS, l’ASEAN et l’OSCE. Le rôle des Nations Unies est également vital car aucune autre institution ne combine un mandat et une représentation quasi universels sur le plan mondial. Nous devons soutenir les efforts du Secrétaire général pour une amélioration de la gestion de l’ONU en admettant que chaque dollar mal dépensé est un dollar de moins pour combattre la pauvreté et nous attaquer aux autres cibles urgentes des Nations Unies.

Nous devons également progresser rapidement dans le renforcement des opérations de maintien de la paix, car elles constituent le mètre étalon vital et le plus visible du succès de l’Organisation, et pour les peuples des régions les plus défavorisées, la différence entre une vie normale et pas de vie du tout. Atteindre cet objectif nécessitera la mobilisation d’une plus grande équipe affectée aux opérations de maintien de la paix, la reconnaissance mondiale de la légitimité de ces missions pour la sécurité de chaque nation, la possibilité d’un déploiement rapide des forces de l’ONU mais aussi des polices civiles et des experts affectés à la réforme du droit et de la justice. Cela nécessitera également une meilleure coordination entre les militaires chargés du maintien de la paix et les civils, pour que chaque mission puisse se conclure sur un terrain permettant la réconciliation. Il faudra également de nouvelles ressources venant de mon gouvernement et des vôtres. Des ressources additionnelles qui ne grèveront pas les budgets affectés aux autres missions des Nations Unies.

Les Etats membres, dont le mien, doivent accomplir des efforts pour mieux payer leur quote-part à l’Organisation. Mais nous devons aussi revoir la méthode utilisée pour l’attribution des responsabilités en matière de coûts dans le budget des Nations Unies. Un système plus équitable devrait permettre d’établir des bases plus solides pour soutenir les programmes et les missions de l’Organisation. Ce qui devrait aussi réduire les attentes trop grandes de l’ONU concernant le paiement des Etats Unis et permettre à mon gouvernement de régler un montant de près de 600 millions de dollars dus à l’Organisation.

Une meilleure gestion des Nations Unies, un renforcement des opérations de maintien de la paix et un assainissement des finances doivent permettre de franchir un pas décisif vers une ONU plus forte et plus efficace. Nous devons aussi nous opposer à la campagne lancée par Bagdad contre l’autorité des Nations Unies et le droit international tout en facilitant la vie du peuple irakien. Lorsque les règles internationales sont bafouées, l’ONU doit faire plus que simplement constater les injustices, les dénoncer ou encore sympathiser avec les victimes, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour arrêter les responsables.

La promotion de la démocratie ne signifie pas que nous voulons imposer notre volonté à quiconque. Il ne faut pas nous leurrer: Dans tous les pays et de tout temps, la tyrannie est imposée, la démocratie est un choix.

Allocution de Son Excellence M. Ismael Omar Guelleh, Président de la République de Djibouti

M. ISMAEL OMAR GUELLEH, Président de Djibouti : Dans tous les domaines, que ce soit la pandémie du sida, la pauvreté qui continue de se propager, les guerres, les problèmes écologiques, les violations des droits de l’homme, les armes de destruction massive et l’absence de développement, les Nations Unies sont la seule organisation à avoir suffisamment d’expérience et de savoir-faire pour polariser et peaufiner les travaux disparates entrepris par l’humanité. En Somalie, le peuple s’est enfin exprimé. Il a refusé l’incertitude et l’aberration d’une guerre de dix ans dont il ne voyait pas la fin. Pour sauver la Somalie, il fallait se départir des pratiques habituelles, qui consistaient à traiter avec les habituels représentants du peuple imbus d’eux-mêmes. Plutôt que de leur donner une nouvelle occasion de jouer un double jeu, j’ai estimé que le moment était venu

de les ignorer et qu’il était temps de donner des moyens d’action au peuple somalien. Il était temps que le peuple somalien prenne son destin en main. Il fallait organiser une conférence à laquelle tous les acteurs seraient conviés et qui aurait pour objectif le rétablissement de la paix, du gouvernement, de la légitimité et la reconstruction.

Les principaux aspects du processus de paix proposé par le groupe intergouvernemental pour le Développement de l’Afrique sous la houlette de Djibouti reposaient sur une approche ascendante, faisant appel à la participation des collectivités et comportant des périodes de discussions afin de consolider peu à peu les acquis. Le 26 août 2000 est une date mémorable qui restera à jamais gravée dans le cœur et l’esprit des Somaliens. Ce jour-là, le parlement provisoire somalien a élu le premier président du pays après un vide de plus de 10 ans. L’homme du jour est Abdiqassim Salad Hassan, le nouveau Président de la Somalie, un homme politique chevronné, raffiné et très expérimenté qui a déjà fait preuve de ses compétences lors d’une série de contacts politiques et d’entretiens tant en Somalie qu’à l’extérieur. Ceux qui désirent s’opposer à la création d’un gouvernement représentatif et démocratique probablement parce qu’ils ne sont plus sous les feux de la rampe en Somalie, doivent revenir à la réalité. On a tendu une main généreuse à tous ces éléments pour qu’ils rejoignent leur peuple épris de paix en appuyant les pourparlers et maintenant le gouvernement.

En fait, j’ai invité personnellement plusieurs d’entre eux et je les ai rencontrés à Djibouti pour discuter avec eux et leur assurer qu’il y avait une place pour tous dans la nouvelle Somalie, gouvernée par la nouvelle structure fédérale proposée. Maintenant que le gouvernement est en place, la balle est dans leur camp. Nous ne pouvons qu’espérer qu’ils utiliseront à bon escient les chances de réconciliation et d’adaptation qui restent, en faisant passer leur propre pays avant leurs intérêts personnels.

On peut espérer que la communauté internationale mobilisera une aide d’urgence pour la Somalie afin de permettre au gouvernement de conduire le pays, de s’établir dans ses fonctions et de recréer les institutions et les capacités essentielles. Ce processus, il est vrai, a mis à rude épreuve les maigres ressources de Djibouti mais jamais la détermination ou la confiance de son peuple. Que ce test d’endurance auquel a été soumis notre peuple, comme le peuple somalien, soit une source d’inspiration et marque le début de ce qui pourrait être un immense succès non seulement pour la corne de l’Afrique mais également pour l’ensemble du continent africain et l’humanité tout entière.

Suite du débat général

M. JUAN FRANCISCO REYES LÓPEZ, Vice-Président du Guatemala : La présence dans mon pays de la mission de vérification des Nations Unies au Guatemala est hautement appréciée et dès à présent nous demandons la collaboration de l’Assemblée générale pour que le moment venu elle prolonge son mandat jusqu’en 2003. Il est important de constater que les objectifs des accords de paix coïncident avec le programme de mon gouvernement dans divers domaines, comme le respect absolu des droits de l’homme, la consolidation de la démocratie participative, la subordination des forces armées à l’autorité civile, le développement d’une société multiethnique, pluriculturelle et multilingue, le renforcement et la modernisation du système de justice, la réforme de l’Etat, et

surtout répondre aux demandes insatisfaites d’une majorité de Guatémaltèques pour une meilleure administration sociale, des revenus suffisants, des emplois mieux rémunérés et l’égalité des chances. Nous devons cependant concilier la situation économique difficile à laquelle nous sommes confrontés avec notre engagement à mener à bien un processus de développement économique vigoureux qui bénéficie à tous les Guatémaltèques. Je tiens à mentionner à cet égard les progrès réalisés dans notre recherche d’une solution au différend historique qui nous oppose au Belize. Nous avons franchi une nouvelle phase dans la recherche d’un dialogue comme moyen de résoudre ce conflit.

Concernant les matières qui seront abordées lors de la 55ème session de l’Assemblée générale, nous considérons que l’ONU doit s’adapter aux exigences de la mondialisation et de l’après guerre froide. Parmi les réformes à accomplir, celle qui doit recevoir le plus d’attention concerne le Conseil de sécurité. Il ne fait aucun doute que sa composition ou son mode de fonctionnement ne reflètent pas les réalités du monde contemporain. Nous sommes en faveur d’une augmentation du nombre des membres du Conseil et du strict respect de la Charte quant à l’utilisation du droit de veto avec un contrôle de l’Assemblée générale et, dans les cas extrêmes, de la Cour internationale de Justice.

Nous considérons également qu’il faut que l’Organisation renforce sa capacité collective de prévenir et de résoudre les conflits externes et internes. Le renforcement des capacités de l’ONU en ce qui concerne les opérations de maintien de la paix ne doit cependant pas se faire au détriment des autres activités sociales et économiques de l’Organisation. Dans cette optique il est sans doute temps de revoir la politique de ‘croissance zéro’ du budget de l’Organisation. Nous acceptons l’idée d’une révision de la manière dont sont distribuées les charges financières des Nations Unies. Dans le même temps, nous considérons que le critère principal de la détermination de la contribution de chaque Etat au budget doit être la capacité de payer. Doivent ainsi être reconnues la situation particulière des pays en développement et la responsabilité particulière que doivent assumer les membres permanents du Conseil de sécurité dans le maintien de la paix.

Finalement nous estimons que les Nations Unies doivent poursuivre leur travail concernant ce que nous avons baptisé la tâche non accomplie du XXIe siècle à savoir l’éradication de la pauvreté dans le monde. Les Nations Unies doivent avec les grandes institutions financières mondiales veiller à ce que tous les pays aient accès aux bénéfices de la mondialisation. Ce qui nécessite des mesures au niveau local mais aussi au niveau international.

M. HUBERT VEDRINE, Ministre des affaires étrangères de la France et Président du Conseil de l’Union européenne : La préservation de la paix, le renforcement de la sécurité internationale et la défense des droits de l’homme sont au cœur des principes qui fondent la politique étrangère de l’Union européenne à qui des crises récentes ont démontré qu’elle ne pouvait rester inactive quand ces principes sont violés. A cet égard, l’Union européenne approuve la priorité donnée au maintien de la paix lors des rencontres du Sommet du millénaire. Sur ce sujet, le Rapport de M. Brahimi constitue une analyse approfondie. L’Union européenne participera activement à l’examen des recommandations de ce rapport. Elle a décidé de se doter des moyens d’être un acteur politique majeur et de jouer pleinement son rôle sur la scène

internationale. A cette fin, elle a pris des mesures décisives en mettant en place de nouveaux organes politiques et militaires, de décision et d’action. Ces organes comprennent un comité politique et de sécurité, un comité militaire, un état-major, un centre de situation, et un comité pour les aspects civils. Ces organes permettront à l’Union européenne d’intervenir de manière rapide et crédible dans la gestion des crises internationales, et elle a également annoncé sa détermination à disposer, d’ici 2003, d’une force de 60000 hommes pour des missions internationales couvrant l’ensemble des opérations de prévention des conflits et de gestion des crises, avec l’appui aérien et naval nécessaire. Cette force pourra être déployée sur un théâtre de crise dans un délai de 60 jours et pour une période d’au moins un an. Aux moyens militaires, l’Union européenne joindra également des moyens d’intervention civils, notamment un contingent de policiers dont la contribution à une opération de maintien de la paix est très précieuse. A cet égard, les Etats Membres de l’Union européenne se sont fixés pour objectif, à l’échéance 2003, la capacité de fournir jusqu’à 5000 policiers, dont 1000 pourront être déployés dans un délai de 30 jours.

La politique et l’action de gestion de crise de l’Union européenne s’inscrivent naturellement dans le plein respect des principes de la Charte de l’Organisation des Nations Unies, avec laquelle il est plus que jamais indispensable d’établir des liens de travail. Afin de lancer cette coopération, la troïka de l’Union européenne va s’entretenir pour la première fois sur ce thème avec le Secrétaire général des Nations Unies. Au nom de l’Union européenne, j’invite donc M. Kofi Annan à se rendre à Bruxelles pour une séance de travail avec les instances de l’Union.

Abordant les questions régionales, M. Hubert Védrine, à propos du Proche- Orient, a déclaré que l’Union européenne salue les efforts considérables et la détermination dont ont fait preuve au cours des dernières négociations, le Président de l’Autorité palestinienne et le Premier Ministre israélien en vue de parvenir à un accord définitif entre les peuples israélien et palestinien. L’Union européenne se réjouit du retrait d’Israël de la zone qu’il occupait au Sud-Liban et salue le redéploiement de la FINUL. Elle considère cependant que seul un règlement global, portant sur l’ensemble des volets du processus de paix, y compris le volet israélo-syrien, est de nature à garantir durablement la stabilité de la région.

En ce qui concerne l’Europe et notamment les Balkans, l’Union européenne pense que l’avenir des pays de la région est dans l’intégration à l’Europe. C’est pourquoi le Conseil européen a réaffirmé que l’objectif reste l’arrimage des pays de la région à l’Europe. L’Union européenne a réaffirmé sa détermination de continuer à jouer le rôle moteur dans le pacte de stabilité, qui représente une vision nouvelle de coopération entre les pays de la région et la communauté internationale. Le sommet, que sur proposition de la France, l’Union européenne et les pays des Balkans occidentaux ont décidé de tenir à l’automne prochain en Croatie, marquera notre commune détermination à surmonter les divisions du passé. La République fédérale de Yougoslavie ne pourra évidemment pas y participer, au vu de la nature de son régime actuel. Mais les Serbes savent qu’ils ont leur place dans la famille européenne, et les élections du 24 septembre pourraient être à cet égard décisives. Au Kosovo, les premières élections démocratiques et municipales prévues dans quelques semaines, marqueront une étape importante dans la mise en

œuvre de la résolution 1244. Nous redisons avec force que la communauté internationale ne permettra pas que des actes de violence inacceptables, quel qu’en soient les motivations, fassent échouer ce processus électoral démocratique en cours.

En ce qui concerne l’Afrique, l’Union européenne entend apporter son soutien aux mesures prises, de manière coordonnée, par l’OUA et les Nations Unies, pour mettre en œuvre le règlement de paix entre l’Ethiopie et l’Erythrée. L’Union est d’autre part profondément préoccupée par l’évolution de la situation en République démocratique du Congo (RDC). Elle appelle toutes les parties à l’Accord de Lusaka à mettre en œuvre leurs engagements, y compris ceux de Kampala. Elle les appelle aussi à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité, en particulier la résolution 1304 qui exige le retrait ordonné des forces étrangères présentes sur le territoire congolais, et la coopération de toutes les parties au déploiement dans la sûreté et la liberté de circulation de la MONUC. L’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC, violation de la souveraineté de ce pays, est inacceptable. L’Union européenne salue par conséquent la constitution par le Secrétaire général des Nations Unies le 15 août dernier, d’un groupe d’experts chargé d’analyser les liens entre l’exploitation illégale de ces richesses et la poursuite du conflit. L’Union européenne est d’autre part heureuse que le trafic illicite de diamants et autres minéraux précieux qui alimente directement les conflits, ait fait l’objet d’une prise de conscience, notamment dans le cas de l’Angola. Elle rappelle aussi le soutien qu’elle a apporté à la résolution 1306 sur la Sierra Leone qui a renforcé le dispositif existant de sanctions sur les armes et établi un régime d’embargo concernant les diamants bruts exportés illégalement de Sierra Léone.

Poursuivant son allocution, M. Hubert Védrine a fait part de la vive préoccupation de l’Union européenne face à la situation en Birmanie. A cet égard, il a demandé aux autorités birmanes de rétablir, sans délai, la liberté d’expression, de circulation et de communication avec l’extérieur de Mme Aung San Suu Ki. Evoquant aussi le Timor oriental, Haïti, la question du Cachemire et celle de la situation entre les deux Corées, M. Védrine a souhaité que les processus de dialogue et de concertation permettent de surmonter les déchirures du passé. L’Union européenne continuera à soutenir l’action des Nations unies en faveur des droits de l’homme a-t-il dit. A cet égard, l’Union européenne approuve la désignation, grâce au soutien de très nombreux pays, d’un Représentant du Secrétaire général pour les défenseurs des droits de l’homme, Mme Jilani. Les Nations Unies ont cette année encore, démontré qu’elles étaient l’enceinte d’élaboration de progrès normatifs en matière de droits de l’homme à travers l’adoption de deux Protocoles additionnels à la Convention des droits de l’enfant, a estimé l’orateur. Dans la perspective de la prochaine Conférence mondiale sur le racisme, l’Union européenne montrera sa détermination à combattre le racisme sous toutes ses formes lors de la conférence préparatoire qui se tiendra en octobre à Strasbourg. Concernant la peine capitale que tous ses Etats Membres ont abolie, elle appelle tous les pays qui ne l’ont pas encore fait à adopter des moratoires allant vers une abolition définitive de la peine de mort, qui est un châtiment contraire à la dignité humaine.

M. CHAKRA PRASAD BASTOLA, Ministre des affaires étrangères du Népal : Par essence, le maintien de la paix suppose la promotion d’une culture de la paix fondée sur le désarmement, le règlement pacifique des conflits, et des mesures de lutte contre les causes originelles des conflits que sont la pauvreté et l’exclusion. Pour maintenir la paix, il nous faut réduire la pauvreté. Le Népal souscrit aux objectifs suggérés par le Secrétaire général dans son Rapport du millénaire et adoptés lors du Sommet du millénaire que sont l’élimination de la pauvreté et la promotion du développement des pays en développement. Les unes après les autres, les conférences internationales des Nations Unies ont convenu qu’il s’agissait de la seule voie à suivre. La série d’examens à mi-parcours de la mise en œuvre des recommandations de ces conférences est parvenue à la même conclusion. Pourtant, rien n’a changé. Les engagements internationaux sont oubliés avant même que l’encre qui a servi à leur signature ne sèche. Nous devons combler le fossé entre ce que nous déclarons et ce que nous accomplissons. Les pays du Sud continuent de ployer sous le fardeau d’une dette insupportable. Ils appellent de manière urgente à la mise en œuvre rapide de l’initiative HIPC et à son élargissement à l’ensemble des pays les moins avancés et aux autres pays en difficultés graves. Les investissements directs étrangers, devenus le moteur de la croissance d’une petite poignée de pays, continuent d’échapper à la majorité des pays en développement. De plus, les modes de production et de consommation non durables des pays riches conjugués à la pression démographique des pays pauvres continuent de peser, de façon considérable, sur l’environnement, l’héritage commun de l’humanité. Les pays les moins avancés, en particulier les pays sans littoral comme le Népal, sont toujours confrontés aux défis les plus considérables du développement. Le Népal espère que la manifestation de haut niveau sur le financement du développement qui doit se tenir l’année prochaine assurera des moyens crédibles de financer le développement. Cette manifestation doit redynamiser la coopération Nord-Sud comme la coopération Sud-Sud.

Démocratie éprouvée, le Népal a montré son engagement en faveur des droits de l’homme et de la bonne gouvernance. C’est fort de cet engagement qu’il s’oppose à tout recours sélectif à ces valeurs pour défendre des intérêts politiques. En ce qui concerne la sécurité des petits Etats, il est attristant de constater que les Nations Unies sont souvent forcées d’adhérer au plan des grandes puissances. Le Népal lance un appel urgent à la communauté internationale pour qu’elle respecte la règle du droit et aux pays riches et puissants pour qu’ils respectent les droits des petits Etats à la souveraineté qu’ils gardent jalousement par-devers eux. A partir du moment où il n’existe aucune alternative aux Nations Unies, nous devons revitaliser l’Organisation et la renforcer par des réformes. Dans ce cadre, il est impératif de rétablir la primauté de l’Assemblée générale qui est l’instance la plus proche d’un parlement capable de traduire les vœux des populations du monde sur les politiques globales. Maintenant que le Sommet du millénaire a reconnu la pauvreté et l’exclusion sociale comme la cause principale des conflits, il est essentiel de concentrer l’attention sur le renforcement du Conseil économique et social et d’en faire un Conseil de sécurité des questions économiques. Il faut rendre le Conseil économique et social capable de coordonner les activités des fonds et programmes des Nations Unies avec celles des institutions de Bretton Woods, de l’Organisation mondiale du commerce et des autres organes extérieurs à l’ONU.

Il faut constater avec regret que les Nations Unies vivent, année après année, des difficultés découlant du défaut de certains de leurs contributeurs importants de respecter leurs obligations. Pour le Népal, le calcul des contributions des Etats Membres doit se fonder sur le rapport entre leur PNB et le PNB mondial. Les Membres Permanents du Conseil de sécurité doivent aussi reconnaître leur responsabilité particulière vis-à-vis du budget des opérations de maintien de la paix. Il est moralement indéfendable de transformer les pays pauvres en donateurs des pays riches en matière de maintien de la paix. Le Népal appelle tous les Etats Membres à payer leurs contributions en temps voulu et sans conditions.

M. JOE BORG, Ministre des affaires étrangères de Malte : La Méditerranée a dû faire face et doit encore affronter des conflits intermittents ainsi que de grandes disparités en matière de développement. La sécurité en Méditerranée requiert l’investissement et la détermination nécessaires afin d’identifier les problèmes et les solutions susceptibles d’apporter une stabilité durable dans la région. Le dialogue qui sous-tend le travail des Nations Unies a permis d’améliorer les relations entre les Etats dans cette partie du monde.

Nous considérons que la gestion du développement économique et social autant que les risques et les menaces qui pèsent sur la paix et la sécurité internationales doivent être envisagées comme des responsabilités partagées. La liberté, l’égalité, la solidarité, la tolérance et le respect de l’environnement sont des cibles que doivent nous permettre d’atteindre la mise en commun de nos énergies et de nos efforts. C’est pour cette raison que nous avons choisi de suivre le chemin tracé par l’Union européenne. Ce sont les valeurs et les principes qui ont inspiré la naissance de l’Union européenne qui président à notre quête d’aujourd’hui. Nous estimons que c’est grâce à notre participation que nous pourrons le mieux jouer notre rôle sur la scène internationale et contribuer plus efficacement à la promotion de la paix et du progrès en Méditerranée. Nous avons le sentiment que notre utilité pourrait grandement être renforcée en intégrant l’Union européenne. Pour notre propre épanouissement mais aussi pour celui des rives nord et sud de la Méditerranée.

L’Union européenne assure aux pays qui la composent les ressources et la force nécessaires en particulier pour les plus petits de ses membres. En même temps, elle promeut et renforce la stabilité et le sentiment d’un engagement commun qui sont les ingrédients indispensables à l’établissement d’une paix, d’une prospérité durables dans le contexte plus large de la mondialisation. La bonne gouvernance est ce que les peuples des Nations Unies recherchent aux niveaux national, régional et international. Cependant, cette bonne gouvernance est menacée par un certain nombre de phénomènes qui pèsent sur la société contemporaine. Qu’il s’agisse du trafic de drogues, d’armes ou d’êtres humains, le crime organisé à l’échelle internationale menace la substance même de la loi et de l’ordre par la violence et la corruption. Une situation qui doit nous alerter en vue d’un renforcement de la coopération internationale. Malte est convaincu du fait que les Nations Unies constituent le forum le mieux à même d’opérer les choix et d’élaborer les solutions à long terme aux problèmes qui pèsent sur la planète et sur les hommes dans sa relation avec elle.

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