AG/961

L'ASSEMBLEE DRESSE UN TABLEAU SOMBRE DE LA SITUATION DES ENFANTS DANS LE MONDE DIX ANS APRES L'ADOPTION DE LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L'ENFANT

11 novembre 1999


Communiqué de Presse
AG/961


L'ASSEMBLEE DRESSE UN TABLEAU SOMBRE DE LA SITUATION DES ENFANTS DANS LE MONDE DIX ANS APRES L'ADOPTION DE LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L'ENFANT

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La pauvreté identifiée comme l'obstacle principal à la protection et la promotion universelles des droits de l'enfant

Le sort des millions d'enfants dans le monde qui souffrent de la pauvreté, de malnutrition, d'analphabétisme, du fléau de la guerre, dont le travail est exploité ou qui sont abusés et exploités sexuellement, a été rappelé ce matin à l'Assemblée générale à l'occasion de la célébration du dixième anniversaire de l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant. Si des progrès ont pu être réalisés, notamment d'un point de vue législatif, de nombreux obstacles subsistent dans la pratique à une protection universelle des droits de l'enfant. Pour la Vice- Secrétaire générale de l'ONU, Mme Louise Fréchette, le plus grand ennemi des droits de l'enfant est la pauvreté. Partant, elle a appelé les gouvernements à agir dans une multitude de domaines en s'attaquant à la racine des problèmes, et en particulier à prévenir ou régler au plus tôt les conflits armés, à enrayer l'épidémie du sida, à mettre fin au trafic de drogues, à veiller à ce que l'Internet ne facilite pas la pornographie enfantine, et à stigmatiser le tourisme sexuel. Appuyant les propos de la Vice-Secrétaire générale, le représentant du Viet Nam, qui parlait au nom du Groupe asiatique, a rappelé que 130 millions d'enfants n'ont pas accès à l'éducation de base, 200 millions d'enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition, la moitié des 21 millions de réfugiés dans le monde sont des enfants et environ 20 millions d'enfants ont été déplacés par les conflits. Le représentant de la Croatie, qui parlait au nom du Groupe des Etats d'Europe orientale, a ajouté que deux millions d'enfants ont été tués ces dix dernières années dans des conflits. Le réprésentant de St Kitts-et-Nevis qui parlait au nom du Groupe des Etats d'Amérique latine et des Caraibes a conclu que cet anniversaire loin d'être une occasion de célébration doit plutôt être un moment de réflexion sur la nécessité d'intensifier les causes profondes de la situation actuelle et d'y porter remède. Le représentant de l'Algérie, qui parlait au nom du Groupe africain, a indiqué que la Charte africaine qui interdit le recrutement des enfants de moins de 18 ans dans les forces armées entrera en vigueur le 28 novembre prochain.

(à suivre 1a)

- 1a - AG/961 11 novembre 1999

Pour la représentante du Liechtenstein, qui parlait au nom du Groupe des Etats d'Europe occidentale et autres Etats, à certains égards, la Convention n'offre pas la protection espérée au départ. Elle a exprimé l'espoir de voir aboutir le plus rapidement possible les travaux des deux Groupes de travail de la Commission des droits de l'homme sur l'élaboration des deux protocoles à la Convention - sur l'implication des enfants dans les conflits armés et sur l'exploitation sexuelle des enfants. La représentante a estimé, d'autre part, que la composition actuelle du Comité des droits de l'enfant, qui comprend 10 membres, n'était pas suffisante pour assurer l'exécution rapide et effective des tâches qui incombent au Comité et a plaidé en faveur d'un élargissement du Comité à 18 membres.

Répondant à l'appel lancé par la Vice-Secrétaire générale qui a pressé les Etats-Unis - le seul Etat qui avec la Somalie ne l'a pas encore fait - à ratifier la Convention, la représentante des Etats-Unis a déclaré que bien que son pays ne soit pas partie à ce Traité, il est fermement engagé en faveur de la protection des enfants partout dans le monde.

Le Président de l'Assemblée générale, M. Theo-Ben Gurirab, a, de son côté, appelé la communauté internationale à agir dès maintenant, soulignant que ce que vivent les enfants dans les premières années de leur vie détermine pour le meilleur ou pour le pire leur croissance et leur place dans la société, leur rôle et leur caractère. Il a invité l'Assemblée générale à faire de la protection des droits de tous les enfants une priorité tout au long de l'année.

Les représentants des pays suivants ont fait une déclaration: Algérie (au nom du Groupe africain), Viet Nam (au nom du Groupe asiatique), Croatie (au nom du Groupe des Etats d'Europe orientale), Saint-Kitts-et-Nevis (au nom du Groupe des Etats d'Amérique latine et des Caraïbes), Liechtenstein (au nom du Groupe des Etats d'Europe occidentale et autres Etats) et Etats-Unis, en tant que pays hôte.

L'Assemblée générale poursuivra ses travaux le lundi 15 novembre à 10 heures. Elle devrait examiner la question de la coopération entre l'ONU et l'Organisation internationale de la francophonie.

CELEBRATION DU DIXIEME ANNIVERSAIRE DE LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L'ENFANT (Point 165)

Informations de base

Traité international le plus largement ratifié de l'histoire, la Convention relative aux droits de l'enfant comptait, au 1er août 1999, 191 Etats parties et un Etat signataire. Adoptée par l'Assemblée générale à l'unanimité le 20 novembre 1989, elle transforme en obligations juridiquement contraignantes les droits de l'enfant à bénéficier d'une protection spéciale et de possibilités et facilités lui permettant de se développer sainement et normalement. La Convention consacre quatre grands principes qui visent à faciliter son interprétation et à orienter les programmes nationaux de mise en oeuvre. Ainsi, le message essentiel qu'elle entend faire passer tient dans l'égalité des chances qui devrait être reconnue à tous les enfants. Autre idée maîtresse, l'intérêt supérieur de l'enfant qui doit être une considération primordiale lorsque les Etats prennent des décisions qui intéressent les enfants. La Convention consacre en outre le droit à la vie, à la survie et au développement et stipule que l'enfant devrait être libre d'avoir des opinions sur toute question l'intéressant, opinions qui devraient être dûment prises en considération "eu égard à son âge et à son degré de maturité", y compris dans toute procédure judiciaire ou administrative les intéressant.

Un Comité des droits de l'enfant, institué par cette Convention, se réunit régulièrement pour surveiller les progrès accomplis par les Etats parties dans l'exécution de leurs obligations. Il peut faire des suggestions et des recommandations aux gouvernements et à l'Assemblée générale sur la manière d'atteindre les objectifs de la Convention. Des groupes de travail de la Commission des droits de l'enfant rédigent actuellement deux protocoles à la Convention, l'un empêchant le recrutement des enfants de moins de 18 ans dans les forces armées ou leur participation aux hostilités, l'autre renforçant les interdictions internationales relatives à la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants. Pour ce qui est du problème de la main- d'oeuvre enfantine, les objectifs des Nations Unies sont de protéger les enfants qui travaillent, contre l'exploitation et les conditions de travail dangereuses qui compromettent leur développement physique et mental, de leur assurer l'accès à un niveau minimal d'éducation, de nutrition et de services de santé et, à long terme, d'en arriver à l'élimination progressive du travail des enfants. Poursuivant le même objectif, l'Organisation internationale du travail (OIT) a adopté en juin dernier une Convention sur l'élimination des pires formes de travail des enfants.

Déclarations liminaires

M. THEO-BEN GURIRAB, Président de la cinquante-quatrième session de l'Assemblée générale, a rappelé qu'il y a dans le monde plus de 2 milliards d'enfants dont la protection et le développement sont essentiels pour la survie de l'humanité. Nous ne pouvons pas faillir à nos enfants, car les conséquences en sont impensables. Ce que vivent les enfants au cours de leurs premières années détermine pour le meilleur ou pour le pire leur croissance et leur place dans la société, leur rôle et leur caractère, a-t-il déclaré. Depuis l'adoption de la Convention, les intérêts des enfants jouissent d'un rang de priorité élevé et la reconnaissance de leurs droits est reflétée dans les initiatives prises par les Etats Membres en leur faveur dans divers domaines. Pourtant, dans le même temps, le processus de la mondialisation qui a élargi l'écart économique et social entre les pays et à l'intérieur de ceux-ci, place les femmes et les enfants dans une situation précaire, en particulier dans les pays du tiers monde. La plupart des pays en développement font face à des problèmes économiques qui assombrissent leurs perspectives de croissance et sapent leurs espoirs de protéger pleinement un jour les droits des enfants. Le fardeau de la dette extérieure représente un autre grand obstacle au progrès social et aux soins à apporter aux enfants. Un enfant d'un pays en développement naît avec un fardeau moyen de la dette de 417 dollars, a-t-il déclaré, rappelant que l'Afrique sub-saharienne dépense davantage pour le service de sa dette qui s'élève à plus de 200 millions de dollars, que pour la santé et l'éducation de ses 306 millions d'enfants.

Le Président de l'Assemblée générale a encore souligné la discrimination et les abus dont souffrent plus particulièrement les fillettes au cours de la plus grande partie de leur vie et a plaidé en faveur d'une meilleure prise en considération de leurs besoins spécifiques. Les millions de fillettes qui continuent de se voir refuser leurs droits fondamentaux perdent la possibilité de participer à part entière à la vie politique, sociale et économique de leur pays, a-t-il observé. Il a souligné l'impact sur les enfants de l'épidémie du sida et du fléau de la guerre qui chasse des millions d'entre eux de leur foyer et de leur pays. A cet égard, il a rappelé le débat, tenu le 25 août 1999, au Conseil de sécurité qui a permis l'adoption de la première résolution du Conseil sur les enfants et les conflits armés. Le Conseil a condamné fermement le fait de viser les enfants dans les conflits armés et les abus qu'ils subissent dans une telle situation, de même que leur recrutement et leur utilisation dans des conflits armés, et a demandé à toutes les parties concernées de mettre fin à de telles pratiques. L'Assemblée générale et le Conseil économique et social, ainsi les autres organes du système des Nations Unies devraient suivre cet exemple et faire encore plus. L'Assemblée doit mener cette croisade en donnant l'exemple, a déclaré le Président qui a insisté sur le fait que la condamnation ne suffit pas en soi.

M. Gurirab a appelé les délégations à apporter leur appui à l'"Agenda pour la paix et la sécurité pour les enfants" lancé cette année par l'UNICEF. Il a encouragé le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, M. Olara Otunnu, a poursuivre sa campagne mondiale en faveur des enfants qui se trouvent dans des situation de conflit. Rappelant que les années 2001-2010 ont été proclamées Décennie internationale pour une culture de la paix et de la non-violence pour les enfants du monde, il a plaidé pour que cette déclaration d'intention soit traduite en un plan d'action viable soutenu par des ressources généreuses et un appui indéfectible de la communauté internationale. Enfin, M. Gurirab a appelé l'Assemblée à faire en sorte que les droits et le bien-être des enfants constituent une responsabilité continue et une priorité tout au long de l'année.

Mme LOUISE FRECHETTE, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, a estimé que l'adoption et la ratification quasi universelle de la Convention relative aux droits de l'enfant constituent une victoire merveilleuse pour les enfants du monde. Réaliser véritablement la ratification universelle de la Convention serait une bonne façon d'entrer dans le prochain siècle, un siècle qui appartiendra aux enfants d'aujourd'hui, a- t-elle estimé. Dans ce contexte, elle a appelé les Etats-Unis, l'un des deux seuls pays à ne pas avoir ratifié la Convention, à le faire le plus rapidement possible. Mme Fréchette s'est réjouie du fait que les principes établis par la Convention fassent aujourd'hui partie des législations nationales dans de nombreux pays, et de ce que celle-ci ait inspiré et guidé le renforcement des normes internationales relatives aux droits de l'enfant. A cet égard, elle s'est félicitée de l'adoption en juin dernier de la Convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) interdisant les pires formes de travail des enfants. Mme Fréchette a invité tous les gouvernements à appuyer les efforts en cours en vue du renforcement de la Convention, par l'adoption de deux protocoles additionnels - sur l'implication des enfants dans les conflits armés et sur l'exploitation sexuelle des enfants.

En pratique, il reste des obstacles énormes à la protection universelle des droits des enfants. Ce qui n'est pas étonnant, puisque de toutes les questions difficiles qui sont examinées à l'ONU, aucune n'a le visage d'un enfant, a poursuivi la Vice- Secrétaire générale. Le plus grand ennemi des droits des enfants est la pauvreté. Si nous tenons vraiment aux droits de l'enfant, nous devons lutter de toutes nos forces contre la pauvreté et pour le développement social, a-t-elle affirmé. Dans cet esprit, elle a appelé à prévenir ou régler au plus tôt les conflits armés, à enrayer l'épidémie de sida, à enrayer le trafic de drogue, à veiller à ce que l'Internet ne facilite pas la pornographie enfantine, et à stigmatiser le tourisme sexuel. Les droits de l'enfant ne sont pas des abstractions: leur non-respect est un drame bien réel, vécu au jour le jour, a observé Mme Fréchette. Pour faire des droits de l'enfant une réalité effective, il faut agir dans une multitude de domaines. Les droits de l'enfant sont, en effet, si intimement liés entre eux et si étroitement liés à la paix et au développement, que si l'on parvient à réaliser partout le respect de tous les droits de tous les enfants, on aura radicalement changé le monde pour tous les êtres humains, quel que soit leur âge. Mettre l'accent sur les droits de l'enfant, c'est s'attaquer, à la racine, à toute une série de problèmes qui se trouvent au coeur de la mission des Nations Unies, a-t-elle déclaré.

Tous les organismes de l'ONU jouent un rôle. Désormais, dans les opérations de maintien de la paix et les missions humanitaires, le sort des enfants fait officiellement l'objet d'une attention particulière. Le Conseil de sécurité s'est penché sur la situation des enfants dans le cadre de ses débats thématiques et le Secrétaire général a pris une mesure décisive en excluant la participation d'enfants de moins de 18 ans aux opérations de maintien de la paix de l'ONU, a rappelé Mme Fréchette. Mais, a-t-elle souligné, ces efforts n'ont de sens que si les gouvernements et la société civile prennent le relais. Elle a invité les gouvernements à rester fidèle aux engagements pris lors des grandes conférences des années 90 et à avoir la situation des droits de l'enfant à l'esprit lors des conférences de suivi et du Sommet du millénaire. S'ils continuent d'intégrer les dispositions de la Déclaration relative aux droits de l'enfant dans leur législation nationale, s'ils font connaître ces dispositions le plus largement possible et, surtout, s'ils mettent réellement en pratique les grands principes du droit à la vie et au développement, de la non discrimination, et de la primauté de l'intérêt de l'enfant, les Etats auront rempli leurs obligations, a-t-elle ajouté. Le mouvement actuel doit se poursuivre et prendre de l'ampleur car les droits de l'enfant sont l'affaire de tous. C'est aujourd'hui qu'il faut commencer à les protéger, non seulement du fléau de la guerre mais de toutes les violations de leurs droits qui leur sont reconnus par la Déclaration et ses 191 signataires, a conclu Mme Fréchette.

Déclarations

M. ABDALLAH BAALI (Algérie) s'exprimant au nom du Groupe africain, a regretté qu'en dépit des avancées réalisées, le constat demeure bien sombre et les perspectives ne sont guère réjouissantes en ce qui concerne le sort des enfants dans le monde. Il a notamment évoqué, pour la seule décennie qui s'achève, plus de deux millions d'enfants tués et des millions d'autres blessés, mutilés ou handicapés à vie. Il a précisé que douze millions d'enfants sont livrés à eux-même, 300 000 servent comme chair à canon dans les conflits dont ils ne comprennent ni les enjeux, ni ne connaissent les causes, et douze millions d'enfants de moins de cinq ans meurent de maladies susceptibles d'être évitées.

S'il est vrai que la communauté internationale n'est pas restée inactive, il n'en demeure pas moins que ses actions restent bien dérisoires au regard de la gravité et de l'urgence de la situation. Dans ce contexte, le représentant a fait observer que l'adoption et la ratification quasi universelle de la Convention relative aux droits de l'enfant constituent un acquis majeur que l'élaboration en cours de deux protocoles facultatifs viendra compléter, consolider et conforter.

Le représentant a souligné la contribution de l'Afrique à ce mouvement universel en faveur de l'enfant, qu'elle a accompagné quand elle ne l'a pas suscité, l'enfant occupant traditionnellement une place centrale dans la famille africaine. A cet égard, le représentant a annoncé que la Charte africaine qui interdit le recrutement des enfants ayant moins de 18 ans entrera en vigueur le 28 novembre prochain et qu'au cours du Sommet de l'OUA qui se tiendra à Lomé, il sera procédé à la mise en place d'un Comité pour la mise en oeuvre de cet important instrument. Le Sommet d'Alger lance par ailleurs un appel pressant aux Etats qui ne l'ont pas encore fait pour qu'ils signent et ratifient d'urgence la dite Charte et invite les Etats Membres à oeuvrer de concert avec l'UNICEF et le Secrétariat général de l'OUA, dans le cadre d'un protocole d'accord, à l'accéleration de la mise en oeuvre effective de la Convention relative aux droits de l'enfant. Lors de la Conférence africaine sur l'utilisation des enfants soldats, tenue à Maputo du 19 au 22 avril dernier, une déclaration condamnant le recrutement des enfants en tant que soldats et appelant au relèvement de l'âge de recrutement, même volontaire, à 18 ans a été adoptée.

Le représentant a estimé que l'Afrique ne peut régler le problème des enfants affectés par les conflits ou victimes du sous-développement, de la maladie et de la misère sans une mobilisation effective de la communauté internationale. Elle ne peut le faire non plus aussi longtemps que se poursuivra le trafic lucratif des armes, que continuera le pillage des ressources du continent, que seront contournées les sanctions imposées par le Conseil de sécurité ou l'OUA et que se montreront parcimonieux à son égard les institutions financières internationales et les investisseurs privés. Pour le représentant, la seule démarche qui vaille est celle qui consiste à s'attaquer, notamment en Afrique, aux causes sous-jacentes de la maladie et des conflits, et qui ont pour noms la pauvreté, la misère et la détresse humaine, et à oeuvrer à travers l'éducation des enfants, à la promotion de la culture de la paix ainsi que du dialogue entre les hommes.

M. PHAM BINH MINH (Viet Nam), prenant la parole au nom du Groupe des Etats asiatiques, a déclaré que l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant a été une étape décisive pour faire de l'engagement de l'Organisation des Nations Unies en faveur des droits de l'enfant, une obligation juridique contraignante et pour créer un cadre de travail légal pour leur protection et leur promotion. Il a souligné le fait que cette Convention a été ratifiée ou signée par 191 Etats en très peu de temps. Cette reconnaissance quasiment universelle de la Convention montre que les droits et les intérêts des enfants concernent toutes les nations, mais c'est aussi la preuve de la volonté des pays de prendre des mesures en faveur des enfants.

Le représentant a indiqué que le Groupe des Etats asiatiques est fier d'annoncer que tous les pays d'Asie sont devenus parties à la Convention et déploient des efforts pour se conformer aux dispositions de la Convention. Des mécanismes nationaux ont été établis, des plans d'actions nationaux ont été élaborés, des programmes d'information ont été entrepris, de nouvelles lois ou des amendements ont été adoptés pour harmoniser les législations nationales avec la Convention, a indiqué le représentant. Il a ajouté que des mesures concrètes ont été prises en faveur du développement des enfants.

M. Binh Mihn a mis l'accent sur le fait que le Groupe des Etats asiatiques participe activement aux débats relatifs aux questions concernant la promotion et la protection des droits des enfants, notamment ceux des enfants handicapés et des enfants dans les conflits armés ou des enfants qui travaillent. Le représentant a souligné le succès remarquable de cette Convention, surtout lorsqu'on pense au rôle actif que joue depuis le Comité des droits de l'enfant. Celui-ci, a-t-il précisé, a contribué à faire prendre conscience des principes et des dispositions de la Convention. Le Comité a également fait des recommandations aux Etats parties sur les moyens de traiter les problèmes liés au bien être des enfants, y compris dans le cadre de la coopération internationale. Le représentant a mis l'accent sur la coopération étroite du Bureau du Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, de l'UNICEF et des autres institutions du système des Nations Unies compétentes dans ces domaines, et ce, sur la base du Plan d'action pour renforcer la mise en application de la Convention.

Le représentant a déclaré que les programmes par pays de l'UNICEF ont été couronnés de succès dans de nombreuses régions en apportant une aide effective et efficace à des millions d'enfants, et plus particulièrement aux enfants ayant besoin d'une protection spéciale et les enfants dans les pays en développement. Par ailleurs, l'UNICEF est aussi actif en ce qui concerne le soutien aux efforts nationaux de mise en oeuvre de la Convention, telle que l'adoption de nouvelles législations et réglementations et la collecte de données sur la situation des enfants ou, en développant une culture du respect de l'enfant notamment. Le représentant a marqué son appréciation à l'ancien Directeur de l'UNICEF, M. James P. Grant pour sa contribution en faveur de l'adoption de cette Convention et du Sommet mondial pour l'enfance. Il a également remercié Mme Carol Bellamy Directrice actuelle de l'UNICEF pour les efforts qu'elle déploie sans relâche, ainsi que le personnel de l'UNICEF. Le représentant a attiré l'attention de l'Assemblée sur le fait qu'alors qu'elle commémore le dixième anniversaire de cette Convention, certaines situations ne doivent pas être oubliées. Il a rappelé à cet égard, que 130 millions d'enfants n'ont aujourd'hui pas accès à une éducation de base et que 200 millions d'enfants âgés de moins de 5 ans souffrent de malnutrition. Il a également attiré l'attention sur le fait que la moitié des 21 millions de réfugiés dans le monde sont des enfants et qu'environ 20 millions d'enfants on été déplacés par les conflits. Aujourd'hui, a-t-il déclaré, il faut également regarder en face le problème de l'exploitation et de l'abus des enfants. La Convention est parvenue à faire passer l'enfant du statut d'objet à celui de sujet mais des efforts sont encore nécessaires aujourd'hui pour réaliser pleinement ce processus et les pays de son Groupe se sont engagés à faire ces efforts.

M. IVAN SIMONOVIC (Croatie) prenant la parole au nom du Groupe des Etats d'Europe de l'Est, a déclaré qu'il était temps de se pencher à nouveau sur la notion de stratégie internationale pour la protection, la promotion et le respect du droit des enfants partout dans le monde. Il a rappelé que la Convention est un outil qui incarne une culture de respect des besoins essentiels des enfants, sans discrimination, mais que sa seule ratification reste insuffisante, car le bien-être des enfants nécessite une action politique aux plus hauts niveaux.

La tragédie des enfants affectés par les conflits armés est une question extrêmement grave et importante, a-t-il souligné. Dans près de 50 pays, des enfants souffrent de conflits armés ou de leurs conséquences. Plus de 2 millions d'enfants ont été tués ces dix dernières années, et plus de 20 millions ont été déplacés par la guerre. La protection des enfants dans les conflits armés doit être définie par des normes fixées dans des instruments internationaux. Les défis, notamment en matière d'élimination de la pauvreté et d'élimination des pires formes de travail infantile, et les difficultés concrètes pour changer la vie des enfants victimes, restent énormes a-t-il déclaré.

La Convention, dont l'action est plus lente mais plus profonde que les projets spéciaux, s'attache à apporter des changements aux législations, institutions, et attitudes. Il a expliqué qu'en dépit des difficultés causées par la transition dans beaucoup de pays de l'Europe de l'Est, des progrès avaient été accomplis dans la protection et le développement des enfants, et que tous les pays de cette région avait ratifié la Convention sur les Droits de l'Enfant, certains ayant également créé des programmes d'action nationaux.

M. JOSEPH CHRISTMAS (Saint-Kitts-et-Nevis) prenant la parole au nom du Groupe des Etats d'Amérique latine et des Caraïbes, a déclaré que les droits des enfants ne pourraient être respectés, tant que davantage d'enfants n'auraient pas un accès adéquat à l'éducation, principal composant du développement, tant que l'eau et les services de santé ne seraient pas accessibles, tant que persisteraient les écarts de revenus et l'inégalité dans l'accès aux services sociaux de base et tant qu'il y aura des conflits armés.

Cet anniversaire est plus l'occasion de réfléchir à la nécessité éventuelle de modifier nos orientations, qu'une célébration a-t-il indiqué. M.Christmas a exposé les progrès faits en Amérique latine et dans les Caraïbes dans le contexte de la Convention. La plupart des pays de la région se sont penchés sur leurs législations et certains l'ont adaptée pour s'assurer de leur conformité avec la Convention, notamment par des réformes juridiques visant la formation des juges et des personnes travaillant à la protection des enfants. M. Christmas a indiqué que des réalisations remarquables avaient été accomplies en matière de santé, notamment avec la disparition de la polio et la réduction de 95% des décès dûs à la rougeole. Le taux de mortalité infantile à la naissance est passé de 51 pour mille en 1990 à 33 pour mille en 1998 et de 60 à 41 pour mille à l'âge de cinq ans. Le taux de scolarisation primaire est à présent de 87%, et le taux de scolarisation global est le plus élevé des régions en développement, le taux de scolarisation féminin étant lui égal, voir supérieur à celui des garçons. Cependant, il est estimé qu'en 1995, il y avait encore 15 millions d'enfants de moins de 15 ans travaillant dans la région, et malgré tous les éléments positifs, les enjeux auxquels font face les enfants restent décourageants, a-t-il conclu.

Mme CLAUDIA FRITSCHE (Liechtenstein) prenant la parole au nom du Groupe des Etats d'Europe occidentale et autres Etats, a déclaré que beaucoup de raisons contraignantes ont amené à l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant et les Gouvernements à reconnaître les droits des enfants à tous les niveaux de la société et le fait que les enfants sont particulièrement vulnérables. La représentante a rappelé la lenteur avec laquelle s'est faite la prise de conscience des droits des enfants car déjà en 1924 la Société des Nations avait adopté la première Déclaration sur les droits de l'enfant et en 1948, l'Assemblée générale avait à son tour adopté une brève Déclaration en sept points sur les droits de l'enfant. Ce n'est qu'en 1989 que l'Assemblée générale a adopté la Convention relative aux droits des enfants. La représentante a toutefois mis l'accent sur la rapidité avec laquelle cette Convention a été signée ou ratifiée.

Mme Fritsche a rappelé que la Convention affirme que les enfants sont des sujets de droit et que l'intérêt supérieur de l'enfant doit guider les mesures prises dans de nombreux domaines mais elle a fait remarquer qu'à certains égards, la Convention n'offre pas la protection espérée au départ. C'est pourquoi la représentante a souligné l'importance de l'effort en cours au sein des deux Groupes de travail de la Commission des droits de l'homme et a exprimé l'espoir de voir leurs travaux aboutir le plus rapidement possible.

Le Groupe des Etats d'Europe occidentale adresse ses félicitations au Comité des droits de l'enfant pour la campagne de sensibilisation qu'elle mène et pour ses efforts visant à faire du bien-être des enfants une priorité politique d'un rang élevé. La représentante a regretté que la composition actuelle du Comité, limitée à 10 membres, ne soit pas suffisante pour assurer une exécution plus rapide et effective des tâches qui incombent au Comité. Elle a encouragé les Etats parties à la Convention qui n'ont pas encore ratifié l'amendement à l'article 43 (2) de la Convention, de le faire au plus vite, afin d'atteindre la majorité des deux-tiers requise pour que la composition du Comité puisse être protée de 10 à 18 membres. Elle a indiqué que le Groupe des Etats d'Europe occidentale attend avec impatience la Session spéciale de l'Assemblée nationale de 2001, consacrée au suivi du Sommet mondial pour l'enfance et reconnaît la pertinence de la Convention en ce qui concerne les actions futures.

Mme BETTY KING (Etats-Unis) prenant la parole en tant que représentante du pays hôte, a déclaré que les Etats-Unis oeuvrent activement à l'amélioration de la situation des enfants aux niveaux national et international. La plus haute priorité est accordée au bien-être des enfants. Les Etats-Unis sont opposés à l'exploitation du travail des enfants qu'ils considèrent comme un abus. C'est pourquoi ils appuient fermement la Convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur l'élimination des pires formes de travail des enfants adoptée en juin dernier. Le Président Clinton a demandé à toutes les agences fédérales d'être absolument sûres qu'elles n'achètent aucun produit fabriqué par l'exploitation du travail des enfants. La communauté internationale doit rester solidaire pour mettre fin à cette pratique abjecte, a-t-elle déclaré. L'engagement des Etats- Unis en faveur de la protection des droits des enfants est indiscutable, a déclaré la représentante, qui a évoqué l'appui des Etats-Unis aux programmes multilatéraux, aux organisations non gouvernementales et à de nombreuses initiatives bilatérales d'assistance. Les Etats-Unis sont parmi les pays qui apportent l'appui le plus important aux programmes de l'ONU en faveur des enfants. Au niveau bilatéral, l'Agence américaine pour le développement internationale apporte depuis 25 ans un appui majeur aux programmes de santé en faveur des enfants. Aujourd'hui, plus de 4 millions d'enfants sont sauvés chaque année de la mort grâce à des services de santé fournis par cette Agence.

Bien que les Etats-Unis n'aient pas ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant, nos actions pour protéger les enfants montrent très clairement notre engagement à défendre leur bien-être, tant aux Etats-Unis qu'ailleurs dans le monde. La communauté internationale peut rester confiante qu'en tant que nation, les Etats-Unis sont prêts à contribuer autant qu'ils le peuvent au renforcement et à la protection des droits des enfants partout dans le monde, a conclu la représentante.

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