En cours au Siège de l'ONU

AG/SHC/437

LES DROITS DE L'HOMME EN HAITI, BOSNIE-HERZEGOVINE, CROATIE ET REPUBLIQUE FEDERALE DE YOUGOSLAVIE, RWANDA, IRAQ ET BURUNDI AU CENTRE DES DEBATS

5 novembre 1999


Communiqué de Presse
AG/SHC/437


LES DROITS DE L'HOMME EN HAITI, BOSNIE-HERZEGOVINE, CROATIE ET REPUBLIQUE FEDERALE DE YOUGOSLAVIE, RWANDA, IRAQ ET BURUNDI AU CENTRE DES DEBATS

19991105

La Commission se penche aussi sur la situation des personnes déplacées

Poursuivant son examen des questions relatives aux droits de l'homme, la Troisième Commission a entendu, cet après midi, des présentations des rapports sur la situation des droits de l'homme en Haïti, en Bosnie-Herzégovine, Croatie et République fédérale de Yougoslavie, au Rwanda, au Burundi - Rapport oral - par les rapporteurs et représentants spéciaux respectivement chargés de ces pays, ainsi que par le Directeur du Bureau de New York du Haut Commissaire aux droits de l'homme. Ont été également présentés, cet après-midi, les rapports sur la situation des personnes déplacées dans leur propres pays.

M. Adama Dieng, Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, a invité les Etats-Unis à restituer sans délais les documents du Front pour l'avancement et le progrès haïtien et des Forces armées d'Haïti, source d'information précieuse pour la poursuite des responsables des crimes graves pendant le régime de coup d'Etat.

M. Jiri Dienstbier, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Bosnie-Herzégovine, Croatie et République fédérale de Yougoslavie, a estimé qu'il était essentiel de replacer la situation de ces trois pays dans une perspective régionale - celle de la désintégration violente de la Yougoslavie.

M. Michel Moussalli, Représentant spécial pour la situation des droits de l'homme au Rwanda, s'est félicité de la création de la Commission des droits de l'homme et du vif intérêt qu'elle suscite au sein de la population.

Au nom des rapporteurs et représentants spéciaux qui n'avaient pu être présents, M. Bacre Waly Ndiaye, Directeur du Bureau de New York du Haut Commissaire aux droits de l'homme, a lu les présentations de MM. Max Van der Stoel, Francis Deng et Mme Marie-Thérèse Keïta-Bocoum. Il a également fait une déclaration liminaire dans laquelle il s'est félicité de l'adoption d'une approche globale qui intègre les droits de l'homme dans le développement et de la coopération accrue entre le Haut Commissariat et ses partenaires.

(à suivre - 1a)

- 1a - AG/SHC/437 8 novembre 1999

Les représentants des pays suivants se sont exprimés: Haïti, Finlande (au nom de l'Union européenne), Cuba, Albanie, Croatie, Fédération de Russie, Canada, Rwanda, Burundi, République-Unie de Tanzanie, République démocratique du Congo, Inde, Iraq, Jamahiriya arabe libyenne.

En début de séance, une série de projets de résolution ont été présentés, qui portent sur les petites filles; la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; et les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme.

La Commission a, d'autre part, adopté, sans vote, un projet de résolution relatif au renforcement du Programme des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale, en particulier de ses moyens de coopération technique.

La Commission poursuivra lundi 8 novembre, à partir de 10 heures, son examen des questions relatives aux droits de l'homme.

Présentation de projet de résolution

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L'ENFANT

Aux termes d'un projet de résolution intitulé "Les petites filles" (A/C.3/54/L.46), présenté par la Namibie, au nom des coauteurs, l'Assemblée générale prierait instamment tous les Etats d'adopter toutes les mesures et réformes juridiques nécessaires pour faire en sorte que les petites filles jouissent intégralement et sur un pied d'égalité de tous les droits de la personne humaine et des libertés fondamentales, de prendre des mesures efficaces pour empêcher qu'il soit porté atteinte à ces droits et libertés, et de fonder sur les droits de l'enfant leurs programmes et politiques en faveur des petites filles.

L'Assemblée générale prierait instamment tous les Etats de promulguer et faire appliquer strictement une législation garantissant que le mariage ne peut être contracté qu'avec le consentement libre et entier des futurs conjoints ainsi que des textes législatifs fixant l'âge minimum légal du consentement au mariage et l'âge minimum du mariage et, le cas échéant, à relever celui-ci; de promulguer et faire appliquer des lois protégeant les filles de toutes les formes de violence et d'élaborer à cet effet des programmes de soins confidentiels sûrs et adaptés à chaque âge ainsi que de créer des services d'assistance médicale, sociale et psychologue pour venir en aide aux filles victimes de violences; de prendre des mesures spéciales pour protéger les enfants, en particulier pour protéger les filles, du viol et autres formes de sévices sexuels et de violence sexiste en cas de conflit armé, en accordant une attention particulière aux filles réfugiées et déplacées, et à veiller à ce que l'aide humanitaire tienne compte des besoins particuliers des petites filles.

L'Assemblée générale demanderait aux gouvernements, aux membres de la société civile, y compris les médias, et aux organisations non gouvernementales de promouvoir l'éducation dans le domaine des droits de l'homme ainsi que le plein respect et la jouissance de ces droits fondamentaux des petites filles. Elle inviterait les gouvernements, le système des Nations Unies, en particulier la Division de la promotion de la femme, les organisations non gouvernementales, et les organisations des femmes à veiller à ce que, lors de la préparation de sa session extraordinaire intitulée "Les femmes en l'an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIe siècle", les besoins et les droits des petites filles soient dûment pris en compte et intégrés à toutes les activités.

APPLICATION DES INSTRUMENTS RELATIFS AUX DROITS DE L'HOMME

Aux termes d'un projet de résolution intitulé "Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants" (A/C.3/54/L.50), présenté et oralement corrigé par le Danemark, au nom des coauteurs, l'Assemblée générale demanderait instamment à tous les Etats qui ne l'ont pas encore fait de devenir parties à la Convention à titre prioritaire et à tous les Etats parties de notifier dès que possible au secrétaire général qu'ils acceptent les amendements aux articles 17 et 18 de la Convention. Elle prierait instamment les Etats parties de s'acquitter rigoureusement des obligations que leur impose la Convention. Elle soulignerait l'obligation faite aux Etats parties en vertu de l'article 10 de la Convention, de sensibiliser et de former le personnel qui peut intervenir dans la garde, l'interrogatoire ou le traitement de tout individu arrêté, détenu ou emprisonner de quelque façon que ce soit. Elle insisterait à cet égard sur le fait que les Etats ne doivent pas punir le dit personnel s'il refuse d'obtempérer lorsqu'il lui est ordonné de commettre un acte qui constituerait un acte de torture ou une autre forme de peine ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant, ou de dissimuler un tel acte.

L'Assemblée générale lancerait un appel à tous les gouvernements pour qu'ils aident le Rapporteur spécial et coopèrent avec lui dans l'exercice de ses fonctions. Elle lancerait un appel à tous les gouvernements, au Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme et aux autres organismes et institutions des Nations Unies, ainsi qu'aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales concernées pour qu'ils célèbrent, le 26 juin, la Journée internationale des Nations Unies pour le soutien aux victimes de la torture.

Aux termes d'un projet de résolution intitulé "Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme" (A/C.3/54/L.52), présenté par la Suède, au nom des coauteurs, l'Assemblée générale demanderait instamment à tous les Etats qui ne l'ont pas encore fait de devenir parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et d'adhérer aux Protocoles facultatifs au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que de faire la déclaration prévue à l'article 41 de ce Pacte. Elle encouragerait les Etats parties qui souhaitent émettre des réserves au sujet des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme à envisager de limiter la portée desdites réserves et à veiller à ce qu'aucune d'entre elles ne soit incompatible avec l'objet et le but de l'instrument visé ou contraire de quelque autre manière au droit international. Elle encouragerait les Etats parties qui ont formulé des réserves au sujet des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme et des Protocoles facultatifs au Pacte international relatif aux droits civils et politiques à les reconsidérer périodiquement en vue de les retirer.

L'Assemblée générale prierait instamment les Etats parties de s'acquitter en temps voulu de l'obligation de présenter des rapports et d'utiliser dans ces derniers rapports des données ventilées par sexe. Elle prierait instamment les Etats parties de tenir dûment compte dans l'application des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, des observations formulées à l'issue de l'examen de leur rapports par le Comité des droits de l'homme et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que des vues exprimées par le Comité des droits de l'homme en vertu du premier Protocole facultatif au pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Elle soulignerait qu'il importe de renforcer la coordination entre les mécanismes du système des Nations Unies et les organes des Etats parties concernés qui en font la demande aux fins de la mise en oeuvre des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme.

Adoption d'un projet de résolution

PREVENTION DU CRIME ET JUSTICE PENALE

Aux termes d'un projet de résolution intitulé "Renforcement du programme des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale, en particulier de ses moyens de coopération technique" (A/C.3/54/L.24), adopté sans vote, l'Assemblée générale soulignerait qu'il est indispensable d'améliorer les activités opérationnelles du Centre pour la prévention de la criminalité internationale afin d'aider, en particulier, les pays en développement et en transition. Elle inviterait tous les Etats à appuyer les activités opérationnelles du Centre en versant des contributions volontaires au Fonds des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale.

Elle demanderait instamment aux Etats et aux institutions de financement de revoir leurs politiques de financement de l'aide au développement et d'inclure, dans cette aide, la prévention du crime et la justice pénale. Elle réaffirmerait qu'il est prioritaire d'élaborer une convention générale contre la criminalité transnationale organisée et d'autres instruments internationaux de lutte contre le trafic d'êtres humains, en particulier de femmes et d'enfants, la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu, de leurs pièces, éléments munitions et le trafic, et le transport de migrants, y compris par la voie maritime, noterait les progrès réalisés par le comité spécial en la matière, et engagerait les Etats Membres à s'employer de leur mieux à l'élaboration et à la conclusion de la convention et des protocoles qui y sont annexés.

QUESTIONS RELATIVES AUX DROITS DE L'HOMME

RAPPORT DE L'EXPERT INDEPENDANT SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN HAITI

Rapport (A/54/366)

Le rapport est une synthèse des constations relevées par l'Expert indépendant, M. ADAMA DIENG, au cours de sa mission et des informations qu'il a reçues régulièrement de la Mission civile internationale en Haïti (MICIVIH), du Gouvernement haïtien et de certaines organisations non gouvernementales.

Les ONG haïtiennes, les leaders de l'opposition et les diverses agences des Nations Unies ont mis en exergue le climat d'insécurité régnant en Haïti. En ce qui concerne les libertés publiques, l'expert indépendant s'est réjoui de ce que la liberté de la presse, la liberté de réunion et de manifestation, le droit à la grève, la liberté d'association, etc. ne font l'objet d'aucune entrave. Il s'est également félicité de ce que la situation est gérée avec sang-froid mais qu'il importe que tous s'efforcent de créer les conditions favorables pour l'émergence d'un pacte social. D'autre part, l'expert encourage les pays amis d'Haïti, les Nations Unies et l'Organisation des Etats américains à poursuivre leur politique de coopération avec Haïti. Il souhaite que tous les acteurs politiques haïtiens prennent conscience des dangers potentiels pour les droits de l'homme de toute nouvelle crise et recommande que le dialogue républicain, à présent entamé, soit poursuivi et consolidé.

En ce qui concerne la lutte contre l'impunité, l'expert indépendant recommande à l'Assemblée générale d'inviter les Etats-Unis à restituer sans délai et dans leur intégralité, les documents saisis au quartier général des Forces armées d'Haïti et du Front pour le progrès et l'avancement haïtien (FRAPH). Le rapport note qu'Haïti souffre, plus que jamais, de la maladie de son système judiciaire. Le processus de réforme en la matière se poursuit avec une lenteur qui ne présage pas la réconciliation entre le peuple haïtien et sa justice. Malgré les efforts qui ont été déployés au niveau des infrastructures pénitentiaires, les conditions de détention ne s'améliorent guère du fait d'un disfonctionnement de la chaîne pénale. Si les libertés publiques donnent un motif de satisfaction, il est permis de s'interroger sur les menaces qui pèsent sur les libertés individuelles. Il n'est que de signaler la multiplication des cas de détention arbitraire et illégale, et les nombreuses décisions de mise en liberté qui ne sont pas exécutées. Le nouveau Ministre de la justice a fait remarquer qu'une véritable réforme judiciaire ne pourra être mise en oeuvre qu'après la tenue d'élections législatives.

En ce qui concerne le climat d'insécurité, une question fondamentale se pose: cette vague d'assassinats, de meurtres et d'attentats relève-t-elle du grand banditisme ou s'agit-il d'une criminalité politique ? Il importe donc que les enquêtes en cours soient menées avec impartialité et de manière approfondie. D'autre part, les statistiques de la MICIVIH font apparaître un accroissement inquiétant des brutalités policières et autres formes de mauvais traitement lors d'arrestations ou d'interrogatoires.

La rapport aborde la question de l'Accord de coopération technique signé entre le Gouvernement haïtien et le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Dans le cas d'un retrait de la MICIVIH, à laquelle a été confié le projet depuis mars 1998, il convient de réfléchir sur la possibilité d'une présence visible du Haut Commissariat. Un soutien serait très apprécié dans l'assistance à la rédaction des rapports à soumettre aux organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ainsi que dans le processus de révision du Code de procédure pénale et du Code pénal. La rapport souligne également le travail remarquable accompli par les organisations féminines. En outre, il fait état de la situation des enfants vivant en domesticité qui rendent aux familles d'accueil toutes sortes de services sans être rémunérés et dont la situation devient de plus en plus alarmante.

Dans ses conclusions, l'Expert indépendant insiste sur le fait qu'Haïti a réalisé des progrès dans la construction d'un Etat démocratique. Il y a des avancées significatives dans le domaine des droits de l'homme depuis le retour à la légalité constitutionnelle. Malheureusement il existe encore de sérieux problèmes de gouvernance, de sécurité, de pauvreté qui constituent autant de menaces à l'état de droit. Le blocage institutionnel de plus de 20 mois a sérieusement compromis le rôle de l'état dans l'amélioration des conditions de vie des populations. La situation d'extrême pauvreté que connaît Haïti est aggravée par les catastrophes naturelles, ainsi que la forte prévalence du VIH/sida.

L'Expert indépendant demande aux autorités haïtiennes de tout mettre en oeuvre pour que les auteurs des nombreux crimes commis pendant et après le coup d'Etat soient appréhendés, poursuivis et jugés dans le respect des normes pertinentes des droits de l'homme. Aujourd'hui plus que jamais, les acteurs politiques et la société civile doivent s'entendre autour de l'essentiel qui est de restituer au peuple haïtien sa dignité. Dans ce contexte, le renouvellement de la MICIVIH est une nécessité. L'expert indépendant exprime l'espoir que tous les acteurs contribueront à créer les conditions permettant que le processus électoral se poursuive normalement, avec la tenue d'élections libres, démocratiques et transparentes et avec la participation la plus large possible des populations haïtiennes. Pour ce faire, le Conseil électoral provisoire doit garder sa crédibilité, son objectivité et son impartialité.

Présentation

M. ADAMA DIENG, Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, a rappelé que les documents du Front pour l'avancement et le progrès haïtien et des Forces armées d'Haïti (FRAPH/FADH), seraient une source d'information précieuse pour la poursuite des responsables de crimes graves commis pendant le régime de coup d'Etat. Les arguments du Gouvernement américain pour ne pas retourner ces documents ne résistent pas à l'analyse, a-t-il estimé. Dans ce contexte, le Ministre de la justice haïtien pour les victimes du coup d'Etat a relevé la contradiction entre les appels des Etat-Unis pour les procès contre les auteurs de crimes contre l'humanité commis en ex-Yougoslavie et le manque de coopération pour de telles procédures en Haïti. Le Ministre a laissé entendre qu'il se pourrait que les Etats-Unis soient préoccupés par le fait que les documents contiennent des informations sur l'éventuelle implication de citoyens américains dans les violations des droits de l'homme. Malgré les appels répétés, le peuple Haïtien attend toujours ces documents. L'Expert a invité les Etats-Unies à les restituer sans délai.

M. Dieng a souligné que la maladie du système judiciaire contribue à accentuer le sentiment d'impunité dans le pays. En effet, de multiples violations des droits de l'homme se produisent notamment à travers le système judiciaire. Les conditions politiques, juridiques, économico-sociales dans lesquelles travaillent les magistrats sont très précaires, alors que les justiciables haïtiens ne peuvent plus continuer à faire face à cette insécurité juridique, à cette justice à deux vitesses. L'Expert a encouragé les bailleurs de fonds, à l'instar de l'Union Européenne, à s'investir davantage pour pallier aux insuffisances des juges de paix. Abordant le problème de la violence croissante en Haïti, l'Expert a rappelé l'incident survenu suite aux manifestations qui ont été organisées, le 28 mai 1999, à Port-au-Prince au cours de laquelle 11 personnes ont trouvé la mort. Il a déclaré qu'aux vues de certains éléments il semble s'agir d'exécutions sommaires et il a déploré que l'enquête soit à ce jour entourée d'un voile de mystère.

L'Expert a annoncé que l'Administration américaine a décidé d'accorder au Gouvernement haïtien un montant de 1,2 millions de dollars en vue de l'aider à lutter contre la pratique odieuse des enfants en domesticité. Il s'est de même réjoui de l'assistance médicale fournie par Cuba dans les zones rurales.

Recommandant la vigilance quant au respect des libertés individuelles, l'Expert a réaffirmé la nécessité du renouvellement du mandat de la Mission civile internationale en Haïti (MICIVIH). Il a cependant regretté que le Groupe consultatif de l'ECOSOC n'est pas pris en compte la situation des droits de l'homme en Haïti et a suggéré qu'il aurait été bon que ce Groupe prenne des contacts préalables avec le Haut Commissariat des droits de l'homme.

Dialogue

M. PIERRE LELONG (Haïti) a indiqué qu'en ce qui concerne l'appareil judiciaire, des mesures concrètes ont été prises pour lui donner un fonctionnement efficient. En effet, avec l'aide de la communauté internationale, le Gouvernement a créé une Ecole de la Magistrature et des Facultés de droit ont réouvert leur portes dans divers villes de province. D'autre part, le Représentant a signalé que le Gouvernement vient, au cours de l'année, d'adopter une nouvelle grille de salaires pour les juges et les officiers de justice de même qu'il a doté l'appareil judiciaire de moyens logistiques nécessaires. Le Représentant a insisté sur le fait que son Gouvernement, conformément à la Constitution, se porte garant des libertés fondamentales telles que le droit de réunion, le droit d'association, le droit de grève et le droit à l'expression.

Dans son effort pour garantir les droits de tous les Haïtiens, la Gouvernement a ratifié la Convention internationale sur les droits de l'enfant, a créé un Tribunal spécial pour enfants et entrepris un vaste programme de rénovation et de construction dans le cadre du Plan national de l'éducation et de la formation. En outre, à l'ouverture de la prochaine législature, le Gouvernement compte déposer quatre projets de loi portant sur le viol, le travail domestique, l'avortement et l'adultère.

Le Représentant a rappelé que, suite à la dissolution des Forces armées d'Haïti, une nouvelle Force de police a été créée avec le concours de la communauté internationale et bénéficie de l'appui de la MICIVIH. Il a présenté les principales orientations du programme d'action pour rétablir le climat de sécurité publique mais a déploré les effectifs insuffisants de la Police haïtienne. Le représentant a insisté sur le fait que l'époque de la violence politique et du terrorisme d'Etat est révolue, et qu'Haïti est en train d'affronter des cas de banditisme le plus souvent liés au trafic de la drogue, à la présence sur le territoire de délinquants rapatriés d'origine haïtienne et à la situation difficile de l'économie.

Dans le cadre de la lutte contre l'impunité, Haïti prend des dispositions pour le déroulement des procès des auteurs et complices de graves violations des droits de l'homme commises pendant la période du coup d'Etat notamment le massacre du quartier de Raboteau. Cependant, les demandes d'extradition se heurtent systématiquement au refus des autorités d'asile alors que d'autre part les archives des anciennes Forces armées d'Haïti et du groupe paramilitaire FRAPH ne sont pas jusqu'à date en possession de la justice haïtienne, a déploré le Représentant. Il a lancé un appel pressant pour la restitution sans délai et dans leur intégralité de tous ces documents.

Le représentant de la Finlande, prenant la parole au nom de l'Union européenne, a demandé à l'Expert d'apporter des précisions sur les moyens existants pour protéger les femmes de certains types de harcèlement. Il s'est également interrogé sur le problème du travail et de l'éducation des enfants de plus de 11 ans. Le représentant de Cuba a, quant à lui, demandé si il serait utile que d'autres rapporteurs s'adressent aux Etats-Unis pour demander la restitution des documents FRAPH/FADH.

Répondant à ces questions, M. DIENG a fait remarquer qu'il se réjouit de la décision du gouvernement haïtien de porter à 9000 le nombre des forces de Police. Il a insisté sur le fait que le processus de recrutement de ces policiers doit se faire dans la plus grande transparence afin d'éviter la présence de policiers partisans au cours des élections de mars 2000. Il a recommandé la vigilance afin que la campagne électorale puisse se dérouler dans les meilleures conditions. En ce qui concerne les délinquants rapatriés d'origine haïtienne, il a souhaité que des mesures soient prises contre la forme de grand banditisme que ces gens pratiquent, inconnue en Haïti jusqu'à présent.

Suggérant que la violence conjugale peut être interprétée comme une forme de violence politique, l'Expert a expliqué que les quatres projets de texte qui vont être soumis au Parlement haïtien ont été élaborés avec l'appui de l'ensemble des organisations de femmes, travaillant étroitement avec les Forces de police. Il semblerait que la femme haïtienne soit en mesure de se libérer progressivement de la peur dont elle était victime, a-t-il ajouté. L'Expert a indiqué que la pratique des restaveks était ancienne. Il a souligné le manque de ressources pour lutter contre cette pratique.

L'Expert a signalé que la question des documents FRAPH/FADH n'avait pas été abordée lors de la réunion des Rapporteurs spéciaux. Il s'est réjoui du fait que, l'année dernière, le Représentant des Etats-Unis a réagi à la demande de Haïti pour la première fois depuis 1995. Lors de la réunion des Droits de l'homme à Genève, il a été convenu que si aujourd'hui les documents n'avaient pas été restitués, des mesures devraient être prises. Il est important que ces documents qui appartiennent à Haïti, lui soient rendus, a-t-il souligné.

RAPPORT DU RAPPORTEUR SPECIAL SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN BOSNIE-HERZEGOVINE, EN REPUBLIQUE DE CROATIE ET EN REPUBLIQUE FEDERALE DE YOUGOSLAVIE (SERBIE ET MONTENEGRO)

Rapport (A/54/396-S/1999/1000) et Add.1

L'additif est une mise à jour au 2 novembre 1999, dont la version française sera publiée prochainement.

Le Rapporteur spécial estime qu'il continue d'être essentiel de replacer la situation en Bosnie-Herzégovine, en République de Croatie et en République fédérale de Yougoslavie (Serbie et Monténégro) dans une perspective régionale. La crise qui a éclaté au Kosovo en 1999 doit être aussi replacée dans le contexte de la désintégration violente de l'ex-Yougoslavie. La présence internationale actuelle au Kosovo ne peut se contenter d'être une "opération en attente".

BOSNIE-HERZEGOVINE

Le Rapporteur spécial se félicite du lancement du Pacte de stabilité européenne mais note que certaines faiblesses apparaissent déjà dans son application. Ainsi, la tendance à isoler la Serbie, noeud géographique et économique de la région est néfaste. Les embargos politiques ou économiques ne peuvent que renforcer les régimes anti-démocratiques de la région et constituent eux-mêmes une grave violation des droits de l'homme. Le Rapporteur spécial s'est rendu en Bosnie-Herzégovine du 15 au 20 mai 1999. Les événements les plus marquants l'an dernier ont été ceux qui ont suivi en Republika Srpska le limogeage du Président de l'entité, Nikola Poplasen, par le Haut Représentant et l'annonce de la sentence arbitrale concernant la zone de Brcko, rendue le 5 mars 1999. L'opération militaire de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) contre la République fédérale de Yougoslavie qui a débuté le 24 mars dernier a accru les tensions en Bosnie- Herzégovine. Les répercussions économiques sont importantes, notamment en Republica Srpska, dont 75% des exportations étaient jusque là destinées à la République fédérale de Yougoslavie.

La plupart sinon la totalité des formes de violation des droits de l'homme en Bosnie-Herzégovine continuent d'avoir pour base la discrimination fondée sur l'appartenance ethnique, l'affiliation politique, le sexe, l'âge, un handicap ou la combinaison de ces facteurs. Cela est particulièrement vrai dans les domaines de l'emploi, de l'éducation, de la propriété et de l'accès aux soins de santé.

La restructuration de la police n'a progressé que lentement dans les deux entités. Cette tâche incombe au Groupe international de police (GIP) de la Mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine (MINUBH).

La police demeure monoethnique dans la plupart des zones et ne fait guère preuve d'efficacité pour retrouver les criminels, ce qui aboutit à l'impunité. On observe la même mollesse face aux violences dont sont victimes les rapatriés appartenant à des groupes minoritaires. Sur la question des rapatriés, l'apparente indifférence de la police face aux violences ne facilite guère le retour dans de nombreuses zones du pays.

L'ordre constitutionnel mis en place suite à l'Accord de Dayton ne permet pas à l'Etat d'exercer le pouvoir exécutif. L'Etat de Bosnie- Herzégovine demeure faible.

La magistrature se trouve actuellement dans une phase de transition, mais l'héritage de l'ancien système communiste, de la guerre et les effets de la division ethnique dans le pays sont difficiles à surmonter. L'incompétence et le manque de formation sont des problèmes fréquents et le système judiciaire est vicié par la corruption et par l'influence politique. Concernant les poursuites pour crimes de guerre, le principal problème demeure que, dans pratiquement tous les cas, les inculpés n'ont pas la même origine ethnique que le ministère public. En revanche, certaines garanties de procédure sont largement respectées et les observateurs internationaux jugent la plupart des procès équitables.

Le nombre de demandes adressées à la Chambre des droits de l'homme en 1999 a augmenté, ce qui prouve que les autres tribunaux du pays n'offraient pas des recours effectifs. En juillet 1999, la Chambre a crée un précédent en rendant sa première décision concernant une affaire de discrimination en matière d'emploi, Zahirovic c. Bosnie-Herzégovine et Fédération de Bosnie- Herzégovine. La Chambre a souligné que "l'interdiction de la discrimination est un objectif essentiel" de l'accord de paix. Outre la réforme de la police et de la justice, le Rapporteur recommande que l'Etat commence à s'acquitter de ses obligations en matière de protection des droits de l'homme et de présentation des rapports aux comités de surveillance.

REPUBLIQUE DE CROATIE

Le Rapporteur spécial rappelle au Gouvernement qu'un système judiciaire indépendant et efficace est indispensable pour assurer la primauté du droit. Tout en se rendant compte des difficultés auxquelles le Gouvernement doit faire face pour revitaliser les entreprises, le Rapporteur spécial note que les employés doivent être assurés de toucher leur salaire ou doivent avoir accès à des recours juridiques efficaces. Le Rapporteur spécial demande au Gouvernement de continuer à étudier activement la question des personnes portées disparues en Croatie, avant, pendant et après les opérations militaires "Flash" et "Storm" en 1995.

Pour renforcer la confiance interethnique dans la région du Danube, le Rapporteur spécial estime que le poste de Ministre de l'intérieur - vacant depuis janvier 1999 - pourrait être pourvu par une personne d'origine serbe.

Le Rapporteur spécial exprime une fois encore ses préoccupations devant l'emprise que le parti au pouvoir exerce sur les média en Croatie, et il demande au Gouvernement d'adopter les mesures voulues pour que les chaînes publiques tiennent compte de l'intérêt général et soient entièrement indépendantes d'intérêts politiques ou financiers. Il note avec satisfaction les initiatives prises par la Commission nationale des questions d'égalité en ce qui concerne les modifications à apporter à la législation et il soutient les efforts qu'elle fait pour promouvoir l'égalité des sexes et intégrer cette question aux programmes du pays. Selon lui, des observateurs internationaux devraient suivre les enquêtes et les procès pour crimes de guerre, ce qui ajouterait de la transparence et donnerait à la population de souche serbe, l'assurance que les procès de guerre n'ont rien à voir avec la "justice du vainqueur".

REPUBLIQUE FEDERALE DE YOUGOSLAVIE

Le présent rapport porte sur la période qui s'étend de la mi-mars à la mi-août 1999. Cette période correspond à la campagne de frappes aériennes de l'OTAN (24 mars-9juin) et à ses suites. L'étendue de la tragédie humaine et des pertes matérielles qui ont pour cause la crise au Kosovo et pour origine des violations massives des droits de l'homme dans toute la République fédérale de Yougoslavie n'est pas encore mesurée.

Outre les questions sur l'apparente incapacité de la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) à établir une administration civile, et celle sur l'incapacité de la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) à assurer la sécurité, le Rapporteur se demande aussi pourquoi les acteurs internationaux qui ont fait la guerre et élaboré l'accord militaire n'ont pas encore réussi à faire la paix. Les formations complexes des différents plans de l'Ambassadeur des Etats-Unis Christopher Hill et celles de l'accord de Rambouillet ne servent plus à rien aux parties qui, à une époque, étaient à la table des négociations. Le Rapporteur note qu'aucune initiative n'a été prise en vue d'un règlement politique. Le Rapporteur recommande que la MINUK mette en place au Kosovo un système complet et permanent d'instances judiciaires. La MINUK et la KFOR devraient prendre les mesures nécessaires pour protéger comme il convient les droits de tous les citoyens au Kosovo contre la violence, les menaces, les actes d'intimidation et tous les autres actes illégaux commis par des membres de son propres groupe ethnique ou d'autres groupes.

Etant donné l'ampleur des opérations de la République fédérale de Yougoslavie et de la Serbie et les bombardements de l'OTAN il est peu probable que l'on connaîtra jamais le nombre exact de personnes tuées au Kosovo pendant la guerre. La MINUK n'a pas encore défini de procédure normalisée d'identification des corps ni d'enregistrement des décès récents et n'a même pas encore dressé de registre des décès pendant la guerre.

Le Représentant spécial constate que les informations sur les activités de l'Armée de libération du Kosovo (ALK) pendant la guerre sont inexistantes. Les bulletins d'information de l'OTAN sont remarquablement silencieux sur les positions de l'ALK au Kosovo. Les sources officielles yougoslaves ne disent rien des activités de l'ALK pendant la guerre. L'ALK elle même est muette. Le Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie devrait mener des enquêtes sur les violations qui se sont produites au Kosovo après la signature de l'Accord de Kumanovo et de l'engagement conclu avec l'ALK en juin 1999.

Le Gouvernement de la République fédérale de Yougoslavie devrait donner au Comité international de la Croix Rouge (CICR) et au Haut Commissariat des droits de l'homme le nom des personnes qui ont été arrêtées au Kosovo ou transférés dans des centres de détention ou des prisons en République fédérale de Yougoslavie, en indiquant où elles se trouvent et ce dont elles sont accusées.

L'ALK devrait communiquer à la MINUK des informations et les dossiers concernant toutes les personnes détenues de mars 1998 à ce jour. Elle devrait libérer les personnes qu'elle détient encore et les remettre à la MINUK, ne plus procéder à aucune arrestation et fermer ses centres de détention.

Présentation

M. JIRI DIENSTBIER, Rapporteur spécial sur la situation en Bosnie- Herzégovine, Croatie et Yougoslavie, a insisté sur le fait qu'une fois que la guerre disparaît de la une des journaux, l'intérêt des gouvernements se porte ailleurs. Il a estimé que la communauté internationale ne doit plus jamais rappeler une mission en place, comme elle l'a fait au Kosovo, laissant les populations aux mains des gangsters.

Il a signalé que la situation des droits de l'homme est différente dans les trois pays couverts pas son mandat, mais qu'elle n'en reste pas moins liée. Il est donc nécessaire de restituer la situation des trois pays dans le contexte régional des Balkans. Il est nécessaire de poursuivre une stratégie humanitaire, politique et économique pour tout le sud-est de l'Europe.

L'accord de Dayton a certes permis d'arrêter les massacres sur une large échelle mais quatre ans après, il faut avouer que la communauté internationale n'a pas réalisé ses objectifs politiques. Le processus de retour s'est ralenti depuis le début de la crise du Kosovo.

Les vieux rêves de division de la Croatie et de la Serbie demeurent, comme le prouvent les récentes déclarations du Président bosniaque en faveur d'une division de la Fédération. Peu de protestations ont été émises, si ce n'est celles en provenance de Sarajevo.

Les rares cas de retour en Bosnie sont encourageants mais il n'y a aucune volonté politique d'encourager les retours massifs. Là encore, les progrès n'ont pu être accomplis que sous la pression de la communauté internationale. Le Rapporteur spécial a attiré l'attention des délégués sur la situation des musulmans Slaves/Bosniaques qui fuient l'ex-Yougoslavie. Ces personnes sont victimes de violences, parfois assassinées par des Albanais du Kosovo et leurs droits sont déniés par la bureaucratie yougoslave. L'unification de Sandjak est devenue une source de tension nouvelle puisqu'elle remet en question l'unité du Monténégro.

Les 900 000 personnes réfugiées en dehors du Kosovo ont peu accès à l'aide humanitaire. En dehors des conflits ouverts, les embargos constituent une violation des droits de l'homme. La faim et le froid ne peuvent pas renverser des dirigeants si des politiciens et des armes n'ont pu le faire auparavant. La communauté internationale doit dire clairement qu'elle n'est pas contre le peuple de Yougoslavie. La fin des sanctions et des embargos donneraient à la population yougoslave la possibilité de s'aider elle même.

Au Kosovo, le nettoyage ethnique dont on été victimes les Albanais de la région au printemps, a été suivi, en automne par le nettoyage ethnique des Serbes du Kosovo, alors même que la KFOR et la MINUK étaient présents. La transformation de l'ALK est une chimère, les dirigeants de cette formation n'ont jamais fait mystère de leur position sur ce point. Dans ces circonstances, le Rapporteur spécial estime que les Serbes ne peuvent être que moins prêts à coopérer avec la communauté internationale. De nombreux Serbes estiment, comme des observateurs internationaux, que si le pont tombe c'est la fin du Kosovo multiethnique.

La MINUK travaille avec dévouement dans une situation très difficile, voire hostile. Le mandat de la MINUK est clair mais la tâche est malaisée même si elle était connue à l'avance. Le Rapporteur spécial a souligné que l'indépendance du Kosovo constituerait une incitation à l'ambition déclarée d'une grande Albanie, ambition impossible a atteindre sans effusion de sang.

Le Rapporteur spécial estime que l'on ne peut pas faire preuve de compréhension quant au désir de vengeance des Albanais du Kosovo, ce serait inciter les Albanais du Kosovo à agir de la même façon que les gangsters serbes. Comme l'a souligné l'Ambassadeur américain Richard Holbrooke, le règlement de la situation au Kosovo sera déterminant pour l'avenir de l'ONU.

Dialogue

Le représentant de l'Albanie s'est déclaré préoccupé par la partialité du rapport présenté qui en outre dépasse le cadre du mandat. Il a indiqué que ce rapport cache des événements importants lorsqu'il explique que les autorités de Pristina interdisent la vente de l'alcool, mais ne parle pas du massacre des Albanais du Kosovo ou qu'il mentionne des églises détruites mais oublie d'indiquer les mosquées également détruites. Il a estimé que M. Dienstbier oublie les chiffres précis quand il s'agit des Albanais, mais pas des Serbes, ainsi le rapport ne correspond pas à la réalité. Or suite à la présentation de M. Kouchner, Représentant spécial du secrétaire général, on connaît les chiffres des Albanais déportés et l'on sait qu'il s'agit d'un nettoyage ethnique. Ainsi il est dommage que M. Dienstbier n'ait pas parlé aux réfugiés kosovars. M. Dienstbier en allant au-delà de son mandat devient le porte-parole des autorités serbes. Le représentant a rappelé au Rapporteur spécial que tant M. Milosevic sera au pouvoir il n'y aura pas démocratisation du régime.

Plusieurs questions ont été posées sur les divers systèmes judiciaires et le régime de détention au Kosovo, notamment par le représentant de la Finlande qui a souhaité avoir des précisions sur la législation utilisée en Croatie lors des procès pour traumatismes psychologiques. De même, une question a été posée sur l'indépendance du système judiciaire en Bosnie-Herzégovine.

M. BRANKO SOCANAC (Croatie) a fait quelques commentaires sur la situation dans son pays. Il a déploré les répétitions au niveau de la procédure et du fond. En outre, il a exprimé sa préoccupation au sujet de l'affirmation selon laquelle la Croatie ne peut appliquer tous les traités relatifs aux droits de l'homme. Le Rapporteur spécial omet le fait que la Croatie est membre du Conseil de l'Europe et donc assujettie aux mécanismes du Tribunal des droits de l'homme. Il a regretté de nombreuses omissions dans le rapport.

Le représentant a exprimé son désaccord sur le fait que les chefs de missions de droits de l'homme en Croatie travaillent dans des conditions difficiles. Il a signalé que le Rapporteur spécial s'est principalement rendu en Croatie à titre privé et a visité certaines localités sans se faire annoncer officiellement. Il s'est étonné du fait que le Rapporteur spécial considère le transfert d'un joueur de basket-ball comme important. En conclusion il a exprimé le souhait que le mandat du Rapporteur spécial ne soit pas renouvelé.

Le représentant de la Fédération de Russie s'est inquiété des avertissements tragiques énoncés dans les conclusions du rapport, notamment en ce qui concerne l'épuration ethnique au Kosovo. Il a souhaité avoir l'avis du Rapporteur spécial sur la manière dont une ingérence humanitaire armée pourrait aider à surmonter l'hostilité interethnique.

M. Dienstbier, en réponse à ces diverses questions et commentaires, a indiqué qu'il a visité des camps pendant la guerre et s'est rendu sur place lors des déplacements de personnes du Kosovo et a condamné à plusieurs reprises les atrocités commises à l'encontre de la population albanaise du Kosovo. Il a estimé que son mandat lui demande de décrire la situation sans trouver d'excuses à ceux qui commettent des meurtres ou des viols.

Au sujet de l'indépendance judiciaire, Le Rapporteur spécial a indiqué que l'indépendance judiciaire n'est pas garantie dans les pays qui émergent du communisme. Il a remarqué que les lois peuvent être quelquefois excellentes, mais que la décision ne dépend pas toujours de la loi, puisqu'il suffit parfois d'un coup de téléphone pour empêcher son fonctionnement. Il a estimé qu'en dépit de certains progrès, beaucoup reste à faire dans ce domaine.

En ce qui concerne les chiffres exacts sur la situation des réfugiés, certaines estimations donnent 500 000 réfugiés de Bosnie et de Croatie, d'autres beaucoup plus. Il a mentionné l'existence de fosses communes au Kosovo qui ne seront pas ouvertes avant longtemps et a insisté sur le bilan des événements de Bosnie n'est pas encore complet. Par ailleurs, le rapporteur spécial s'est félicité du travail de l'Ombudsman croate.

Au sujet du retard dans la publication des rapports, le Rapporteur spécial a insisté sur le fait que dans une situation aussi changeante, des modifications de dernières minutes sont toujours apportées. Le Rapporteur spécial a affirmé que son rapport ne comporte aucune critique du Gouvernement croate. Il a insisté sur la nécessité d'appliquer pleinement les résolutions du Conseil de sécurité et des accords de Dayton. Il a convenue qu'il est temps d'obtenir des résultats, si l'on ne veut pas entacher la crédibilité des Nations Unies. Il importe aujourd'hui de régler les problèmes humains. Le Rapporteur spécial a fait état de ses multiples contacts sur le terrain qui et sont favorable à la démocratisation. Il a estimé que la majorité des démocrates albanais sont contre les atrocités commises, mais ne peuvent faire entendre leur voix faute d'hommes politiques pour les représenter.

Après la réponse du Rapporteur spécial, la représentante de Cuba s'est inquiétée du jugement porté par le Rapporteur spécial sur la manière dont fonctionne le système judiciaire dans les pays communistes. Elle a estimé qu'il ne convient pas qu'un Rapporteur spécial fasse des généralisations de ce type.

RAPPORT DU REPRESENTANT SPECIAL DE LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME AU RWANDA

Rapport (A/54/359)

Ce rapport a été établi par M. MICHEL MOUSSALLI, Représentant spécial de la Commission des droits de l'homme sur la question.

Le Représentant spécial note avec satisfaction que le Rwanda s'éloigne du sombre climat du génocide. Bien que ce crime terrible ne doive jamais être effacé de la mémoire, les Rwandais prennent des mesures vigoureuses pour qu'il ne fasse plus obstacle au développement de la nation. En dépit des progrès, il n'existe pas encore une culture des droits de l'homme au Rwanda. Il faut commencer par le dialogue et la discussion.

Le Représentant spécial déplore vivement que les prisons continuent d'absorber 4 % du budget national et de ternir la réputation du pays en matière de respect des droits de l'homme. Tout en s'améliorant, leurs conditions restent inacceptables.

En se tournant vers l'avenir, le Rwanda aura une série de défis structurels à relever. L'un concerne la liberté de mouvement. Les Rwandais sont liés à leurs communes respectives par un système obligatoire d'enregistrement et de cartes d'identité. Ce système limite leur liberté de mouvement et fait également obstacle à la flexibilité du marché du travail et au développement économique. La liberté de parole et d'opinion est liée à la liberté de presse. Les médias ne se sont pas encore remis de la perception qu'ils ont aidé et encouragé le génocide.

Le Représentant spécial se félicite des efforts entrepris par le Gouvernement pour éliminer les tensions ethniques. On a fait disparaître la mention de l'origine ethnique sur les cartes d'identité; les postes clés du Gouvernement sont répartis entre différents groupes ethniques; des milliers de soldats des ex-Forces armées rwandaises (FAR) ont été intégrées dans l'armée nationale. Il s'agit là d'une série de démarches certes louables mais insuffisantes pour transformer la société au Rwanda. Beaucoup évoquent l'obéissance aveugle sur laquelle se sont appuyés ceux qui ont conçu les massacres de 1994. Le meilleur antidote en est l'esprit d'indépendance au niveau des collectivités locales. Les associations civiques -- et plus spécialement celles qui s'occupent des droits de l'homme -- montrent le chemin.

En ce qui concerne la sécurité qui est la clé des droits de l'homme au Rwanda depuis 1994, le Représentant spécial voudrait notamment attirer l'attention sur un fait préoccupant concernant le nord-ouest. Il croit comprendre que des patrouilles de défense civile sont formées et armées

dans les villages isolés. Il tient à rappeler que des forces de ce type ont commis ailleurs des violations des droits de l'homme et que l'Interahamwe elle-même était initialement une organisation de défense locale au Rwanda. Le Représentant spécial engage donc vivement le Gouvernement à veiller à ce que ces patrouilles de défense civile fassent l'objet d'un contrôle approprié et soient considérées responsables de leurs actions.

Les réfugiés du Rwanda ont longtemps été le symbole visible des divisions du Rwanda. Certains signes semblent indiquer que cette longue crise qui a déchiré le pays touche peut-être à sa fin.

Après avoir refusé pendant cinq ans de parler de réconciliation tant qu'on ne verrait pas que justice est faite, les Rwandais reconnaissent désormais que la réconciliation doit constituer un objectif national en soi. C'est là une indication de la nouvelle confiance dont fait preuve le pays qui mérite l'appui de la communauté internationale. Afin d'aider les rescapés du génocide, l'année dernière, le Parlement a décidé de consacrer 5% du budget en leur faveur, soit environ 12 millions de dollars.

Le Représentant spécial conclut le rapport en insistant sur les nouvelles possibilités qui s'offrent au Rwanda et à ses partenaires donateurs. Il salue les efforts déployés par le Ministère de l'intérieur pour améliorer l'administration des prisons et espère que le nouveau règlement pénitentiaire sera diffusé le plus largement possible. Il est également ravi de faire savoir que le Gouvernement rwandais prépare l'opinion publique à la libération de nouveaux prisonniers. Le Représentant spécial suggère qu'un mécanisme spécial soit mis en place pour traiter plus rapidement les témoignages recueillis. Enfin, le Représentant spécial tient à insister sur l'importance de mesures pratiques comme l'établissement de plans cadastraux; l'octroi de licences d'émission à des stations radio privées, l'établissement d'un budget pour les commissions parlementaires et les centres de détention communaux (cachots) et l'octroi de primes aux familles.

Selon lui, la contribution des gouvernements donateurs est essentielle pour favoriser la transition au Rwanda. Il faudrait améliorer et mieux coordonner l'aide aux projets en matière de droits de l'homme. Davantage de ressources doivent être consacrées aux salaires et aux frais généraux. Compte tenu de l'histoire très sombre du Rwanda, le Représentant spécial tient à faire quelques remarques sur l'aide étrangère. Certains experts considèrent que les politiques macroéconomiques imposées au Rwanda au début des années 1990 ont exacerbé les tensions ethniques en favorisant apparemment un groupe au détriment de l'autre. Le Représentant spécial a reçu l'assurance que l'aide économique multilatérale tient aujourd'hui mieux compte de la situation sur le plan des droits de l'homme. Il a lancé un nouvel appel à la communauté internationale pour qu'elle collabore pleinement avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda concernant les individus suspectés d'avoir participé au génocide.

Le Représentant spécial recommande que la Commission nationale des droits de l'homme et la Commission nationale pour l'unité et la réconciliation oeuvrent en étroite collaboration afin d'assurer la complémentarité de leurs efforts, le but étant de promouvoir le respect des droits de l'homme par le biais de la cohabitation pacifique et de la réconciliation de tous les membres de la société rwandaise.

Il importe au plus haut point pour le Rwanda et pour tous les pays de la région des Grands Lacs que l'on parvienne à un règlement régional global des conflits qui frappent la région. Il espère vivement que les accords de paix de Lusaka seront scrupuleusement respectés par toutes les parties concernées mais est vivement préoccupé par les événements récents survenus au Burundi. Si la situation n'est pas maîtrisée, elle pourrait bien compromettre l'ensemble du processus régional.

Présentation

M. MICHEL MOUSSALLI, Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda, a déclaré qu'il a effectué sa dernière mission dans le pays à l'invitation de la Commission rwandaise des droits de l'homme. La création d'une Commission rwandaise des droits de l'homme était une priorité essentielle depuis 1997.

Dès la création de la Commission, le souci majeur du Rapporteur a été d'organiser une Table ronde en vue d'un débat public atour des objectifs et des priorités de la Commission. Cette Table ronde a permis de réunir des individus représentatifs de toutes les couches de la société rwandaise. Des représentants régionaux et internationaux étaient également invités. La Commission pour l'unité et la réconciliation nationale venait d'être créée et il était évident que leurs rôles étaient complémentaires. Le Président de la Commission des droits de l'homme souhaitait bénéficier de l'expérience d'organes similaires.

Les discussions furent franches et positives. Trois groupes de travail ont permis d'aborder les questions du cadre juridique et du mandat de la Commission. Ont été également abordées, les activités de protection et de promotion à entreprendre par la Commission, et la coopération et le partenariat aux niveaux national, régional et international.

Au terme des discussions, cinq point importants ont été retenus: l'examen et la poursuite par la Commission de plaintes émanant d'individus ou de groupes d'individus victimes de violations des droits de l'homme commises par des organes de l'Etat ou des individus agissant sous le couvert de l'Etat; le versement de compensations et indemnités aux victimes de violations;

le respect par tous les organes de l'Etat des engagements internationaux en matière de droits de l'homme; promotion et développement de l'enseignement des droits de l'homme au sein de toutes les couches de la société rwandaise; assurer la complémentarité entre les deux Commissions nationales pour les droits de l'homme et celle de l'unité et de la réconciliation. Le Rapporteur spécial a repris l'appel de M. Pierre Galand qui demande que la dette extérieure du Rwanda soit effacée ou serve à rembourser les victimes du génocide.

Dialogue

Parmi les diverses questions posées au Représentant spécial, le représentant du Canada a souhaité savoir comment les Organisations non gouvernementales peuvent bénéficier de la création de la Commission des droits de l'homme au Rwanda et comment l'on peut aider les ONG dans leur mission.

Une question du représentant de la Finlande, au nom de l'Union européenne, s'est portée sur la réinstallation dans les villages et sur la situation des réfugiés. Le représentant a souhaité savoir si les réfugiés étaient libre de retourner chez eux ou étaient intégrés dans les programmes de création de villages.

M. JOSEPH MUTABOBA (Rwanda) a admis qu'il n'existe pas encore du culture des droits de l'homme au Rwanda, il a estimé que cela résulte des événements récents et non d'une mauvaise volonté du peuple rwandais. Il a indiqué que les organisations locales des droits de l'homme travaillent encore sous l'influence de la culture divisionniste. Le représentant a souligné la nécessité de la coopération des organisations de défense des droits de l'homme.

Il s'est inquiété de certains points du rapport qui risquent de prêter à confusion, notamment en ce qui concerne la situation dans les prisons. Le représentant a indiqué qu'il y a une population de 120 000 prisonniers, dont 5 400 seulement sont des prisonniers de droit commun sur 12 847 qui ont plaidé coupable jusqu'ici, 294 ont été condamnés à mort. La surpopulation des prisons vient du nombre de prisonniers génocidaires.

Le représentant a indiqué qu'aucun citoyen rwandais n'a besoin de laisser-passer pour se déplacer d'une région à une autre comme le laisse entendre certaines informations mensongères. En ce qui concerne la création de villages, le représentant a indiqué que les Rwandais vivaient autrefois de manière éparse sur les collines. La création de villages est donc un progrès nécessaire pour faciliter l'accès aux routes.

Répondant aux questions, M. MOUSSALLI a estimé que la communauté internationale doit assister les associations nationales qui sont prêtes à travailler avec la Commission des droits de l'homme. Les organisations des droits de l'homme au Rwanda pourront jouer un rôle d'intermédiaire entre la société civile et la Commission. M. Moussalli se félicite de la proposition de la Suisse de financer une table ronde entre les ONG rwandaises et la Commission. Il a souligné l'engagement sérieux de la Commission mais a rappelé qu'il faudra du temps et de l'argent pour atteindre les objectifs fixés. Il serait donc souhaitable que cette Commission bénéficie du soutien régulier des membres de la communauté internationale.

En réponse aux questions concernant le retour des réfugiés. M. Moussalli estime qu'il est remarquable qu'un pays aussi petit que le Rwanda ait pu absorber 3 millions de réfugiés en si peu de temps. Certes, pour des raisons indépendantes de sa volonté, le Gouvernement n'a pas pu assurer le retour de tous les réfugiés dans leurs régions d'origine. Dans le nord-ouest du pays, la création de villages - la villagisation - préoccupe certains observateurs mais ce phénomène est imposé par la situation instable dans la région. Le Gouvernement tente tout ce qui est possible pour que la villagisation ne soit pas forcée.

M. Moussalli reconnaît que la culture des droits de l'homme n'est pas encore établie au Rwanda mais la création de la Commission est une avancée. Cependant, il est nécessaire que la paix soit rétablie dans toute la région pour assurer la paix et la sécurité pour tous.

RAPPORT SUR LES DROITS DE L'HOMME EN IRAQ

Rapport (A/54/466)

Le Rapporteur spécial tient à rappeler que le Gouvernement iraquien n'est pas revenu sur son refus d'autoriser le déploiement des observateurs chargés des droits de l'homme.

Les allégations reçues par le Rapporteur spécial concernent des violations graves et systématiques de pratiquement tous les droits civils. Pendant la période considérée, le Rapporteur spécial a continué de recevoir des allégations faisant état d'exécutions sommaires, arbitraires et extrajudiciaires. L'Iraq demeure également la pays où le plus grand nombre de disparitions ont été signalées au Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires créé par la Commission des droits de l'homme. Le Rapporteur spécial reçoit également de temps à autre des informations faisant état de la destruction de zones de peuplement civiles, notamment des listes de villages et de maisons qui auraient été détruits dans de nombreuses localités situées dans la zone marécageuse ainsi qu'à Bagdad.

Le rapporteur a constamment rendu compte de la détérioration de la situation dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels. La vie quotidienne des Iraquiens est profondément perturbée par les difficultés d'approvisionnement et la qualité médiocre des denrées alimentaires, des médicaments et des services d'assainissement ainsi que par l'absence d'eau potable salubre. En outre, d'autres problèmes comme le renforcement du pouvoir du régime, l'apparition d'un vaste marché noir, le renforcement du contrôle des forces de sécurité et la difficulté d'obtenir le droit d'asile ou de manifester une opposition politique sévissent également. Après l'entrée en vigueur du régime des sanctions internationales, non seulement le Gouvernement iraquien n'a pas su faire bon usage des ressources qui sont les siennes et n'a toujours pas pleinement tiré partie de l'accès aux vivres et aux soins de santé que lui procurait la formule "pétrole contre nourriture", mais il a encore utilisé certaines ressources pour s'enrichir lui même.

Le Rapporteur spécial conclut que la structure de l'Etat qui repose sur un parti unique omniprésent, l'absence de toute perspective démocratique ainsi que de toute institution capable de contrôler les abus de pouvoir laissent à conclure que le peuple iraquien ne jouit et ne jouira pas dans un avenir prévisible du respect de ses droits fondamentaux. Il note que presque aucune des recommandations contenues dans ses précédents rapports n'a été prise en compte par le Gouvernement iraquien. A moins que la communauté internationale ne se montre fermement déterminée à faire face d'une manière sérieuse et conséquente aux violations extrêmement graves des droits de l'homme, la tradition d'impunité qui prévaut en Iraq est presque certainement appelée à persister.

Présentation

M. BACRE WALY NDIAYE, Directeur du Bureau de New York du Haut Commissaire aux droits de l'homme, présentant le rapport au nom de M. Marx Van der Stoel, a souligné que tout autre parti que le parti officiel Baas est déclaré hors-la-loi et les opposants sont victimes d'exécutions arbitraires. En outre le Gouvernement de l'Iraq continue à pratiquer les déplacements forcés. Des offensives militaires ont été lancées contre des populations civiles qui vivent dans les marais du Sud au prétexte de chercher les déserteurs militaires qui s'y seraient cachés.

La dégradation de l'économie affecte la vie de milliers de personnes qui souffrent du manque de nourriture, de médicaments et d'eau potable. Le Gouvernement iraquien ne se soumet pas à ses obligations en vertu des articles 2, 11 et 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturel. En revanche, le Gouvernement a utilisé les ressources disponibles pour renforcer son pouvoir et alimenter le marché noir qui profite aux élites qui le contrôlent.

Le Rapporteur spécial a souligné que l'imposition de sanctions économiques ne diminue en rien les obligations de l'Etat partie au Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels. S'il est vrai que les sanctions affectent les capacités de l'Etat partie, celui-ci n'en demeure pas moins sous l'obligation de prendre toutes les mesures possibles pour garantir l'absence de discrimination et réduire au minimum l'impact de ces sanctions sur les groupes vulnérables de la société.

Le Rapporteur spécial a indiqué que le Gouvernement irakien n'avait suivi aucune des recommandations qui lui ont été faite au cours des 9 dernières années. Il n'a répondu à aucune des communications qui lui ont été envoyées et a refusé que le Rapporteur spécial se rende dans le pays. La communauté internationale ne doit pas permettre que l'impunité qui prime en Iraq continue.

RAPPORT SUR LES PERSONNES DEPLACEES

Rapport (A/54/409)

Le présent rapport est établi par M. FRANCIS DENG, Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la questions. Il couvre les trois domaines principaux relevant de son mandat du Représentant, soit le cadre normatif, en particulier l'élaboration des Principes directeurs régissant le traitement des personnes déplacées dans leur propre pays, le cadre institutionnel, aussi bien au niveau international que régional, et la situation dans les pays particuliers. Les travaux entrepris dans le cadre de ce mandat y sont également exposés.

Le représentant note que des situations nouvelles sont apparues, en Indonésie et au Kosovo par exemple, que d'autres se sont détériorées, notamment en Angola, en Colombie et au Soudan, et que d'autres encore n'ont pas évolué et ont fini par ne plus retenir l'attention de la communauté internationale comme au Caucase. Cependant, une nette amélioration s'est produite dans la façon dont les pays réagissent au niveau national, régional, et international aux énormes problèmes que posent les déplacements de personnes dans leur propre pays.

Etablis à la suite de la compilation et de l'analyse des normes juridiques en vigueur dans ce domaine, les Principes directeurs s'appliquent aux personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays où que ce soit dans le monde et ont pour objet de répondre à leurs besoins particuliers en spécifiant les droits et les garanties applicables à leur situation. Ils sont donc une source d'indication pour toutes les parties intéressées.

Le rapport fait état de la situation concrète des déplacés en Azerbaïdjan, au Burundi, au Rwanda, en Somalie, au Sri Lanka, au Soudan, dans les pays de l'ex-Yougoslavie, en Colombie,en Géorgie, en Arménie, en Ouganda et au Kosovo.

Il est également nécessaire de mettre au point des stratégies pour le problème des déplacements de populations dans des pays qui nient l'existence d'un tel problème ou qui n'autorisent pas une intervention internationale à l'intérieur de leur frontières. A ce jour, les pays auxquels le Représentant a pu accorder une attention spéciale sont ceux qui font preuve d'une attitude de coopération. Il n'est pas acceptable que des pays qui connaissent de graves problèmes de déplacements puissent échapper à la surveillance internationale. La nature des conflits contemporains fait que de grands nombres de personnes déplacés habitent dans des zones qui ne sont pas sous le contrôle d'un gouvernement. Les principes directeurs stipulent que toutes les autorités, groupes et individus sont responsables comme les Etats de la protection des populations déplacées dans les territoires qui sont sous leur contrôle. Il est d'ailleurs nécessaire de soucier davantage du contrôle des activités de ces acteurs autres que les Etats.

Dans ses conclusions, le Représentant indique que, depuis sa création, le mandat relatif à la question des personnes déplacées a contribué au développement d'un système de collaboration interorganisations pour répondre aux besoins de ces populations et créé un programme viable de visite de pays appelant l'attention sur les conditions sur le terrain et initiant un dialogue avec les gouvernements et les autres acteurs pertinents. En effet, la mise au point d'un système efficace et global de réponse aux besoins des populations déplacées dans le monde entier est une tâche dantesque qui exige un effort concerté de tous les intéressés au niveau local et mondial. Il convient désormais de garantir les mesures prises pour qu'elles aient une incidence sur le terrain et que ce système soit plus efficace au niveau de la protection et de l'assistance apportées aux millions de personnes déplacées ayant un besoin urgent d'aide. Il faut mettre davantage l'accent sur la diffusion et l'utilisation des Principes directeurs, la surveillance des conditions sur le terrain afin de détecter les situations exigeant une intervention d'urgence, intercéder au nom des personnes déplacées le cas échéant, et recommander des mesures de collaborations entre les institutions d'exécution du système international et les gouvernements concernés. En outre les capacités en ressources humaines et personnelles qui sont très insuffisantes devront être accrues. En effet, le Représentant a dû se tourner vers d'autres sources pour compléter le soutien effectif qu'il reçoit du Haut Commissariat des droits de l'homme.

Présentation

Au nom du Rapporteur spécial, M. BACRE NDIAYE a déclaré que le nouveau cadre de coopération inter-institutions sous la direction de Sergio Viera di Mello, l'établissement de Principes directeurs sur la question sont des développements positifs, particulièrement l'utilisation pratique de ces principes par les différents acteurs sur le terrain. De nombreuses réunions de travail ont été organisées au niveau régional, en Afrique, en Amérique latine. Les prochaines réunions auront lieu en février 2000, à Bangkok, en Thaïlande puis, plus tard dans l'année un séminaire sera organisé avec l'OSCE sur les personnes déplacées dans la région du Caucase.

A travers les missions dans les pays, le Représentant spécial continue de surveiller de prêt les situations spécifiques. Ainsi, le Représentant spécial a attiré l'attention de la Commission sur la situation en Colombie. Plus qu'un million de personnes déplacées en Colombie attendent une assistance et une protection de base. La crise du Kosovo ne doit pas offrir à la communauté internationale l'idée trompeuse qu'une réponse sélective au problème des personnes déplacées est possible. Les ressources internationales ne sauraient se concentrer sur un point du globe tandis que la situation des personnes déplacées en Sierra Leone, Afghanistan, Angola et Tchétchénie - pour ne mentionner que quelque cas - méritent également l'attention de la communauté internationale. Le Représentant spécial a souligné que les moyens financiers à sa disposition était limité, ne lui permettant que de faire deux ou trois déplacements par an. Le Représentant spécial a évoqué le problème de la catégorisation des personnes déplacées et des réfugiés, notant que parfois, les frontières changent du fait de la situation politique et qu'un déplacé devient un réfugié, comme c'est le cas actuellement au Timor oriental.

DECLARATION LIMINAIRE

Prenant la parole en sa capacité de Directeur du Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme, il a souhaité apporter des précisions au Rapport sur le droit au développement et les moyens de permettre l'application de ce droit. Il a fait état des travaux menés par l'Expert indépendant sur le droit au développement en vue d'établir une groupe de travail à composition non limitée sur cette question qui a tenu sa première session du 13 au 17 septembre dernier. M. Ndiaye a annoncé qu'un séminaire régional sur le droit au développement sera organisé du 7 au 9 décembre à Yaoundé, Cameroun. Ce sera le premier d'une série de séminaires qui se tiendront en Amérique latine, dans les Caraïbes et en Asie. En outre, comme il l'a été décidé à l'issue du septième atelier sur la coopération régionale pour la promotion et la protection des droits de l'homme dans la région Asie-Pacifique, un atelier régional se tiendra au début de l'année prochaine à Sanaa, Yémen.

M. Ndiaye s'est félicité de l'adoption d'une approche globale qui intègre les droits de l'homme dans le développement et de la coopération accrue entre le Haut Commissariat et ses partenaires, y compris les institutions financières internationales. Il a fait état des progrès accomplis grâce au Comité des Nations Unies pour le développement et de la coopération renforcée avec la Banque mondiale, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Programme relatif aux droits de l'homme.

RAPPORT ORAL SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME AU BURUNDI

Présentation

M. BACRE NDIAYE, au nom de Mme MARIE-THERESE KEITA-BOCOUM, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur la questions, a noté qu'on assiste ces derniers mois à une recomposition constante des alliances et à des divisions au sein des partis politiques. En outre, les négociations menées à Arusha marquent le pas, bien qu'une reprise ait été annoncée pour le 18 octobre dernier. Enfin, la violence armée connaît une nette recrudescence à l'approche de la phase finale des négociations. Tous ces éléments font augurer d'un avenir politique sombre pour le Burundi. La levée de l'embargo en janvier 1999 n'a pas produit les effets escomptés. La situation de guerre et les nombreux déplacements de la population en pleine période culturale ont produit un effet néfaste sur l'agriculture dont le pays tire la majeure partie de ses ressources.

Dans un contexte où l'insécurité s'ajoute à la précarité économique, on assiste à une généralisation et à une accentuation des violations des droits de l'homme. On observe un accroissement des violations du droit à la vie et des atteintes à l'intégrité physique, attribuées aux agents de l'Etat, aux groupes armés qualifiés de rebelles et à des bandes non identifiées. Il est fréquent que la population civile, accusée de complicité, subisse tour à tour les assauts des militaires et des groupes armés. L'Hôpital militaire présente des cas de mutilations graves occasionnées par des mines antipersonnel. Cette violence a fini par gagner la capitale. Des exécutions extrajudiciaires ont également été révélées.

Suite à une attaque des rebelles à Bujumbura, le Gouvernement a repris sa politique de déplacement forcé des populations civiles vers des camps de regroupements. Le nombre des camps s'élève aujourd'hui à plus de 50, ceux-ci regroupant, selon des sources officielles, 314 000 personnes dont plus de 80% de femmes et d'enfants. Outre les déplacements forcés, il faut noter les violations des droits à la vie, à la liberté et plus généralement des droits civils et politiques, économiques et sociaux. Si les autorités justifient la politique de regroupement par la volonté d'assurer la protection des populations civiles, force est de constater que les conditions de vie dans les camps sont de nature à semer le doute sur le bien fondé de cette politique.

Certaines dispositions prises dans le domaine de la justice sont de nature à en améliorer le fonctionnement. Il s'agit notamment de l'adoption d'un nouveau Code de procédure pénale qui entrera en vigueur en janvier 2000, des efforts conjoints de plusieurs administrations et associations, ainsi que des ONG, pour lutter contre les irrégularités, et de l'assistance judiciaire dont bénéficient environ 1500 personnes. Toutefois les visites de certaines prisons et les rapports des observateurs des droits de l'homme indiquent que de gros efforts restent à faire dans ce domaine.

Dans ses observations, le Rapporteur estime qu'en vue d'une diminution des atteintes aux droits de l'homme, il faut que la paix et la sécurité règnent au Burundi. Ainsi il est nécessaire de favoriser la participation aux négociations de toutes les parties impliquées dans le conflit. D'autre part, une relance de l'économie est nécessaire pour lutter contre la pauvreté.

Selon Mme Keita-Bocoum, le Gouvernement du Burundi doit être fermement invité à suspendre sa politique de déplacement de la population et à prendre des mesures adéquates pour assurer les droits de l'homme. Un soutien plus net doit être accordé aux initiatives d'éducation et de promotion des droits de l'homme conçues en collaboration avec l'Office du Haut Commissariat aux droits de l'homme au Burundi.

L'aide humanitaire d'urgence doit être maintenue mais elle doit être entourée des conditions de sécurité suffisantes. Dans la présence situation de crise, la lutte pour le respect des droits de l'homme constitue une des garanties de survie de la population. Il serait donc regrettable que les moyens destinés à cette campagne viennent à décroître. Si, dans l'ensemble, on assiste à une dégradation de la situation des droits de l'homme, une volonté de progrès est perceptible dans le monde politique, judiciaire et dans la société civile.

Dialogues

M. MARC NTETURUYE (Burundi) a expliqué que depuis 1993, le pays fait face à une rébellion interne et externe qui commet des actes de terrorisme aveugle contre les populations, que certains pays voisins abritent cette rébellion, les efforts du gouvernement pour amener ces pays à coopérer étant restés vains, et qu'une alliance génocidaire est désormais une réalité dans la sous-région. Devant une telle situation, le Gouvernement n'a d'autre choix que de prendre ses responsabilités pour protéger la population, a souligné le Représentant. Ainsi, le gouvernement a décidé, suite à la recrudescence des violences, de regrouper les gens dans des "sites de protection". Le Représentant a expliqué que le gouvernement a fait cette opération tout en ayant pleine conscience des problèmes que cela pose sur le plan humanitaire.

Le gouvernement a donc pris toutes les précautions nécessaires et a veillé à ce que la transparence soit de mise. Le représentant a insisté sur le fait que le regroupement des populations est une mesure provisoire destinée à protéger les populations et à neutraliser les rebelles dans une zone infestée. Si les besoins humanitaires sur les sites sont importants, le gouvernement fait de son mieux pour les satisfaire et il a lancé un appel à la communauté internationale pour qu'elle l'assiste. Le Représentant a fait observer qu'il y a quelques années, l'insécurité causée par ces mêmes rebelles avait élu domicile dans des provinces où les populations sont aujourd'hui soulagées après le passage dans des sites de protection. Les bavures des forces de sécurité gouvernementales sont d'autre part sévèrement sanctionnées selon le règlement militaire, a-t-il ajouté.

Malgré les problèmes de moyens humains et logistiques, le fonctionnement de la justice, fonction d'une société en crise, a essayé de tenir la barre. Le Représentant a demandé une assistance internationale dans ce secteur si important pour un pays qui compte inscrire sur son programme politique prioritaire la réconciliation nationale.

Le Représentant a fait part de l'intention du gouvernement du Burundi de poursuivre les pourparlers politiques inclusifs jusqu'à la conclusion d'un Accord global de paix. Il a déjà issu un plan de paix qu'il soumet aux parties en négociation. Dans ce contexte, la Communauté internationale doit soutenir les forces qui oeuvrent pour la paix et adresser un message clair aux mouvements hostiles au processus de paix. Il a répété que les négociations interburundaises doivent inscrire désormais sur leur programme, l'arrêt des hostilités. Geler la coopération est, dans ce contexte, créer un environnement hostile aux négociations, a indiqué le Représentant à la communauté internationale, notamment aux partenaires du développement.

Le représentant de l'Iraq s'est réservé le droit de prendre la parole lundi.

La représentante de la République-Unie de Tanzanie a affirmé que son Gouvernement n'a pas pour politique d'abriter des éléments armés désireux de lancer des actes subversifs contre des pays voisins. Elle a accueilli des réfugiés du Burundi et d'autres pays.

La représentante de la République démocratique du Congo a démenti les allégations selon lesquelles des terroristes génocidaires opèreraient au côté des forces gouvernementales congolaises. La véritable raison de l'instabilité est au Burundi où aucune cohésion nationale n'existe.

Le représentant de l'Inde s'est déclaré préoccupé par les affirmations du rapport sur les personnes déplacées. Il est dit qu'il n'est pas acceptable que les pays ayant des personnes déplacées échappent aux vérifications internationales. Selon lui, ce sont les pays qui doivent signaler ce problème sur leur territoire. L'Inde ne connaît pas le problème des personnes déplacées.

Le représentant de la Fédération de Russie s'est opposé aux allégations relatives à la région de la Tchéchénie. Aucune information n'a été demandée à son pays.

APPLICATION DES INSTRUMENTS RELATIFS AUX DROITS DE L'HOMME

Mme ALETHIA BARKER (Jamaïque) a fait remarquer que le droit international n'interdit pas la peine de mort. Le Pacte et la convention européenne des droits de l'homme reconnaissent aussi ce droit. La question de l'imposition de la peine de mort doit être décidée par chaque pays dans le cadre de son système de justice pénale. Selon les instruments internationaux, la peine de mort peut être prononcée.

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