AG/DSI/224

DES INQUIETUDES SONT EXPRIMEES A LA SUITE D'UN CONSTAT SELON LEQUEL LE DESARMEMENT NE PROGRESSE PAS

15 octobre 1999


Communiqué de Presse
AG/DSI/224


DES INQUIETUDES SONT EXPRIMEES A LA SUITE D'UN CONSTAT SELON LEQUEL LE DESARMEMENT NE PROGRESSE PAS

19991015

La Commission du désarmement et de la sécurité internationale a entendu ce matin les délégations des Etats Membres qui ont exprimé leurs inquiétudes à la suite de leur constat selon lequel le désarmement ne progresse pas. Plusieurs raisons soutendent cela, en particulier, entre autres, la position de certains états nucléaires, qui pressent les autres de signer le CTBT pendant qu'eux mêmes ne l'ont pas encore signé ou refusent de le ratifier, et la production ainsi que le trafic illicite d'armes légères et de petit calibre. C'est ainsi que le représentant de l'Inde a expliqué que la décision de son gouvernement de ne pas adhérer au CTBT s'explique par la nécessité de réaliser un consensus au niveau national et par l'imperfection de ses dispositions ainsi que par le fait que certains pays continuent d'imposer des conditions à leur ratification. Il a expliqué que le caractère discriminatoire du régime de non-prolifération nucléaire avait obligé l'Inde à prendre des mesures pour assurer sa sécurité. La mise en oeuvre du CTBT apportera certes des améliorations capitales au désarmement nucléaire dans la mesure où il limitera les progrès qualitatifs des armes nucléaires, a observé le représentant de l'Australie. A lui seul, il ne parviendra cependant pas à relever le défi du désarmement nucléaire. Un traité "cut off" des matières fissiles permettra de réduire la quantité des arsenaux nucléaires. Les délégations de Singapour et de la République de Corée ont demandé des efforts supplémentaires pour renverser la tendance à une course aux armements en Asie. Constatant qu'il n'existe à ce jour aucune norme internationale régissant la prolifération des systèmes missiles de longue portée, la République de Corée a demandé que des négociations soient entamées afin d'établir des normes internationales contre la prolifération de la technologie des missiles balistiques à des fins militaires. Il a jugé impératif que la République populaire démocratique de Corée, en tant qu'Etat membre du TNP, applique pleinement les Accords de garanties de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). D'autres délégations ont dénoncé le commerce illicite d'armes légères et de petit calibre et demandé que la communauté internationale prenne des mesures pour limiter leur production, leur commerce et leur utilisation.

Les représentants des pays suivants ont pris la parole: Australie, Singapour, Bélarus, Inde, Viet Nam, Sénégal, Kazakhstan, Kenya, Ouganda et République de Corée. Le représentant de la Fédération de Russie a également pris la parole.

La Commission reprendra ses travaux cet après-midi à 15 heures.

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Débat général

M. LES LUCK (Australie) a souligné que l'Australie est reconnaissante des efforts déployés par les Nations Unies dans le domaine du désarmement et de la paix. Elle se félicite notamment, concernant la paix, des efforts de la Force multinationale mandatée par les Nations Unies (INTERFET) au Timor Oriental afin de restaurer la paix et de faire face au besoin humanitaire considérable dans cette région du monde. Il a rappelé qu'un certain nombre de défis a été posé aux aspirations à la non-prolifération et au désarmement. Les conséquences immédiates en ont été un risque accru pour la sécurité internationale et régionale. Les essais nucléaires conduits l'an passé en Asie du Sud soulignent la nécessité continue de faire avancer le processus de ratification du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (CTBT). A cet égard, l'Australie est profondément déçue et préoccupée face à la décision des Etats-Unis de ne pas ratifier ce Traité. Le représentant a prié instamment l'Administration américaine de poursuivre ses efforts afin de créer un soutien en faveur du Traité qui permette une ratification rapide de cet instrument important. La Conférence qui s'est tenue à Vienne la semaine dernière, conformément à l'Article XIV, a souligné la détermination des pays qui ont ratifié le CTBT, parmi lesquels l'Australie, ainsi que celle des Etats signataires à oeuvrer en faveur d'une entrée en vigueur rapide. Le CTBT apportera une contribution capitale au désarmement nucléaire en limitant l'amélioration qualitative des armes nucléaires. Mais le traité CTBT, à lui seul, ne permettra pas d'aboutir au désarmement nucléaire. Un traité Cut-Off apporterait des avantages essentiels de sécurité à tous les Etats, qu'ils soient ou non dotés de l'arme nucléaire. Bien souvent, dans le domaine du désarmement multilatéral, nos efforts se heurtent à des attentes irréalistes, avec pour conséquence que les résultats qui peuvent être atteints sont menacés. Une réalité subsiste cependant: la tâche de réduire les arsenaux nucléaires nécessitera des négociations déterminées, en particulier entre les Etats détenteurs de ces arsenaux.

Au regard des armes légères, la région de l'Asie-Pacifique a entrepris des efforts régionaux qui méritent notre attention. Parmi eux, le Forum du Pacifique Sud est en train de développer une approche commune régionale face au contrôle des armes, la fabrication et le trafic illicite des armes à feu, des munitions et des explosifs. Le Forum régional de l'ANASE (Association des nations de l'Asie du Sud-Est) organisera des réunions transnationales au niveau régional pour discuter du crime transnational découlant de l'utilisation de ces armes.

M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a souligné la complexité des questions liées au désarmement à tous les niveaux, qu'il s'agisse des armes de destruction massive ou des armes classiques. L'humanité a accepté l'existence de cinq puissances nucléaires comme un fait indéniable et irréversible de l'histoire. Les cinq puissances nucléaires doivent en échange se montrer dignes de la confiance placée en eux par l'humanité en adoptant des attitudes

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responsables sur les questions touchant le nucléaire. C'est la raison pour laquelle, la position du Sénat américain qui a refusé de ratifier le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires est troublante et pourrait réveiller de vieux démons. Les armes chimiques et biologiques constituent également des armes de destruction massive. Comme les armes nucléaires, a constaté le représentant, elles n'ont pratiquement pas été utilisées lors des guerres entre superpuissances bien que l'on assiste à une tendance de la part des Etats de puissance intermédiaire visant à les utiliser. Compte tenu de l'horreur qui s'inspire de telles armes, il est surprenant de voir que peu d'organisations non gouvernementales et peu de personnalités publiques se sont mobilisées contre elles. Nous comprenons leurs préoccupations au sujet des mines antipersonnel et des armes légères, mais il est déprimant de voir que ceux qui militent en faveur du désarmement se comportent comme des couturiers qui suivent la mode du jour sans se soucier des besoins à long terme.

Si l'élimination des armes nucléaires est un objectif lointain, l'élimination d'autres armes comme les navires, avions militaires et les chars semble encore plus éloignée. Curieusement, le rythme de vente de ces armes a donné lieu à un accroissement des instances où sont examinées les questions relatives à de telles armes. Pour certaines nations, acquérir de telles armes constituent presque une épreuve de virilité. L'acquisition n'est pas nécessairement mauvaise en soi. L'organisation la plus militarisée est l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Ses membres poursuivent la modernisation de leurs arsenaux militaires et pourtant la possibilité d'une guerre entre ces Etats est pratiquement nulle malgré les efforts constants de réarmement. En fait, les armes en elles-mêmes ne produisent pas les guerres. Dans certains cas elles peuvent prévenir les conflits. Viendra un jour où l'humanité mettra en place un ordre de sécurité collective afin de prévenir ou d'intervenir dans les conflits. Au sujet des armes de petit calibre, il faudra mettre un terme au trafic illicite de telles armes. Nous ne devons pas, en revanche, mettre un terme au commerce légal de ces armes. Le commerce illicite des armes de petit calibre peut être comparé au trafic de drogues. Paradoxalement, a relevé le représentant, les pays développés tentent d'étouffer les pays consommateurs d'armes de petit calibre alors que dans la lutte contre le trafic de drogues, ils tentent d'étouffer les producteurs. La seule explication à ce phénomène étrange est que dans les deux cas, le poids retombe sur les pays en développement.

M. KISHORE MAHBUBANI (Bélarus) a déclaré qu'il ne serait pas exagéré d'affirmer que le processus de désarmement international avance dans une direction critique. La guerre froide a été remplacée par des déséquilibres multipolaires qui ont des facteurs déstabilisateurs. Pour être juste, il faut aussi constater qu'il y a eu des événements positifs dans le domaine du désarmement. Il convient à cet égard de souligner ce que l'on appelle le "désarmement préventif". Bien que cet instrument ait été utilisé jusqu'à présent dans le domaine des armes légères, il devra être appliqué également aux armes de destruction massive, en particulier aux armes nucléaires. A cet

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égard le projet de résolution, qui sera présenté par la délégation du Bélarus lors de cette session, vise à prévenir la mise au point et la fabrication des nouvelles armes de destruction massive. Le représentant a formulé l'espoir que cette résolution sera adoptée sans vote lors de cette session et qu'il deviendra un élément modeste de la tendance grandissante du "désarmement préventif".

Le Bélarus s'est dit profondément choqué par la décision prise par le Sénat des Etats-Unis de ne pas ratifier le CTBT. Il s'agit là d'un coup sérieux porté à l'ensemble de l'édifice du désarmement moderne et de la non- prolifération. Cette décision a également porté un coup à la confiance qui est un principe de haute importance dans les négociations délicates sur les accords de maîtrise des armements et de désarmement. Dans le même temps, le Bélarus souhaite faire connaître qu'il apprécie les efforts déployés par la branche du pouvoir exécutif américain pour sauver la situation et souhaite que ces efforts se poursuivent. Le Bélarus estime également que la création de zones exemptes d'armes nucléaires représente un pas positif vers la sécurité régionale et la confiance mutuelle. C'est ainsi que le Bélarus a entrepris de créer une telle zone en Europe centrale et de l'Est et est certain que sa réalisation constituera une priorité pour les nations de la région dans la première partie du 21ème siècle.

Mme SAVITRI KUNADI (Inde) a estimé que les perspectives d'une réduction continue et irréversible des forces stratégiques nucléaires s'éloignent. Nous espérons que les accords conclus lors du Sommet de Cologne permettront de revitaliser ce processus bilatéral. L'impasse actuelle des négociations bilatérales relatives aux armes nucléaires ne doit pas dissuader les autres Etats dotés de l'arme nucléaire d'entreprendre une réduction de leurs arsenaux nucléaires dans un cadre multilatéral. La seule alliance militaire aux dimensions transcontinentales continue d'assigner aux armes nucléaires la plus grande priorité. Avec la fin de la guerre froide, il n'y pas plus de justification pour maintenir en état d'alerte de milliers d'armes nucléaires qui entraînent des risques inacceptables pour l'humanité. L'année dernière, l'Inde a présenté un projet de résolution sur "la réduction du danger nucléaire" qui a reçu un vaste soutien au sein de l'Assemblée générale. Nous proposons de réintroduire cette année encore ce texte en espérant que la communauté internationale pourra prendre les mesures nécessaires collectives pour réduire les risques posés par les dispositifs en état d'alerte et éliminer la doctrine sur laquelle ils reposent.

L'Inde, a souligné la représentante, n'a pas fléchi dans son engagement en vue du désarmement nucléaire. L'Inde est le seul Etat doté de l'arme nucléaire qui croit dans les vertus d'un monde exempte de l'arme nucléaire pour assurer sa sécurité. C'est la raison pour laquelle, elle continue de militer en faveur de négociations pour l'élaboration d'une convention sur les armes nucléaires qui interdirait pour toujours la production, le stockage, l'emploi et la menace de l'emploi d'armes nucléaires et qui prévoierait des

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mesures de vérifications internationales à cet effet. Convaincue qu'un monde exempte de l'arme nucléaire contribuerait à la promotion de la sécurité collective, l'Inde a été à l'origine de nombreuses initiatives et notamment celle en 1998 visant la mise en oeuvre d'un programme d'élimination progressive et complète des armes nucléaires. Aucune de ces initiatives n'a été acceptée. En revanche, il nous a été demandé de devenir partie à un régime de non-prolifération discriminatoire et inégal. L'échec du régime actuel de non-prolifération nous a obligé à prendre des mesures afin d'assurer notre sécurité. Notre doctrine de dissuasion minimale est au coeur de notre politique nucléaire. Cette politique est caractérisée par la retenue et par l'engagement de ne pas utiliser l'arme nucléaire contre les pays qui n'en ont pas, a expliqué la représentante.

La décision de l'Inde de ne pas adhérer au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires a été motivée par un certains nombres de questions. Certaines ont été réglées grâce à la série de cinq essais nucléaires souterrains menés en 1998. A la suite des ces essais, l'Inde a annoncé un moratoire volontaire. Le Gouvernement tient à créer le consensus le plus vaste possible au niveau national. Un environnement positif sera de nature à faciliter l'adhésion à ce traité. Nous souhaitons également que d'autres pays n'imposent pas de conditions à leur adhésion. La représentante a souligné que l'accord obtenu au sein de la Conférence du désarmement en 1998 au sujet de la création d'un comité ad hoc sur les matières fissiles est dû à la flexibilité de ses membres au premier rang desquels se trouve l'Inde. La création d'un comité ad hoc sur le désarmement nucléaire est une de ses priorités. La représentante a regretté l'impasse dans laquelle s'est trouvée la Conférence cette année qui ne doit pas servir la cause d'un groupe d'Etats. La représentante a soutenu la création de zones exempte d'armes nucléaires sur la base du libre consentement des Etats concernés de la région. L'Inde respecte pleinement le statut de zone exempte d'armes nucléaires en Asie du Sud-Est. Elle est disposée à traduire cet engagement en obligation juridique. L'Inde est également prête à prendre les engagements nécessaires à la création rapide d'une zone exempte d'arme nucléaire en Asie centrale.

L'utilisation pacifique des technologies nucléaires est de la plus grande importance pour les pays en développement, a relevé la représentante. L'Agence internationale de l'énergie atomique doit s'efforcer de rester fidèle à son mandat d'origine consistant à promouvoir l'énergie atomique et ne pas jouer au policier. Les récents événements ont montré que nous attachons une importance particulière à la sécurité nucléaire. L'Inde envisage l'accession à la Convention sur la protection physique du matériel nucléaire. Nous sommes également disposés à maintenir et à renforcer un système transparent de contrôle des exportations des technologies nucléaires qui entre dans le droit fil des objectifs de non prolifération sous tous ses aspects sans que les applications pacifiques de ces technologies ne soient mises en danger. La représentante a dénoncé le caractère discriminatoire de certains mécanismes de

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contrôle qui sont en contradiction avec les traités existants. Elle a dit le soutient de son pays à la mise en oeuvre de directives non discriminatoires multilatérales portant sur le transfert des technologies à double usage.

M. PHAM BINH MINH (Viet Nam) a déclaré que son pays partage l'avis du Secrétaire général adjoint lorsqu'il affirme que la question la plus difficile à l'ordre du jour de la Commission est de parvenir au désarmement nucléaire mondial. Le Viet Nam est convaincu que l'heure est venue pour la communauté internationale de parvenir "pour de bon" à une interdiction des armes nucléaires. Le Viet Nam appuiera toute initiative dans cette direction et se joint aux délégations qui demandent instamment aux Etats dotés de l'arme nucléaire de s'engager à se débarrasser de leurs stocks d'armes nucléaires dans un délai bien défini. Conformément aux instruments légaux, les Etats nucléaires sont obligés, a rappelé le représentant, de conduire des négociations en toute bonne foi afin d'éliminer toutes les armes nucléaires qu'ils ont produites.

L'une des réalisations les plus importantes de la période de l'après Guerre froide est celle de la conclusion et de l'entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques (CAC) qui vise à la destruction des armes de ce type. Le Vietnam a ratifié cette convention à l'automne dernier et est pleinement engagé à s'acquitter de ses obligations au titre de la convention. S'agissant des zones exemptes d'armes nucléaires, le représentant a rappelé que le Traité établissant une zone exempte d'armes nucléaires en Asie du Sud- Est est entré en vigueur il y a deux ans. Un protocole annexé à ce traité a été ouvert à la signature pour les Etats dotés de l'arme nucléaire. Le représentant a qualifié d'encourageants les souhaits exprimés par la République populaire de Chine et la Fédération de Russie de signer et de ratifier ce Protocole dans un futur proche. Concluant sur les travaux du Centre régional pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique, le représentant s'est dit convaincu que le Centre représente un instrument utile permettant de renforcer la confiance mutuelle entre les pays de la région, à la fois en termes de sécurité et de désarmement.

M. IBRA DEGUENE KA (Sénégal) a regretté la situation incertaine dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement dont son pays est membre. Elle est enlisée depuis trois ans par des considérations stériles. L'esprit du consensus qui l'a toujours animée paraît s'être assoupi pour céder la place au règne de la méfiance et de la suspicion où la moindre proposition est immédiatement sujette à caution. Nous invitons ses membres à un sursaut salutaire pour que s'instaure un nouveau climat de confiance et une réelle volonté politique, seule gage de succès. Le représentant a estimé qu'il fallait accorder une attention plus soutenue à la question de la prolifération des armes légères et de petit calibre qui menacent non seulement la paix, la sécurité et la stabilité des Etats africains mais constituent des obstacles majeurs à l'édification et au renforcement des régimes démocratiques sans lequel aucune politique de développement économique et social n'est concevable sur le continent africain.

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Le représentant a évoqué l'adoption par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) d'un moratoire sur la fabrication, l'importation et l'exportation des armes légères en Afrique de l'Ouest. Cet instrument a été renforcé dans le cadre d'un projet intégré de sécurité et de développement appelé "Programme de Coordination et d'Assistance pour la sécurité et le développement" dont le but est de créer une culture de la paix et de la sécurité dans la sous-région. Le représentant a fait état de l'initiative du 35ème Sommet des Chefs d'Etats et de Gouvernements de l'Organisation de l'unité africaine qui a adopté des décisions concrètes en vue de juguler ce phénomène. Il faut souligner que ce fléau dépasse les frontières de l'Afrique, a expliqué le représentant. Il y a lieu dans ce contexte de se féliciter des mesures prises en Amérique latine et au sein de l'Union européenne.

Toutes ces actions aussi pertinentes soient-elles, doivent être en harmonie avec les organes des Nations Unies. Le Conseil de sécurité a tenu un débat sur cette question le 23 septembre prochain et le diagnostique qui s'en est dégagé donne toute la mesure de l'importance qu'il faut accorder à la convocation de la Conférence internationale sur le commerce illicite des armes prévue en l'an 2000. Evoquant également le fléau que représente pour le continent africain la prolifération des mines antipersonnel, le représentant s'est félicité de l'entrée en vigueur de la Convention d'Ottawa et de la première réunion des Etats parties à la Convention qui est tenue à Maputo au Mozambique des 3 au 7 mai 1999. La Convention offre des possibilités réelles de coordination des ressources au plan mondial.

M. YERZHAN KAZYKHANOV (Kazakhstan) a rappelé que le Kazakhstan a été l'un des premiers pays à avoir signé le CTBT en 1996 et qu'à cet égard il soutient les initiatives en vue de faire entrer en vigueur le traité aussi rapidement que possible. Attachant une importance majeure au maintien de la paix et de la sécurité en Asie centrale, le Kazakhstan est très attaché au processus visant à établir une zone exempte d'armes nucléaires dans cette région. Des travaux importants ont été réalisés dans ce domaine par le groupe d'experts provenant des cinq Etats de la région, lequel a été constitué avec l'assistance des Nations Unies. Le Kazakhstan est convaincu que la création d'une telle zone en Asie centrale constituera une mesure importante vers la consolidation du régime de non-prolifération nucléaire. Le 5 août dernier, le Kazakhstan est devenu membre à part entière de la Conférence du désarmement. Cette admission est pour lui le signe de la reconnaissance de la communauté internationale face à la contribution du Kazakhstan au désarmement mondial et au régime de non-prolifération.

Le Kazakhstan souhaite poursuivre l'initiative de son président, M. Nursultan Nazarbaev, concernant la convocation d'une Conférence sur les mesures d'interaction et de confiance en Asie (CICA). Cette initiative, proposée en premier lieu à l'Assemblée générale en 1992, a donné lieu, le 14 septembre dernier, à une réunion des Ministres des affaires étrangères des

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Etats membres à la conférence ainsi qu'à la signature d'une déclaration sur les principes régissant les relations entre les membres de cette conférence. C'est ainsi que, pour la première fois dans l'histoire, les fondations légales d'un système de sécurité en Asie ont été posées. Le Kazakhstan attache enfin une grande importance à la réunion des Chefs d'Etat membres des "Cinq de Shanghai", qui s'est tenue à Bishkek, au Kyrgyzstan en août dernier. Cette coopération unique, qui a commencé il y a trois ans à Shanghai entre les 5 pays du Kazakhstan, de la Chine, du Kyrgystan, de la Fédération de Russie et du Tajikistan, a permis de conclure des accords notamment dans le domaine de la réduction des forces armées aux régions frontières.

M. FARED M. KUINDWA (Kenya) a estimé que l'année écoulée a été particulièrement difficile. Sur le continent africain, la disponibilité des armes légères et de petit calibre continue d'être une cause de souffrance indicible. La situation au Rwanda, Burundi, Somalie et en République démocratique du Congo sont des exemples parmi tant d'autres. Ce type d'armes est utilisé dans des conflits qui font intervenir en général des milices armées non gouvernementales. Nous accueillons favorablement dans ce contexte la convocation d'une conférence internationale en l'an 2001 consacrée à cette question. Au sujet des mines antipersonnel, il a demandé aux producteurs de telles armes et à ceux qui les utilisent de devenir partie à la Convention d'Ottawa qui constitue le seul instrument qui traite de cette question en tenant compte de tous les aspects du problème. Dressant un lien entre désarmement et développement, le représentant a évoqué le rôle de promotion de la paix que peuvent jouer les centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement. Il a demandé que des ressources adéquates leur soient allouées.

Le représentant a fait état de l'incapacité de la Conférence du désarmement de parvenir à un consensus sur son programme de travail et notamment sur deux points de l'ordre du jour d'une importance considérable qui sont la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra- atmosphérique et le désarmement nucléaire. Pour prévenir une course aux armements dans l'espace, a souligné le représentant, il est impératif de combler les lacunes des traités existants comme celui sur l'interdiction partielle des essais nucléaires de 1963 ou le Traité de 1967 sur l'espace extra-atmosphérique. La tendance dans le domaine du désarmement nucléaire est plutôt négative alors que nous préparons la Conférence d'examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Les stocks d'armes nucléaire ont pris des proportions énormes. Les pourparlers sur la limitation et la réduction des armes stratégiques offensives (START II) sont dans l'impasse. L'OTAN de son côté, lors de son 50ème sommet à Washington, a réaffirmé sa doctrine visant à "partager ses capacités nucléaires" avec les Etats qui n'en ont pas. Cette déclaration est en contradiction avec l'article II et III du TNP. Il est particulièrement décevant de constater que parmi les Etats dont la ratification est nécessaire pour l'entrée en vigueur du CTBT, trois sont des puissances nucléaires. Le refus du sénat américain de ratifier le Traité est une source supplémentaire d'inquiétude.

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M. FRED BEYENDEZA (Ouganda) a rappelé que le désarmement est crucial pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Pourtant, la course aux armements se poursuit sans relâche à la veille d'un nouveau siècle et un certain nombre d'Etats continuent de faire des armes nucléaires le pilier de leur sécurité. Dans le même temps, les Etats nucléaires eux-mêmes font la sourde oreille aux objectifs et aux idéaux du désarmement nucléaire. En fait, ils sont devenus indifférents face aux programmes de désarmement actuels. Voilà une attitude qui ne s'explique pas, particulièrement en ce moment. L'Ouganda ajoute sa voix à celle des Etats membres qui ont demandé une entrée en vigueur rapide du CTBT. Le représentant a notamment exigé que les deux puissances nucléaires, la Fédération de Russie et les Etats-Unis, ratifient le CTBT qu'ils ont signé.

Pour les pays en développement, et en particulier pour l'Ouganda, les questions des armes légères et des mines terrestres sont particulièrement préoccupantes. En Afrique, la plupart des conflits armés impliquent l'emploi d'armes légères. Les conséquences en termes de pertes de vies humaines sont effroyables. Il convient de se pencher sur les causes mêmes de ces conflits qui, pour beaucoup d'entre elles, sont liées au manque de développement social et économique. En outre, des ressources considérables chiffrées en milliards de dollars sont gaspillées chaque année pour l'acquisition des armes légères et de mines terrestres. Il convient donc d'inscrire en priorité à l'ordre du jour de la sécurité et du développement le contrôle des armes légères et la réduction des dépenses consacrées aux armes. Dans ce contexte, le représentant a demandé aux 70 pays qui fabriquent et qui font le commerce des armes légères et de petit calibre de revoir leurs pratiques commerciales et de ne pas vendre ces armes à des entités non-étatiques.

M. LEE SEE-YOUNG (République de Corée) a rappelé que les essais nucléaires qui se sont produits en Asie du Sud, l'an dernier, ont porté un coup sérieux aux efforts visant à créer un monde exempt d'armes nucléaires. De plus, le non-respect par certains pays du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) a eu des conséquences néfastes sur le régime de non-prolifération. Il nous faut redoubler d'efforts afin que la tendance à la course aux armements en Asie du Sud soit renversée. La République de Corée exige également que soit revitalisé le processus START, notamment par une entrée en vigueur rapide de START II et un début des négociations relatives à START III. Le représentant a souhaité saisir l'occasion de cette séance pour informer la commission que la République de Corée a déposé ses instruments à la ratification du Traité CTBT le 24 septembre dernier. Dans ce contexte, la République de Corée a exprimé sa profonde déception face à l'incapacité du Sénat américain à ratifier le CTBT. Elle espère sincèrement que les Etats- Unis, qui ont dominé les efforts internationaux visant à renforcer le régime mondial de non-prolifération, seront en mesure de continuer à jouer ce rôle de tête de file en ratifiant aussitôt que possible le CTBT. Concernant les missiles de longue portée, et constatant qu'il n'existe à ce jour aucune norme

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internationale régissant leur prolifération, la République de Corée partage l'avis du Secrétaire général selon lequel il faudra négocier des normes internationales contre la prolifération de la technologie des missiles balistiques à des fins militaires.

S'agissant de la situation sur la péninsule coréenne, le représentant a regretté que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ne soit pas parvenue à coopérer pleinement avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) afin d'appliquer l'Accord relatif aux garanties. Il est impératif que la RPDC, en tant qu'Etat membre du TNP, applique pleinement les Accords de garanties de l'AIEA. La République de Corée se réjouit également de la mise en oeuvre rapide de la Déclaration conjointe sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, signée par les deux Corées en 1991 et espère que, comme le fait le Gouvernement de la République de Corée en affirmant son attachement ferme au régime mondial de non-prolifération, la RPDC y donnera suite en se joignant aux efforts de non-prolifération menés par la communauté internationale, contribuant ainsi à la paix et à la sécurité sur la péninsule coréenne.

Déclaration à la suite de la position des Etats-Unis sur le CTBT

Le représentant de la Fédération de Russie a fait part de sa préoccupation quant au refus du Sénat américain de ne pas ratifier le CTBT qui est un document international important et le résultat d'années d'efforts. L'administration américaine a pourtant été partie prenante à toutes les étapes de son élaboration. Elle a été la première à le signer. C'est un coup sévère qui est porté au régime de non-prolifération nucléaire. La Fédération de Russie s'estime obligée de tenir compte des conséquences de cette décision sur sa sécurité et la stabilité dans le monde.

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