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AG/1030

DE NOMBREUX INTERVENANTS A LA SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLEE GENERALE SOULIGNENT QUE LE POIDS DE LA DETTE ENTRAVE LE DEVELOPPEMENT SOCIAL

28 juin 2000


Communiqué de Presse
AG/1030


DE NOMBREUX INTERVENANTS A LA SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLEE GENERALE SOULIGNENT QUE LE POIDS DE LA DETTE ENTRAVE LE DEVELOPPEMENT SOCIAL

20000628

Au nom de la solidarité internationale, de nombreux orateurs demandent que la session extraordinaire se prononce sur la question de la dette

GENEVE, le 28 juin -- La session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies intitulée : « Sommet mondial pour le développement social et au-delà : le développement social pour tous à l'heure de la mondialisation », a poursuivi, ce matin, son débat sur les propositions de nouvelles initiatives de développement social.

De nombreux intervenants ont fait le constat que, cinq ans après l'adoption de la Déclaration et du Programme d'action de Copenhague, les objectifs d'élimination de la pauvreté, de promotion du plein emploi ou d'intégration sociale ne sont toujours pas atteints. Plusieurs orateurs ont rappelé qu'en l'espace de cinq ans, le nombre de personnes vivant dans la pauvreté a augmenté. Ils ont par ailleurs souligné que la mondialisation et la libéralisation des échanges ont creusé le fossé entre pays riches et pays pauvres.

Forts de ce constat, de nombreux intervenants ont plaidé en faveur d'un renouvellement de la solidarité internationale envers les pays les plus pauvres. Plusieurs orateurs ont ainsi attiré l'attention de l'Assemblée générale sur le poids de la dette qui pèse sur les pays en développement et qui, dans de nombreux cas, ne leur permet pas de mettre en œuvre de façon efficace les engagements souscrits lors du sommet de Copenhague. Certains intervenants ont dénoncé le fait que des gouvernements soient obligés de recourir à l'emprunt pour assurer le remboursement de leur dette. Partant, ils ont demandé à l'Assemblée générale de se prononcer sur des mesures d'allégement ou d'annulation de la dette. Ils ont fait valoir que de telles mesures permettraient aux gouvernements d'accroître les budgets consacrés à la réalisation du développement social.

Sont intervenus la Vice-Présidente des Philippines et le Vice-Président du Conseil des ministres de Cuba, ainsi que de hauts responsables gouvernementaux de l'Indonésie, de l'Équateur, de la Jordanie, de l'Australie, de la République arabe syrienne, de l'Argentine, du Koweït, de Haïti, de l'Arménie, de l'Italie et du Mali. Les représentants de Singapour, du Maurice, de Saint-Marin, du Brésil et de l?Égypte ont également pris la parole.

La session extraordinaire de l'Assemblée générale poursuivra ses travaux cet après-midi à 15 heures.

Déclarations

Mme GLORIA MACAPAGAL-ARROYO, Vice-Présidente des Philippines, a décrit les mesures prises par son pays pour remplir les objectifs de Copenhague, à savoir, l'éradication de la pauvreté, la promotion de l'emploi et l'intégration sociale. Elle a souligné que la crise financière en Asie, le phénomène El Niño et la mondialisation ont affecté la productivité du pays en matière d'emploi. La Vice-Présidente a souligné la nécessité d'une coopération internationale pour traiter des questions telles que le trafic de drogue, le terrorisme, la protection de l'environnement et le sida.

Les Philippines s'efforcent de créer un environnement favorable au développement social. Le gouvernement poursuit une politique de décentralisation en matière de services sociaux et tente de renforcer le dialogue et les partenariats entre les institutions gouvernementales et la population. Si les gouvernements locaux ont davantage conscience de leur responsabilité en matière de développement social, leur action est limitée par le manque de moyens financiers, a expliqué la Vice-Présidente. Elle a par ailleurs souligné la nécessité, à l'échelle internationale, de rechercher les moyens de traiter la question de la volatilité excessive des flux de capitaux. Il est également important de se saisir du problème de la dette, a-t-elle ajouté.

La Vice-Présidente des Philippines a par ailleurs indiqué que la part du budget philippin consacré au développement social est passé de 27% en 1995 à 34,1% en 2000. Elle a par ailleurs demandé aux pays donateurs de renverser la tendance au déclin de l'aide publique au développement.

M. JOSÉ LUIS RODRÍGUEZ GARCÍA, Vice-Président du Conseil des ministres et Ministre de l'économie et de la planification de Cuba, a rappelé qu'en 1995 déjà, avait été proclamée une assertion fausse, que la croissance économique et certaines politiques d'ajustement suffiraient à assurer naturellement le développement social grâce aux énormes richesses générées au bénéfice de tous. Cinq ans plus tard, la réalité est bien différente à ce qui avait alors été pronostiqué. Les pays en développement, dont la croissance avait atteint les 6,2% entre 1990 et 1995, ont connu une croissance de seulement 4,8% de 1995 à 1999. L'endettement extérieur du tiers monde est passé pendant la décennie 1990 de 1,5 milliards de dollars à environ 2,5 milliards de dollars, confortant son rôle de mécanisme d'exploitation et de domination des peuples. Face à cette dure réalité, ne sont proposées que des solutions mesquines telles que l'initiative en faveur de la réduction de la dette des pays les plus pauvres fortement endettés. Les termes de l'échange se sont par ailleurs détériorés. L'impact social des politiques d'ajustement a entraîné une crise sans précédent, les riches étant sans cesse plus riches et les pauvres plus pauvres. Le nombre de personnes vivant dans la pauvreté est passé de 1 milliard à 1,5 milliard en seulement cinq ans.

L'égoïsme l'emporte sur la solidarité sociale, la discrimination et la marginalisation génèrent l'exclusion sociale, a constaté le Ministre cubain. Des ressources s'avèrent indispensables pour résoudre les problèmes sociaux auxquels sont confrontés les pays les plus pauvres. Pour dégager de telles ressources, il suffirait de réduire les dépenses consacrées aux armements, qui se sont élevées à 780 millions de dollars en 1999; de mettre un terme aux dépenses publicitaires engagées dans le monde, qui peuvent se chiffrer à mille milliards de dollars chaque année dans le monde; et de mettre en place une taxe sur la spéculation financière. Pour sa part, Cuba a montré que l'on pouvait promouvoir le développement social avec peu de ressources s'il existe une volonté politique dans ce sens. Il faut maintenant mettre un terme aux promesses non tenues, a affirmé M. Rodríguez García.

M. BASRI HASANUDDIN, Ministre d'État, coordonnateur pour le bien-être de la population et l'éradication de la pauvreté de l'Indonésie, a déclaré que la communauté internationale est encore loin d'avoir atteint ses nobles objectifs du Sommet de Copenhague en faveur de l'amélioration de la condition humaine et des niveaux de vie. Le Ministre a rappelé que la pauvreté sévit partout dans le monde et s'est même accrue dans certains pays, que la réduction du chômage reste un processus lent, que l'intégration sociale nous échappe. Les objectifs de Copenhague sont restés des vœux pieux. Le processus de mondialisation et de libéralisation a eu un impact majeur sur le développement social et en particulier dans les pays en développement. Ces phénomènes ont clairement accentué leurs difficultés, en particulier en ce qui concerne l'accès aux marchés, aux ressources financières et technologiques. Certaines économies, ouvertes prématurément, se sont exposées à une concurrence déstabilisante. La croissance du monde en développement est en baisse en cette époque de grand changement et d'innovation.

M. Hasanuddin a estimé que si la communauté internationale est sincère dans son engagement pour le développement social, alors il lui faut travailler au redressement des asymétries et déséquilibres de l'économie mondiale. L'Indonésie a appelé la communauté internationale à réduire les effets négatifs de la crise financière en assistant les pays en développement dans le renforcement de leurs marchés intérieurs des capitaux, en incluant des mesures pour traiter le flux des capitaux à court terme et la volatilité des marchés financiers. Pour ce faire, les pays en développement devraient participer davantage au processus de prise de décision des institutions financières internationales. Parallèlement, nombre de pays en développement sont toujours écrasés par le fardeau de la dette. Le Ministre a déclaré que cette question devrait être réglée rapidement sachant qu'il s'agit d'un sérieux obstacle au développement de nombreux pays. L'Indonésie salue ainsi toutes les initiatives telles que l'initiative d'allégement de la dette des pays pauvres lourdement endettés.

M. RAÚL PATIÑO-AROCA, Ministre du bien-être social de l'Équateur, a reconnu que son pays n'a pas pu mettre en œuvre les engagements souscrits lors du Sommet de Copenhague en 1995. Le nombre de pauvres représente aujourd’hui près de 70% de la population de l'Équateur. Entre 1995 et 2000, le taux de chômage est passé de 6,9% à 15%. L'Équateur s'est doté d'une structure de développement qui a idéalisé le marché, considéré comme seul capable de favoriser l'emploi et le bien-être pour toute la population. L'application de ce modèle a eu des répercussions négatives, conduisant à une crise économique sans précédent, une augmentation de la pauvreté, et a entraîné une grande instabilité politique. La dette extérieure de l'Équateur constitue le principal obstacle à son développement. À cet égard, le Ministre a fait siens les propos prononcés par le Pape Jean-Paul II selon lesquels la dette est immorale et constitue un instrument politique de pression sur les pays débiteurs.

En raison de la dette, a poursuivi le Ministre équatorien, les peuples du tiers monde n'ont pas encore goûté les fruits de tous les efforts consentis en vue de promouvoir le développement social. Le Ministre a demandé à l'Assemblée générale de se prononcer sur les conditions inhumaines et injustes qui découlent du remboursement de la dette par les pays concernés. Il a plaidé en faveur d'une annulation d'une partie importante de la dette qui empêche les pays d'assumer leurs responsabilités et d'honorer les engagements pris lors du Sommet de Copenhague. Dans ce contexte, il a souligné que les sommes épargnées pourraient être investies dans les secteurs de l'éducation, de la santé et de l'emploi. Il est injuste, a-t-il affirmé, que les pays en développement aient à s'endetter pour rembourser leur dette. Le Ministre a enfin précisé que son pays va mettre en œuvre un plan en faveur de l'emploi. Une réforme fiscale sera également entreprise afin de mieux redistribuer la richesse nationale.

Mme TAMAM LE-GHUL, Ministre du développement social de la Jordanie, a souligné que son pays a mis au point un plan national d'action afin d'assurer le suivi des décisions prises à Copenhague il y a cinq ans. Ce plan prévoit la mise en œuvre de programmes visant à éliminer la pauvreté, notamment en assurant la promotion du rôle de la femme dans la vie économique, sociale et politique du pays et en élargissant le système de protection sociale. Les politiques mises en place visent également à promouvoir les possibilités d'emploi et à apporter un soutien aux familles. En dépit des progrès réalisés en Jordanie en matière de développement social, beaucoup reste à faire pour améliorer le niveau de vie de l'ensemble de la population, en particulier en ce qui concerne les nombreux réfugiés qui sont entrés dans le pays en trois vagues successives.

La Ministre jordanienne a insisté sur la nécessité de réduire les barrières douanières, de renforcer le secteur privé et de résoudre le problème de l'endettement. Si l'on ne parvient pas à assurer que les acquis du développement et de la prospérité profitent à tous, le monde entier connaîtra des problèmes, comme en a témoigné la crise asiatique qui devrait servir d'avertissement. Le développement social dans le monde ne pourra être réalisé sans une coopération accrue au niveau international, a affirmé Mme Le-Ghul.

Mme ELISABETH SICKL, Ministre chargé des affaires sociales et des générations d'Autriche, a déclaré que son pays s'est engagé dans la bataille du développement international dont l'objectif est de diviser par deux le nombre des personnes vivant dans une pauvreté extrême d'ici 2015, estimant qu'il s'agit d'un des combats prioritaires de la coopération pour le développement. Mme Sickl a également déclaré que son gouvernement est convaincu que la bataille contre la pauvreté est non seulement indispensable mais possible, car la croissance économique et les retombées escomptées ne sont habituellement pas suffisants pour permettre aux pauvres de passer rapidement et de façon irréversible au-dessus du seuil de pauvreté. Aussi, a-t-elle dit, des mesures précises doivent être prises directement en faveur des pauvres pour leur permettre d'accroître leur pouvoir d'achat. Le combat contre la pauvreté est possible, le monde dispose de moyens et de stratégies adéquats, a-t-elle ajouté, et à condition de les appliquer de façon appropriée, elles devraient conduire à des résultats positifs.

La Ministre autrichienne a souligné que la lutte systématique contre la pauvreté devrait également favoriser la prévention des conflits violents, du flux de réfugiés, de la migration. Selon l'Autriche, l'efficacité de toutes ces mesures dépend fortement de la coopération des pays donateurs, de la cohérence des mesures prises ainsi que de l'application du principe de partenariat. Toutes les décisions relatives à l'orientation du processus de développement, a-t-elle conclut, doivent être prises par les gouvernements en accord avec les populations des pays en développement.

Mme BARIA AL-KOUDSI, Ministre du travail et des affaires sociales de la Syrie, a rappelé que l'être humain doit être placé au centre des politiques de développement. La Syrie, a-t-elle affirmé, a adopté nombre de mesures pour lutter contre la pauvreté. L'accent a été mis sur l'éducation et la santé. Des plans sont également élaborés afin d'améliorer l'alimentation de la population. Le gouvernement s'efforce de multiplier les possibilités de travail pour tous. Il s'efforce également de promouvoir l'emploi des femmes, a-t-elle précisé.

La Ministre syrienne du travail et des affaires sociales a décrit les mesures prises par son gouvernement pour favoriser l'intégration sociale des personnes handicapées. Elle a également souligné les efforts déployés par le gouvernement pour généraliser la protection sociale, précisant qu'une attention particulière est accordée aux femmes et aux enfants. La Syrie considère que l'instauration d'une paix juste et durable dans la région est une condition essentielle de son développement social. Dans ce contexte, la Ministre a déclaré qu'il faut assurer le retrait complet d'Israël du Golan. La Syrie lance un appel à la communauté internationale pour qu'elle apporte son soutien à la mise en œuvre de toutes les résolutions pertinentes sur la question.

Mme GRACIELA FERNÁNDEZ MEIJIDE, Ministre du développement social de l'Argentine, a déclaré que la décennie des années 90 a été, pour les Argentins, une décennie aux résultats mitigés. D'un côté les réformes structurelles ont permis d'ouvrir l'économie du pays au monde et d'accroître la productivité nationale; et de l'autre les méthodes employées pour procéder à ces réformes n'ont fait que creuser le fossé social et augmenter le déficit social à un niveau jamais atteint auparavant. Combler ce fossé et réduire le déficit constitue l'objectif central du gouvernement récemment élu en Argentine.

La principale ligne de conduite du Gouvernement argentin en la matière consiste à renforcer les capacités institutionnelles des acteurs publics et privés impliqués dans le développement social. C'est dans cet esprit qu'a été prise la décision de créer un Ministère du développement social et de l'environnement. La collaboration des organismes internationaux reste indispensable dans le contexte actuel qui est celui de l'Argentine, pays où subsistent deux millions de personnes vivant dans la pauvreté, c'est-à-dire dans des familles dont les revenus ne dépassent pas les 67 dollars par mois pour chaque membre de la famille. Pour sa part, le Gouvernement argentin est sur le point de lancer un plan de lutte contre l'exclusion afin de répondre à cette dramatique réalité.

M. ABDULWAHAB MOHAMMED AL-WAZZAN, Ministre du commerce et de l'industrie et Ministre des affaires sociales et du travail du Koweït, a souligné que la mondialisation est une arme à double tranchant : trop peu de pays profitent rapidement d'effets positifs sur leur économie et leur environnement social, alors que la majorité, et surtout les pays en développement, sont les moins en mesure de prendre en marche le train de la mondialisation. Au contraire, ils sont davantage touchés par ses conséquences négatives. Le Ministre a rappelé qu'il existe également de nouveaux phénomènes sociaux tels que la recrudescence de la violence, du trafic des drogues, des armes et autres produits illicites qui entravent le développement social aux niveaux national, régional et international. Dans ce contexte, le Koweït estime que la création d'un nouveau mécanisme de coopération et de coordination internationales dépendant des Nations Unies et de ses institutions spécialisées est nécessaire aujourd'hui pour lutter contre ces fléaux sociaux qui menacent la sécurité et la stabilité nationales et internationales. Le Koweït souhaite que la création d'un tel mécanisme fasse partie des décisions de la présente session. Le Ministre koweïtien a rappelé que son pays soutient financièrement de nombreux projets de développement dans nombre de pays par le biais de l'aide officielle au développement, qui représente 4 à 5% du PIB, soit bien plus que les 0,7% stipulés dans l'engagement 9 de la Déclaration de Copenhague. En accord avec la politique d'allégement de la dette des pays en développement, le Ministre a ajouté que le Koweït a voté une loi en 1995 en faveur de l'annulation de la dette de certains pays ainsi que du paiement d'intérêts par d'autres pays.

M. ANTHONY DESSOURCES, Ministre de la Planification et de la Coopération externe d'Haïti, a souligné qu'à l'issue du Sommet de Copenhague, son pays a concentré ses efforts sur la promotion des programmes sociaux. La priorité a été accordée à la justice sociale, à la sécurité publique, à l'éducation et à la multiplication des services de santé. Le Gouvernement haïtien s'est donc attelé, dans la limite des maigres ressources collectées auprès des contribuables, à de multiples travaux tendant à la modernisation du système hospitalier et au développement des infrastructures scolaires. Le Ministre a expliqué que la crise institutionnelle qui a frappé le pays a paralysé le programme de développement social mis en œuvre par le gouvernement. Il a toutefois estimé que le retour à la normalité institutionnelle, avec l'organisation d'élections, ouvrira de bonnes perspectives pour le redémarrage du programme.

M. Dessources a déclaré que malgré la diversité des actions entreprises par le gouvernement, la stratégie de lutte contre la pauvreté reste encore faible en raison des difficultés financières actuelles. Néanmoins, en dépit d'un plafond de financement réduit, du service de la dette extérieure, Haïti s'engage à poursuivre son programme de lutte contre la pauvreté. Mais la lutte contre la pauvreté doit être universelle. Tous les pays ont intérêt à se lancer dans cette voie. Dans ce contexte, le Ministre sa incité les pays riches à démontrer leur solidarité envers les pays en développement en consacrant effectivement 0,7% de leur PNB à l'aide publique au développement. Il a invité les pays donateurs à prendre en compte, dans leurs stratégies, le financement des programmes de coopération technique dans le domaine social. Il a enfin demandé à la session extraordinaire de l'Assemblée générale de se prononcer en faveur d'une annulation de la dette des pays les plus pauvres de la planète ou leur reconversion en investissements sociaux.

M. RUBEN SHUGARIAN, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Arménie, a souligné que tous les pays du monde sont touchés de près par le processus de mondialisation. Si la spécialisation et l'élargissement des marchés par le biais du commerce, de la division du travail et d'une répartition plus efficace et diversifiée des ressources devraient permettre d'accroître la productivité globale et le niveau de vie des populations à travers le monde, tous les pays ne peuvent tirer parti de cette tendance immédiatement et automatiquement. Les principales tâches qui incombent aux gouvernements consistent à poursuivre des politiques d'ajustement structurel équilibrées, de répondre aux défis sociaux et de tirer parti des avantages de la mondialisation. À cet égard, les réformes et la planification économique au niveau national s'avèrent aussi importantes que la coopération et l'intégration au niveau régional si l'on veut maximiser les bénéfices. Pour sa part, l'Arménie doit simultanément consolider ses structures étatiques, améliorer son potentiel économique, établir un nouvel agenda social et résoudre le conflit du Karabagh. Selon certaines estimations alarmantes, la population de l'Arménie a diminué ces cinq dernières années. En outre, le taux d'émigration, dû au niveau de chômage élevé, a entraîné des bouleversements démographiques.

Le Vice-Ministre arménien des affaires étrangères a indiqué que son pays a lancé un programme stratégique de réduction de la pauvreté comprenant des mesures de promotion de l'activité économique, de réduction du chômage, d'amélioration du système d'administration de l'État, de renforcement de la campagne de lutte contre la corruption et d'amélioration des services fournis par l'État aux groupes de population socialement vulnérables. Les groupes vulnérables tels que les réfugiés et les personnes déplacées internes figurent en effet en bonne place dans les politiques gouvernementales. Contrairement à l'Azerbaïdjan, l'Arménie n'a jamais politisé les problèmes sociaux liés aux réfugiés et aux personnes déplacées. Aujourd'hui, l'Arménie compte 200 000 chômeurs et elle a mis en place un programme de promotion des travaux publics qui devrait devenir un élément important de la campagne de lutte contre le chômage.

M. RINO SERRI, Vice-Ministre des affaires étrangères d'Italie, a déclaré que le risque de crises humanitaires et de situations d'urgence progresse plus rapidement que la capacité à les prévenir et les éviter par le biais de solutions courageuses, de ressources appropriées et d'un esprit d'innovation. Se référant au drame récent des clandestins de Douvres, le Vice-Ministre a déclaré qu'il suffit de penser aux aspects tragiques du flux migratoire et des nouveaux phénomènes criminels inhérents pour réaliser que la communauté internationale doit agir. À cet égard, il est nécessaire de passer d'une coopération pour le développement conçue comme un ensemble de projets indépendants à une coopération fondée sur des objectifs et des stratégies partagées, des actions coordonnées de longue portée appuyées par les politiques régionales et nationales. D'autre part, il faut mettre en place de nouvelles dynamiques entre les initiatives coordonnées et unifiées qui permettraient d'aller au-delà des pratiques sectorielles rigides, centralisées et trop souvent purement axées sur le bien-être, et d'inviter une plus large participation des partenaires et des institutions démocratiques, ainsi que toutes les formes organisées de société civile, qui doivent jouer un nouveau rôle, important.

C'est dans cette perspective, a poursuivi le Vice-Ministre italien des affaires étrangères que l'Italie a décidé d'organiser, en marge de cette session extraordinaire, un événement spécial de deux jours pour examiner plus avant cette coopération décentralisée. Enfin, le Vice-Ministre a expliqué que les nouvelles relations au sein de la société, les nouveaux potentiels de communication et les nouvelles technologies sont de la plus haute importance dans la recherche de nouvelles formes de convergence et d'intégration entre les secteurs privés et publics, les phénomènes sociaux et économiques, les dynamiques d'affaires, les valeurs de communauté et de solidarité, au moment où la vie sociale est la plus riche. Il s'agit en fait de trouver de nouvelles formes de coopération internationale.

M. TATSUO ARIMA (Japon) a souligné que depuis le Sommet mondial pour le développement social, le fossé séparant les pays riches des pays pauvres s'est creusé sous l'effet de la mondialisation. Le Japon, en tant que premier pays donateur depuis neuf années consécutives, attache une grande importance à la réduction de la pauvreté. Les efforts de réduction de la pauvreté devraient être soutenus par un allégement de la dette, a ajouté le représentant. Le Japon est favorable à l'accélération de l'initiative en faveur de pays pauvres les plus lourdement endettés. M. Arima a ainsi précisé que son pays a décidé de participer au Fonds volontaire de la Banque mondiale pour les pays pauvres les plus lourdement endettés à hauteur de 200 millions de dollars. Pour le Japon, il est important de s'assurer que les sommes débloquées grâce aux mesures d'allégement de la dette seront effectivement investies dans le domaine social. Le représentant japonais a ensuite évoqué les mesures prises par son pays pour promouvoir l'éducation, lutter contre l'épidémie de sida, promouvoir le rôle de la femme dans le développement. Par ailleurs, le Japon est d'avis que pour assurer la paix et la prospérité au XXIe siècle, il faut permettre à l'ensemble de la communauté internationale de partager bénéfices des progrès techniques. À cet égard, le représentant a affirmé que son pays déploiera tous ses efforts pour promouvoir l'utilisation des nouvelles technologies de l'information dans les pays en développement.

Mme LIM SOO HOON, Secrétaire permanente au Ministère du développement communautaire et des sports de Singapour, a rappelé que son pays ne dispose d'aucune autre ressource naturelle que sa population. Dans ces circonstances, Singapour estime qu'elle se doit d'investir dans sa population et de lui offrir toutes les chances de développement et de croissance. À cet égard, Singapour a toujours considéré l'éducation comme étant un investissement stratégique.

Mme Lim Soo Hoon a déclaré que, dans son pays, la famille est le noyau de la société. Ce n'est que si sa famille s'avère incapable de lui apporter une aide que sera envisagée la possibilité de fournir à l'individu une aide communautaire ou gouvernementale. Dans ce cas, l'aide gouvernementale et communautaire sera accordée en prenant garde de ne pas développer une mentalité de dépendance. Ce sont ces principes qui président à l'approche suivie par Singapour en matière de politique de développement social.

Le développement économique et le développement social vont de pair, a poursuivi Mme Lim Soo Hoon avant de préciser que la priorité du Gouvernement de Singapour a toujours été d'assurer le développement économique. Elle a enfin souligné que, d'ici 2030, un cinquième de la population de Singapour aura atteint l'âge de 65 ans, de sorte que les adultes qui travaillent devront à la fois s'occuper des jeunes et des personnes âgées. C'est pourquoi Singapour s'efforce de restaurer le taux de fertilité dans le pays et de se préparer à une population vieillissante.

M. DHARMADASS BAICHOO (Maurice) a déclaré qu'en dépit d'une croissance économique de 5% par an, son pays reste vulnérable à des facteurs tant exogènes qu'endogènes. La volatilité économique liée à la mondialisation et à la libéralisation du commerce, la concurrence internationale inégale et l'érosion progressive de l'accès des produits mauriciens au marché constituent autant de menaces graves pour le développement socioéconomique. Selon M. Baichoo, il faudrait que l'ouverture des marchés et l'augmentation du niveau de l'aide publique au développement envisagées dans la Déclaration de Copenhague obtiennent davantage de considération de la part des pays développés pour soutenir la croissance économique des pays en développement.

M. Baichoo a reconnu que l'économie de marché peut promouvoir la croissance. Mais la poursuite de cette croissance, à laquelle ont accorde aujourd'hui toute la priorité avec des niveaux de productivité toujours plus élevés, conduisent à des processus de développement qui favorisent des disparités de richesse tant à l'intérieur des pays qu'entre pays, et aboutissent à l'exclusion sociale. En conclusion, M. Baichoo a estimé qu'il est nécessaire de promouvoir des idées et politiques neuves pour aller graduellement vers une réforme du système actuel dont l'objectif ultime serait la ?re-socialisation de l'économie?.

Mme FEDERICA BIGI (Saint-Marin) a souligné que les dernières décennies se caractérisent par une croissance économique sans précédent, obtenue grâce à la mondialisation des marchés. Mais ce développement ne s'est fait qu'au profit d'une petite partie de la planète, creusant le fossé séparant les plus riches des plus pauvres. Pour la représentante, le problème fondamental est l'absence d'une croissance économique équilibrée entre les différents pays du monde. Saint-Marin estime que la lutte contre la pauvreté constitue aujourd'hui plus que jamais un impératif à la fois éthique, social, politique et économique. On ne saurait accepter que des centaines de millions d'être humains souffrent de la faim, soient privés de logements convenables et n'aient aucun accès aux soins de santé de base et à l'éducation.

Pour la représentante saint-marinaise, l'opinion publique des pays occidentaux prend conscience de cet état de fait. On se rend compte de manière dramatique des déséquilibres énormes et des inégalités profondes qui caractérisent le monde d'aujourd'hui. À cet égard, la représentante a déclaré que la question de la dette constitue aujourd'hui pour beaucoup de pays un problème d'une extrême gravité qui conditionne et limite les capacités et possibilités de nombreux pays à se développer tant au plan économique que social. La société civile attend de cette session spéciale de l'Assemblée générale qu'elle donne un nouvel élan au processus de Copenhague en vue de l'éradication de la pauvreté, de la réalisation du plein emploi. Pour Saint-Marin, les États et la communauté internationale ont le devoir de s'engager à assurer à chaque individu, à chaque famille, à chaque groupe social et à chaque peuple des conditions de vie qui garantissent la jouissance effective de leurs droits. Pour conclure, Mme Bigi a invité la communauté internationale à réitérer son engagement à faite preuve de solidarité.

M. GELSON FONSECA (Brésil) a rappelé que le développement social ne peut se faire sans démocratie. Il a souligné à cet égard que le Brésil s'est efforcé d'améliorer l'interaction entre l'État et la société de manière à être mieux à même d'identifier l'intérêt public et les politiques susceptibles d'apporter des réponses correspondant à cet intérêt. Le fait que les revendications sociales soient aujourd'hui plus nombreuses et variées au Brésil témoigne de l'émergence dans le pays d'un processus de débat public. En outre, le plan de stabilisation économique a permis de stopper l'inflation qui avait des conséquences néfastes pour les groupes de population les plus vulnérables. La mise en place d'un environnement macroéconomique stable, combinée à une série d'initiatives prises dans les secteurs de l'éducation, de la santé et de l'emploi, a entraîné une réduction du taux de pauvreté qui est passé de 41,7% en 1993 à 32,7% de la population brésilienne en 1998. En ce qui concerne l'éducation, le Brésil a connu une véritable révolution puisque le taux d'enfants non scolarisés est passé de 18% en 1992 à 4% aujourd'hui. Le Brésil s'est par ailleurs doté de l'un des meilleurs programmes du monde en matière de prévention contre le VIH/sida et le Brésil est le seul pays qui distribue gratuitement des médicaments visant à enrayer l'évolution de la maladie. Ces cinq dernières années, le Brésil a par ailleurs mis en œuvre le plus important programme de réforme agraire de son histoire, distribuant des terres à environ 373 000 familles.

Étant donné que le développement social dépend du développement économique, il est indispensable de remédier aux disparités croissantes qui se manifestent au sein du système économique international. À cet égard, il convient de souligner que le développement économique dépend de l'adoption de politiques nationales adaptées et de l'instauration d'un système international basé sur des règles justes et clairement définies. Il faut souligner qu'aujourd'hui, c'est aux pays développés de procéder aux principaux ajustements exigés par la libéralisation des relations économiques et commerciales internationales. Il est à cet égard nécessaire d'empêcher que la volatilité des flux internationaux de capitaux ne génère l'instabilité. Les flux d'aide publique au développement doivent en outre être augmentés.

Mme SUZANNE MUBARAK (Égypte) a déclaré que dans ce monde nouveau où le changement s'accélère, la loi du marché expose de plus en plus de personnes à une incertitude inimaginable pour les générations passées, au fléau du chômage, à la souffrance engendrée par la pauvreté, aux privations, au fardeau de la dette. Tous ces phénomènes sont amplifiés par le rapprochement des sociétés. Les objectifs de Copenhague, que traduit l'expression ?une société pour tous? n'ont pas été atteints. En fait, selon Mme Mubarak, la raison est peut-être liée au fait qu'il n'existe pas de nouveau modèle de développement unique qui créerait les conditions nécessaires au progrès économique et qui rejaillirait sur le développement social. Il existe une complémentarité entre ?croissance et redistribution? et le vieux modèle de ?croissance et retombées? et qu'il faut dépasser la rhétorique et s'assurer que les plans d'actions produisent des outils essentiels pour que les objectifs et les valeurs de Copenhague se transforment en quelque chose de concret.

De nombreux pays ont instauré des politiques visant à lier l'aide au développement économique et social. Les succès ont été mitigés et cela ne changera pas tant que les règles fondamentales du jeu n'auront pas changé. Aujourd'hui, les pays du tiers monde doivent mettre en œuvre des réformes dans un temps de plus en plus court pour pouvoir absorber les changements qui interviennent dans les pays développés. Les mots ?transformation? et ?transition? de cette nouvelle révolution sont devenus synonymes de progrès. Les pays du tiers monde ont moins de ressources pour satisfaire leurs besoins, et quand ces ressources se réduisent plus encore à cause du remboursement de la dette, la part du gâteau se rétrécit encore davantage. Le rôle des gouvernements nationaux en matière de politique sociale est miné par les exigences des pays donateurs afin de réduire l'intervention gouvernementale, a- t-elle affirmé. Selon Mme Mubarak, il faudrait songer à la mise en place d'un mécanisme grâce auquel les petites et moyennes entreprises deviendraient le véhicule d'un nouveau modèle de développement.

Mme DIAKITÉ FATOUMATA NDIAYE, Ministre du développement social, de la solidarité et des personnes âgées du Mali, a déclaré que le gouvernement de son pays a fait de la lutte contre la pauvreté un objectif majeur de sa politique en adoptant une stratégie nationale à cet effet. Les politiques économiques mises en œuvre au Mali ont permis de réaliser une croissance moyenne qui, malheureusement, n'a pas été suivie d'une réduction sensible de la pauvreté, qui reste très élevée, notamment en milieu rural. Les inégalités restent importantes en matière de répartition des revenus, d'éducation et d'accès aux soins de santé et en matière d'assainissement et d'accès à l'eau potable.

La Ministre malienne du développement social, de la solidarité et des personnes âgées a indiqué que, pour assurer l'accès universel et équitable à un enseignement de qualité, le Programme décennal d'éducation (PRODEC) a été élaboré. Sa mise en œuvre, déjà engagée, devrait permettre d'atteindre un taux de scolarisation d'au moins 75% en 2007. Le programme national d'emploi visant à réduire la pauvreté met notamment l'accent sur l'emploi des femmes, le développement des petites et moyennes entreprises, l'emploi informel et le programme d'infrastructures à fort potentiel d'emplois. La Ministre malienne a toutefois insisté sur la nécessité d'un engagement plus ferme et d'une solidarité plus marquée de la communauté internationale vis-à-vis des pays en voie de développement, ainsi que d'une plus grande solidarité entre les pays en développement.

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