DH/G/1271

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND DES RESPONSABLES GOUVERNEMENTAUX DU CAMEROUN, DE LA TURQUIE, D'ISRA-L, DU MAROC, DU MEXIQUE, DE L'ITALIE ET DU LUXEMBOURG

22 mars 2000


Communiqué de Presse
DH/G/1271


LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND DES RESPONSABLES GOUVERNEMENTAUX DU CAMEROUN, DE LA TURQUIE, D'ISRAËL, DU MAROC, DU MEXIQUE, DE L'ITALIE ET DU LUXEMBOURG

20000322

Plusieurs délégations présentent leurs observations concernant le rapport annuel de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme

Genève, le 22 mars 2000 -- La Commission des droits de l'homme a entendu les déclarations des Ministres des affaires étrangères du Cameroun et du Luxembourg, des Ministres des droits de l'homme de la Turquie et du Maroc, du Ministre de la justice d'Israël, des Sous-secrétaires d'État aux affaires étrangères du Mexique et de l'Italie. Elle a poursuivi son débat sur le rapport annuel de la Haut- Commissaire aux droits de l'homme et le suivi de la Conférence mondiale sur les droits de l'homme.

M. Augustin Kontchou Kouomegni, Ministre d'État chargé des relations extérieures du Cameroun, a notamment dit l'attachement de son pays à l'idéal des droits de l'homme et son engagement à les promouvoir toujours davantage. Il a également souligné que les droits de l'homme ne devraient pas être utilisés aux fins de chantage et de pressions politiques et économiques.

Le Ministre d'État chargé des droits de l'homme de la Turquie, M. Mehmet Ali Irtemelik, a reconnu qu'en dépit de l'ancienneté de son système démocratique, le pays connaît encore des déficiences en ce qui concerne les droits de l'homme. À cette lutte contre le terrorisme, qui a permis de réduire à néant les violences dirigées contre les institutions démocratiques, la paix et l'harmonie sociales, est venu s'ajouter un processus lent, mais constant, de réformes visant la promotion des droits de l'homme.

M. Yossi Beilin, Ministre de la justice d'Israël, a déclaré que la rencontre à Genève, dimanche prochain, entre M. Hafez El Assad, Président de la Syrie, et M. Bill Clinton, Président des États-Unis, offre une occasion de faire la paix entre la Syrie, le Liban et Israël. Le Gouvernement israélien comprend que pour faire la paix, il faut en payer le prix, même s'il est élevé. Nous avons cette rare occasion qui se présente de faire la paix, nous ne devons pas la manquer, a déclaré le ministre.

M. Mohamed Auajjar, Ministre chargé des droits de l'homme du Maroc, a souligné que les droits de l'homme et l'édification de l'État de droit revêtent un caractère prioritaire pour son pays. Il a déclaré que la question des victimes de la disparition forcée et de la détention arbitraire a été traitée dans le souci de réconcilier les Marocains avec leur histoire, en garantissant la réhabilitation des victimes et, par ce fait, la reconnaissance de la responsabilité de l'État. Le Maroc est vivement préoccupé par la question de l'immigration, et les événements dont ont été victimes des immigrés marocains dans le sud de l'Espagne sont un indicateur inquiétant appelant à la vigilance et à la mobilisation pour prévenir ce qui pourrait provoquer la violation des droits des immigrés.

La Sous-secrétaire d'État aux affaires étrangères du Mexique, Mme Carmen Moreno, a insisté sur le processus de transition politique en profondeur et irréversible que connaît actuellement le Mexique. Elle a notamment rappelé le souci fondamental de son pays de garantir les droits des populations autochtones, évoquant en particulier l'action menée au Chiapas.

M. Aniello Palumbo, Vice-Ministre des affaires étrangères d'Italie, s'est félicité que la cause en faveur de l'abolition de la peine de mort gagne jour après jour plus de terrain. Il faut, a-t-il dit, appuyer toutes les initiatives portant sur le droit le plus fondamental de l'homme, le droit à la vie.

Mme Lydie Polfer, Ministre des affaires étrangères du Luxembourg, a souligné l'importance accordée par son pays à la question de la protection des défenseurs des droits de l'homme et à la création d'un mécanisme chargé de la question. Elle a par ailleurs déclaré que la situation en Tchétchénie doit être examinée par la Commission aux même titre que les violations graves des droits de l'homme dans d'autres régions du monde.

Poursuivant son débat sur le rapport annuel de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, la Commission a entendu les représentants de Cuba, de la Fédération de Russie, du Soudan, du Canada, du Guatemala, de l'Inde et de l'Autriche, qui ont commenté le rapport et manifesté des attitudes parfois divergentes quant aux orientations du Haut Commissariat aux droits de l'homme. Plusieurs représentants se sont félicités de la volonté de mettre l'accent sur les efforts de prévention. D'autres ont estimé que le recours à des mécanismes d'alerte précoce des conflits outrepasse le mandat du Haut-Commissaire aux droits de l'homme.

La Commission entamera cet après-midi son débat relatif au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et son application aux peuples assujettis à une domination coloniale ou étrangère, ou à l'occupation étrangère. Elle doit également entendre les Ministres des affaires étrangères de l'Allemagne, de la Suède et du Yémen.

Déclarations

M. AUGUSTIN KONTCHOU KOUOMEGNI, Ministre d'État chargé des relations extérieures du Cameroun, a rappelé que l'on oublie trop souvent, inconsciemment ou à dessein, que les droits civils et politiques, et notamment la liberté d'expression, qui mobilisent tant la communauté internationale, ne peuvent s'épanouir pleinement que si les droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement, sont également garantis. Le ministre s'est félicité de la tenue à Yaoundé, en décembre 1999, d'un séminaire destiné à contribuer à l'adoption d'une position africaine commune sur les mesures qui permettraient une meilleure mise en œuvre du droit au développement. Cette initiative laisse espérer qu'à l'heure de la mondialisation et de la libéralisation des échanges, les exigences de dignité et de bien-être de l'homme seront placées au centre des préoccupations de la communauté internationale et l'emporteront sur les germes de tensions, les sources de conflits, ainsi que sur les velléités de domination et d'appât du gain.

Pour sa part, le Cameroun souhaite renouveler son attachement à l'idéal des droits de l'homme et son engagement à les promouvoir toujours davantage. En témoignent notamment l'adoption d'un programme national de bonne gouvernance, d'un programme de lutte contre la pauvreté et d'un plan d'action contre la corruption. Le climat politique et social du Cameroun est aujourd'hui serein, ce qui a permis au pays de s'engager sur la voie d'un redressement remarquable, a fait valoir le ministre, qui a notamment indiqué qu'à partir de la rentrée prochaine, c'est-à- dire d'octobre 2000, l'enseignement primaire serait non seulement obligatoire mais gratuit au Cameroun.

En attendant le règlement pacifique et définitif du conflit territorial et frontalier qui l'oppose au Nigéria, le Cameroun s'en tient au respect du droit international et souhaite vivement que la communauté internationale aide plus vigoureusement au maintien de la paix entre les deux pays, avant, pendant et après le verdict de la Cour internationale de justice de La Haye. Le ministre a par ailleurs fait valoir le rôle joué par son pays pour soulager les souffrances de nombreux africains qui, fuyant la guerre, se sont réfugiés au Cameroun par dizaines de milliers.

Le ministre camerounais a regretté que la profonde mutation opérée méthodiquement, progressivement et avec détermination par le Cameroun n'échappe pas à une certaine vague malveillante de dénigrement. Malgré les efforts colossaux déployés pour renforcer l'essor des droits de l'homme, seules sont mises en exergue, par certains cercles, les lacunes et les bavures. Or, les droits de l'homme ne devraient pas être utilisés aux fins de chantage et de pressions politiques et économiques inavouées. Pour faire du troisième millénaire celui de l'effectivité des droits de l'homme et de la dignité humaine, nous devons mener la lutte sur un double front, d'une part en instaurant partout dans le monde des régimes politiques réellement démocratiques et, de l'autre, en éradiquant la pauvreté qui constitue, aujourd'hui, l'atteinte la plus grave à la dignité humaine et retarde le progrès des deux tiers des habitants de la Terre.

M. MEHMET ALI IRTEMCELIK, Ministre d'État chargé des droits de l'homme de la Turquie, a affirmé que son pays est un État nation fondé sur le respect des droits et libertés individuels. Toutefois, le Ministre a reconnu qu'en dépit de l'ancienneté de son système démocratique, des réformes politiques, juridiques et sociales entreprises dès les années 30, son pays connaît toujours des déficiences non négligeables en ce qui concerne les droits de l'homme. Il a souligné que les gouvernements successifs de son pays ont toujours œuvré au renforcement de la démocratie, tout en livrant un combat inlassable contre le terrorisme ethnique. Il a déclaré à cet égard que le phénomène du terrorisme avait pu, à de nombreuses reprises, porter atteinte aux avancées démocratiques. Le Ministre a toutefois estimé que le combat contre le terrorisme a permis de réduire à néant les violences dirigées contre les institutions démocratiques, la paix et l'harmonie sociales.

À cette lutte contre le terrorisme, est venu s'ajouter un processus lent, mais constant, de réformes visant la promotion des droits de l'homme. Le défi de la Turquie est d'assurer le progrès de règles protectrices de ces droits. Le gouvernement s'efforce de le faire le plus rapidement possible, a-t-il affirmé, attirant l'attention sur des mesures qui ont été prises à cette fin : réforme de la justice et du code pénal, adoption d'une définition plus large des notions de torture et de traitement inhumain et dégradant. Le Ministre a également signalé que son pays est sur le point de signer deux instruments importants en matière de droits de l'homme, à savoir, la Convention sur les droits civils et politiques, et la Convention sur les droits économiques, sociaux et culturels. Fort de ces exemples, le Ministre s'est dit confiant dans le développement d'un régime protecteur des droits de l'homme dans son pays.

M. YOSSI BEILIN, Ministre de la justice d'Israël, a annoncé que dimanche prochain aura lieu à Genève une rencontre significative entre le président syrien, M. Hafez El Assad et le Président des États-Unis, M. Bill Clinton. Il s'agit d'une rencontre importante, l'occasion de faire la paix entre la Syrie, le Liban et Israël. Hier, a-t-il rappelé, des négociations ont repris aux États-Unis, ce qui laisse espérer qu'un accord de paix au Proche-Orient est possible en l'an 2000, après 50 ans de guerre et d'hostilité. Le monde a compris qu'Israël n'est pas un simple épisode de l'histoire. Aujourd'hui, a souligné M. Beilin, le Gouvernement israélien comprend que pour faire la paix, il faut en payer le prix, même s'il est élevé. Nous avons cette rare occasion qui se présente de faire la paix, nous ne devons pas la manquer. Le ministre a souligné qu'Israël a dû lutter pour exister et a sacrifié toute une génération de jeunes en 1948. En 1967, le pays a dû se défendre. Suite à sa victoire, il a occupé d'autres territoires, notamment ceux de Palestiniens. Il faut espérer que ces occupations appartiendront bientôt au passé.

M. Beilin a estimé que l'histoire unique d'Israël lui confère un rôle réel qui consiste à mettre le monde en garde contre tout retour aux jours les plus sombres du XXème siècle et aujourd'hui face au fascisme de Haider à Le Pen, il s'agit de convaincre l'individu. Il a souhaité que l'an prochain, il sera possible aux représentants d'Israël, quels qu'ils soient, d'être aux côtés des pays arabes pour dire que l'occasion de faire la paix n'a pas été manquée.

M. MOHAMED AUAJJAR, Ministre chargé des droits de l'homme du Maroc, a souligné que les changements que connaît le Maroc témoignent que les droits de l'homme et l'édification de l'État de droit revêtent un caractère prioritaire pour l'État marocain. Les actes pris sous le nouveau règne traduisent l'intérêt particulier accordé à la solidarité et à la confraternité à même d'assurer un développement harmonieux du pays et de garantir à tous les Marocains dignité et équité, en leur assurant la jouissance de leurs droits sociaux, économiques, politiques et civils.

La création d'une instance indépendante chargée de l'indemnisation des victimes de la disparition forcée et de la détention arbitraire ou de leurs ayants droits a été l'un des premiers actes de Mohammed VI. Il s'agit d'une décision d'importance capitale en ce sens qu'elle constitue une initiative de règlement définitif de ce dossier douloureux, sachant que le gouvernement a décidé, dès son investiture, d'apporter une solution à ce problème. Le traitement qui a été fait de cette question vise à réconcilier les Marocains avec leur histoire en toute objectivité et responsabilité, en garantissant la réhabilitation des victimes et de leurs ayants droits et, par ce fait, la reconnaissance de la responsabilité de l'État. Par ailleurs, a poursuivi M. Auajjar, en application de la grâce royale amnistiante, le gouvernement a pris toutes les mesures nécessaires pour apurer les dossiers des anciens détenus pour des raisons politiques ou syndicales.

Le Ministre marocain chargé des droits de l'homme a indiqué qu'il a été procédé à la préparation de trois projets de loi portant sur la réforme de la presse, la constitution des associations et les manifestations publiques, l'objectif étant de raffermir l'espace des libertés et de garantir leur pleine jouissance. Ces projets seront soumis au Parlement marocain au cours de cette année législative, a indiqué M. Auajjar. En ce qui concerne *ðl'affaire du Sahara+ð, le Gouvernement marocain réaffirme que l'organisation d'un référendum dans ces provinces ne peut se faire qu'avec la participation de toutes les populations originaires de cette région, sans discrimination ou exclusion, dans l'intérêt de l'équité et de la transparence de l'opération référendaire. Le Maroc, convaincu de la justesse de la cause de son intégrité territoriale, réitère son attachement à coopérer de manière constructive et sincère avec l'ONU. Le ministre a fait part de la vive inquiétude de son gouvernement quant aux violations des droits humains dans les camps de Tindouf dont sont victimes les marocains retenus contre leur gré dans ces camps et qui souffrent le calvaire de la torture, des travaux forcés et de la privation de leurs droits les plus élémentaires. À cet égard, le Gouvernement marocain lance un appel pour que des enquêtes soient menées sur ce qui se passe dans ces camps de Tindouf.

La question de l'immigration constitue un autre sujet majeur de préoccupation pour le Gouvernement marocain, surtout face aux répercussions sociales nées de l'impact de la mondialisation et aux profonds bouleversements que connaît l'ordre économique mondial. Ces bouleversements ont été accompagnés par une vague de racisme et de xénophobie, a-t-il ajouté avant de souligner que les tristes

événements de El Ejido, dans le sud de l'Espagne, dont ont été victimes principalement les immigrés marocains, sont un indicateur inquiétant appelant à la vigilance et à la mobilisation pour prévenir ce qui pourrait provoquer la marginalisation et la violation des droits des immigrés. Le Maroc réitère à cet égard son appel pour que les membres de l'ONU adhèrent à la Convention relative aux droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles.

MME CARMEN MORENO, Sous-Secrétaire d'État aux relations extérieures du Mexique, a affirmé que les Mexicains sont engagés dans un processus de transition politique profond et irréversible. Le débat politique s'intensifie, et le caractère transparent, équitable et juste des processus électoraux s'intensifient, a-t-elle déclaré. Aujourd'hui, le pluralisme et l'institutionnalisation de ces processus assurent la pleine participation de la société à la vie publique du pays. *ðLa démocratie au Mexique est irréversible+ð, a réitéré Mme Moreno.

À cet enracinement de la démocratie s'ajoute la promotion d'une culture de respect des droits de l'homme, grâce à l'action conjointe de la société civile et des pouvoirs publics. Nombre d'actions juridiques traduisent l'émergence de cette culture des droits de l'homme, a fait valoir Mme Moreno, évoquant la ratification par le Mexique d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et le statut d'autonomie de la Commission nationale des droits de l'homme, notamment. De la même manière, on a donné au pouvoir judiciaire les moyens d'assurer son indépendance, son impartialité et son professionnalisme.

Pour le Mexique, nation multiethnique et pluriculturelle, il est fondamental de garantir les droits des populations autochtones, a affirmé Mme Moreno. Les minorités font partie intégrante de la société mexicaine et sont représentées au Parlement et au niveau des gouvernements locaux. D'importants efforts, sur le plan juridique, ont été déployés afin de reconnaître coutumes, spécificités culturelles et langues propres aux différentes communautés. Dans ce contexte, Mme Moreno a affirmé que le Chiapas fait l'objet d'une attention particulière, cet État ayant notamment reçu le budget le plus important pour l'éradication de la pauvreté.

M. ANIELLO PALUMBO, Vice-Ministre des affaires étrangères d'Italie, a souligné l'importance attachée par son pays à la question de la peine de mort. Il s'est félicité que la cause abolitionniste gagne jour après jour plus de terrain, et que le nombre de pays où la peine de mort a été abolie, de facto ou juridiquement, augmente sans cesse. Il est nécessaire, a-t-il estimé, d'appuyer toutes les initiatives relatives au droit le plus fondamental de l'homme, le droit à la vie. Il a dans le même esprit rappelé l'importance accordée par l'Italie au protocole facultatif de la Convention sur la torture sur les visites in situ, qui devraient contribuer à prévenir l'une des plus graves atteintes aux droits de l'homme : la torture.

M. Palumbo a par ailleurs souligné que la communauté internationale, face aux refus auxquels se heurte l'autorité de cette Commission, doit rester solidaire et dénoncer sans réserve les situations à risques, les cas de violations flagrantes et répétées des droits de l'homme, les menaces subies par les groupes ethniques ou groupes de population contre lesquels s'exerce une discrimination en raison de la race, du sexe, de la croyance, des idées politiques, etc. Il a insisté sur le fait que trop souvent par le passé la communauté internationale est restée en retrait, témoin impuissant des massacres et génocides commis en Bosnie, au Kosovo, au Rwanda, au Timor oriental et au Burundi en dépit des appels des organisations non gouvernementales et de nombreux défenseurs des droits de l'homme. Il a également évoqué l'évolution préoccupante de la situation en Tchétchénie, qui fait partie des cas dont la Commission doit se saisir.

MME LYDIE POLFER, Ministre des affaires étrangères du Luxembourg, a déclaré que la protection des défenseurs des droits de l'homme est un sujet dont la Commission doit rester saisie car il est important d'assurer, par la mise en place d'un mécanisme approprié, le suivi de la déclaration adoptée ici même il y a deux ans.

Mme Polfer a jugé alarmantes les informations qui se précisent au sujet des souffrances subies par les populations de la Tchétchénie et des violations graves de leurs droits. Elle s'est félicitée que les autorités russes aient consenti à inviter la Haut-Commissaire aux droits de l'homme à se rendre désormais dans la région. La situation en Tchétchénie demande à être approchée de la même manière par la Commission que l'ont été les allégations de violations graves des droits de l'homme dans d'autres régions du monde. En effet, quelles que soient les complexités de la situation dans cette partie de la Fédération de Russie, la communauté internationale ne peut admettre que, sous prétexte de rétablissement de l'ordre ou de lutte contre le terrorisme, des forces militaires s'en prennent de manière répétée aux populations civiles, a déclaré la Ministre luxembourgeoise des affaires étrangères. Elle a lancé un appel à la coopération des autorités de la Fédération de Russie pour qu'elles fassent preuve de transparence en autorisant la présence sur place d'observateurs internationaux et des médias, pour qu'elles permettent aux organisations humanitaires internationales de porter assistance à la population et pour qu'elles identifient les responsables de violations graves des droits de l'homme et du droit humanitaire international.

Saluant l'engagement de Bernard Kouchner, le Représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU au Kosovo, la ministre a estimé que l'évolution des mentalités finira par justifier les efforts importants de la communauté internationale pour le rétablissement de la paix et la reconstruction. Elle a par ailleurs indiqué que son pays continue d'attacher la plus haute importance au dialogue critique que l'Union européenne entretient depuis 1997 avec la Chine et, espère-t-elle, prochainement avec l'Iran. Elle a par ailleurs souligné que son pays soutient activement l'initiative de l'Union européenne sur la peine de mort.

Débat sur le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme

M. RODOLFO REYES RODRIGUEZ (Cuba) a indiqué que sa délégation aurait souhaité que les rapports périodiques de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme aient une orientation intégrée conforme à l'approche retenue dans la Déclaration et le Programme d'action de Vienne qui visent la promotion et la protection de tous les droits de l'homme. Pour être efficace, tout système international de prévention des violations des droits de l'homme devrait se fonder sur le respect de l'égalité souveraine des États et sur leur intégrité territoriale; sur l'existence de normes et de règles de fonctionnement transparentes; et sur l'existence d'institutions internationales ayant une compétence reconnue et prouvée qui fassent preuve d'objectivité et d'impartialité. Malheureusement, ces éléments ne sont pas précisément ceux qui caractérisent actuellement la pratique internationale en matière de droits de l'homme. Étant donné le statu quo en vigueur, Cuba ne peut qu'exprimer sa profonde préoccupation face à diverses propositions et recommandations contenues dans le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme.

M. Reyes Rodriguez a rappelé qu'il n'a pas été possible de parvenir à un consensus à l'Assemblée générale sur les questions relatives à la diplomatie préventive et aux mécanismes d'alerte précoce pour la simple raison que la plupart des pays en développement avaient conscience du fait que les conditions injustes qui caractérisent l'ordre international ne feraient que contribuer à institutionnaliser de nouveaux instruments d'intervention et de coercition à l'encontre de nos peuples. Récemment, a-t-il rappelé, la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a jugé le concept d'*ðintervention humanitaire+ð incompatible avec le droit international général en vigueur.

M. YURI BOITCHENKO (Fédération de Russie), a noté l'effort qui est fait par la Haut-Commissaire dans son rapport visant à analyser de façon exhaustive les différents moyens de prévenir les violations des droits de l'homme dans le monde. Le représentant a appuyé l'idée selon laquelle le racisme ou la xénophobie doivent faire l'objet de la plus grande attention, dans la mesure où ils constituent des catalyseurs de l'apparition de conflits interétatiques. S'agissant des propositions visant création d'une équipe spéciale pour les opérations d'urgence ou d'une force de réaction rapide, le représentant a estimé qu'un tel mécanisme n'est pas conforme au mandat conféré au Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme et de la Commission elle-même. Les questions relatives aux droits de l'homme ne sauraient en aucun cas justifier des activités illégitimes, contraires à la Charte des Nations Unies. Elles doivent rapprocher les peuples, a-t-il insisté.

M. IBRAHIM MIRGHANI (Soudan) a souligné que sa délégation avait étudié attentivement le rapport de la Haut-Commissaire et s'est dit perplexe quant au contenu du paragraphe 59, qui évoque des problèmes de l'esclavage au Soudan, au lieu de qualifier ces problèmes comme il se doit, à savoir des cas d'enlèvement. Sa délégation rejette catégoriquement cette conclusion qui se fonde sur des allégations non étayées. Selon le Soudan, il s'agit de la répétition d'allégations semblables à celles faites notamment par une organisation non gouvernementale dont le statut auprès du Conseil économique et social fut retiré l'an dernier. Cette

référence dans le rapport du Haut-Commissaire est contraire à la décision prise par la Commission l'an dernier qui avait vu au Soudan un problème d'enlèvement et non d'esclavage. Le Soudan aurait souhaité que ses efforts et les mesures positives qu'il a prises soient reconnues au lieu de présenter des conclusions aussi graves. Il a rappelé que les cas d'enlèvement en question font partie des séquelles de la guerre civile dans des zones sous contrôle de mouvements rebelles. Il a enfin estimé qu'une telle référence dans le rapport ne va pas dans le bon sens, cela peut avoir au contraire un effet préjudiciable et le fait de montrer du doigt n'aidera sûrement pas les personnes enlevées.

M. ROSS HYNES (Canada) s'est félicité que le rapport annuel de la Haut- Commissaire insiste sur la notion de prévention des droits de l'homme. Cela est pleinement conforme au mandat du Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a-t-il estimé. Le représentant canadien a fait remarquer que nombre de propositions faites dans le rapport sont liés aux questions qui seront débattues lors de la présente session. Aussi sa délégation se réserve le droit d'intervenir sur ces différents points lors des séances consacrées à ces points spécifiques.

M. LUIS PADILLA MENÉNDEZ (Guatemala) a noté que le rapport du Haut- Commissaire fait mention de la formule *ðalerte rapide+ð à propos de la situation de génocide qui se préparait au Rwanda, et qui fut évoquée dans le rapport de 1993 présenté devant la Commission par le Rapporteur spécial sur les exécutions extra judiciaires, sommaires et arbitraires. Cet exemple, a-t-il dit, démontre que l'alerte rapide en soi ne suffit pas. Le représentant guatémaltèque a ajouté qu'il parait pertinent et approprié que le Haut-Commissariat développe une capacité de réponse aux situations d'urgence et s'est félicité de son intention de créer un groupe dont le rôle est de répondre aux urgences et qui soit chargé d'analyser les situations d'alerte précoce et de signaler les incidents graves afin de mobiliser les mécanismes pertinents des droits de l'homme des Nations Unies.

MME SAVITRI KUNADI (Inde), s'agissant des propositions contenues dans le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a fait remarquer que l'institution des Nations Unies n'a pas été c

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