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SG/SM/7247

RECONNAITRE LE PROBLEME DU SIDA, C'EST DEJA S'Y ATTAQUER DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL AUX PARTENAIRES INTERNATIONAUX CONTRE LE VIH/SIDA EN AFRIQUE

6 décembre 1999


Communiqué de Presse
SG/SM/7247


RECONNAITRE LE PROBLEME DU SIDA, C'EST DEJA S'Y ATTAQUER DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL AUX PARTENAIRES INTERNATIONAUX CONTRE LE VIH/SIDA EN AFRIQUE

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La déclaration suivante a été faite par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, à l'ouverture de la réunion consacrée aux partenariats internationaux contre le VIH/sida en Afrique:

Nous savons tous pourquoi nous sommes réunis ici, même si ceux qui ne vivent pas en Afrique ne peuvent pas imaginer la catastrophe humanitaire qui s'y produit. Pourtant, l'urgence est telle que nous devons agir maintenant et agir résolument, et que la communauté des nations doit s'engager de toutes ses forces dans cette lutte.

Il y a vingt ans, le monde n'avait pas encore entendu parler du sida. Aujourd'hui, la pandémie — imprévisible, impensable et d'une cruauté sans nom — est devenue, particulièrement en Afrique, une tragédie que nous avons bien du mal à appréhender, sans même parler de la maîtriser.

Plus de la moitié des personnes contaminées par le VIH vivent en Afrique australe et orientale, où l'on compte moins de 5 % de la population mondiale. C'est dans cette région que se sont produits 60 % de tous les décès imputables au sida. C'est là aussi que toute une génération d'enfants est privée de parents du fait de la maladie. À la fin de l'année, l'épidémie aura fait onze millions d'orphelins dans le monde — 90 % rien qu'en Afrique.

Il s'agit d'un véritable fléau qui s'est abattu sur des millions de personnes et leurs familles. L'épidémie ruine l'économie des pays, emporte les soutiens de famille et fauche ceux qui prennent soin des jeunes, des personnes âgées et des infirmes. Elle détruit les forces vives de la société.

Le sida appauvrit encore des sociétés déjà démunies et les rend ainsi encore plus vulnérables. Il ouvre la porte à la discrimination, aux préjugés et, souvent, aux atteintes aux droits de l'homme. Il vole à l'Afrique non seulement son présent mais aussi son avenir.

Une action à la mesure de ce drame sans précédent s'impose, et elle doit venir de chacun d'entre nous, qui que nous soyons et où que nous nous trouvions. Une action qui montre que nous n'avons pas oublié le sens du mot humanité.

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L'épidémie est certes terrible mais nous ne sommes pas totalement impuissants. Animés par l'espoir et la foi, certains nous montrent déjà la voie. Et c'est souvent l'Afrique qui mène la contre-attaque.

La plupart des gouvernements africains ont compris que la première bataille qu'il leur faut gagner, s'ils veulent remporter la guerre contre le sida, consiste à briser le mur du silence et à vaincre les préjugés. Ils savent que reconnaître l'existence du problème, c'est déjà s'y attaquer. Ils ne craignent plus d'en parler ouvertement et s'efforcent d'enrôler tous les secteurs de la société dans la lutte.

En Ouganda, la lutte contre le sida est une priorité absolue. Aucun moyen n'est épargné pour diffuser le message, depuis la déclaration présidentielle jusqu'aux campagnes dans les médias. Ainsi, aucun Ougandais n'ignore plus ce qu'est le sida ni ce qu'il faut faire pour enrayer sa propagation. Grâce à cet effort, l'Ouganda est le premier pays d'Afrique où le niveau de contamination a cessé de progresser.

Au Botswana, le Président Mogae a lancé l'an dernier un plan national de lutte contre le sida, qui est financé à 80 % par des fonds botswanais. Au Lesotho, le budget consacré à la lutte contre le sida a été doublé. En Namibie, le cabinet a approuvé un nouveau programme national de lutte contre le sida, tandis qu'en Afrique du Sud, un nouveau partenariat associant tous les secteurs du Gouvernement et de la société civile a été lancé en octobre dernier. Ces quelques exemples montrent que les pays africains ont traduit leurs paroles en actes.

Les groupes communautaires et les organisations non gouvernementales font un travail remarquable en Afrique, tant pour empêcher la maladie de se propager que pour atténuer les souffrances qu'elle provoque. Des groupes comme Women and AIDS Support Network, au Zimbabwe, éduquent, conseillent et organisent les femmes et les jeunes pour les aider à prendre des décisions concernant leur santé en toute connaissance de cause; à parler à leur partenaire sexuel du VIH et de la sexualité sans risques; et à faire pression sur les responsables gouvernementaux pour qu'ils offrent aux femmes de meilleurs services en matière de santé. Le réseau apporte aussi des secours aux femmes dont la vie a été bouleversée par le VIH/sida — qu'elles soient elles-mêmes contaminées ou qu'elles aient à s'occuper de parents malades.

Les femmes qui participent à ce réseau contribuent à faire comprendre au Zimbabwe — et au reste du monde — que le sida se nourrit de l'injustice dont les femmes sont victimes. Une de leurs initiatives — couronnée de succès — a consisté à faire circuler une pétition pour convaincre le Gouvernement de distribuer des préservatifs féminins dans tout le pays.

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Les entreprises privées ont elles aussi un rôle crucial à jouer — elles peuvent fournir des locaux pour sensibiliser leurs employés au VIH, offrir aide et protection à leurs employés et montrer la voie à suivre dans les communautés dans lesquelles elles sont implantées.

Au Nigéria, la société pétrolière Chevron a adopté une stratégie de prévention du VIH se caractérisant par la créativité et la persévérance, qui s'adresse non seulement à son personnel mais aussi à l'ensemble de la collectivité.

En Afrique du Sud, Eskom, une compagnie de production d'électricité qui emploie plus de 37 000 personnes, fait de la prévention du VIH/sida un de ses chevaux de bataille depuis déjà six ans. Elle est maintenant en mesure d'offrir une aide à ceux de ses employés qui sont atteints du sida et à leur famille, et finance des dispensaires qui offrent des services de dépistage et de surveillance du système immunitaire et des traitements médicaux.

Au Zimbabwe, la société Rio Tinto a pris des mesures pour protéger ses employés : elle a constitué des groupes de volontaires qui conseillent leurs collègues et organisent des campagnes de sensibilisation. De plus, elle distribue des préservatifs à ses mineurs, en majorité des hommes qui vivent séparés de leur épouse pendant de longues périodes.

Et dans toute l'Afrique australe, des projets de recherche médicale, d'éducation et d'action sociale bénéficient de l'appui du nouveau partenariat entre le secteur public et le secteur privé intitulé "Assurer l'avenir", auquel la société Bristol- Myers Squibb s'est engagée à consacrer 100 millions de dollars au cours des cinq prochaines années.

Tous ces exemples sont encourageants, mais les mesures qu'ils décrivent sont loin d'être suffisantes. La crise a pris une telle ampleur qu'elle nécessite la mise en place d'une stratégie globale coordonnée. Tel est le but de la présente réunion : prévoir un dispositif qui soit à la mesure de l'ampleur qu'a pris le sida en Afrique et qui fasse intervenir un partenariat entre tous les protagonistes — gouvernements, milieux d'affaires, organisations internationales, organisations non gouvernementales et populations locales. L'action entreprise devra être menée sur tous les fronts.

Au cours de l'année écoulée, nombre d'organismes et de donateurs ont pris conscience de la nécessité absolue d'une telle stratégie, sans laquelle tout espoir de vaincre le sida en Afrique serait perdu. Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est précisément pour formuler une stratégie et construire le partenariat qui la portera.

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Nos objectifs prioritaires doivent, à mon sens, être les suivants :

— Rompre la conspiration du silence à tous les niveaux;

— Répondre aux besoins des individus déjà atteints et des familles;

— Ouvrir aux sociétés africaines l'accès à des traitements efficaces, dont le prix soit à la portée de leurs moyens;

— Accélérer les travaux de recherche sur un vaccin;

— Mettre tout en oeuvre pour empêcher la maladie de se propager.

Pour atteindre ces objectifs, il nous faut créer de nouvelles institutions et de nouveaux mécanismes et, bien entendu, mobiliser des ressources.

C'est la première fois, aujourd'hui, que se trouvent rassemblés tous ceux qui doivent former un partenariat pour mettre en place un dispositif d'intervention global. Aussi paradoxal que cela puisse être, c'est la première fois depuis qu'a commencé la lutte contre le sida que des membres des gouvernements africains se trouvent réunis avec l'ONU et les donateurs de l'OCDE, avec des représentants du secteur privé et des fondations et avec des membres de la société civile internationale. Une occasion unique nous est ainsi donnée à chacun de nous instruire par l'expérience des autres, d'entendre ce que les autres ont à offrir et de comprendre ce que les autres attendent de nous.

L'heure n'est plus aux déclarations cocardières ni aux querelles chauvines; le moment est venu d'oeuvrer ensemble à l'élaboration d'une action coordonnée au niveau des pays et à la formulation d'une stratégie mondiale.

Chacun de nous a son rôle à jouer.

Premièrement, les activités effectives de soins et d'éducation ne peuvent être assurées que par les populations locales, travaillant au sein de leur communauté. C'est sur elles qui sont les plus pauvres et les plus faibles que pèse la charge la plus lourde. Nous inspirant de leur exemple, nous devons tous nous faire leurs partenaires. Nous devons être à l'écoute de leurs besoins et des évaluations qu'ils en font, et leur donner l'appui stratégique qu'ils méritent amplement.

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Deuxièmement, les dirigeants politiques en Afrique doivent continuer à montrer le chemin et à tenir la barre afin de dynamiser les actions entreprises sur le plan national. Ce rôle de direction ne saurait venir de l'extérieur. C'est aux gouvernements africains qu'il incombe de prendre l'initiative de faire cesser l'opprobre qui s'attache au sida dans l'esprit des individus, quelle que soit la couche de la société à laquelle ils appartiennent et ainsi d'amener chacun, hommes, femmes et enfants, à comprendre qu'il faut mettre son honneur à affronter cette maladie et que celle-ci ne doit pas faire honte. C'est à eux qu'il incombe de convaincre les donateurs et les sociétés partenaires qu'ils ne plaisantent pas et que combattre le sida est leur priorité absolue.

Troisièmement, les organisations non gouvernementales — nationales et internationales — doivent être associées, à tous les niveaux, à l'élaboration et à l'exécution des politiques. Elles sont des partenaires précieux, tant pour la défense de la cause que pour l'action sur le terrain. Elles doivent parler au nom des hommes, des femmes et des enfants touchés par l'épidémie et veiller à ce que ce soient les besoins et non la notoriété qui guident tous nos efforts; elles doivent exiger la transparence et la responsabilité de la part des gouvernements, de la part des organisations internationales et de leur propre part.

Quatrièmement, les sociétés et les fondations doivent s'employer, conjointement avec les autres partenaires, à rechercher les moyens d'atténuer les pires effets de l'épidémie, à aider à financer et gérer des programmes de prévention et de traitement, à protéger et éduquer la main-d'oeuvre locale, à éduquer et convaincre leurs propres actionnaires et clients, à répondre aux besoins de médicaments abordables et à stimuler la recherche en vue d'un vaccin.

Cinquièmement, nous-mêmes, au sein du système des Nations Unies, devons faire de la lutte contre le sida une priorité authentique de notre travail en Afrique, au même titre que notre travail en faveur de la paix et de la sécurité. Chacun dans son secteur propre doit être la source des pratiques optimales et l'autorité de référence : l'OMS et le FNUAP dans le domaine de la santé; l'UNICEF pour ce qui est de répondre aux besoins des enfants et des jeunes, le PNUD et la Banque mondiale pour ce qui concerne la politique sociale et économique, le PNUCID pour ce qui concerne la lutte contre la propagation de la maladie par le biais de la drogue; l'UNESCO dans le domaine de l'éducation.

Et nous tous — fonds, programmes, organisations — devons coordonner nos efforts. J'adresse aujourd'hui un appel à tous les organismes des Nations Unies qui mènent des activités en Afrique subsaharienne pour leur demander d'accorder la priorité absolue au problème du sida et de se laisser inspirer et diriger par l'ONUSIDA.

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Ceci veut dire, bien entendu, que l'ONUSIDA doit être prêt à jouer un rôle dirigeant, tant sur le plan intellectuel que sur le plan organisationnel, et qu'il doit en être capable. C'est là un partenariat qui doit représenter plus que la somme des parties qui le composent.

Enfin, les donateurs — les pays de l'OCDE — doivent consacrer davantage de ressources à la lutte contre l'épidémie. Les sommes que la communauté internationale affecte à la lutte contre le sida en Afrique ne sont même pas une goutte d'eau dans l'océan si on les compare aux 22 000 milliards de dollars auxquels se chiffre le produit national brut combiné des pays à fort revenu. Le défi du sida ne pourra pas être relevé sans ressources.

Toutefois, les donateurs peuvent et doivent faire plus que fournir des ressources. Ils doivent adopter des politiques et des priorités adaptées aux besoins des pays touchés. Et ils doivent dans leurs propres pays faire prendre conscience du fait que le sida sévit encore, qu'il est bien plus qu'un problème médical et bien plus qu'un problème national, qu'il est une menace qui pèse sur une génération tout entière — et même sur l'ensemble de la civilisation humaine.

Aujourd'hui commence une période de planification et d'élaboration intenses. Pendant les deux prochains jours, nous allons nous mettre en quête des moyens qui nous permettront le mieux de faire face à l'épidémie, en tant qu'individus, en tant que membres de nos organisations respectives et de nos gouvernements, et en tant que partenaires.

D'ici au mois de mai prochain, au plus tard, il faut que nous nous soyons mis d'accord sur un plan d'action. Et nous devrons être à même, tous les ans, de signaler des progrès importants sur la voie de la réalisation de nos objectifs. Nous n'avons que cinq ans pour atteindre l'objectif que l'Assemblée générale a fixé en juin dernier lors de sa session extraordinaire — à savoir de réduire d'un quart avant l'année 2005 l'incidence de la maladie parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans dans les pays les plus touchés.

Jusqu'à présent, nous avons échoué en Afrique. Décidons maintenant que dorénavant l'échec n'est pas une option.

Je vous remercie.

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