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DH/269

LES EXPERTS ESTIMENT INSUFFISANTES LES REPONSES DE LA MONGOLIE A LEURS QUESTIONS SUR LE STATUT DE LA FEMME, SUR LES MINORITES, ET SUR LA LIBERTE RELIGIEUSE

23 mars 2000


Communiqué de Presse
DH/269


LES EXPERTS ESTIMENT INSUFFISANTES LES REPONSES DE LA MONGOLIE A LEURS QUESTIONS SUR LE STATUT DE LA FEMME, SUR LES MINORITES, ET SUR LA LIBERTE RELIGIEUSE

20000323

Le comité invite l'Etat partie à apporter des réponses précises à ces questions dans son prochain rapport

Le Comité des droits de l’homme a poursuivi et terminé ce matin l’examen du quatrième rapport périodique de la Mongolie. Les experts ont d’abord entendu les réponses de la délégation de la Mongolie aux questions qui lui avaient été posées hier après-midi. Après avoir estimé que les informations fournies en réponse à ces questions étaient d’un niveau généralement insuffisant, les experts ont, à nouveau, demandé des éclaircissements sur les questions touchant notamment à la discrimination observée contre les femmes dans le domaine économique et surtout dans le secteur privé. Ils ont souhaité que la délégation donne des informations précises sur le programme national en faveur de l’avancement des femmes dont il est fait mention dans le rapport. M. Dash Ganbold, Ministre de la justice de la Mongolie et Chef de la Délégation, a regretté que des problèmes de langue et de traduction de documents aient abouti à une mauvaise compréhension des informations fournies par son pays au Comité. Le programme en faveur de l’avancement des femmes initié par le gouvernement a connu quelques difficultés de mise en œuvre, a-t-il dit, en précisant que ce programme ne vise pas à redéfinir le statut général de la femme dans la société mongole. C’est plutôt une forme de programme d’action destiné à améliorer les conditions de vie des femmes et à aider notamment celles qui sombrent dans la prostitution sous la coupe de proxénètes, dont un certain nombre sont, malheureusement, de sexe féminin. Le gouvernement lutte aussi en faveur de l’amélioration du statut de la femme à travers la mise en œuvre d’une nouvelle loi qui vise à combattre la discrimination dont les femmes peuvent être victimes dans le secteur économique privé, a dit le Ministre de la justice. Il a ajouté que des efforts étaient, d’autre part, déployés pour dispenser des soins de santé génésique à la population féminine et réduire le taux élevé de décès dus à des accouchements ou des avortements.

En réponse aux nombreuses questions des experts sur les droits des minorités et la liberté de religion, la délégation de la Mongolie a affirmé qu’il n’y avait pas réellement de problème de minorités dans le pays. La population kazakh y est majoritaire, a dit M Ganbold. Elle pratique généralement la religion bouddhiste, mais cette pratique religieuse ne lui donne droit à aucun avantage particulier de la part de l’Etat. Le Ministre a assuré que l'Etat veille au respect des droits des minorités dans un pays qui connaît une grande variété de coutumes et de langues au sein même de sa population majoritaire.

Dans ses remarques de conclusion, Mme. Cecilia Medina Quiroga, Experte du Chili et Présidente du Comité, a regretté que les réponses de la délégation de la Mongolie soient restées vagues, alors que des questions précises lui ont été posées. Elle a proposé que dans son prochain rapport, la Mongolie inclue des informations claires et détaillées sur toutes les questions que le Comité a soulevées lors de l’examen de son quatrième rapport périodique. Les services du Haut Commissariat aux droits de l’homme et de l’ONU sont à la disposition de la Mongolie et des autres Etats parties, a-t-elle rappelé. Elle a invité la délégation à préparer un cinquième rapport périodique consistant et à ne pas hésiter à faire appel à l’aide des Nations Unies et de leurs organes dans cette démarche.

Le Comité reprendra ses travaux demain vendredi 24 mars à 10 heures.

QUATRIEME RAPPORT PERIODIQUE DE LA MONGOLIE (CCPR/C/103/Add.7)

Suite des réponses de la délégation aux questions des experts

M. DASH GANBOLD, Ministre de la justice de la Mongolie, a déclaré que l’égalité entre les hommes et les femmes est respectée rigoureusement et inscrite dans la loi mongole. Ainsi, les hommes célibataires qui ont un enfant ont droit aux mêmes congés parentaux que les hommes mariés. Les femmes ont droit à la pension plus tôt que les hommes, a-t-il dit, à titre d'exemple. Les différenciations relevées hier par les experts du Comité s'expliquent par la place spéciale que la Mongolie accorde aux femmes, a-t-il ajouté. M. Dash Ganbold a attribué la violence au foyer et celle exercée à l’égard des enfants mineurs à l’alcoolisme et au chômage. Le Gouvernement appuie les activités des organisations non gouvernementales qui travaillent dans ces domaines, a-t-il déclaré. Il a précisé que 70 % environ des personnes qui travaillent dans le domaine de la santé étaient des femmes. Le Ministre de la justice a indiqué que la Cour constitutionnelle veillait à l’application sans discrimination des dispositions de la Constitution et contrôlait toute violation de celle-ci. L’expérience des dernières années montre que cette Cour constitutionnelle s’est révélée très efficace, a-t-il souligné.

M. Ganbold a indiqué que le Grand Khoural d’Etat était habilité à nommer les magistrats en fonction des besoins de chaque région. Nous respectons l’indépendance des tribunaux, a-t-il souligné. La Constitution stipule que personne en dehors du Président de la république, du Grand Khoural d’Etat ou du Ministre de la justice n’est habilité à intervenir dans le fonctionnement des tribunaux. Le Conseil de la magistrature veille à l’indépendance de celle-ci sous le contrôle du Parlement et avec l’aide des magistrats eux-mêmes. Lorsqu’un juge enfreint la loi, il est condamné en vertu de la Constitution ou de la loi sur la justice.

Le Code civil mongol prévoit que toute violation des droits de l'homme d'un citoyen soit obligatoirement sanctionnée, notamment par une amende. Les autorités départementales surveillent l’application de toutes les décisions judiciaires en Mongolie. La législation mongole prévoit des peines de prison encore plus dures pour les infractions graves, y compris les tentatives de se soustraire à la justice. Le représentant a reconnu que des employés de police avaient commis certaines violations des droits de l'homme contre des personnes en détention provisoire. Il a admis que la période de détention provisoire devrait être réduite. Le représentant a déclaré que, selon la loi, toute personne, sans exception, a droit à une assistance juridique dès le début de la procédure judiciaire. Les organes s’occupant de la détention provisoire sont contrôlés par le Ministère de la justice. La pratique montre que les autorités ne réagissent pas toujours dans les meilleurs délais aux plaintes des citoyens, a aussi admis le représentant. Le Gouvernement envisage donc la création d’un organe chargé de recevoir les plaintes concernant des instances administratives. Les conditions de détention, elles sont régies par la loi, cependant les conditions sanitaires en détention ne sont pas encore conformes aux directives du ministère de la santé. Il a précisé que des conditions spéciales étaient prévues pour les alcooliques chroniques.

Le Gouvernement ne peut, en ce moment, adopter une attitude positive en faveur de l’abolition de la peine de mort. Au vu de la criminalité qui sévit dans le pays, le Parlement aussi a lui aussi jugé prématurée l'abolition de la peine capitale, a-t-il dit. En réponse à une question du comité, il a précisé que les personnes qui détiennent un secret d’Etat ne pouvaient pas sortir du territoire mongol pendant trois ans. D’après les lois en vigueur, les droits et obligations des citoyens étrangers sont les mêmes que ceux des citoyens mongols, mais les étrangers ne peuvent être élus dans des organes d’Etat. Le représentant a indiqué que la Mongolie n’était pas encore prête à adhérer à la Convention sur le statut des réfugiés. M. Dash Ganbold a assuré, en conclusion, le Comité que son Gouvernement étudierait soigneusement toutes les conclusions qui seraient présentées à l’avenir par cet organe conventionnel.

Nouvelle série de questions des experts

M. DAVID KRETZMER, Expert d’Israël, a estimé que les réponses fournies n’avaient pas donné suffisamment d’éclaircissements sur le statut des femmes. Au paragraphe 18 du rapport, il est fait mention d’un “programme national pour l’avancement des femmes. Où en est ce programme? Que dit la loi mongole à propos du viol, et quelles sont les preuves à apporter devant un tribunal pour démontrer la culpabilité d’un homme en cas de viol?

LORD COLVILLE, Expert du Royaume-Uni, a demandé comment se déroulait l’application des peines et des sentences en Mongolie, cette application semblant relever de l’exécutif. Que doit faire un individu pour voir appliquée une peine qui a été prononcée en sa faveur? Combien de peines de réparation ont été prononcées pour abus de l'Etat à l'encontre de citoyens?

M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI, Expert de l’Inde, a demandé quel était le niveau d’indépendance des magistrats. Sont-ils nommés à vie? Qui peut les révoquer? D’autre part, il ne semble pas que l’article 11 du Pacte (interdiction de la privation de liberté pour le fait de ne pas être en mesure d'exécuter une obligation contractuelle) soit respecté. Il semble que rien dans la Constitution mongole ne garantisse ce droit.

Reprenant la parole pour répondre aux questions des experts, M. DASH GANDOLD, Ministre de la justice de la Mongolie, a dit que le gouvernement avait adopté un programme spécial en ce qui concerne la protection des femmes. Mais, malheureusement, il semble que les documents envoyés par la Mongolie au Comité n’aient pas été correctement traduits, d’où la mauvaise compréhension qu’en ont les membres du Comité. Il faut savoir que le programme adopté par le Gouvernement en faveur des femmes a connu certains problèmes dans sa mise en œuvre. Ainsi, il aborde notamment la situation des femmes prostitués. Or, on a découvert malheureusement que cette activité était aussi parfois dirigée par d’autres femmes.

En ce qui concerne le mode de désignation des juges, M. Ganbold a expliqué que le Conseil général des juges est composé du Juge général, de tous les organes de la magistrature, du Procureur général et du Ministre de la justice. Les membres des organes faisant partie de ce Conseil sont élus au scrutin secret et c’est le Conseil qui reçoit et examine les candidatures aux postes de juges. Les juges sont nommés à vie et ne peuvent être révoqués que s’ils commettent une violation flagrante de la loi. Un juge peut cependant décider de lui-même de quitter sa fonction. En ce qui concerne la mise en application des décisions de

justice, c’est un Département, organe d’Etat, qui s’en charge dans le respect de la loi. Le Département d’application des peines applique de façon stricte les sentences telles qu’énoncées par les tribunaux. Les fonctionnaires de ce Département sont cependant, en trop petit nombre, et n’ont donc pas encore pu appliquer toutes les décisions judiciaires récentes. Le Ministre a assuré que le Gouvernement comptait renforcer cette structure. Il a précisé que lorsque la partie défendante n’avait pas les moyens de payer des dédommagements, on permettait que soit étalée la période de mise en application de la peine prononcée. Le Ministre a reconnu, par ailleurs, que la loi mongole ne contenait pas de disposition en ce qui concerne l'interdiction de la privation de liberté pour ne pas être en mesure d'exécuter une obligation contractuelle

M. Ganbold a précisé, d'autre part, qu’une loi spéciale garantissait le secret de la vie privée et que les atteintes au secret de la vie privée étaient punies par des amendes. En ce qui concerne la formation dans le domaine des droits de l'homme, le Ministre a indiqué que les gardiens de prison suivaient un programme de formation spécial. Des organisations non gouvernementales organisent également des séminaires sur les questions des droits de l'homme. En outre, une brochure sur les droits de l'homme a été distribuée, en 1992 et en 1999, à tous les services de l’Etat.

M. ROMAN WIERUSZEWSKI, Expert de la Pologne, a demandé quel est le degré d'autonomie du Parquet vis-à-vis du Gouvernement.

M. LOUIS HENKIN, Expert des Etats-Unis, a demandé des précisions sur le processus de privatisation et son effet sur les droits des femmes. Le droit à la propriété, et particulièrement celui des femmes et des ressortissants étrangers, est-il respecté? Il a salué les décisions prises par le Grand Khoural d'Etat en matière de religion et a demandé des précisions sur le contenu exact des lois dans ce domaine. Relevant le fait que le rapport décrit surtout la situation dans les grandes villes, il a demandé dans quelle mesure les dispositions légales s’appliquent aux citoyens qui ont un mode de vie nomade. Les nomades connaissent- ils tous leurs droits?

Mme PILAR GAITAN DE POMBO, Expert de la Colombie, a souhaité savoir quelles sont les garanties législatives du bon fonctionnement des organisations non gouvernementales. Elle a demandé comment les dénonciations des cas de traite des femmes et de violence à leur égard étaient traitées. L’Expert a également demandé des précisions sur la présentation des dispositions du Pacte dans les écoles.

M. HIPOLITO SOLARI YRIGOYEN, Expert de l’Argentine, a estimé que les réponses apportées ce matin par la délégation de la Mongolie avaient été une nouvelle fois incomplètes, notamment en ce qui concerne la situation de la femme mongole et le droit du travail. Il a demandé dans quels cas s'appliquaient les exceptions au secret de la vie privée. L'expert a salué l’arrêt de la Cour constitutionnelle en faveur de l’égalité des religions. Il a regretté que les Chinois, qui sont environ 1400 en Mongolie, les Ouzbèques et les Ouïgours soient considérés comme des ressortissants étrangers alors qu’ils représentent tout au plus une minorité linguistique. Il a demandé des informations précises sur les mesures de diffusion du Pacte et le contenu des enseignements en matière de droits de l'homme dispensés aux fonctionnaires. Il a souhaité savoir combien de brochures sur les droits de l'homme avaient été distribuées aux pouvoirs publics et à la presse.

M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI, Expert de l’Inde, a regretté qu'environ 150 femmes soient mortes des suites d'un avortement. Il a demandé quelles mesures avaient été adoptées par le Gouvernement pour remédier à cette situation. Constatant une importante discrimination entre les hommes et les femmes dans le secteur privé, il a souhaité savoir si le Gouvernement avait mis en place un mécanisme de surveillance habilité à recevoir les plaintes des femmes qui s’estiment lésées. Les juges disposent-ils d’un système de formation continue, a- t-il également demandé.

M. ABDELFATTAH AMOR, Expert de la Tunisie, a demandé des précisions sur la “position dominante” de la religion bouddhiste qui, selon le rapport, “doit être respectée par l’Etat”. Comment s’exprime le respect qui serait dû à cette religion? La liberté de conviction, religieuse ou non religieuse, est-elle garantie? Il a demandé ce qu’il en est des autres cultes et religions, notamment le chamanisme et le judaïsme.

LORD COLVILLE, Expert du Royaume-Uni, a souligné que la question sur les droits des minorités vivant en Mongolie ne concernait pas les ressortissants étrangers. Il a demandé des précisions sur les mesures concrètes adoptées pour protéger les cultures, les langues et l’éducation de citoyens appartenant à ces groupes minoritaires. Soulignant le caractère très dispersé de la population, l’Expert a demandé des précisions sur les mesures prises par le Gouvernement pour assurer à tous un accès aux services médicaux et à l’éducation. La création d’un réseau destiné aux populations rurales est-elle prévue, a-t-il demandé.

En réponse aux questions des experts, M. DASH GANBOLD, Ministre de la justice de la Mongolie, a dit que la population majoritaire Kazakh est en fait elle-même un assemblage de minorités. On s’accorde cependant à dire qu’il y a une ethnie dominante en Mongolie, qui use d’une seule langue et a une seule culture, bien que la langue connaisse des variations. L’Etat protège les traditions et les cultures de tous les groupes ethniques. Le pays compte un certain nombre de ressortissants d’origine chinoise, officiellement au nombre de 1640, qui conservent leur citoyenneté de ressortissants de la République populaire de Chine. Ces Chinois, qui sont actifs dans certains secteurs économiques, vivent en Mongolie depuis plusieurs générations. Il est, il faut l’avouer, difficile pour l’Etat de fournir de façon soutenue une assistance au développement de chaque groupe culturel dans les régions très éloignées, du fait de la vie nomade et de l’étendue du pays. Mais le taux d’enseignement et d’éducation scolaire est cependant très élevé grâce aux efforts de l’Etat, a déclaré M. Ganbold.

En ce qui concerne la liberté de religion, la Constitution stipule que personne ne peut être persécuté du fait de sa croyance religieuse. L’Etat et les Eglises sont séparés. La loi demande que soient enregistrés tous les mouvements religieux existant en Mongolie. Le lamaïsme est la religion la plus répandue, mais cela ne signifie pas que les autres croyances ne soient pas reconnues ou qu’elles sont réprimées. Aucun citoyen n’a été poursuivi en Mongolie pour des motifs de croyances, et la Constitution interdit toute surveillance des activités des Eglises. Nous voulons une nouvelle fois assurer le Comité de la liberté, de l'autonomie et de l’indépendance des juges qui ne sont soumis à aucune pression, a poursuivi le Ministre. Il a précisé que le système pénal et ses procédures étaient dérivés du modèle allemand. Les conditions d’accès au métier de juge sont l’âge minimum, qui est de 24 ans, et la formation, pour laquelle nous exigeons un certain niveau d’études universitaires, a-t-il ajouté.

Quant à la question des femmes qui décèdent en couches ou des suites d’un avortement, le gouvernement a adopté un programme de prévention des causes de ce phénomène considéré comme un fléau public. Le droit des femmes à la vie est énoncé par la loi et protégé, et des mesures ont été prises, dans la limite des moyens, pour leur assurer des services de contrôle des naissances et de santé génésique. Le Ministre a ensuite expliqué que plus de 40% du PNB provenait désormais du secteur privé issu de la privatisation des anciennes entreprises d’Etat. La loi sur la privatisation ouvre la reprise des entreprises aux étrangers qui peuvent en devenir des actionnaires. Pour défendre le statut des femmes qui travaillent dans le secteur privé, une loi destinée à combattre les injustices et la discrimination dont elles peuvent être victimes a été mise en place.

En ce qui concerne les activités politiques, le Ministre a expliqué qu'en 1990 et 1996, de nouveaux partis politiques avaient vu le jour en Mongolie. Le pays est aujourd’hui gouverné par une coalition. Les partis sont enregistrés auprès de la Cour Suprême, et quatre d’entre eux sont représentés au Gouvernement et au Grand Khoural d’Etat. Une loi spéciale a été votée qui octroie aux associations et aux syndicats un statut juridique particulier, leur assurant des droits, leur permettant d’exercer des pressions et de faire des propositions de réformes concernant le monde du travail.

Pour ce qui est de la question de la peine de mort, le Ministre a rappelé que son champ d’application se rétrécit petit à petit. En 1994, 18 catégories de crimes en étaient passibles, alors qu’aujourd’hui, il n’y en plus que 5. Le Gouvernement de la Mongolie fait tout ce qui est dans ses moyens et à sa portée pour faire connaître les droits de l’homme, a poursuivi M. Ganbold. Ceux-ci sont enseignés désormais dans l’enseignement supérieur. Ainsi, la Mongolie compte 17 établissements d’enseignement supérieur où sont dispensés des cours sur les droits fondamentaux du citoyen et sur les dispositions du Pacte. Il existe, en outre, un Centre de formation pour la magistrature, par lequel tous les juristes et magistrats sont obligés de passer au cours de leurs études. Un séminaire de recyclage y est également organisé chaque année. Les droits de l’homme sont débattus dans les organes d’information de masse et nous fournissons à la presse privée tous les documents dont elle peut avoir besoin sur cette question, a encore assuré le Ministre. La liberté de rassemblement est respectée et il n’existe aucune limite aux droits des associations pour autant qu’elles respectent l’obligation d’enregistrement. A propos de liberté de la religion et de croyance, il a précisé que les Mongols qui pratiquent en majorité le Bouddhisme n’en tirent de l’Etat aucun privilège par rapport aux fidèles des autres religions. Il y a cependant une loi qui prévoit que les religions prêchant la violence peuvent être poursuivies. Une fois qu’ils ont été enregistrés, les mouvements religieux peuvent recevoir le statut d’église.

Interrogeant à son tour la délégation, M. NISUKE ANDO, Expert du Japon, a demandé s’il existe une télévision nationale en Mongolie. Quelle est la réglementation qui régit l’ouverture d’une chaîne privée? La Mongolie possède-t- elle des journaux en langue étrangère? Revenant sur les violences au foyer et soulignant la place importante des femmes dans les sociétés nomades ainsi que sous le modèle soviétique, l’Expert a demandé quel était le régime matrimonial prévu par le nouveau Code civil. Il a souhaité savoir si ce régime matrimonial assure

l’égalité entre les époux. Les époux peuvent-ils demander le divorce pour les mêmes motifs et de quelle manière s’effectue la répartition des biens après le divorce? L'expert a demandé, d'autre part, s’il existait un Barreau en Mongolie et s’il était complètement indépendant du Gouvernement. Est-ce le gouvernement local ou le ministère de la justice qui prend les décisions en matière d’assistance judiciaire, a-t-il demandé.

M. RASJOOMER LALLAH, Expert de Maurice, a abordé la question de la liberté d’opinion, en remarquant que le rapport parle tantôt de liberté de conscience, tantôt de liberté de religion ou de pensée, ce qui prête à confusion. Il a demandé des précisions sur les conséquences du non enregistrement des religions. Les personnes qui ne pratiquent aucune religion font-elles l’objet de discriminations, a-t-il demandé. La composition du Grand Khoural d'Etat et des ministères dépend-elle de l’appartenance à une religion donnée. Il a douté de ce que tous les Mongols soient effectivement conscients de leurs droits et a demandé à la délégation si tous les Mongols savent lire et écrire et s’ils ont tous accès au Pacte.

En réponse aux questions des experts, M. Dash Ganbold, Ministre de la justice, a déclaré que le régime législatif mongol est conforme au régime allemand romain. Les avocats appartiennent à une association libre de juristes, qui ne dépend pas du Barreau. A la fin de leurs études, les jeunes avocats font un stage pratique de deux ans, après quoi ils peuvent passer un concours pour obtenir le titre de docteur en droit. Une fois ce concours réussi, les jeunes diplômés doivent obtenir un certificat du Ministère de la justice. Le choix d’un avocat s’effectue librement. La diffusion massive d’informations sur les droits de l'homme ne peut être financée par le budget de l’Etat, elle est donc relayée par des médias privés. Le représentant a indiqué qu’il existe des télévisions ainsi que des journaux privés. Il existe des journaux en anglais, en russe et en chinois. Une loi sur la famille a été récemment adoptée qui dispose que les époux peuvent conclure un contrat gouvernant leurs biens. L’épouse et le mari peuvent conserver les biens qu’ils possédaient avant le mariage. L’Etat désigne un tuteur pour les enfants orphelins sans parenté.

Le Ministre a déclaré que les églises sont considérées comme des personnes morales enregistrées auprès du Ministère de la Justice. Bien sûr, le choix de sa croyance n’exige aucun enregistrement, a-t-il souligné. Le fait que des églises soient enregistrées ne signifie pas qu’elles sont plus importantes que d’autres croyances qui ne sont pas organisées en tant que religion et qui ne sont pas enregistrées. Le Ministre a indiqué que 90 % de la population sait lire et écrire et qu'il est donc facile aux citoyens de prendre des renseignements par le biais des télévisions et des radios qui émettent dans presque tout le pays. Le représentant n’a toutefois pas exclu que les populations qui vivent dans des zones les plus reculées ne reçoivent pas à temps les informations les plus récentes.

Prenant ensuite la parole, la Présidente du Comité, Mme CECILIA MEDINA QUIROGA, Expert du Chili, a admis que la barrière de la langue avait pu entraver le dialogue entre la délégation de la Mongolie et les experts du Comité. Pour les experts, a-t-elle poursuivi, la place du Pacte dans l’architecture juridique de la Mongolie n’est pas encore claire. Elle a demandé si les dispositions du Pacte avaient la primauté sur la Constitution et la loi. La Présidente a ensuite suggéré au Gouvernement d’adapter le mode de transmission des connaissances aux régions dont les populations sont analphabètes, notamment avec l’aide des ONG. Sur ce

point, elle a jugé qu’il semblait y avoir un problème grave d’ignorance du Pacte. Il serait important de connaître les instances devant lesquelles la population peut se plaindre des violations de ses droits, a-t-elle ajouté. Elle a également souligné que l’Etat a la responsabilité de créer une culture nouvelle afin que les gens sachent qu’ils ont des droits et de quelle manière ils peuvent les défendre. Par ailleurs, elle a estimé que la détérioration de la situation relative à l’égalité entre hommes et femmes, que tous les experts ont soulignée, requiert des mesures de la part du Gouvernement. La Présidente a regretté l’absence d’informations sur les causes des décès des suites d’avortements, sur la violence et sa fréquence, sur la situation financière des femmes, ainsi que sur les mesures prises en matière de planification familiale. S’interrogeant sur les survivances du passé, elle a demandé si les crimes passés restaient impunis ou leurs auteurs étaient poursuivis. Elle a également évoqué la position de la religion bouddhiste. La Présidente a conclu en suggérant à la délégation de la Mongolie d’examiner les comptes-rendus des séances du Comité pour préparer son prochain rapport. Elle a également souligné le support technique que le Haut Commissariat aux droits de l'homme est prêt à fournir à la Mongolie dans le cadre de la rédaction de ce rapport.

Le Ministre de la justice de la Mongolie, M. DASH GANBOLD, a dit avoir pris note des critiques du Comité. Il a souligné les problèmes en grand nombre que rencontre encore son Gouvernement. Tout en reconnaissant que celui-ci n’avait pas encore mis en place une société pleinement démocratique, il a assuré que la Mongolie était absolument résolue à progresser pour parvenir à cet objectif. Le Ministre a remercié les experts pour leurs conseils et observations, ainsi que pour l’aide qu’ils ont proposée pour la préparation du prochain rapport.

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À l’intention des organes d’information. Document non officiel.