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AG/1027

SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLEE GENERALE : DIRIGEANTS ET HAUTS RESPONSABLES D'ETATS POURSUIVENT L'EXAMEN DE PROPOSITIONS SUR LE DEVELOPPEMENT SOCIAL

26 juin 2000


Communiqué de Presse
AG/1027


SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLEE GENERALE : DIRIGEANTS ET HAUTS RESPONSABLES D'ETATS POURSUIVENT L'EXAMEN DE PROPOSITIONS SUR LE DEVELOPPEMENT SOCIAL

20000626

Il faut que tous les pays puissent tirer parti de la mondialisation

Genève, 26 juin -- La session extraordinaire de l'Assemblée générale consacrée à l'évaluation de la mise en oeuvre de la Déclaration et du Programme d'action du Sommet mondial pour le développement social a poursuivi cet après- midi son débat sur les moyens de réaliser les objectifs du Sommet.

Le Président de la Zambie et le Premier Ministre du Gabon ont fait des déclarations, ainsi que les Vice-Présidents de la République islamique d'Iran, Venezuela, Costa Rica. Le Prince héritier de Monaco est également intervenu, de même que les personnalités de haut rang suivantes : la Présidente adjointe du gouvernement de la Fédération de Russie, le Ministre du travail et de la solidarité du Portugal (au nom de l'Union européenne), le Ministre d'État du bien-être social du Bangladesh, le Conseiller politique spécial du Président de Colombie, la Ministre de l'emploi et de la solidarité de France, le Ministre de l'économie et des finances du Burkina Faso, le Ministre de la coopération pour le développement de la Suède, le Ministre et Président adjoint de la Commission de la planification de l'Inde, la Ministre de la santé et des services humains des États-Unis, le Vice-Ministre du développement régional du Mexique et le chef de la délégation des Pays-Bas.

Plusieurs intervenants ont évoqué les mesures prises par leurs gouvernements respectifs pour mettre en oeuvre les engagements pris lors du Sommet de Copenhague. Certains ont notamment fait part de l'adoption de plans d'actions nationaux et témoigné des progrès réalisés par leur pays dans des domaines de la santé ou de l'éducation, de l'emploi ou de la lutte contre la pauvreté. De nombreux orateurs ont toutefois souligné que les actions entreprises en matière de développement social se font dans la limite des ressources disponibles. Plusieurs ont appelé de leurs voeux une plus grande solidarité internationale. Soulignant le poids des contraintes financières qui pèsent sur eux, plusieurs représentants de haut niveau de pays en développement ont plaidé en faveur de l'allégement ou de l'annulation de la dette. Ils ont fait part de leur préoccupation s'agissant du déclin de l'aide publique au développement et ont insisté sur la nécessité d'une coopération internationale accrue. Plusieurs intervenants ont également évoqué les effets néfastes de la mondialisation et demandé à la communauté internationale de rechercher les moyens de répartir de façon plus équitable les bénéfices de ce processus.

La session extraordinaire de l'Assemblée générale consacrée au développement social tiendra sa prochaine séance plénière demain, à 10 heures, afin d'entendre les chefs d'État et de gouvernement et les hauts responsables de plusieurs pays. Suite du débat sur de nouvelles initiatives de développement social

Le Prince ALBERT, Prince héréditaire de Monaco, a déclaré que les travaux de ce Sommet mondial sont d'autant plus importants qu'ils s'inscrivent dans une étape de transformation du monde exceptionnelle à la fois par sa rapidité et sa profondeur. Après avoir accordé à la mondialisation, essence de cette transformation, de très nombreuses qualités, ses inconvénients commencent aujourd'hui à apparaître et il serait par conséquent malvenu, notamment à la suite des graves déceptions accumulées depuis le Sommet de Copenhague, de continuer d'encenser sans quelques réserves ce phénomène, comme de le condamner sans recours en l'estimant responsable de tous les maux. Lorsque des progrès scientifiques et techniques entraînent une mutation rapide et profonde des sociétés humaines, il faut s'attendre à une remise en cause, parfois douloureuse, de l'ordre établi. Le Prince a estimé que nous vivons une révolution qui bouleverse autant les pays en développement ou en transition que les pays développés. Il appartient à la communauté internationale de mieux appréhender cette mutation pour tenter de porter remède aux conséquences les plus néfastes à l'être humain et ses légitimes aspirations à bénéficier des avantages économiques et sociaux qu'elle engendre.

La sagesse des nations commence à s'éveiller, a déclaré le Prince Albert : dans nombre de nos États, les responsables politiques en liaison avec les forces vives de la société civile et du monde du travail s'emploient à maîtriser, au plan national comme au plan international, les effets plus pervers de cette révolution technologique. Il a estimé que l'économie de marché connaît-elle aussi des limites naturelles et n'apparaît plus comme une réponse exclusive à la satisfaction des besoins élémentaires tant individuels que collectifs à long terme. Son ambition est de courte portée et ne correspond pas au rythme lent de changement des sociétés humaines. Se référant à Max Weber, le Prince Albert a déclaré que le capitalisme réclame en fait pour s'installer durablement un processus de maturation et d'adaptation aux valeurs sociales. L'économie libérale ne peut trouver en réalité une justification stable que si ses bienfaits profitent à l'ensemble d'une population ainsi qu'aux peuples du sud comme à ceux du nord, le développement social s'impose alors en allié plus qu'en opposant irréductible du libéralisme.

M. MOHAMMAD ALI NAJAFI, Vice-Président de la République islamique d'Iran, a souligné que le Sommet de Copenhague a produit un nouveau contrat social mondial. Toutefois, en dépit des progrès enregistrés dans certains secteurs précis, le résultat global, cinq ans après ce Sommet, est moins que satisfaisant. Lutter efficacement contre les maux sociaux et assurer un développement social véritablement durable sont des objectifs dont la réalisation requiert une action mondiale déterminée contre la misère et la pauvreté. À cet égard, s'avèrent particulièrement nécessaires l'instauration d'un environnement économique international propice à une distribution plus équilibrée des richesses, l'instauration d'un système commercial non- discriminatoire, l'allégement de la dette et un système financier international mieux adapté.

Le Vice-Président iranien a déclaré que les négociations qui se poursuivent en ce qui concerne le texte final de la présente conférence d'examen du Sommet social témoignent clairement des défis auxquels la communauté internationale est confrontée pour ce qui est de la mise en oeuvre des engagements pris à Copenhague. Le processus de mondialisation, en dépit des promesses qu'il recèle, a rendu encore plus difficile, pour la plupart des pays en développement, le respect des engagements pris à Copenhague. La présente session extraordinaire devrait donc s'attacher à dégager un consensus sur les nouvelles initiatives qui pourraient permettre de parvenir à une mise en oeuvre plus efficace du Programme d'action de Copenhague.

Pour sa part, la République islamique d'Iran, qui avait activement participé au Sommet de Copenhague, a accordé un rang de priorité élevé aux objectifs de développement social. Le troisième plan national quinquennal (2000-2004) est très fortement orienté vers la mise en oeuvre de réformes dans divers domaines économiques et sociaux. La politique gouvernementale, vouée à l'institutionnalisation de la primauté du droit, à la promotion de la responsabilité et de la transparence, à l'amélioration de la gestion à tous les niveaux et au renforcement du rôle de la société civile, a largement contribué à la promotion du développement social en Iran. Il va sans dire que pour parvenir à réaliser le développement social, il convient avant tout de résoudre les conflits et d'instaurer et préserver la paix à l'échelle mondiale. La paix et la stabilité ne peuvent être assurées que par le biais de la promotion de la tolérance et de la compréhension entre toutes les sociétés.

M. ISAIAS RODRÍGUEZ, Vice-Président du Venezuela, a insisté sur la nécessité de placer l'être humain au centre des politiques de développement. La pauvreté, la marginalisation, les déficiences des systèmes de santé et d'éducation, doivent être des priorités pour les pays en développement. Le Vice-Président du Venezuela a réitéré que l'être humain doit être le sujet et l'objet de toute politique sociale. Il a insisté sur la nécessité d'assurer la participation des citoyens aux actions qui les intéressent directement. Dans ce contexte, il a indiqué que la constitution entrée en vigueur dans son pays consacre le droit au développement social, sans discrimination. Se fondant sur la Déclaration et le Programme d'action de Copenhague, le Gouvernement du Venezuela a mis en oeuvre une série d'actions afin d'assurer notamment la protection sociale des enfants et des adolescents, la promotion de l'égalité des chances.

M. Rodríguez a toutefois souligné que la charge de la dette diminue les ressources qui pourraient être affectées à la poursuite des objectifs de Copenhague, tels que l'éradication de la pauvreté et la création d'emplois durables. Partant, il a émis l'espoir que la communauté internationale prendra des mesures permettant de résoudre le problème de la dette des pays en développement. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité d'édifier un système financier international plus fort, plus stable, plus démocratique et transparent. M. Rodríguez a déclaré que nous vivons dans un monde de plus en plus interdépendant, notamment en raison du processus de mondialisation. Ce processus doit être au service de la promotion de l'équilibre social et non pas source d'inégalité. En effet, une grande partie des pays en développement ne bénéficient pas des avantages de la mondialisation. Partant, le Vice-président du Venezuela a appelé de ses voeux la recherche par la communauté internationale de réponses nouvelles permettant de corriger les effets pervers de la mondialisation et d'étendre ses bénéfices à l'ensemble des pays. Il a déclaré que les préoccupations liées au développement social doivent figurer en bonne place dans les priorités des gouvernements. Dans ce contexte, il a particulièrement insisté sur la nécessité de renforcer les institutions sociales et la coopération dans ce domaine.

M. JEAN-FRANÇOIS NTOUTOUME EMANE, Premier ministre du Gabon, a déclaré que cinq ans après le sommet de Copenhague, le bilan est plus que mitigé, les promesses faites n'ayant pas été toutes tenues. La crise qui a frappé son pays de plein fouet, doublée d'un lourd endettement, l'a conduit à se tourner vers les institutions de Bretton Woods. Son Gouvernement a ainsi défini des objectifs prioritaires dans sa lutte contre la pauvreté dont les composantes les plus importantes sont la lutte contre le chômage, l'intégration sociale, la promotion de la femme et l'accès à un enseignement et à des soins de santé de qualité.

Le Gabon connaît aujourd'hui un taux de chômage élevé de l'ordre 18% touchant majoritairement les femmes et les jeunes. Le Premier ministre a souligné que les femmes constituent 60% de la population la plus touchée par la pauvreté. C'est pourquoi le gouvernement oriente son action en prenant compte de la notion d'égalité entre les sexes dans l'élaboration des dispositions législatives, en mettant l'accent sur la formation et l'éducation des femmes, et en favorisant pour les femmes des activités génératrices de revenus. En dépit de la volonté du Gouvernement du Gabon, malheureusement desservie par un contexte économique difficile, les dotations budgétaires allouées ces dernières années aux secteurs sociaux sont encore insuffisantes et il est indispensable de mobiliser des ressources supplémentaires au bénéfice des secteurs cibles, afin d'améliorer l'efficacité des dépenses et de favoriser un accès optimal des populations aux services sociaux de base.

Le Premier ministre gabonais a insisté sur la détermination de son pays à continuer d'oeuvrer à la promotion sociale en dépit de l'entrave majeure que constitue le fardeau de la dette, problème qui doit être apprécié non seulement à travers les indicateurs socio-économiques mais également à travers les efforts que déploie un pays dans sa lutte contre la pauvreté. Il a rappelé que la dette apparaît, à l'instar de la pauvreté dont elle constitue l'un des facteurs les plus déterminants, comme une menace permanente contre la stabilité des États. Le moment est venu de mettre en pratique les engagements pris au sujet de l'Aide publique au développement : l'objectif des 0,7 % du PNB des pays riches consacrés à cette aide.

M. FREDERICK CHILUBA, Président de la Zambie, a estimé que la session extraordinaire devrait s'efforcer de traiter de manière décisive le problème des inégalités qui subsistent dans le système économique mondial et qui ont maintenu des millions de personnes dans une pauvreté abjecte pendant qu'une petite minorité vivait dans l'opulence. La bonne gestion des affaires publiques, la pleine participation de la société civile ainsi que la promotion de cadres juridiques et politiques centrés sur l'être humain doivent être les pierres angulaires des efforts en matière de développement. L'examen des résultats de Copenhague se déroulent sur la toile de fond d'une dégradation des termes de l'échange qui se produit au détriment des pays en développement, en particulier en Afrique. Or, cette situation a eu des effets particulièrement dévastateurs pour la Zambie, a souligné le Président Chiluba. La capacité de la Zambie de s'acquitter du service de sa dette extérieure continue de se réduire, ce qui limite d'autant sa capacité à promouvoir son développement social. La Zambie est exposée à des chocs extérieurs brutaux liés aux conflits régionaux, aux hausses de prix du pétrole, aux chutes de prix du cuivre, aux conditions météorologiques difficiles et aux crises financières. Il faudrait que le pays développe sa capacité d'anticipation de ces phénomènes.

La pauvreté en Afrique et dans la plupart des pays du tiers monde n'est pas un accident, a déclaré le Président zambien. Il a affirmé qu'elle est le résultat de rapports mondiaux dans le cadre desquels les intérêts économiques de chacun ont pris le pas sur la raison et sur la morale. Si les instruments qui gouvernent les institutions donatrices multilatérales sont devenus une entrave à la prise en compte du développement social dans les politiques d'ajustement structurel, peut-être la communauté internationale pourrait-elle envisager une action urgente afin d'éviter que ces programmes ne deviennent l'instrument d'un appauvrissement encore plus important. Le Président Chiluba a souligné que le fardeau de la dette continue de peser sur un grand nombre de pays en développement, en particulier en Afrique. Il a rappelé que cette session extraordinaire n'est pas réunie pour renégocier Copenhague mais pour assurer, par le lancement de nouvelles initiatives, la levée des obstacles entravant la mise en oeuvre des engagements pris il y a cinq ans.

Mme ASTRID FISCHEL VOLIO, Vice-Présidente du Costa Rica, a rappelé l'engagement de son pays en faveur du développement humain et de la promotion du bien être des citoyens. S'inspirant des résultats du Sommet de Copenhague, le Costa Rica a défini et mis en oeuvre une politique de développement social, mesurée par des indicateurs de croissance économique très satisfaisants. Les résultats obtenus en matière d'emploi sont également satisfaisants puisque le taux de chômage est actuellement de 5% et le taux de sous-emploi inférieur à 7%.

La Vice-Présidente du Costa Rica a assuré que son pays a fait de la lutte contre la pauvreté un impératif éthique, social, politique et économique. Les mesures adoptées ont permis de faire passer de 30 à 20% le nombre de familles vivant dans la pauvreté. Mme Fischel a également évoqué la mise en oeuvre d'un Plan de solidarité nationale ainsi que d'un projet intitulé "Triangle de solidarité" qui vise à promouvoir la culture de la participation dans le pays. Ce projet a pour but de favoriser une action conjointe des administrations locales et des institutions gouvernementales au service de l'amélioration de la qualité de vie des citoyens. Mme Fischel a déclaré que l'aspiration au développement, au progrès des familles, à la solidarité sociale ont toujours été et demeurent des priorités de l'agenda national au Costa Rica.

Mme VALENTINA MATVIENKO, Présidente adjointe du Gouvernement de la Fédération de Russie, a déclaré les changements radicaux dans les conditions de vie des Russes en raison de la mondialisation n'ont pas apporté de remèdes aux difficultés, mais créent au contraire de nouveaux risques et lancent de nouveaux défis. La menace d'une catastrophe mondiale liée à une éventuelle confrontation nucléaire a été remplacée par de terribles réalités telles que le terrorisme transnational et le crime organisé, le séparatisme militant, les conflits inter- ethniques et les trafics d'armes et de stupéfiants. Tous les pays n'ont pas eu la chance d'accéder aux progrès technologiques et scientifiques. Un nombre limité de pays, où habite le "milliard doré" de la population mondiale, a seul pu atteindre un nouveau niveau élevé de prospérité. La majorité des autres États n'est pas sortie du XXe siècle avec une meilleure qualité de vie. L'écart entre les plus pauvres et les plus riches se creuse et, pour surmonter cet état de fait, il nous faut revoir dans sa totalité l'architecture moderne de la coopération internationale. L'élément social doit être plus clairement reflété dans les activités des organisations économiques et financières internationales. La mondialisation doit être un outil favorisant le progrès social et économique afin que tous les pays puissent jouir de ses bénéfices. À cet égard, les Nations Unies devraient être un élément clé dans la poursuite de cet objectif.

Mme Matvienko a déclaré que la Russie a parfaitement conscience de ne plus être en mesure en survivre à un autre choc social ou à une nouvelle restructuration radicale. Son gouvernement est en train de conclure l'élaboration d'une stratégie de développement national à long terme destinée à surmonter les conséquences de la récente crise et à créer un environnement favorable à une croissance économique et sociale efficace.

M. EDUARDO FERRO RODRIGUES, Ministre du travail et de la solidarité du Portugal, a réitéré, au nom de l'Union européenne et des pays associés, la validité du principe d'une société pour tous en faveur duquel s'étaient engagés les chefs d'État et de gouvernement lors du Sommet social. Ce principe reste en effet valable même si, au cours de ces cinq dernières années, le monde a dû faire face à de nouveaux défis ayant un impact sur le développement social. La mondialisation, les crises économiques et le nouvel ordre économique sont autant de phénomènes qui requièrent des solutions urgentes. Si des progrès ont pu être enregistrés dans certains domaines depuis 1995, de nouvelles initiatives s'avèrent indispensables. À cet égard, le Conseil européen a fixé en mars dernier un nouvel objectif stratégique pour l'Union européenne dans les dix années à venir : devenir une économie plus compétitive et plus dynamique capable de promouvoir une croissance économique durable qui s'accompagne d'une cohésion sociale accrue et d'un nombre plus élevé d'emplois de qualité.

L'Union européenne tient à réitérer son engagement en faveur d'une réduction de moitié, d'ici 2015, du nombre de personnes vivant dans l'extrême pauvreté. Soulignant que l'Union européenne attache la plus grande importance à la ratification universelle et à la pleine mise en oeuvre des conventions de l'Organisation internationale du travail concernant les droits fondamentaux des travailleurs, M. Ferro Rodrigues a souligné qu'elle considère que le plein emploi et un travail digne pour tous constituent des objectifs prioritaires pour assurer l'éradication de la pauvreté et l'intégration sociale. Il a rappelé que les investissements réalisés dans les secteurs de l'éducation et de la santé produisent de meilleurs résultats socio-économiques que tout autre investissement. M. Ferro Rodrigues a par ailleurs rappelé que l'Union européenne s'efforce d'assurer la pleine et entière application de l'initiative améliorée en faveur des pays pauvres lourdement endettés. Afin d'évaluer les progrès réalisés et ce qui reste à faire en matière de développement social, il est indispensable d'élaborer un ensemble d'indicateurs acceptés par tous aux niveaux national et international. À cet égard, les organes et institutions concernés des Nations Unies, tels que le Programme des Nations Unies pour le développement et les institutions de Bretton Woods, ainsi que les autres organisations internationales telles que l'Organisation pour la coopération et le développement économique, devraient soutenir encore davantage les efforts visant à mettre au point de tels indicateurs.

M. MOZAMMEL HOSSAIN, Ministre du bien être social du Bangladesh, a évoqué les mesures prises par son gouvernement pour mettre en oeuvre les engagements pris lors du Sommet mondial de Copenhague pour le développement social. Un plan d'action national est entré en application en 1997 sous la responsabilité d'un comité composé de représentants de différents ministères concernés et de représentants de la société civile. Le Bangladesh a fait de la lutte contre la pauvreté, de la promotion de l'emploi productif et de l'intégration sociale ses priorités, a souligné M. Hossain. Dans ce contexte, il a insisté sur la réussite du programme de microcrédit mis en oeuvre au Bangladesh.

Le Ministre a souligné que la création d'un environnement favorable au développement social ne peut se faire sans le concours de la communauté internationale. Dans ce contexte, il a rappelé que la Déclaration et le Programme d'action de Copenhague ont défini des engagements spécifiques afin de renforcer la coopération internationale, régionale et sous-régionale, au service du développement social. Dans ce contexte, il a souligné le peu de progrès réalisés en matière d'aide au développement. Il a également souligné le fait que les pays pauvres lourdement endettés restent confrontés aux problèmes de l'accès au marché ou souffrent de déficit en ce qui concerne le transfert de technologie. Si des mesures urgentes ne sont pas prises, les objectifs de Copenhague ne pourront être atteints par les pays les plus pauvres. Dans ce contexte, M. Hossain a émis l'espoir que la prochaine rencontre du G8 sera l'occasion pour les pays les plus industrialisées d'alléger la dette des pays les plus pauvres.

Le Ministre du bien être social du Bangladesh a souligné l'utilité qu'il y aurait à prendre de nouvelles initiatives. Il a ainsi plaidé en faveur d'un renforcement des moyens de suivi des conférences des Nations Unies par le Conseil économique et social. Il a également insisté sur la nécessité d'établir des partenariats effectifs pour le développement social en renforçant l'interaction entre les institutions du système des Nations Unies. M. Hossain a également insisté sur la nécessité pour les États de s'acquitter de leurs engagements au titre de l'aide au développement. Il a enfin suggéré la création d'un Fonds de la mondialisation afin de remédier aux problèmes découlant de la mondialisation de l'économie.

M. JAIME EDUARDO RUIZ LLANO, Conseiller politique spécial du Président de Colombie, a déclaré que les efforts réalisés par la Colombie pour apporter des solutions aux différents problèmes structurels qui limitent les possibilités de progrès du niveau de vie des citoyens colombiens se sont heurtés à une situation de violence liée pour une large part au conflit interne et au développement sans précédent du trafic de la drogue qui a entravé le développement du pays. Cette réalité est un véritable cercle vicieux dans lequel la violence se transforme en obstacle au développement durable de la société colombienne.

M. Ruiz Llano a estimé qu'il faudrait un nouveau cadre conceptuel pour définir et évaluer le développement social dans ces circonstances particulières. En Colombie, la violence et le trafic des stupéfiants ont freiné le processus de développement social et entraîné d'énormes coûts économiques et sociaux car les dépenses s'élèvent annuellement à 1000 millions de dollars dans des activités de lutte contre les narcotraficants. Le trafic de stupéfiants non seulement pénètre la société et ses institutions en générant de la corruption et détruisant les valeurs, mais concerne également les activités des groupes armés dont le financement provient essentiellement du commerce de la drogue. Au cours des cinq dernières années, les cultures illicites se sont multipliées et avec elles s'est amplifiée la situation de violence.

Mme MARTINE AUBRY, Ministre de l'emploi et de la solidarité de la France, a déclaré que les manifestations qui se déroulent cinq ans après se doivent d'être à la hauteur des actes fondateurs. Soulignant que le bilan de Copenhague a ses ombres et ses lumières, elle a déclaré que la progression des inégalités, tant entre les États qu'au sein des États eux-mêmes, constitue l'un des constats les plus inquiétants. Mme Aubry a mis l'accent sur les résultats remarquables de la présidence portugaise de l'Union européenne, qui a manifesté un souci constant de jeter des ponts entre le Nord et le Sud, et a indiqué que la future présidence française de l'Union, qui prendra effet le mois prochain, s'inscrira dans ses pas.

À l'occasion du renouvellement des engagements souscrits au Sommet de Copenhague, Mme Aubry a témoigné de la volonté de la France de voir des progrès s'accomplir dans quatre directions : la lutte contre la pauvreté et l'exclusion; la promotion et la mise en oeuvre effective des droits de l'homme, des droits économiques, sociaux et culturels (en assurant notamment la mise en oeuvre de la déclaration de l'OIT sur les droits fondamentaux des travailleurs, sans pour autant conduire les pays riches à imposer un protectionnisme déguisé); la mise en oeuvre rapide de l'initiative en faveur des pays pauvres lourdement endettés (il convient notamment de donner un contenu concret à une gestion plus sociale des programmes d'ajustement structurel); l'approfondissement de la stratégie en faveur des pays les moins avancés, particulièrement en Afrique, à l'occasion de la prochaine conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés. Sur ce dernier point, la France militera notamment pour une accentuation de la lutte contre les grandes pandémies et pour l'accès des pays les plus pauvres aux médicaments. Sur tous ces points, a déclaré Mme Aubry, il existe à la fois des éléments intéressants et même des propositions audacieuses dans les documents qui sont soumis à l'Assemblée générale. Elle a exprimé l'espoir que ces éléments se retrouveront dans les conclusions de la session extraordinaire. N"ous ne pouvons pas décevoir", a-t-elle poursuivi. "C'est notre crédibilité qui est en cause et celle des Nations Unies", a-t-elle conclu, avant de faire observer "que c'est dans la dernière ligne que s'opèrent les progrès décisifs".

Mme ANNE KONATÉ, Ministre de l'économie et des finances du Burkina Faso, a déclaré que 5 ans après le Sommet de Copenhague, force est de constater que si des progrès ont été réalisés, des efforts restent à faire car la pauvreté n'a pas diminué et a même augmenté par endroits. Évoquant le bilan africain au regard des objectifs de Copenhague, la Ministre a affirmé que, de façon générale, les indicateurs macro-économiques ont progressé. Elle a ainsi souligné que son propre pays a connu des progrès non négligeables dans le domaine social. La Ministre a expliqué que trois phénomènes ont donné une ampleur nouvelle au phénomène de la pauvreté : le déchaînement des conflits, l'épidémie de sida et la dégradation de l'environnement. Ces trois phénomènes, a-t-elle déclaré, ont fait replonger des millions d'individus dans la pauvreté au cours des 15 dernières années. C'est pourquoi l'élimination de la pauvreté s'impose de plus en plus comme un défi majeur.

La Ministre a insisté sur la nécessité de renforcer la coopération entre les pays africains afin de renforcer leur compétitivité sur les marchés mondiaux. Dans ce contexte, elle a évoqué l'adoption en septembre dernier de la "Déclaration de Ouagadougou" qui vise notamment à promouvoir les réformes économiques de soutien à la croissance, à renforcer le dialogue et la collaboration entre tous les acteurs oeuvrant pour la réduction de la pauvreté, à renforcer les principes et pratiques démocratiques et la bonne gouvernance.

L'une des contraintes à laquelle fait face l'Afrique reste l'insuffisance des ressources financières, a souligné Mme Konaté. De nombreux pays n'ont pas encore atteint l'objectif de 20% fixé dans le cadre de l'initiative 20/20, l'essentiel des ressources étant consacré au règlement du service de la dette extérieure. Partant, elle a souligné que l'allégement de la dette permettrait d'augmenter le financement des secteurs sociaux. Elle a par ailleurs affirmé que si les pays concernés avaient tenu leur promesses en matière d'aide au développement, les ressources mobilisées auraient suffi à éradiquer l'extrême pauvreté.

Mme MAJ-INGER KLINGVALL, Ministre de la coopération pour le développement, la migration et l'asile politique de la Suède, a déclaré que les instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme ont clairement établi qu'il incombe à chaque gouvernement de garantir à chaque membre de sa société le respect de ses droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels. Pour terrasser la pauvreté et l'exclusion sociale, il faut absolument lier le développement social, politique, économique et environnemental et favoriser un fort partenariat entre les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les autres acteurs de la communauté internationale en soulignant que dans ce contexte, le rôle des Nations Unies est un élément clé. Le Sommet de Copenhague a permis aux dirigeants du monde d'explorer pour la première fois l'interaction entre la croissance économique et le développement social. Depuis, des progrès ont été réalisés et la réduction de la pauvreté est devenue une priorité sur le calendrier de la communauté internationale.

La Ministre a également souligné que l'après Sommet a vu certains reculs dans des régions où le sida et les conflits armés ont eu des effets dévastateurs. Davantage d'actions doivent être entreprises et la coopération internationale renforcée. À cet effet, la Ministre a souligné l'importance de l'engagement des pays développés à consacrer 0,7% de leur PNB à l'aide au développement, de l'allégement de la dette qui pèse de plus en plus lourd sur les pays en voie développement, de l'amélioration des conditions de travail des travailleurs du monde entier et enfin de la question de l'égalité entre les sexes. Pour conclure, Mme Klingvall a déclaré que l'éradication de la pauvreté nécessite une volonté politique et un engagement réel. Une distribution plus juste des richesses est un fondamentale à l'établissement d'une société plus juste et plus équitable.

M. KRISHNA CHANDRA PANT, Ministre et Président adjoint de la Commission du plan de l'Inde, a déclaré que l'examen des résultats enregistrés ces cinq dernières années en matière de développement social indique que les objectifs fixés à Copenhague n'ont été que partiellement atteints. Désormais, le défi est de protéger les systèmes sociaux et d'assurer que chaque société, même la plus vulnérable, tire parti de la mondialisation. Commentant la tendance récente selon laquelle on attribue de plus en plus les lacunes en matière de développement aux dysfonctionnements qui existent dans le domaine de la bonne gouvernance, le ministre a fait observer que les gouvernements sont rarement les acteurs les plus puissants, y compris dans leur propre pays. Il a estimé que la présente session extraordinaire de l'Assemblée générale devrait se concentrer sur les secteurs où les progrès seraient impossibles sans soutien international. L'éradication de la pauvreté est à cet égard l'un des domaines où la coopération internationale s'avère essentielle si l'on veut assurer la réalisation du développement social.

Insistant sur l'importance du problème des ressources, M. Chandra Pant a souligné que le Forum sur l'éducation mondiale qui s'est tenu à Dakar en avril dernier a estimé à 8 milliards de dollars supplémentaires le montant annuel nécessaire pour assurer la réalisation de l'objectif de l'école primaire universelle. Sur les 60 milliards de dollars dépensés chaque année pour la recherche dans le domaine de la santé, seuls 10% sont consacrés aux problèmes endémiques dans les pays en développement. L'absence de ressources consacrées à la réalisation de ces deux objectifs sociaux témoigne de l'importance de l'aide publique au développement en matière de développement social. Or, le montant de l'aide publique au développement ne cesse de diminuer. Les progrès en Afrique seront la clef du succès du monde en développement. Il convient également de mettre sur pied des stratégies internationales visant à faire échec aux fléaux sociaux tels que le terrorisme, le crime transnational, le trafic de stupéfiants et la xénophobie. Dans le village planétaire actuel, la paix et le développement durable reposeront en fin de compte sur notre sensibilité aux préoccupations d'autrui, a estimé M. Chandra Pant.

Mme DONNA SHALALA, Secrétaire d'État à la santé et des services humains des États-Unis, a rappelé les propos tenus par le Vice-Président des États Unis lors du Sommet de Copenhague en 1995 : "La croissance économique ne peut être durable que si ses fruits sont réinvestis de façon continue dans le potentiel humain". Cinq ans après Copenhague, la pauvreté, le manque d'éducation, les maladies infectieuses, les violences à l'égard des femmes, le chômage, sont toujours présents dans le monde. Les États-Unis sont prêts à oeuvrer avec tous leurs partenaires internationaux pour favoriser la croissance économique, l'intégration sociale et la santé publique dans le monde. Les États-Unis sont convaincus, s'agissant de leur action en faveur du développement économique et social, que les pays pauvres ne doivent pas être considérés comme des bénéficiaires passifs de l'aide mais comme des acteurs maîtres de leur propre avenir.

S'agissant de son pays, Mme Shalala a rappelé que les États-Unis connaissent la phase de croissance économique la plus longue de son histoire, ce qui a permis de ramener le taux de chômage à un niveau inégalé depuis 30 ans. Il reste pourtant beaucoup à faire a-t-elle reconnu, notamment en matière de discrimination fondée sur la race et le sexe, ou en ce qui concerne les soins de santé. Dans ce contexte, elle a souligné que le Président Bill clin ton s'est fixé pour but en 1998 de mettre fin aux disparités en matière de santé en fonction de l'origine ethnique.

Évoquant les défis à relever pour atteindre les objectifs fixés à Copenhague il y a 5 ans, elle a notamment affirmé que la liberté est l'essence du développement durable. Il est impossible de mettre fin à la pauvreté sans accorder la liberté politique et la liberté d'expression, et sans une société civile dynamique. Mme Shalala a également déclaré que le temps est venu de répartir plus équitablement les bénéfices tirés de la mondialisation.

M. MARIO PALMA ROJO, Vice-Ministre pour le développement régional du Mexique, a déclaré que le développement social passe par la disponibilités de ressources, mais aussi par plusieurs autres facteurs, essentiels pour traduire la politique sociale en réalité concrète, en un bien-être tangible et quotidien pour les personnes. Ces facteurs comprennent l'intégralité des actions, leur pertinence, la convergence des divers niveaux de gouvernement et la décentralisation des actions, ainsi que l'évaluation des politiques et la transparence dans l'utilisation des ressources, en particulier grâce à la participation de la société civile. La combinaison de ces facteurs doit permettre à la politique de développement social d'être efficace dans l'accomplissement de ses objectifs. La somme de tous ces efforts et de ces volontés contribue à nourrir le combat contre la pauvreté et ses conséquences qui affectent la santé, l'alimentation, l'éducation et les opportunités de travail des individus et de leurs familles, a déclaré le ministre. Pour la combattre, des programmes universels sont nécessaires, à travers lesquels le respect des droits sociaux sont garantis à tous les individus, avec des programmes destinés aux groupes les plus démunis afin de rompre le cercle vicieux de la pauvreté.

M. Palma a également présenté un bilan de la situation dans son pays depuis le Sommet de Copenhague et déclaré qu'aujourd'hui l'espérance de vie des Mexicains s'élève à 75 ans, qu'en 1998 le Mexique a enregistré un taux de mortalité des moins de 5 ans de 28 pour mille, un chiffre de 17 points inférieur à la moyenne fixée à 45 pour mille par le Sommet, la mortalité des moins de un an s'est élevée en 1998 à 24 pour mille, soit 11 points de moins que la moyenne fixée à 35 pour mille lors du Sommet. En matière d'emploi, le taux de chômage en zones urbaines a été réduit de façon significative de 6,2% à 2,5% de la population économiquement active, c'est à dire qu'il a été réduit de presque quatre points en cinq ans. Le Gouvernement mexicain est conscient de la nécessité d'un effort soutenu pour résoudre les multiples facettes de la pauvreté et la marginalisation qui en découle.

M. HANS J.HEINEMANN (Pays-Bas) a affirmé que pour son pays, le Sommet social de Copenhague a marqué la reconnaissance du fait que la prospérité et la pauvreté coexistent, même dans un pays riche comme les Pays-Bas. Ce Sommet a marqué la fin de la complaisance et le début d'un programme global générateur de travail et de revenus. Depuis le Sommet social de 1995, la communauté internationale a pris davantage conscience que le progrès économique ne devrait pas se produire au détriment des individus. Elle a également pris conscience de l'importance d'un travail décent pour mener une vie décente. Pourtant, depuis le Sommet social, le nombre de pauvres a augmenté à l'échelle mondiale, tout comme les inégalités entre les pays et au sein des pays. En outre, si les opportunités d'emploi se sont accrues dans les pays en développement, la plupart concernaient les secteurs informels, peu rémunérateurs et non protégés.

Aussi, s'avère-t-il urgent de mettre au point des stratégies en faveur du plein emploi et de la promotion d'un travail digne. Sur ce dernier point, les Pays-Bas lancent un appel en faveur de la ratification universelle et de la mise en oeuvre intégrale des conventions de l'Organisation internationale du travail, notamment celle portant sur l'élimination des pires formes de travail des enfants. La santé, l'éducation et le travail ainsi que l'assurance d'une vie meilleure sont des éléments étroitement liés les uns aux autres. Pour assurer la mise en oeuvre des engagements pris en matière de développement social, l'aide du secteur privé s'avère indispensable. La bonne gouvernance est également une condition préalable pour le développement social. Les Pays-Bas lancent également un appel à tous les gouvernements afin qu'ils respectent l'accord concernant l'aide publique au développement. Cinq ans après Copenhague, les Pays-Bas sont plus que jamais convaincus que la coopération est absolument nécessaire, tant au niveau national qu'au niveau international. En matière de développement, l'allégement de la dette est un point essentiel pour les pays pauvres lourdement endettés, qui doivent fonder leur politique de développement sur des stratégies de réduction de la pauvreté élaborées par les pays concernés eux-mêmes.

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