En cours au Siège de l'ONU

AG/SHC/421

LE RAPPORTEUR SPECIAL SUR LES MERCENAIRES MET EN GARDE CONTRE LE RISQUE DE FORMATION D'ARMEES PRIVEES REGIES PAR L'INTERET

21 octobre 1999


Communiqué de Presse
AG/SHC/421


LE RAPPORTEUR SPECIAL SUR LES MERCENAIRES MET EN GARDE CONTRE LE RISQUE DE FORMATION D'ARMEES PRIVEES REGIES PAR L'INTERET

19991021

Des mesures doivent être prises contre la prolifération des sites racistes et xénophobes sur Internet

Les délégations à la Troisième Commission, qui a entamé, ce matin, ses travaux sur l'élimination du racisme et de la discrimination raciale, et sur le droit des peuples à l'autodétermination, ont été informées des dangers que la prolifération d'entreprises privées ayant recours à des mercenaires fait planer sur les droits de l'homme et le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé de la question du recours aux mercenaires, M. Enrique Bernales- Ballesteros a insisté sur le fait que la multiplication des entreprises privées qui recrutent des mercenaires et participent activement aux conflits armés, est un phénomène particulièrement alarmant dans la mesure où ces entreprises, régies par l'intérêt, s'arrogent les prérogatives des Etats.

La Directrice adjointe du Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme, Mme Elsa Stamatopoulou-Robbins, a présenté le rapport sur les formes contemporaines du racisme, établi par M. Maurice Glèlè-Ahanhanzo, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, au nom de ce dernier. Le Rapporteur spécial a fait part de ses inquiétudes face à la montée des forces xénophobes sur les cinq continents. Il a appelé à un réveil des consciences contre les promoteurs de la haine ethnique et raciale, à l'exemple du soi-disant Parti de la Liberté (FPO) qui, en remportant 27,22% des suffrages aux dernières élections législatives autrichiennes, est devenu un acteur majeur de la scène politique de ce pays. Les délégations ont aussi dénoncé l'expansion de la propagande raciste sur Internet où se côtoient des sites racistes et antisémites.

Les représentants des pays suivants ont pris part au débat: Etats-Unis, Afrique du Sud, Finlande (au nom de l'Union européenne et des pays associés), Sénégal, Cuba, Equateur, Ukraine et République du Congo. Avant le débat général, les représentants des pays suivants ont demandé des précisions sur les rapports qui avaient été présentés: Finlande, Liechtenstein, République islamique d'Iran et Autriche.

(à suivre - 1a)

- 1a - AG/SHC/421 21 octobre 1999

La Commission poursuivra cet après-midi, à partir de 15 heures, l'examen des points relatifs à l'élimination du racisme et de la discrimination raciale et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Elle se prononcera sur des projets de résolution concernant le développement social, la prévention du crime et la justice pénale et la promotion de la femme.

ELIMINATION DU RACISME ET DE LA DISCRIMINATION RACIALE

DROIT DES PEUPLES A L'AUTODETERMINATION

Information de base

La Déclaration universelle des droits de l'homme stipule que "tous les hommes naissent égaux en dignité et en droits" et peuvent se prévaloir de tous les droits et libertés proclamés dans la Déclaration "sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute situation". S'inspirant de ces principes, l'Assemblée générale a adopté en 1963 la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et en 1966, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Deux Conférences mondiales de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale se sont tenues en 1978 et 1983. Face à l'ampleur de ces deux fléaux, de leurs nouvelles formes, de la xénophobie et de l'intolérance, la communauté internationale a décidé de tenir une nouvelle conférence en 2001. Les travaux préparatoires ont été confiés à la Commission des droits de l'homme qui a créé à cet effet un Groupe de travail. Le Groupe s'est réuni en mars 1999, ayant reçu plusieurs documents de base préparés par le Haut Commissariat aux droits de l'homme. Il a été proposé que le secteur privé soit invité à soutenir la conférence. La Convention a institué le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale pour suivre la manière dont elle est appliquée par les Etats parties, notamment par des rapports périodiques que présentent ces Etats.

La réalisation universelle du droit à l'autodétermination de tous les peuples est également une condition essentielle pour la garantie et l'observation effectives des droits de l'homme. La participation de mercenaires à des conflits armés ou à toute autre opération où les services qu'ils fournissent constituent un délit et une atteinte aux droits de l'homme de ceux qui subissent leur présence. Aussi, l'Assemblée générale a-t-elle demandé instamment à tous les Etats de faire preuve d'une extrême vigilance face à la menace que constituent les activités des mercenaires. Pour donner plus de portée à ses travaux, elle a invité les gouvernements à proposer les éléments d'une définition juridique plus claire du mercenaire.

Documentation

Rapport du Conseil économique et social (A/54/3)

Le rapport signale qu'aucune proposition n'a été présentée au titre de l'Application du programme d'action de la troisième Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale.

Rapport sur l'application du Programme d'action pour la troisième Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale et processus préparatoire de la Conférence mondiale (A/54/299)

Le rapport du Secrétaire général présente les progrès accomplis dans les préparatifs de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, ainsi que les activités qui ont été menées dans le cadre de la mise en oeuvre du programme d'action.

Il est indiqué qu'une étude sur les facteurs économiques qui contribuent à perpétuer le racisme, la xénophobie, et d'autres formes de discrimination sera présentée au Comité préparatoire de la Conférence en mai 2000. Afin de compléter le Programme d'action, le Secrétaire générale envisage de soumettre de nouvelles propositions, en fonction des conclusions et recommandations formulées par la Conférence en 2001.

Le Groupe de travail sur la conférence créé par la Commission des droits de l'homme s'est réuni du 24 au 26 mars dernier. Parmi les questions de fond, il a abordé plus particulièrement l'identification des thèmes à examiner. Le rapport contient la liste des thèmes qui, selon le Groupe de travail, doivent être reflétés dans l'ordre du jour de la conférence et ont fait l'objet de réflexions spécifiques de la part de plusieurs participants: facteurs qui contribuent à perpétuer le racisme (historiques, économiques, sociaux, culturels, psychologiques); séquelles de l'esclavage et du colonialisme; incidences de la mondialisation de l'économie dans le contexte de la recrudescence des manifestations du racisme; traitement des migrants, des réfugiés, des demandeurs d'asile et des personnes déplacées; moyens à mettre en oeuvre pour protéger les droits des populations autochtones; conflits ethniques et prévention de la discrimination raciale, notamment procédures d'urgence et d'alerte rapide; prévention de la discrimination raciale par l'éducation; mesures à adopter dans le domaine de l'éducation, de la formation et de l'accès à l'emploi des personnes appartenant à des groupes vulnérables; voies de recours, mécanismes de réparation et indemnisation en cas de discrimination raciale; notion d'action positive; mécanismes internationaux pour la mise en oeuvre de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et leur développement progressif; lutte contre les discours d'incitation à la haine et promotion de la tolérance à l'ère de l'informatique; incidence des multiples identités (race, couleur, ascendance, origine nationale ou ethnique, sexe); négationisme du phénomène du racisme. Les participants estiment que la question du racisme et de la discrimination raciale doit être appréhendée dans une perspective globale. Au niveau national, la conférence devrait attirer l'attention des Etats sur la législation modèle élaborée par l'ONU.

En ce qui concerne le lieu de la conférence, le rapport rend compte également des questions de procédure qui ont été abordées. La Commission des droits de l'homme recommande que Genève soit la ville d'accueil si aucune autre offre ne parvient au Haut Commissaire avant la fin de la première session du Comité préparatoire. A cet égard, il convient de noter que le Gouvernement de l'Afrique du Sud a formellement proposé d'être pays hôte de la conférence. Pour ce qui est de la date, la Commission recommande qu'elle se tienne en 2001, après la session de la Commission des droits de l'homme et avant celle de l'Assemblée générale.

Rapport sur les mesures à prendre pour lutter contre les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée (A/54/347)

Ce rapport a été établi par M. Maurice Glèlè-Ahanhanzo, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme. Il traite des activités du Rapporteur spécial depuis le précédent rapport à l'Assemblée générale, des manifestations contemporaines du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie et du suivi des visites sur le terrain.

Dans ce cadre, le Rapporteur spécial examine les mesures prises ou envisagées par des gouvernements, des organes législatifs et judiciaires ou d'autres instances en Allemagne, au Bélarus, en France, aux Pays-Bas. Il indique qu'il s'est rendu aux Etats-Unis d'Amérique, au Brésil, en Colombie, en Allemagne, en France, au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, au Koweït, en Afrique du Sud, en Australie et en Indonésie. Le rapport spécial indique aussi qu'au Kosovo, depuis la fin de la guerre, de nombreux cas de violation des droits de l'homme des Roma par des Albanais ont été rapportés. Il se propose d'examiner avec les gouvernements concernés de cette région, ainsi qu'avec le Représentant spécial du Secrétaire général au Kosovo, les mesures qui pourraient être prises afin de mieux protéger cette minorité vulnérable. Le Rapporteur spécial précise dans le rapport qu'il se rendra en Hongrie, en République tchèque et en Roumanie au mois de septembre 1999.

Dans le chapitre concernant les manifestations du racisme, le Rapporteur spécial constate que les promoteurs en sont à la fois les agents de l'Etat chargés du maintien de l'ordre et les membres d'organisations racistes comme les skinheads. La discrimination raciale prend aussi des formes de plus en plus insidieuses et subtiles, difficiles à déceler et à combattre par des lois, notamment dans l'accès à l'emploi et au logement. Le Rapporteur spécial indique, d'autre part, qu'il envisage de mener une étude plus approfondie de la scène néonazie latino-américaine qui émerge comme une des zones en expansion de la nébuleuse des organisations racistes mondiales. S'agissant de la violence policière inspirée par la négrophobie, selon lui, le fait le plus marquant est l'assassinat du jeune Amadou Sékou, un Guinéen, abattu froidement

de 41 balles par des agents de la police de New York. Le Rapporteur spécial a saisi les autorités des Etats-Unis afin qu'une enquête soit ouverte et que les résultats lui soient communiqués. On constate, d'autre part, une banalisation du racisme verbal et de la xénophobie dans leur dimension structurelle, par une certaine professionnalisation des activités inspirées du racisme, de la discrimination et de l'antisémitisme.

Enfin, l'Internet apparaît comme un puissant outil de propagande aux mains de groupes racistes qui parviennent ainsi à atteindre un large public, notamment les jeunes, avec peu d'investissement financier. Le Rapporteur Spécial voudrait suggérer que la question de l'exploitation de l'Internet en vue de la diffusion du racisme et de la xénophobie soit inscrite à l'ordre du jour de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, et fasse l'objet d'études dans des ateliers des conférences régionales préparatoires.

En outre, il conviendrait, dans la perspective de la conférence mondiale, d'instaurer une véritable concertation et une réelle collaboration entre les différents organes et mécanismes de la Commission des droits de l'homme, y compris le Rapporteur spécial sur le racisme dont les différents rapports constituent une importante base de données, et de lui donner effectivement tous les moyens nécessaires pour "mener une étude sur les actions préventives se rapportant aux conflits ethniques, raciaux, religieux ou motivés par la xénophobie et à formuler des recommandations". Enfin, il conviendrait dès maintenant de sensibiliser l'opinion publique internationale à la tenue de la conférence mondiale en soulignant ses objectifs et le processus d'organisation.

Rapport sur le Recours aux mercenaires pour attenter aux droits fondamentaux et empêcher les peuples de disposer d'eux-mêmes présenté par le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme (A/54/326)

Ce rapport est établi par le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé de la question, M. Enrique Bernales-Ballesteros (Pérou). M. Ballesteros fait état de ses diverses réunions, entretiens, et de sa correspondance concernant la situation en Géorgie, au Costa Rica, en El Salvador, ainsi que de sa correspondance relative aux activités mercenaires menées en Colombie où, selon certaines informations, les mercenaires et leur équipement sophistiqué seraient fournis par Defence Systems Limited, une entreprise qui propose des services de sécurité sur le marché international, agissant par l'intermédiaire de sa filiale colombienne, Defence Systems Columbia (DSC).

Cette entreprise aurait été engagée par la compagnie pétrolière British Petroleum pour surveiller ses installations. Ainsi, il semblerait que British Petroleum et les entreprises associées aient signé des accords avec des unités de l'armée et de la police nationale pour qu'elles fournissent, en échange de rémunérations spéciales et d'équipements, des services particuliers pour assurer la sécurité de leurs installations, après avoir reçu un nouvel entraînement lequel serait dispensé par des mercenaires.

Ces renseignements proviennent d'organisations non gouvernementales prestigieuses, de documents publics et de l'analyse et des observations de la presse internationale. Ces informations attestent de l'existence probable d'activités mercenaires en Colombie réalisées par l'intermédiaire de sociétés privées.

En outre, M. Enrique Bernales-Ballestros rend compte de sa visite au Royaume-Uni de laquelle il ressort que les éléments de preuve exigés par la Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires n'ont que peu de pertinence au regard de la procédure pénale britannique qui sanctionne des conduites objectives et non la situation des personnes ou leur intention présumée de commettre un délit. D'autre part, selon les fonctionnaires du Ministère d'Etat chargé des affaires extérieures et du Commonwealth britanniques, le Rapporteur spécial devrait établir une nette distinction entre les entreprises privées militaires qui participent aux combats et recrutent des mercenaires à cette fin et les entreprises privées qui offrent des services de sécurité.

Le développement des sociétés privées spécialisées dans le recrutement et l'embauche des mercenaires a favorisé l'augmentation du nombre de mercenaires et de ceux qui voudraient le devenir. En outre le Rapporteur spécial a constaté que la situation se caractérisait par une insuffisance de normes internationales sanctionnant et pénalisant les activités mercenaires. Ainsi, il est urgent de s'interroger sur les moyens de remédier aux vides juridiques qui ont conduit à la constitution de ces entreprises et les ont laissé se livrer à des activités à la limite de la légalité. L'adoption de normes réglementaires et de surveillance à l'égard de ces entreprises semble indispensable.

Force est de constater que le continent africain reste le plus touché par les activités des mercenaires: ceux-ci participent activement aux conflits qui déchirent l'Angola, la République du Congo, la Sierra Leone et la République démocratique du Congo. Ainsi, le Rapporteur espère que l'Accord de paix signé le 7 juillet 1999 à Lomé entre le Gouvernement de la République de Sierra Leone et le Front révolutionnaire unifié mettra un terme à la tragédie que vit ce pays. Malgré l'embargo décrété par l'ONU, des armes continuent d'être livrées à l'UNITA, donc aux mercenaires. L'UNITA aurait exporté 3 à 4 milliards de diamants extraits des zones qu'elle contrôle,

ce qui lui permet de continuer de recruter des mercenaires et d'acquérir un armement sophistiqué. De grandes entreprises occidentales bénéficient toujours de ce commerce au mépris du droit à l'autodétermination du peuple angolais et de ses droits les plus élémentaires. Le Rapporteur est également préoccupé par la présence des mercenaires angolais, tchadiens et français dans la République du Congo, ainsi que par le nombre élevé de morts, de mutilés, de réfugiés et de déplacés à l'intérieur du territoire qui résultent de ce conflit.

Le Rapporteur spécial présente ensuite certaines recommandations à l'Assemblée générale qui devrait adopter une position ferme face au défi que constitue pour le système de protection internationale des droits de l'homme la privatisation du maintien de l'ordre public et de la sécurité des personnes par le recrutement d'entreprises privées offrant des services de sécurité, d'assistance et d'instruction militaires, ainsi que face au recours de plus en plus fréquent de ces entreprises à des mercenaires. Selon le Rapporteur spécial, l'Assemblée devrait demander à tous les Etats Membres de l'ONU d'inclure dans leur législation une disposition qualifiant le mercenariat de délit pénal et stipuler que celui-ci est considéré comme un facteur aggravant de tout autre délit pénal, notamment des actes de terrorisme. Compte tenu des ambiguïtés et des vides juridiques qui facilitent actuellement le recours aux mercenaires et leur prolifération, l'Assemblée générale devrait inviter les Etats Membres à ratifier la Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires ou à y adhérer. A ce jour, seuls 19 Etats ont accompli les formalités par lesquelles ils se déclarent liés par les dispositions de la Convention internationale alors qu'il en faut 22 pour qu'elle puisse entrer en vigueur.

En outre, le Haut Commissariat des Nations Unies devrait également fournir des services d'assistance technique aux pays qui pâtissent des conséquences des activités des mercenaires et qui en font la demande, et organiser des réunions d'experts qui peuvent aider à mieux cerner les problèmes des entreprises privées qui fournissent des services de conseil et d'assistance militaires.

L'Assemblée générale devrait rappeler à tous les Etats Membres et aux organisations internationales qu'il est nécessaire d'interdire aux entreprises privées fournissant des services de sécurité de recourir à des mercenaires, notamment à celles qui offrent une assistance et des conseils militaires sur un marché international mondialisé. L'Assemblée générale devrait également garder à l'esprit que les mercenaires font valoir comme avantage comparatif leur plus grande efficacité et le fait qu'ils ne se sentent pas obligés de respecter les droits de l'homme ou les normes du droit international humanitaire.

Rapport sur le droit des peuples à l'autodétermination (A/54/327)

Le Secrétaire général note que la question est traitée dans les chapitres correspondants du rapport de la Commission des droits de l'homme (Documents officiels du Conseil économique et social, 1999, Supplément No 3 - E/1999/23 - partie II, chap. V et VIII. La Commission a adopté les résolutions 1999/3, relative à l'utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit des peuples à l'autodétermination; 1999/4, relative à la question du Sahara occidental, le 23 avril 1999 et 1999/55, relative à la situation en Palestine occupée, le 27 avril 1999.

La Commission est également saisie de la Lettre datée du 17 mai 1999, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent du Bangladesh auprès des Nations Unies (A/54/98), qui transmet le texte de l'Agenda de La Haye pour la paix et la justice au XXIe siècle, qui est le résultat de la Conférence relative à l'Appel de La Haye pour la paix tenue à La Haye du 12 au 15 mai 1999 et qui contient un chapitre sur les questions de l'élimination du racisme et de la discrimination raciale, ainsi que sur le droit des peuples à l'autodétermination; et d'une Lettre datée du 27 mai 1999, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent du Pakistan auprès des Nations Unies (A/54/118 - S/1999/633), faisant tenir le texte d'une lettre de M. Muhammad Nawaz Sharif, alors Premier Ministre de la République islamique du Pakistan dans laquelle ce dernier affirmait que les Cachemiriens se battent pour leur liberté depuis 50 ans et que cette lutte d'un peuple est menée au nom du droit à l'autodétermination, dont l'exercice lui a été promis par l'Inde comme par les Nations Unies.

Présentation des rapports

M. ENRIQUE BERNALES-BALLESTEROS, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé de la question du recours au mercenaires, a rappelé qu'il manque toujours trois ratifications ou adhésions pour que la Convention contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires entre en vigueur. Il a rappelé son voyage au Royaume-Uni à l'invitation du Gouvernement britannique, ainsi que celui qu'il a effectué récemment à Cuba pour enquêter, à la demande du Gouvernement, sur la possibilité d'activités mercenaires à l'encontre d'installations touristiques à La Havane. Le compte-rendu de cette visite figurera dans son prochain rapport. Il ressort de la visite au Royaume-Uni que les autorités britanniques sont également préoccupées par le développement d'entreprises de sécurité et de conseil militaire qui profitent du vide juridique pour engager des mercenaires qui participent activement aux conflits armés et se livrent à des violations des droits de l'homme. Ces sociétés privées agissent dans

les Etats affaiblis par des conflits armés qui ont besoin d'aide pour faire respecter leur souveraineté, a poursuivi le Rapporteur spécial. Les autorités britanniques ont suggéré plus de rigueur et de précision dans les concepts afin d'éviter que soient classées dans la même catégorie les entreprises privées légales qui fournissent des services de sécurité légitimes et celles qui recrutent des mercenaires et participent à des conflits armés.

M. Bernales-Ballesteros a cité en exemple le cas de la Sierra Leone, où l'intervention des ces entreprises militaires n'a en rien aidé à résoudre le conflit. Cet exemple montre qu'il faut renforcer les mécanismes de sécurité régionale afin d'aider à protéger les démocraties et les droits de l'homme. M. Bernales-Ballesteros a insisté sur le fait que ces entreprises privées sont mues par des objectifs qui sont indifférents, voire contraires à la paix et aux droits de l'homme. En Afrique, ces entreprises ont contribué à aggraver la situation.

A l'instar des autorités britanniques et des experts consultés, M. Bernales-Ballesteros a estimé que, face au vide juridique existant, il importe de définir clairement la nature des activités qui doivent être jugées et que les mercenaires soient jugés pour les actes qu'ils commettent. Quelle que soit l'origine des mercenaires, le danger est le même pour les peuples qui souffrent de leurs méfaits et il faut considérer que ces sociétés privées qui les engagent sont un facteur aggravant pour ce qui est de la violation des droits de l'homme. Il est dangereux que ces entreprises privées ne soient pas contrôlées et qu'une distinction claire ne soit pas établie fermement entre les activités de sécurité légitime et la participation aux conflits qui est délictueuse. En effet, a-t-il ajouté, il n'est pas admissible de tolérer la formation d'armées privées, le transfert de la protection des Etats à des entreprises privées, en quelque sorte, la privatisation de la guerre. On ne saurait tolérer que les Etats se libèrent de leurs obligations de défense de la paix qu'ils transféreraient à des entreprises privées. Ces entreprises ont d'autres motivations que le maintien de la paix, et il suffit de lire les annonces qu'elles passent sur Internet pour reconnaître qu'elles sont motivées par le profit qu'elles font aux dépens des Etats affaiblis qui le sont d'autant plus après l'intervention de ces entreprises sur leur territoire. M. Bernales-Ballesteros a insisté sur la nécessité de porter une attention particulière à cette privatisation de la guerre et à ses conséquences sur les droits de l'homme. La communauté internationale ne peut accepter un marché mondial libre et non régulé en ce qui concerne les services consultatifs et l'assistance militaire. La passivité en ce domaine sera interprétée comme une tolérance face à ces interventions paramilitaires privées dans le domaine de la sécurité des Etats.

Mme ELSA STAMATOPOULOU-ROBBINS, Directrice adjointe du Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme à New York, dans la présentation de son rapport lu par M. MAURICE GLELE-AHANHANZO, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, a déploré que, le lundi 11 octobre, un citoyen des Etats-Unis d'origine bulgare travaillant pour la Mission des Nations Unies au Kosovo, Valentin Krumov, ait été assassiné par un coup de feu après avoir été enlevé par une foule irritée qu'il se soit exprimé en langue serbe. Ce fait tragique nous montre combien l'intolérance, les animosités ethniques et raciale sont encore bien présentes dans notre monde qui, en cette fin de siècle, aspire à la paix et à la fraternité. Je pourrais citer de nombreux exemples qui, sur les cinq continents, appellent à un réveil des consciences contre la montée des forces xénophobes et les promoteurs de la haine ethnique et raciale, à l'exemple du soi-disant Parti de la Liberté (FPO) qui, en remportant 27,22% des suffrages aux dernières élections législatives autrichiennes, est devenu un acteur majeur de la scène politique de ce pays, a affirmé le Rapporteur spécial. Il a ajouté que l'expansion de la propagande raciste sur Internet se poursuit. Des sites antinègres, antiarabes, antisémites s'y côtoient et répandent un discours haineux. Il s'est félicité que des mesures visant à circonscrire cette activité nuisible, qu'aucune frontière ne semble pouvoir arrêter, aient déjà été prises en supplément des séminaires qui ont déjà eu lieu, en Allemagne, au Canada, en France, aux Pays-Bas et en Suède. Il a estimé que ces mesures méritent d'être amplifiées au niveau international.

Au-delà des préoccupations que suscite l'expansion des idéologies racistes, c'est avant tout le sort des personnes victimes de la discrimination raciale qui a préoccupé le Rapporteur spécial et, de ce point de vue, son attention a été attirée sur la situation des Aborigènes d'Australie chez lesquels les modifications de la Loi sur la propriété foncière pour les Aborigènes (Native Title Amendement Act 1998) adoptées en juillet 1998 par le Parlement australien suscite des craintes. Par conséquent, il a invité le Gouvernement australien à prendre des initiatives pour réviser les dispositions de la loi qui limitent l'accès à la propriété de la terre ou annulent les titres de propriété de cette population. Le Rapporteur a souhaité aussi que, pour favoriser une véritable réconciliation, il soit permis aux Aborigènes de participer au processus de décision dans les affaires qui les concernent et qu'une oreille attentive soit accordée aux revendications de la génération des enfants aborigènes enlevés à leurs parents et forcés à l'assimilation (Lost Generation, Génération perdue). Une mission pourrait être envisagée dans ce pays.

L'attention du Rapporteur spécial a été également attirée sur la situation des Intouchables ou "Dalits" de l'Inde. Le Gouvernement indien a pris de nombreuses mesures, notamment au plan législatif et constitutionnel, pour garantir les droits de l'homme de ces populations. Cependant, en dépit

des progrès enregistrés, les Dalits continuent d'être "subjugués" par des structures traditionnelles et sont en butte à la résistance d'individus tirant profit du système des castes. Après la publication du rapport, l'attention du Rapporteur spécial a notamment été attirée sur l'expulsion de Belgique vers la Slovaquie de 70 demandeurs d'asile appartenant à l'ethnie Roma. Cette déportation massive, selon plusieurs organisations des droits de l'homme, n'est pas conforme aux normes internationales en matière de droit d'asile (qui exigent l'examen individuel de chaque demande) et aurait un caractère discriminatoire. C'est toujours la situation des Roma qui a conduit le Rapporteur spécial à effectuer une mission en République tchèque, en Roumanie et en Hongrie, du 20 au 30 septembre 1999. Bien que des problèmes persistent, a dit le Rapporteur spécial, des mesures positives ont été adoptées dans chaque pays et favoriseront l'intégration progressive des Roma, à moyen ou long terme, tout en respectant leur identité culturelle.

Mme ELSA STAMATOPOULOU-ROBBINS, Directrice adjointe du Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme à New York, présentant le rapport sur la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a déclaré que les conflits armés et la violence quotidiens qui portent atteinte à la paix et à la sécurité internationales et qui sont souvent nourris par des idées de supériorité raciale, de racisme et de xénophobie démontrent que la lutte contre le racisme doit rester une priorité pour le système des Nations Unies.

Au cours des dernières années, a-t-elle notamment indiqué, le Comité sur l'élimination de la discrimination raciale a examiné la situation de certains Etats dans le cadre de sa procédure d'urgence qui comprend des mesures d'alerte rapide et des procédures d'action urgente. Dans le cadre de ces procédures, le Comité a adopté, cette année, des décisions concernant l'Australie, la République démocratique du Congo, la République fédérale de Yougoslavie en ce qui concerne le Kosovo, le Rwanda et le Soudan. En outre, le Comité a fait des déclarations sur les droits de l'homme du peuple kurde et sur la situation en Afrique. Par ailleurs, Mme Stamatopoulou-Robbins a estimé qu'il reste beaucoup à faire pour que les individus ou des groupes de personnes soient en mesure de soumettre des plaintes conformément à l'Article 14 de la Convention.

La Directrice adjointe a attiré l'attention de la Commission sur la décision adoptée par le Comité sur une question administrative, à savoir la possibilité de tenir sa 58ème session au Siège des Nations Unies, à New York, en mars 2001.

Mme Stamatopoulou-Robbins a également présenté le rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre du Programme d'action de la Troisième décennie de lutte contre le racisme et la discrimination raciale et le processus préparatoire de la conférence mondiale. Elle a précisé que la conférence

sera préparée lors des deux prochaines réunions des comités préparatoires qui auront lieu à Genève, en mai 2000 et en mai 2001. La conférence elle-même doit avoir lieu après le second Comité préparatoire et avant la session d'automne de 2001 de l'Assemblée générale.

Dialogue avec les délégations

Le représentant de la Finlande a déclaré que l'Union européenne (UE) partage les inquiétudes exprimées dans le rapport en ce qui concerne l'emploi de mercenaires. Il a posé la question de savoir si les informations fournies dans le rapport concernant divers pays mentionnés, notamment le Costa Rica, El Salvador, la Colombie, le Sierra Leone et divers pays africains, ont été mises à jour. En outre, concernant le recours aux entreprises privées, le représentant a demandé au Rapporteur spécial s'il s'agit d'une tendance due à la situation mondiale et à l'augmentation de la demande ou si ce sont les mercenaires qui cherchent à imposer leurs services. En troisième lieu, concernant le besoin de définition plus claire, le représentant a demandé à M. Bernales-Ballesteros de faire des suggestions et de partager les informations qu'il aurait reçues des milieux académiques. En quatrième lieu, le représentant a demandé s'il existe des développement positifs et encourageants pour l'avenir.

Le représentant du Liechtenstein, s'adressant à M. Bernales-Ballesteros, lui a demandé s'il a des commentaires à faire sur la récente résolution 1267 du Conseil de sécurité demandant l'extradition d'un individu. En outre, il lui a demandé son avis sur la convention en cours d'élaboration à la Sixième Commission relative au financement du terrorisme, car certaines délégations ont suggéré que la Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires devrait être incluse en annexe de la Convention sur le terrorisme.

Le représentant de la République islamique d'Iran, s'adressant à Mme Stamatopoulou-Robbins, a posé une question relative à la prochaine conférence sur le racisme et les contributions du Haut Commissariat des droits de l'homme. Il a souhaité savoir ce qu'il en est du financement du Bureau du Haut Commissariat en ce qui concerne la préparation de la prochaine conférence sur le racisme.

M. BERNALES-BALLESTEROS, en réponse aux questions qui lui ont été posées, a demandé à ce que l'on considère ses réponses comme provisoires. En ce qui concerne la mise à jour des informations compte tenu du fait qu'il n'y a eu que deux visites au cours de l'année écoulée, M. Bernales-Ballesteros a indiqué que cela fait deux ans qu'il s'efforce en vain d'organiser une visite au Sierra Leone, ainsi qu'une visite en République démocratique du Congo.

D'autre part, il est difficile d'organiser plus de deux visites dans une année budgétaire, notamment faute de ressources. Cela étant, a-t-il ajouté, les données fournies reposent sur des communications directes avec les gouvernements dont le texte se trouve dans les archives à Genève. Le rapport se base également sur les dénonciations des organisations non gouvernementales qui travaillent sur le terrain, par exemple International Alert. C'est à l'initiative de cette organisation que s'est tenue la conférence de Washington regroupant des chefs d'Etats et des experts. Une autre réunion du même genre se tiendra à Londres au mois de novembre.

En ce qui concerne la question de l'Union européenne, M. Bernales- Ballesteros a indiqué que le monde a changé depuis qu'il a pris ses fonctions en tant que Rapporteur spécial. Il existe aujourd'hui des entreprises qui vendent de la sécurité et du conseil militaires, ce qui est un phénomène nouveau. Ces entreprises sont installées dans divers pays et certaines d'entre elles peuvent, en recrutant des mercenaires dans divers pays, fournir une armée équipée de 500 personnes. Il ne faut pas assimiler ces entreprises à celles qui vendent légalement de la sécurité ou même des conseils et de l'information militaires dans le respect du droit des divers pays. Certaines entreprises vendent des conseils spécialisés à de nombreuses armées du monde sans se livrer à des activités mercenaires. Toutefois, il faut savoir qu'il existe aussi des groupes de mercenaires qui s'emploient à supplanter les armées légales ou les forces de paix en présence.

Dans le cas du Sierra Leone, a-t-il ajouté, si l'ECOMOG avait pu agir librement, il est probable que la destruction de ce pays n'aurait pas pris les mêmes proportions. C'est la présence d'entreprises qui ont prétendu former des armés et puiser dans les réserves minières du Sierra Leone qui a aggravé la situation. Aujourd'hui en Angola, en dépit de la paix signée en 1991, l'UNITA reçoit l'aide d'une entreprise privée qui lui fournit des armes, forme ses troupes et participe à ses combats internes. C'est à ce type d'entreprises que le rapport s'adresse. Il est évident que ses entreprises se multiplient car un marché existe et qu'il y a un vide juridique. M. Bernales-Ballesteros a estimé que, sans aller jusqu'à une interdiction qui affecterait les entreprises légales, il faut contrôler le marché et renforcer les mécanismes de maintien de la paix et de la sécurité.

S'agissant de savoir si ces mercenaires cherchent à imposer leur services, M. Bernales-Ballesteros a déclaré qu'il faut penser que oui. En ce qui concerne la précision de la définition du mercenaire, M. Bernales-Ballesteros a, depuis ses premiers rapports, dénoncé sa difficulté à travailler dans un domaine de vide juridique. Il a ajouté que la définition qui figure au protocole à la Convention de Genève est inadéquate. Il est donc, dans un premier temps et avant de pouvoir retravailler sur cette définition, nécessaire d'adhérer ou de ratifier la convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction

de mercenaires. A cet égard, de nombreux Etats ont émis des réserves à l'Article 1, M. Bernales-Ballesteros a tenu à signaler que la convention contient plus d'un article et qu'elle est très explicite sur les questions de financement. Si cette convention est adoptée, elle permettrait de limiter l'action de ces entreprises ayant recours à des mercenaires. Il a donc demandé aux Etats de la ratifier au plus vite et a rappelé qu'il ne manque que trois Etats pour qu'elle entre en vigueur. Par ailleurs, le Rapporteur spécial a indiqué qu'il est urgent de réunir des experts pour qu'ils étudient le phénomène du mercenariat tel qu'il se présente dans le monde moderne. Cela permettrait d'aboutir à un consensus positif pour limiter le phénomène et le définir clairement.

En réponse à la question concernant des changements positifs, M. Bernales-Ballesteros s'est félicité du fait que les réponses des Etats ont été plus nombreuses et que ceux-ci ont témoigné plus d'intérêt à cette question, notamment le Royaume-Uni dont les autorités ont montré une préoccupation réelle. La question de la Finlande elle-même dénote l'évolution positive en ce qui concerne l'intérêt que les Etats portent à cette question. Le mercenariat est un phénomène qui a ressurgi après la fin de la guerre froide et avec lequel il faut en finir.

En ce qui concerne le question sur le résolution 1267 du Conseil de sécurité, M. Bernales-Ballesteros a demandé à se renseigner plus avant car il n'est pas familier avec les termes précis de cette résolution. En ce qui concerne la convention sur le financement du terrorisme en cours d'élaboration à la Sixième Commission, M. Bernales-Ballesteros a estimé qu'il importe d'abord de faire ratifier la convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires elle même, car l'inclure en annexe ne paraît pas être la voie idoine aux Nations Unies. Il a toutefois ajouté qu'il existe un lien très fort entre le terrorisme et les activités mercenaires. On remarque que les actes terroristes sont souvent perpétrés par des mercenaires. Ainsi, il ne s'agit pas d'établir une distinction absolue entre les deux éléments, car en recherchant les sources de financement du terrorisme, il arrive souvent que l'on constate que l'acte a été commis par un mercenaire. En ce sens, ces deux conventions sont toutes deux nécessaires et visent le même objectif qui est d'accroître le respect des droits de l'homme dans le monde.

Mme ELSA STOMATOPOULOU-ROBBINS, Directrice adjointe du Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme à New York, a déclaré que le financement prévu par la résolution de l'Assemblée générale de 1997 sur la conférence mondiale contre le racisme couvre les deux comités préparatoires, la conférence même et la réunion ministérielle qui aura lieu deux jours avant. Un fonds de contribution a été créé pour financer les autres activités. La Directrice adjointe a précisé que les contributions reçues ne sont pas encore suffisantes pour financer les conférences régionales. Elle a indiqué que

le Bureau a préparé un plan de financement détaillé qui comprend notamment les activités liées à Internet, les séminaires avec des experts régionaux, les études demandées aux Organes des Nations Unies et le Secrétariat de la Conférence mondiale. Elle a salué l'intérêt démontré par la Fondation Ford pour ces activités et le soutien qu'elle a fourni.

Le représentant de l'Autriche a déclaré que l'Autriche est une démocratie stable qui a accueilli quelques 150 000 réfugiés provenant des Balkans dont 80 000 sont restés. Il a demandé à M. Bernales-Ballesteros des précisions sur les services consultatifs et l'assistance pratique que pourrait offrir le Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme pour lutter contre le recours aux mercenaires.

M. ENRIQUE BERNALES-BALLESTEROS, répondant au représentant de l'Autriche, a déclaré que l'assistance pratique découle d'une résolution de l'Assemblée générale concernant le Bureau et n'a pas encore été mise en pratique. Extrapolant à partir de sa visite en Grande-Bretagne, au cours de laquelle il a été suggéré d'assister les Etats frappés par des conflits armés ou émergeant de conflits, il a estimé que l'on pourrait contribuer à la consolidation des institutions démocratiques et de l'état de droit afin d'éviter l'apparition de situations de tension dont tirent parti les mercenaires. Dans ce cadre, il s'est inquiété de l'existence de personnel militaire démobilisé et sans emploi, qui ne sait faire que la guerre.

Débat général

M. SIM FARAR (Etats-Unis) a déclaré que la situation raciale aux Etats-Unis évolue dans un sens positif et que l'initiative présidentielle de 1997 sur les races a permis d'engager une étude et un dialogue positif sur la manière d'aborder le XXIe siècle en tant que communauté unie, autour de valeurs communes, tout en respectant les différences. Au-delà des efforts menés au niveau national, les Etats-Unis appuient les actions des Nations Unies dans le cadre de la troisième Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale, ainsi que les actions visant à encourager des réformes en vue de protéger les personnes des effets du racisme.

Le représentant a loué les travaux effectués dans le cadre du Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme. Il a encouragé le Rapporteur spécial à mener des enquêtes dans toutes les régions du monde. Mais, a-t-il ajouté, la responsabilité d'éliminer le racisme et la xénophobie incombe principalement aux Etats. Il a déclaré que les Etats-Unis travailleraient avec le Secrétaire général et le Bureau du Haut Commissariat et autres, afin de mettre au point l'ordre du jour de la Conférence mondiale sur le racisme de 2001. A cet égard, il a indiqué que les Etats-Unis étaient favorables

à ce que les réunions de ce type se tiennent dans les villes où les Nations Unies ont des locaux afin de limiter les dépenses pour le Secrétariat et pour les délégations. En outre, la conférence devrait s'attacher à souligner les "bonnes pratiques" plutôt qu'a ressasser le passé. Aucun Etat n'a le monopole des bonnes idées. Nous devons apprendre les uns des autres.

M. DUMISANI KUMALO (Afrique du Sud) a débuté son allocution en rendant hommage à Julius Nyerere, ancien président de la Tanzanie, et cofondateur de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC). Prenant la parole au nom de la SADC, M. Kumalo a déclaré que l'Afrique a longtemps eu à lutter contre le racisme, l'injustice et le colonialisme. L'Afrique australe, tout particulièrement, a eu combattre la forme la plus institutionnalisée de racisme. La SADC regrette qu'à travers le monde, la faiblesse des instruments juridiques disponibles rende quasi impossible le jugement des crimes liés au racisme ou aux discriminations de toutes formes. La SADC est également préoccupée par des formes plus subtiles de racisme que sont certains messages haineux diffusés sur Internet ou certaines politiques visant les populations immigrées. M. Kumalo a souligné que quoique subtils, ces actes ou propos racistes tombent sous le coup de la définition adoptée par la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Cette définition englobe le racisme au-delà des considérations basées sur la couleur de la peau.

La SADC estime que la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée devrait prendre en compte un volet de recherche sur l'utilisation d'Internet à des fins racistes. M. Kumalo a attiré l'attention des participants sur les incidences de la mondialisation sur le phénomène du racisme. Il a souhaité que le Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme enquête de façon plus poussée sur cette relation. Au sujet des préparatifs de la conférence mondiale sur le racisme, la SADC propose que les questions de financement bénéficie d'un calendrier précis. Afin d'assurer une plus grande sensibilisation et participation de l'opinion publique internationale, la SADC suggère que soit lancée immédiatement une campagne d'information.

M. JOHAN SCHALIN (Finlande), au nom de l'Union européenne et des Etats associés, a déclaré que les gouvernements avaient l'obligation de respecter le principe de non discrimination, condition sine qua non du respect de tous les droits humains. Une société stable, en paix, ne peut être fondée que sur la tolérance et le respect de la diversité. L'Union européenne est convaincue qu'il est essentiel d'avoir la participation active de tous les individus d'une société, y compris des minorités, des populations autochtones et des migrants, pour combattre efficacement le racisme. En ce qui concerne les femmes, et plus particulièrement les femmes appartenant à une minorité où le risque de subir une double marginalisation est plus important, M. Schalin a estimé que le sexisme doit être fermement combattu. Les gouvernements doivent donc être attentifs à la situation particulière des femmes et des jeunes filles dans leurs programmes de lutte contre le racisme.

Sur le plan normatif, l'Union européenne a adopté une série de textes qui établissent clairement sa volonté de lutter contre le racisme et toutes les autres formes de discrimination. L'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam en mai 1999 a renforcé le respect de l'ensemble des droits humains. Elle a permis à l'Union européenne de mieux combattre la discrimination fondée sur le sexe, l'origine ethnique ou raciale, la religion ou les croyances, l'infirmité, l'âge ou l'orientation sexuelle. Plus pratiquement, le Centre européen de surveillance du racisme et de la xénophobie a établi une base de données très utile au travail des organisations non gouvernementales (ONG) et des chercheurs.

L'importance de la coordination des efforts dans le domaine de la lutte contre le racisme est illustrée par le travail de terrain accompli par l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Le Conseil de l'Europe a par ailleurs mis en place un Commissaire des droits de l'homme et un organisme indépendant chargé de proposer des recommandations et de scruter les politiques et les législations des Etats Membres. M. Schalin a souligné que les différents organes de l'Union européenne accordent une plus grande attention aux problèmes des communautés Roma et Sinti. Le combat contre le racisme est intrinsèque au concept de sécurité de l'OSCE.

L'Union européenne se félicite du nombre croissant d'Etats parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et appelle tous ceux qui ne l'ont pas encore fait à y adhérer ou à la ratifier, ceci dans le cadre de leurs préparatifs de la prochaine conférence mondiale contre le racisme. M. Schalin a souligné que les différents instruments internationaux sur la question offrait un cadre juridique essentiel. Le représentant a rappelé que l'Europe organiserait à Strasbourg, en octobre 2000, une conférence intitulée "Tous différents, tous égaux: des principes à la pratique". L'Union européenne soutient la Haute Commissaire aux droits de l'homme dans son rôle de Secrétaire générale de la conférence.

Sur le point de l'ordre du jour concernant le droit des peuples à l'autodétermination, M. Schalin a affirmé que ce droit restait d'actualité et que sa réalisation est un processus continu. Le représentant a souligné qu'il était de la responsabilité des Etats d'assurer à tous la liberté de pensée, la liberté d'expression, d'association ainsi que le droit à une participation effective. Ces droits sont essentiels et doivent pouvoir être exercés par tous les individus, appartenant ou non à une minorité ou à une communauté autochtone sans crainte de représailles. M. Schalin a conclu que la bonne gouvernance, la démocratie, l'Etat de droit étaient des conditions sine qua non de l'exercice de ces droits. Les peuples ont le droit de changer leurs dirigeants régulièrement sans craindre un coup d'état.

M. IBRA DEGUENE KA (Sénégal) a déclaré que l'idéologie de la supériorité raciale loin de s'estomper, continue de se développer. Les conflits ethniques identitaires en Afrique et ailleurs, les mauvais traitements dont sont l'objet les travailleurs migrants et les réfugiés, les lois sur la "préférence nationale", les discriminations en matière d'emploi et de formation, constituent autant d'indices de fragilité de notre civilisation. Le moment nous semble venu de réfléchir ensemble sur la meilleure manière de bâtir une société ouverte, tolérante, de tous les âges, de toutes les traditions, de toutes les cultures et de toutes les religions. Ma délégation déplore le peu d'intérêt porté à la troisième Décennie de lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, ainsi que le peu d'activités menées durant la période 1994-1998, a poursuivi le représentant. Ma délégation appuie la demande formulée par le Haut Commissaire aux droits de l'homme aux fins de disposer de ressources suffisantes pour assurer la coordination des activités prévues dans le cadre de cette troisième Décennie.

Mon pays, le Sénégal, se félicite du travail remarquable mené par le Groupe de travail de la Commission des droits de l'homme qu'il a le privilège de présider depuis sa création. Le rapport du Groupe de travail nous donne une bonne base pour aborder, ensemble, les questions de fond et les questions de procédure dans la perspective de la conférence mondiale contre le racisme. Le rapport du Secrétaire général sur l'application du Programme d'action pour la troisième Décennie et sur le processus préparatoire de la conférence rend bien compte des efforts déployés par le Groupe de travail dans le cadre du mandat que lui a confié la Commission des droits de l'homme.

Une conférence mondiale contre le racisme ne saurait être une conférence d'exclusion, a estimé le représentant. Elle nécessite une large participation de tous. Ma délégation considère que l'accent devrait davantage être mis sur la question de l'éducation et de la sensibilisation, sur l'usage des technologies modernes de l'information, notamment l'Internet, pour mobiliser l'opinion publique nationale et internationale en faveur des objectifs de la conférence. Ma délégation est d'avis que l'ordre du jour de la conférence mondiale, devrait, entre autres, inclure les questions suivantes: voie de recours, mécanismes de réparation et indemnisation en cas de discrimination raciale; promotion d'une culture de la tolérance et d'un dialogue fécond entre les civilisations et les religions; révolution des technologies de l'information et leur utilisation à des fins non raciales. Pour conclure, je voudrais redire, ici, solennellement, l'appui du Sénégal à la candidature de l'Afrique du Sud, pour abriter, en l'an 2001, la conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie qui y est associée.

M. LUIS ALBERTO AMOROS NUNEZ (Cuba) a indiqué que le monde développé est une scène où le racisme se décline de manière alarmante et perfide. Les immigrés sont devenus les boucs émissaires des sociétés développées. Il sont les victimes des groupes extrémistes et d'un racisme administratif déguisé. Alors que des murs tombent, d'autres sont ainsi érigés à l'intérieur des sociétés et il faut s'interroger sur la situation américaine à cet égard. Il s'est déclaré préoccupé par l'augmentation des groupes néofascistes dans certains pays du Nord où ils deviennent des alternatives au pouvoir. Ces groupes profitent du climat d'insécurité et de désespoir que font régner les injustices de la mondialisation. Le représentant s'est également inquiété du nombre de sites Internet qui divulguent des informations racistes et a estimé qu'il est temps d'élaborer un code afin de protéger ceux qui naviguent sur l'Internet. Il est également urgent qu'il y ait un retrait de toutes les réserves à la Convention internationale sur toutes les formes de discrimination. Il est inconcevable, d'autre part, que le Rapporteur spécial n'ait que de faibles ressources pour exécuter ses fonctions et ne reçoive pas une meilleure coopération des Etats. Il est donc nécessaire que des ressources soient allouées au titre du budget ordinaire vue l'apathie de la communauté internationale.

En ce qui concerne la prochaine conférence sur le racisme, le représentant a estimé que l'Afrique du Sud serait un hôte très approprié et que la délégation de Cuba participera dans sa mesure aux travaux préparatoires.

Mme MONICA MARTINEZ (Equateur) a salué le rapport de M. Glèlè-Ahanhanzo, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme. La représentante a ajouté que le Ministre des affaires étrangères de son pays s'emploie à diffuser auprès de la population équatorienne les instruments internationaux qui interdisent les pratiques discriminatoires, et particulièrement la discrimination raciale. Plusieurs textes ont été publiés en quechua, langue que parle la majorité des populations autochtones de l'Equateur. Le Gouvernement équatorien accorde une grande importance à la préservation et au renforcement du patrimoine culturel de ses groupes ethniques. Elle a appelé la communauté internationale à passer des manifestations de bonne volonté à la mise en pratique du concept d'égalité des droits. La représentante a salué le travail du Groupe de travail à composition non limitée de la Commission des droits de l'homme, en particulier dans la définition des thèmes que la prochaine conférence sur le racisme devrait aborder.

Mme OKSANA BOYKO (Ukraine) a déclaré qu'il était de la responsabilité des gouvernements de combattre le racisme et toutes les autres formes de discrimination. L'Ukraine estime que les Etats doivent mettre l'accent sur leurs législations et sur leurs programmes éducatifs.

Concernant la situation dans son pays, Mme Boyko a affirmé qu'il n'y avait aucun problème notable d'hostilité ou de violence liées au racisme ou à l'antisémitisme. La législation condamne sévèrement les actes ou propos racistes. Un quart de la population ukrainienne est composée de minorités nationales, l'Etat accorde donc une attention particulière au respect des droits de ces populations. Ainsi, tous les citoyens ukrainiens ont le droit de pratiquer la religion de leur choix, conserver leurs symboles nationaux, célébrer leurs fêtes nationales et traditionnelles et utiliser leur langue au même titre que la langue de l'Etat.

Sur le principe de l'autodétermination des peuples, Mme Boyko a établi une distinction entre, d'une part, les peuples dont le statut a été déterminé par la colonisation ou l'occupation par des puissances étrangères et, d'autre part, les minorités nationales englobées dans des Etats modernes du fait d'un processus historique. Faisant référence à la Déclaration des Principes du droit international, Mme Boyko a insisté sur le fait que le principe de l'autodétermination des peuples n'implique pas automatiquement le droit à la sécession d'un territoire.

Mme Boyko a regretté les allégations concernant la présence de mercenaires ukrainiens en Angola, contenues dans le Rapport sur l'utilisation de mercenaires comme moyen d'empêcher l'exercice du droit des peuples à l'autodétermination. L'Ukraine demande que les Etats concernés apportent la preuve de la nationalité des mercenaires.

M. HENRI-BLAISE GOTIENNE (République du Congo) a estimé que le rapport présenté par M. Bernales-Ballesteros abonde d'allégations fausses et incorrectes. Le représentant a indiqué que qualifier le contingent angolais qui stationne au Congo de mercenaires fait preuve d'une méconnaissance de la situation régionale. D'autre part, il a justifié la présence des soldats français et tchadiens par la nécessité d'aider à reconstituer une armée en déliquescence après le passage de M. Lissouba. Le représentant s'est indigné du silence du rapport sur les activités des mercenaires de l'UNITA qui mettent le pays à sac.

En ce qui concerne le pétrole exploité au Congo depuis 1957, le représentant a expliqué que c'est Lissouba qui a imposé la compagnie Occidental Petroleum comme exploitant, après l'arrivée de laquelle la situation est devenue explosive.

En ce qui concerne la question des milices armées, le représentant a rappelé que ce phénomène remonte à 1965, date à laquelle M. Lissouba était Premier Ministre et qu'il est réapparu quand celui-ci est devenu Président. Ces milices ont saccagé l'infrastructure, l'industrie, l'administration et pris en otage des pans entiers de la population. C'est pourquoi il est étonnant qu'elles ne soient pas dénoncées dans le rapport.

Le représentant a estimé que c'est encore une preuve d'ignorance de la situation locale et a regretté que le Rapporteur spécial n'ait pas consulté les rapports de l'UNICEF. Par ailleurs, le représentant a démenti les informations selon lesquelles des combats se dérouleraient encore au Congo alors que les combattants se rendent en masse. Le représentant a insisté sur le fait que le Congo est aujourd'hui en train de se remettre sur les rails. Il a cité en exemple l'Accord signé en 1998 avec les Institutions de Bretton Woods et les récentes visites du FMI et de la Banque mondiale. Le représentant a demandé où le Rapporteur a pris ses informations qu'il a jugées comme un "fracas d'incohérence qui pêche par légèreté". Le Congo mérite d'être mieux jugé afin que le dialogue reprenne avec les organisations internationales.

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