En cours au Siège de l'ONU

CNUCED/B/242

LE FMI PLAIDE POUR UN ENGAGEMENT RENOUVELE EN FAVEUR D'UN MULTILATERALISME A VISAGE HUMAIN

14 février 2000


Communiqué de Presse
CNUCED/B/242


LE FMI PLAIDE POUR UN ENGAGEMENT RENOUVELE EN FAVEUR D’UN MULTILATERALISME A VISAGE HUMAIN

20000214

Il faut une CNUCED forte pour faire des pays en développement des partenaires Égaux du commerce international, estime le Président de la dixième session de la CNUCED

Bangkok, le 13 février -- Un appel au renforcement du multilatéralisme nécessaire à la matérialisation du nouveu paradigme de développement a été lancé, ce matin, par le Directeur général du Fonds monétaire international (FMI), au cours d’une séance de questions-réponses avec les participants à la dixième session de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) qui se tient depuis le 12 février à Bangkok. M. Camdessus a mis l’accent sur l’émergence du nouveau paradigme de développement rendue possible par une humanisation progressive des notions économiques fondamentales. Il a expliqué que la poursuite de la croissance en tant que telle a montré ses limites et que la solution ne peut provenir que d’une croissance de haute qualité. Une telle croissance a été décrite par le Directeur général du FMI comme celle qui doit viser la durabilité, et qui met l’homme au centre des préoccupations tout en contribuant à l’élimination de la pauvreté, à la protection de l’environnement et au respect des valeurs culturelles nationales. Aux côtés du nouveau paradigme de développement, M. Camdessus a noté la convergence entre le respect des valeurs éthiques fondamentales et la recherche de l’efficacité requise par la concurrence commerciale. La conjugaison du nouveau paradigme et de la convergence entre les valeurs éthiques et l’efficacité concurrentielle est ce que M. Camdessus a défini comme les éléments constitutifs de la “nouvelle vision économique” et de la”perception plus positive de la mondialisation”. Imputant les critiques faites à la mondialisation au fait qu’elle ne s’est pas révélée capable d’éliminer la pauvreté, M. Camdessus s’est livré à un plaidoyer en faveur de la lutte contre la pauvreté, qu’il a qualifiée de “la plus grande menace à la stabilité mondiale”.

La lutte contre la pauvreté qui est au coeur du nouveau paradigme de développement exige, pour M. Camdessus, un “multilatéralisme revigoré” qui seul peut donner un visage humain à la mondialisation. Ce multilatéralisme nécessite la cohérence; cohérence des gouvernements vis-à-vis des institutions multilatérales; cohérence des mesures prises par ces institutions; et cohérence des décisions politiques des gouvernements. A cet égard, M. Camdessus a proposé de remplacer, tous les deux ans, les réunions du G-7 et G- 8 par une réunion des chefs d’Etat et de gouvernement ayant des

Directeurs au sein des Conseils d’administration du FMI et de la Banque mondiale. Une telle réunion, a estimé le Directeur général du FMI, serait plus représentative des 182 membres qui composent ces institutions. La nécessité de la cohérence a été appuyée par le Président de la dixième session de la CNUCED, M. Supatchai Panitchpakdi, qui l’a souhaitée, en particulier, entre les politiques de la CNUCED et celles de l’OMC, en matière de commerce international. Pour lui, le monde a besoin d’une CNUCED forte, crédible et pertinente pour faire des pays en développement des partenaires égaux et bien préparés. Le Premier Ministre du Cambodge a abondé dans ce sens. Le rôle de la CNUCED, a précisément rappelé le Secrétaire général de la CNUCED, M. Rubens Ricupero, est d’aider les gouvernements à construire les institutions dont ils ont besoin pour formuler des politiques commerciales et d’investissements. La CNUCED se doit de mener des analyses et des recherches de qualité qui seront complétées par des discussions et des consultations avec des experts extérieurs et des échanges avec d’autres organisations. Evoquant aussi la question de la cohérence, M. Ricupero a estimé que pour remédier aux inquiétudes et aux angoisses face à la mondialisation, un dialogue systématique et structuré doit être initié entre les gouvernements, les organisations internationales et la société civile.

Ce matin, la dixième session de la CNUCED a composé son Bureau en élisant M. Mohammad Nahavandian (Iran) au poste de Rapporteur et M. Philippe Petit (France) à celui de Président du Comité plénier. Les Vice-Présidences sont assurées par les pays suivants : Pakistan, Ethiopie, Nigéria, Egypte, Royaume-Uni, Guatemala, ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Mexique, Suisse, Japon, Afrique du sud, Suède, Gabon, Lesotho, Inde, Pérou, Etats-Unis, Canada, République tchèque, Burundi, Pays-Bas, Uruguay, Espagne, Colombie, Liban, Philippines, Slovénie, Norvège, Bolivie, Singapour, Chine et République dominicaine. La dixième session de la CNUCED a également nommé les pays suivants au Comité de vérification des pouvoirs : Autriche, Afrique du sud, Bolivie, Chine, Etats-Unis, Fédération de Russie, Philippines, Togo et Trinité-et-Tobago.

La dixième session de la CNUCED poursuivra son débat général cet après- midi à 15 heures.

Débat interactif

MICHEL CAMDESSUS, Directeur général sortant du Fonds monétaire international (FMI), à qui le Secrétaire général de la CNUCED a rendu hommage, s’est dit heureux de l’initiative de la CNUCED visant à offrir aux collègues les plus proches de la famille des Nations Unies la possibilité de donner leur avis et de partager, dans le cadre de cette réunion, l’expérience de leurs institutions, les leçons qu’ils ont tirées de la crise des années 97 et 98 et leurs espoirs pour l’avenir. Commentant la situation économique actuelle, M. Camdessus l’a qualifiée de paradoxale en ce sens qu’elle est caractérisée par des perspectives économiques encourageantes et par l’exclusion d’une grande partie du monde. Pour le Directeur général du FMI, cette époque offre l’occasion unique d’essayer d’identifier la dynamique de l’histoire récente du monde, qui doit être vue comme offrant de nouveaux moyens d’améliorer le bien- être de l’humanité. Il s’agit aussi de reconnaître que la pauvreté est une véritable menace à la stabilité d’un “monde mondialisé”. Il s’agit enfin de souligner la nécessité de la création d’un nouveau multilatéralisme pour éliminer cette pauvreté. Revenant sur la dynamique positive de l’histoire récente, M. Camdessus l’a caractérisée de solution efficace pour une crise financière majeure, l’apparition d’une nouvelle vision du développement et l’acceptation du fait que si la mondialisation est bien gérée, elle peut devenir une chance de taille pour le progrès du monde. En Asie, a noté M. Camdessus, on a pu voir certes les hésitations des économies asiatiques devant la crise, mais surtout leur capacité à y répondre. On a pu voir surtout l’action déterminante de la communauté internationale. La Thaïlande est un exemple probant de ce cas. Les mesures courageuses du Gouvernement thaï ont engagé l’économie dans la voie de la reprise et il faut, aujourd’hui, rendre hommage aux pays d’Asie et à toutes les économies émergentes des autres régions comme le Brésil, a estimé M. Camdessus. Ces pays, a-t-il dit, ont répondu à la crise avec un courage remarquable, surtout leurs populations.

Il ne s’agit pas de prétendre que le processus de réforme est terminé. Mais les changements fondamentaux ont été faits et les vieux styles de gouvernements ont été abandonnés. Les pays concernés ont ainsi eu la chance d’atteindre une croissance de meilleure qualité et le monde dans son ensemble a maintenant une occasion en or d’avancer de manière à paraître moins vulnérable. La crise financière a démontré l’importance qu’il y a à renforcer tous les moyens de prévention; l’importance de la force et de la détermination des réactions des gouvernements; et la capacité de la communauté internationale à réagir et à intervenir, de manière rapide, pour réduire la longueur de la crise. Ces faits tracent la voie de la stabilité dans l’avenir comme en témoigne aujourd’hui, l’ordre du jour de la réforme du système financier international. La reprise est une expérience formidable sur laquelle il faut construire, a dit M. Camdessus. Il a jugé intéressant d’observer que cette reprise s’appuie sur des développements positifs, étant donné la manière dont la communauté internationale fait face aux enjeux économiques. Pour M. Camdessus, une nouvelle vision du développement apparaît de manière progressive. Elle est d’abord composée d’une humanisation progressive des notions économiques de base. Il est admis aujourd’hui que le marché ne détient pas toujours toutes les réponses, qu’il peut présenter des failles majeures et que la croissance seule ne suffit pas. Seule une croissance d’une qualité supérieure mérite les efforts. Une telle

croissance se définit par une durabilité qui n’entraînerait pas pour autant de déséquilibres sur le plan financier et par la place centrale qu’elle accorde à la personne humaine. Cette croissance, a poursuivi M. Camdessus, doit s’accompagner d’investissements dans le domaine de l’éducation et de la santé pour améliorer le capital humain dont dépend sa durabilité. Cette croissance doit aussi promouvoir la protection de l’environnement et le respect des valeurs culturelles nationales.

Cette croissance est aussi composée d’une convergence entre le respect des valeurs éthiques fondamentales et la recherche de l’efficacité nécessaire à la concurrence des marchés. On reconnaît de plus en plus, a estimé M. Camdessus, que la démocratie participative peut optimiser l’efficacité des économies saines. On reconnaît aussi que la transparence, l’ouverture et la responsabilité sont des nécessités fondamentales à l’expansion économique. L’objectif doit donc être de réaliser une croissance peut-être plus faible mais plus efficace puisqu’elle offrirait un cadre solide où le droit devra prévaloir. L’objectif exige donc un rapport renforcé entre la stabilité macroéconomique et la réforme structurelle, d’une part, et la croissance et la réduction de la pauvreté, d’autre part. Une nouvelle vision économique se dégage donc, a insisté M. Camdessus, et de nouvelles possibilités de croissance créées, par exemple, par les technologies de l’information peuvent laisser espérer une amplification des efforts positifs sur le plan macroéconomique. Dans le même temps, une nouvelle perception de la mondialisation apparaît comme ont pu en témoigner les travaux préparatoires de la dixième CNUCED. Un appel en faveur d’une action commune pour mettre la mondialisation au service du développement se fait de plus en plus entendre. Il est donc possible aujourd’hui de percevoir la mondialisation d’une manière positive, à savoir comme la suite logique des principes économiques et des relations humaines qui ont existé et apporté la prospérité.

La question centrale est donc de se demander pourquoi si une dynamique aussi puissante existe, l’angoisse et le rejet de la mondialisation persistent? Cela s’explique, a dit M. Camdessus, par le fait que la mondialisation n’a pas encore prouvé sa capacité à surmonter la plus grande inquiétude de cette époque, à savoir, la pauvreté. Pour M. Camdessus, le fossé entre les riches et les pauvres et celui entre les pays les plus riches et les plus pauvres constituent un outrage réel, un gaspillage économique et une possibilité d’explosion sociale. La pauvreté, a-t-il dit, n’est plus inévitable pour autant que nous soyons à même de faire jouer les nouvelles possibilités pour le bénéfice des plus pauvres, grâce à la nouvelle vision économique. Comment faire sinon en respectant les priorités que les pays eux- mêmes fixent pour leur population ? Le Nord et le Sud doivent mobiliser toutes les ressources pour mettre en œuvre les promesses ambitieuses faites à l’occasion des conférences internationales des Nations Unies. En prenant immédiatement les mesures nécessaires et – demain il sera trop tard - nous améliorons les possibilités de créer de meilleures synergies entre les dépenses sociales et la croissance, a insisté le Directeur général du FMI.

Le défi est de travailler ensemble pour consolider les compétences des pays en développement et pour mobiliser les ressources voulues à l’appui de leurs efforts. Il incombe surtout de permettre aux pauvres du monde de jouer un rôle de premier plan tant il est vrai que l’appui national est capital pour la réussite des programmes mis en place par les différentes institutions. Le succès passe par le sentiment de la population nationale que les politiques relèvent de sa volonté.

Le reste du monde doit être à la disposition d’un pays qui laisse entendre qu’il a besoin d’appui. Mais comment venir à l’appui des efforts des pays les plus pauvres ? D’abord, a dit M. Camdessus, en accordant, sur le plan commercial, la priorité à l’accès aux marchés de leurs produits et en concentrant tous les efforts pour encourager les flux de capitaux privés vers les pays en développement à faible revenu. Ceci exige de ces pays qu’ils renouvellent leur engagement en faveur de la création de conditions propices et des investisseurs, qu’ils fassent tout pour tirer parti des possibilités au fur et à mesure que les pays apprennent et définissent leurs propres politiques pour attirer le secteur privé. Il faut enfin offrir le concours financier requis pour la réalisation des promesses de réduction de pauvreté. Le prétexte de lassitude en matière financière n’est plus crédible, a souligné M. Camdessus, et il est même cynique. Ce n’est pas parce que l’objectif du PNUD de 7% de l’APD n’a pas été atteint en 2000, qu’il a perdu de sa pertinence pour l’avenir. L’allégement de la dette est une initiative dont il convient de se féliciter, mais il ne devrait pas être perçu une solution de remplacement des flux de capitaux, a souligné en outre le Directeur général du FMI. Il ne faut en aucun cas en faire une mesure de substitution. Enfin, les organisations multilatérales doivent jouer leur rôle. Le FMI et la Banque mondiale ont apporté des modifications à leur fonctionnement et leur nouvelle démarche exige que l’on remonte la barre de la coopération parce que “c’est ensemble qu’il faut venir en aide aux pays désireux de soulager la pauvreté”, a dit M. Camdessus.

Pour lui, remonter la barre de la coopération équivaut à l’établissement d’un “multilatéralisme relancé et revigoré”. Fustigeant l’attitude de la communauté internationale, M. Camdessus a constaté que bien souvent elle donne d’une main ce qu’elle reprend de l’autre. Illustrant ses propos, il a, par exemple, expliqué que les mêmes gouvernements qui ont mis en place des programmes de réduction de la dette à l’intention des 35 à 40 pays très endettés n’ont pas réussi, dans le cadre de l’OMC, à lancer un cycle de négociations commerciales, voire à prendre la mesure très simple d’éliminer les barrières commerciales qui barrent l’entrée sur leurs marchés des produits des pays pauvres les plus endettés. Les progrès en la matière sont insuffisants et cohérents, a poursuivi M. Camdessus, en parlant surtout de ce qui concerne l’Afrique. Présentant certaines propositions, il s’est surtout arrêté sur celle visant à juguler les dépenses militaires et à instaurer un plafond qui ne devrait pas dépenser 1,5% du PNB en Afrique. Le monde, a-t-il dit, ne peut se payer le luxe de permettre aux incohérences de frustrer les espoirs naissants. Il faut prendre un nouvel engagement en

faveur des principes du multilatéralisme, car il s’agit du moyen le plus efficace de tirer profit des bénéfices de la mondialisation pour tous. Ceci exige que l’on porte le regard sur le système financier et économique mondial qui doit concerner toute la gamme des transactions internationales afin de créer un environnement stable dans le cadre duquel les capitaux, les investissements et l’individu pourront se mouvoir dans une grande transparence pour le bien-être commun de l’être humain.

Beaucoup à été fait depuis deux ans pour cerner ce que devrait être la nouvelle architecture financière internationale, a indiqué M. Camdessus en appelant tous les pays à assumer la responsabilité de veiller à ce que leurs économies et institutions soient à la hauteur des efforts multilatéraux pour assurer une croissance de qualité pour tous. Mais il faut surtout assurer un appui politique des gouvernements aux institutions multilatérales. Trop de gouvernements refusent d’exprimer publiquement cet appui et dans un monde où l’opinion publique se fait de plus en plus entendre et où la démagogie peut conduire à une explosion, nous échouerons tous si nous – institutions internationales - ne sommes pas perçues pour ce que nous sommes, à savoir les instruments fidèles de la communauté des nations. M. Camdessus a alors souhaité que le FMI et les autres institutions soient perçues comme tributaires de l’appui politique de leurs membres. Dans ce cadre, il a proposé la création d’un organe suprême de prises de décisions au FMI qui, a- t-il dit, fait toujours l’objet de la réticence de certains gouvernements. Pour lui, le multilatéralisme est le meilleur moyen de renforcer la cohérence des mesures prises par les institutions mais il faut aller plus loin. Le multilatéralisme est aussi la solution des problèmes de gestion de l’économie mondiale. Non pas dans l’illusion de créer un gouvernement mondial utopique mais dans l’ambition indispensable de trouver une réaction mondiale, une solution mondiale aux problèmes mondiaux inévitables.

Si jusqu’à ce jour la mondialisation a réagi aux aléas des forces technologiques et financières apparemment autonomes, l’heure a sonné, a estimé M. Camdessus, de prendre l’initiative afin que l’on parvienne à l’unité mondiale au service de l’humanité. Ceci exige l’existence d’institutions qui encouragent la réflexion et qui soient à même de garantir l’adoption de stratégies à l’échelle mondiale. Il faut faire preuve d’imagination pour que les institutions soient au service de ces objectifs et il faut, à tout le moins, procéder aux modifications voulues dans les institutions créées à San Francisco ou à Bretton Woods. Dans ce cadre, M. Camdessus a proposé de remplacer le Sommet des G7 et du G8 par une réunion des gouvernements de tous les pays représentés dans l’exécutif du FMI et de la Banque mondiale. Une telle réunion serait réellement représentative de tous les membres des ces institutions et le moyen d’établir un lien plus net et plus fort entre les institutions multinationales et un groupe représentatif des dirigeants mondiaux, a estimé M. Camdessus.

Le représentant du Royaume-Uni a observé que la crise qu’a connue l’Asie du Sud-Est était trop récente pour que l’on fasse preuve de complaisance.

M. Camdessus a montré qu’il n’y avait rien de plus urgent aujourd’hui que l’humanisation de la mondialisation, a-t-il noté, tout en soulignant que le fléau de la pauvreté doit aujourd’hui être fermement combattu, et que les pays en développement tout comme les pays développés ont chacun leurs responsabilités à cet égard.

Intervenant à son tour, le représentant des Pays-Bas a demandé de savoir quels étaient les moyens qui pouvaient être mis en œuvre pour lutter efficacement contre la pauvreté, réduire les conséquences néfastes du vieillissement des populations et les disparités grandissantes entre groupes de pays. D’autre part, il existait au départ une répartition des tâches entre le FMI et la Banque mondiale. Une coopération étroite entre ces deux institutions ne permettrait-elle pas d’épargner des moyens et de conduire des actions plus efficaces de lutte contre la pauvreté ? Un appel a été lancé sur l’attribution des crédits, qui devrait désormais se faire sur des lignes plus contraignantes favorisant la participation et l’implication du secteur privé. L’approche cas par cas, adoptée par le FMI, ne fait-elle cependant pas craindre une inégalité de traitement des différents pays ? Et ne vaudrait-il pas mieux négocier des accords avec le secteur privé et les autres partenaires plutôt que de leur imposer des lignes et des normes directrices ?

Répondant aux remarques du Royaume-Uni et des Pays-Bas, M. CAMDESSUS a déclaré que le FMI devrait avoir pour priorité l’allégement de la dette des pays pauvres très endettés. A cet égard, il faut féliciter le Royaume-Uni qui a accordé une annulation de 100% de la dette à certains pays et a refusé de couvrir les exportations et les achats d’armes de certains pays auprès de firmes britanniques. Mais il ne faut pas oublier que 79% des ventes d’armes dans le monde sont le fait des pays du G7. Concernant le type de FMI dont le monde a besoin, je pense, a dit M. Camdessus que le Fonds, tel qu’il existe aujourd’hui est tout à fait pertinent dans sa forme et sa substance. Il s’est acquitté honorablement des missions qui lui avaient été assignées, et la confiance qu’il a donnée à ses membres ne s’est pas démentie. Le FMI se réforme lui-même constamment de l’intérieur. Peut-être qu’il faudrait cependant renforcer son mandat central, qui est celui de la surveillance et non les interventions. La surveillance est au cœur des missions du FMI, qui mène cette tâche de façon simultanée dans plus de trente pays à l’heure actuelle. La gouvernance et la nouvelle architecture financière mondiale doivent être renforcées et c’est un des leitmotiv du FMI, qui insiste sur cet aspect des choses, notamment dans les pays les plus économiquement affectés. La lutte contre la pauvreté est sans aucun doute un des impératifs de ce début de siècle mais cela ne signifie pas que nous allons créer un nouveau département de la lutte contre la pauvreté. Il n’y aura pas de multiplication des tâches entre le FMI et la Banque mondiale, qui coopèrent déjà étroitement. Il ne faut donc pas s’inquiéter d’une quelconque déperdition de moyens et de ressources. En matière de prévention des crises, le FMI est engagé envers les 182 pays membres du Fonds et nous ne pensons pas qu’il fasse moins pour certains pays alors que l’on fait plus pour d’autres sous prétexte que les pays font parti de différents groupes de nations

n’ayant pas les mêmes indicateurs économiques et financiers. Quant à ses relations avec le secteur privé, il n’a jamais été de la volonté du FMI d’imposer quoi que ce soit. Sur la question de la dette et de l’accès aux marchés, on constate que l’OMC, apparemment, n’a pas pu, pour l’instant, mettre en place les termes qui permettraient aux pays en développement de tirer parti du système d’échanges multilatéral.

Prenant la parole après M. Camdessus, le représentant de l’Afrique du Sud a fait remarquer que la pauvreté détruit les compétences mêmes des pays qu’elle affecte et sape profondément leur capacité de vision socioéconomique. Les ressources de nos pays vont en s’amenuisant alors que nous menons aussi une course contre la montre. Peut-on vraiment continuer, comme le maintiennent certains, comme si de rien n’était ? L’OMC s’est avérée incapable de trouver des solutions aux vrais problèmes qui se posent aux pays en développement, notamment dans les domaines agricole et des industries à forte capacité de main-d’œuvre. Où sont les priorités et où est le véritable ordre du jour pertinent qui permettraient de résoudre les vrais problèmes ? L’Occident ne semble même pas comprendre les préoccupations des pays en développement et le devoir de solidarité semble avoir été complètement oublié.

Le représentant de la Banque du commerce et du développement est intervenu pour faire part de ses soucis sur le thème de la lutte contre la pauvreté. Intervenant à son tour, le représentant de Sainte-Lucie a demandé de savoir pourquoi les processus de l’OMC ne respectaient pas la volonté des Etats Membres des Nations Unies. Ces processus sont donc totalement perçus comme illégitimes. Pourquoi refuse-t-on de reconnaître les spécificités de certains Etats, notamment les petits Etats insulaires en développement qui sont plus vulnérables que d’autres pays ? Prenant la parole, le représentant de l’ONG “Réseau de commerce pour le tiers monde” s’est étonné que M. Camdessus ait évoqué la mise en valeur des ressources humaines. Le FMI ne semblait pas se soucier beaucoup de ce genre de questions au cours de ces dernières décennies. M. Camdessus n’aurait-il pas pu faire une honnête autocritique du rôle du FMI ces dernières années ? Et cette institution ne s’est-elle pas complètement trompée quand il a fallu réagir à la crise financière asiatique ? Les manipulateurs financiers étrangers n’ont-ils pas été la vraie cause de la crise asiatique ? Pourquoi ne pas clairement les dénoncer ? Et pourquoi accuser les pays asiatiques de “syndrome de déni ?” Où est la transparence dans les activités des institutions internationales ? Et l’Asie est-elle seule à avoir le monopole du népostisme ? Le népotisme n’existe-t-il pas dans les relations entre le Gouvernement des Etats-Unis, les intérêts de Wall Street et la direction des institutions financières internationales ? Les ajustements structurels, tels que les a imposés le FMI étaient-ils vraiment nécessaires ? Cette institution a-t-elle vraiment des raisons d’exister ?

M. CAMDESSUS a répondu en disant qu’il n’avait pas de réponses à toutes les observations qui pouvaient être faites ici. Nous nous sommes rendus partout où cela était possible pour manifester notre devoir de solidarité envers les peuples les plus affectés par la pauvreté. C’est vrai qu’il existe un besoin crucial de financement de programmes sociaux, mais il faut être conscient que seule une croissance soutenue par des structures assainies pourra dégager les ressources nécessaires à la relance sociale, a observé le

Directeur sortant du FMI. L’initiative en faveur de la réduction de la dette des pays les plus pauvres est, il faut le reconnaître, un succès du FMI qui a pu mettre en place les conditions nécessaires sans déprécier le marché de l’or. L’Afrique du Sud est un des premiers bénéficiaires de la stratégie qui a été adoptée. Personnellement, a dit M. Camdessus, la mission que j’ai accomplie à la tête du FMI a pu nous faire apparaître comme l’agent de la marginalisation de nombreux pays et de nombreux peuples. On oublie trop souvent que nous avons eu des succès dans certaines régions et pays du monde. Le fameux consensus de Washington, que l’on nous jette tous les jours à la figure, n’a, à notre connaissance, jamais existé. Nous n’avons jamais cautionné ou signé de document portant ce nom. Le consensus dont nous nous réclamons, c’est celui qui doit se faire en faveur des pauvres, qui ont trop souvent été oubliés et nous maintenons que l’espérance de développement passe par la stabilité macroéconomique. La nouvelle architecture financière doit s’articuler autour d’un pilier de stabilité sociale. Concernant les soucis des petits Etats insulaires, nous sommes conscients de leur vulnérabilité et avons inclus dans notre programme de réforme des mesures en leur faveur. Nous demandons aux Etats insulaires de nous aider à mener notre plaidoyer en leur faveur auprès de la communauté internationale. Les décisions du conseil exécutif du FMI sont prises à l’unanimité et à la majorité et il n’y a pas d’exclusion. Nous devons cependant nous assurer que tous les pays bénéficient du quota qui leur est approprié, et l’an dernier j’ai pris l’initiative de revoir la répartition des quotas du Fonds pour m’assurer qu’une représentativité équitable était assurée à tous les Etats membres. Nous ne partageons pas l’analyse qui a été faite des causes de la crise asiatique, car si nous nous étions trompés dans le diagnostic et le remède que nous lui avons apportés, la reprise n’aurait pas été si rapide à venir dans cette région. La Thaïlande et l’Indonésie ont pu redresser leurs conditions financières car les politiques qu’elles appliquaient étaient bonnes. Quant aux pays qui ont imposé des contrôles de change, nous ne les avons jamais condamnés de manière péremptoire, nous les avons simplement prévenus des risques inhérents à ce genre de politique. Le FMI et les autres institutions internationales gardent toutes leurs raisons d’être. Concernant la transparence, il n’y jamais eu de politique de deux poids deux mesures au FMI, et il est de même pour les accusations de népotisme.

Débat général

M. SAMDECH HUN SEN, Premier Ministre du Cambodge : Grâce à la détermination de sa population et de ses dirigeants ainsi qu’à l’appui des pays amis, le Cambodge a retrouvé la voie d’une nation unie, pacifique, dynamique et tournée vers l’avenir. Il commence le nouveau millénaire plein d’espoirs et d’optimisme en souhaitant contribuer à l’amélioration de la condition humaine. Le Cambodge est un petit pays caractérisé par la richesse mais aussi par une misère terrible. Il participe à cette réunion pour apprendre de tous et des délibérations qui toucheront sans doute un grand nombre de domaines. Le Cambodge reconnaît avec gratitude l’appui et l’assistance de la CNUCED dans sa tentative d’adhésion à l’OMC. Comme il s’agit d’un processus qui demande du temps, le Cambodge prie la CNUCED de

continuer d’aider tous les pays les moins avancés à accélérer ce processus en améliorant les connaissances et les capacités des négociateurs nationaux. Le Cambodge a également besoin d’aide pour identifier les marchés potentiels pour ses produits nationaux car, en dépit de la mondialisation, il faut constater la persistance de barrières commerciales telles que les subventions que certains pays offrent à leurs producteurs de produits de base. La concurrence libre s’effectue toujours à sens unique et ce, malgré les Accords de l’OMC. Il faut donc établir une série de paramètres qui permettront aux forces du marché de fonctionner réellement. Il reste beaucoup à faire pour encourager les pays en développement à utiliser leurs avantages comparatifs. L’imposition de conditions et de normes déraisonnables revient en fait à faire obstacle à la croissance et au libre commerce. L’ASEAN déploie, elle, des efforts pour encourager la circulation des biens et des personnes pour que tous les pays de la région réalisent la croissance.

Les questions de la mondialisation doivent viser, au stade ultime, un développement à visage humain. Les différents outils en la matière comme l’économie et le libre commerce doivent faire l’objet d’accords de manière segmentée. Il ne faut pas, dans ce cadre, perdre de vue les objectifs essentiels du développement durable non seulement pour certains pays mais pour toute l’humanité. La situation actuelle en matière de pauvreté montre bien que l’objectif ultime du développement durable est encore éloigné. La croissance accélérée dans quelques parties du monde ne doit pas faire oublier la nécessité de déployer des efforts en faveur des milliards de personnes qui vivent encore dans la pauvreté. Nous sommes à une croisée des chemins qui doit mener à la mise en place d’un nouveau principe de développement fondé sur les valeurs humaines et s’écarter définitivement des valeurs boursières. Outre ce nouveau principe, il faut aussi trouver la façon d’élaborer un nouvel outil de mesure des progrès accomplis comme, par exemple, un indice de consommation humaine minimum. Un élément essentiel dans l’avenir doit aussi être le rétablissement d’un sentiment de partage. Les ressources mondiales étant destinées à être limitées, le partage est donc une nécessité et non un acte de charité. Le partage doit se faire entre voisins, au niveau des pays, entre collectivités et aussi entre régions. En matière de développement, ce partage doit encourager le transfert des ressources financières et technologiques ainsi que l’ouverture des marchés et ce, sans condition. Pour leur part, les pays en développement doivent jouer leur rôle dans la protection des droits de l’homme et de l’environnement.

M. SUPATCHAI PANITCHPAKDI (Thaïlande, Président de la Xe CNUCED) : Certains pays à faible revenu sont en train d’être abandonnés par le processus de mondialisation actuel, ce qui accroît davantage leur marginalisation sur la scène internationale. La communauté internationale devrait en être préoccupée. Mais les effets négatifs de la mondialisation n’affectent pas seulement les pays les plus pauvres, et la crise financière que l’Asie a connue au cours de la deuxième moitié des années 90 a clairement démontré que même les pays en développement ayant connu une croissance accélérée étaient aussi vulnérables. Cette expérience a, d’autre part, montré qu’une crise régionale pouvait rapidement s’étendre et affecter le monde entier. La dixième session de la CNUCED est une occasion unique de faire le point sur la mondialisation et d’améliorer la connaissance que nous

avons de la relation entre ce phénomène et le processus de développement. Pendant de longues années, les objectifs de la CNUCED et ceux de l’Accord général sur les tarifs douaniers (GATT ) et plus tard de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), ont été perçus comme divergents par certains observateurs, alors que pour nous, la CNUCED et le GATT/OMC sont complémentaires par nature. Et à l’aube de ce nouveau siècle, ce constat est plus que jamais fondé et valable, les rôles de la CNUCED et de l’OMC devenant convergents. Le système commercial multilatéral que nous devons promouvoir, doit se baser sur certaines caractéristérisques fondamentales : il devrait, entre autres, servir les intérêts de tous ses membres, s’adapter aux nouvelles réalités et être cohérent et pertinent vis-à-vis des objectifs de développement de la communauté mondiale.

Pour les pays en développement, la poursuite des opportunités commerciales ne devrait pas simplement se limiter à un besoin d’expansion commerciale, mais, fait plus important, devrait viser la promotion du développement et l’amélioration de la qualité de la vie. Pour ce faire, les pays en développement, et notamment les moins avancés d’entre eux, doivent être en nombre de prendre part de manière efficace au système commercial multilatéral. En tant qu’institution dont les activités portent sur la recherche et le savoir en matière économique et financière, la CNUCED occupe une position unique qui lui permet de jouer un rôle dirigeant dans la préparation des pays en développement à faire face aux défis résultant de leurs actions aux plans du commerce et de la finance. Elle peut, par exemple, les assister à préparer et à mener leur processus d’adhésion à l’OMC. Le soutien de la CNUCED, grâce à ses programmes de coopération technique et analytique, peut, d’autre part, aider les pays dont la survie dépend d’un ou de deux produits de base, à tirer un maximum de profits de leur participation au cadre international d’échanges commerciaux. L’après-Bangkok doit assurer une CNUCED forte, crédible et pertinente pour faire des pays en développement des partenaires égaux et bien préparés. Pour ce faire, nous pensons que trois points doivent être relevés : le premier est que le débat sur la politique économique à la CNUCED doit viser des approches concrètes permettant la résolution des questions de développement. Pour y parvenir, nous devons dépolitiser le dialogue entre pays développés et pays en développement, et travailler dans un esprit d’unité et de solidarité. Ensuite, les analyses et les recherches indépendantes entreprises par la CNUCED pourraient être prises comme une bonne base et un objectif désirable pour créer des consensus sur les questions mondiales de développement. Enfin, nous pensons que le travail de la CNUCED devrait être au maximum accompli dans un esprit et avec une approche de partenariat et d’actionnariat multiple et diversifié, bénéfique à tous, ceci pour permettre à toutes les composantes sociales, aux ONG, au secteur des affaires, aux intellectuels et aux autres groupes et parties prenantes de jouer des rôles appropriés dans l’élaboration des stratégies, la compréhension des nouvelles questions qui se posent et la conduite des activités de coopération technique et de développement des ressources humaines. Le Sommet de Bangkok doit, en bref, veiller à mettre la CNUCED sur la voie qui la rendra capable de faire face aux défis du XXIe siècle.

M. RUBENS RICUPERO (Secrétaire général de la CNUCED ) : l’Asie est sortie de la profonde crise qui l’avait affectée. Elle l’a fait par le déploiement d’efforts soutenus, de sacrifices et grâce aussi à la coopération internationale. Les vertus fondamentales que l’on trouve derrière le redressement des économies d’Asie demeurent cependant celles dont parle la sagesse et le bon sens : le sens de l’épargne, de bonnes politiques macroéconomiques, l’investissement dans les ressources humaines, la promotion des exportations et le partenariat entre secteurs public et privé. L’interdépendance des nations et des économies s’est une fois de plus manifestée au moment de la crise financière asiatique et au moment de la recherche de solutions à ce phénomène dont les conséquences ont affecté le monde entier. La cohérence a été un mot et un élément essentiel de la résolution des troubles qu’a connus l’Asie du Sud-Est. Aurait-on pu appliquer des politiques plus cohérentes permettant de trouver des équilibres entre les différents aspects financiers, monétaires et commerciaux, qui auraient pu épargner à la région les troubles qu’elle a traversés ? La stratégie du développement durable a parfois été handicapée par l’application sélective des décisions qui, si elles avaient été totalement mises en œuvre, auraient permis le développement de toutes les parties du monde. Il faut, d’autre part, reconnaître aujourd’hui qu’il n’y a pas un ensemble de remèdes immuables ou de paradigmes incontournables qui doivent obligatoirement s’appliquer partout en matière de développement. Le développement est une question de patience, mais aussi de solidarité. Nous savons qu’il y aura toujours à certaines périodes, des pendants, mais avons-nous le droit moral d’accepter ou de nous résigner à ce qu’il y ait des perdants absolus ? Peut-on prétendre n’avoir aucune responsabilité en la matière et se contenter de regarder des millions d’êtres humains sombrer dans le désespoir le plus total ? Ne doit-on pas dire clairement que le jeu de la concurrence exige, comme tous les jeux, des règles claires et des arbitres impartiaux ? Ne faudrait-il pas reconnaître qu’il y a un travail d’éducation et de patience à faire dans les coulisses pour permettre aux êtres humains et aux pays de se donner les moyens de comprendre et de se faire compétition ? N’y a-t-il pas une menace qui plane sur la justice internationale, qui devrait présider aux relations entre êtres humains ? Mme Ogata du Haut Commissariat pour les réfugiés, disait de manière pertinente qu’il n’y aura pas de mondialisation digne de ce nom tant qu’il n’y aura pas de fin aux différentes formes de génocide que connaît le monde. C’est pourquoi, en ce qui nous concerne, ne parlons-nous jamais de mondialisation sans parler d’interdépendance.

Il y a une espèce d’arrogance, en ce moment, du grand capital. La CNUCED pense que les économies émergeantes ne peuvent réaliser leur potentiel de croissance sans acquisition de capitaux et de connaissances techniques étrangères. Dans l’une des déclarations à la première CNUCED, on avait déjà constaté que les besoins des pays en développement dépassaient toujours de loin les moyens et les recettes qu’ils pouvaient générer grâce à travers leurs activités économiques. Le rapport de la CNUCED de l’année dernière a montré que le déficit commercial des pays en développement était en moyenne plus élevé (3% du PNB) que durant les années 70. Les raisons de ces mauvaises performances sont souvent dues à la chute des cours des produits de base, et parfois du choix de mauvaises politiques. Mais il faut clairement reconnaître qu’une part importante du blâme doit être placée sur la manière

déséquilibrée dont la libéralisation du commerce international a été menée. Le Professeur Harold Brown, de l’université de Princeton écrivait de manière pertinente, que l’on avait donné au système commercial multilatéral les moyens de fonctionner en en excluant délibérant les secteurs clés de l’agriculture, des textiles et de la confection. Durant de longues années, la CNUCED a été la seule voix à attirer l’attention sur ce problème. Mais aujourd’hui, d’autres voix se joignent à nous, notamment celles de Mme Clare Short, Ministre de la coopération et du développement du Royaume-Uni et de Mike Moore, le Président de l’OMC, qui a tenu un discours proche du nôtre lors de la réunion des Ministres du Groupe des 77 et de la Chine à Marrakech. Il en a été de même du Président Clinton à Davos et de M. Pascal Lamy, le Commissaire européen au commerce, à Bruxelles.

Le rôle de la CNUCED est clair. C’est une organisation basée sur la connaissance et le consensus, qui devrait aider les pays en développement à construire les institutions dont ils ont besoin pour les aider et les assister à développer les capacités indispensables à la formulation des politiques commerciales, d’investissement et économiques. Ceci les aiderait à mener des négociations fructueuses avec leurs partenaires et de tirer le meilleur avantage de ces négociations. Pour atteindre cet objectif, la CNUCED se doit de mener des recherches et des analyses de première qualité, qui seront cependant complétées par des discussions et des consultations avec des experts extérieurs et des échanges avec d’autres organisations. Ceci ouvrirait la voie au consensus entre différents pays situés à des niveaux de développement différents. Ce début de siècle est marqué par une profonde inquiétude née de la mondialisation perçue comme une menace aux valeurs humaines et à la possibilité d’une vie riche, épanouie et pleine. Cette inquiétude doit être traitée dans le cadre d’un dialogue systémique, structuré, qui doit être rapidement initié entre les gouvernements, les organisations internationales, et toutes les personnes concernées où qu’elles se trouvent. Nous devrions à cet égard nous inspirer des “Cahiers de doléances “ de la Révolution française, dans lequel le petit peuple et les autres acteurs sociaux venaient exprimer leurs angoisses et leurs besoins. Aujourd’hui, nous appellerons ce cahier “Cahier d’espérances”.

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