En cours au Siège de l'ONU

AG/938

LES DELEGATIONS PLAIDENT EN FAVEUR DE L'ELABORATION DE CRITERES PERMETTANT DE FORMULER DES REPONSES COLLECTIVES AUX SITUATIONS D'URGENCE

7 octobre 1999


Communiqué de Presse
AG/938


LES DELEGATIONS PLAIDENT EN FAVEUR DE L'ELABORATION DE CRITERES PERMETTANT DE FORMULER DES REPONSES COLLECTIVES AUX SITUATIONS D'URGENCE

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Un appel est lancé en faveur du renforcement des pouvoirs de l'Assemblée générale dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité

Les critères et le cadre dans lequel la communauté internationale devrait mener ses interventions humanitaires ont à nouveau été au centre du débat ce matin à l'Assemblée générale qui examinait le rapport annuel du Secrétaire général sur l'activité de l'Organisation. "Quant peut-on juger qu'une situation humanitaire ne peut plus être résolue par des mesures préventives; à quel moment un problème humanitaire devient-il un sujet de préoccupation internationale nécessitant l'intervention des Nations Unies", a ainsi demandé le représentant du Brésil. Comme plusieurs autres intervenants, il a jugé primordial de définir une liste de critères qui orienteront les réponses de la communauté internationale en cas de situation d'urgence et dont la légitimité ne pourra être remise en question. L'utilisation de la force devrait toujours constituer la dernière solution, a estimé le représentant du Brésil. Abondant en ce sens, les représentants de la Fédération de Russie et de l'Iran ont affirmé que l'utilisation de la force sans mandat du Conseil de sécurité sapait le système de sécurité internationale. Pour le représentant de l'Egypte, s'il y a des lacunes dans la Charte à cet égard, elles peuvent être comblées sur le plan juridique sans pour autant que l'on ne porte atteinte aux principes qui y sont inscrits, en particulier la souveraineté nationale, l'intégrité territoriale et la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats. Le représentant de l'ex-République yougoslave de Macédoine s'est prononcé pour sa part pour une augmentation des pouvoirs de l'Assemblée générale dont le potentiel n'est pas pleinement utilisé. Il a suggéré que celle-ci se réunisse plus souvent au cours de l'année pour examiner les questions liées à la paix et la sécurité internationales. Le Conseil de sécurité deviendrait, pour sa part, le véritable organe exécutif de l'Organisation dans ce domaine.

Les représentants des pays suivants ont fait une déclaration : Fédération de Russie, Brésil, Liechtenstein, Namibie, Ukraine, Argentine, ex- République yougoslave de Macédoine, République islamique d'Iran, Autriche, Iraq, Egypte, République de Corée, Afrique du Sud et Jamahiriya arabe libyenne.

(à suivre - 1a)

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L'Assemblée générale reprendra ses travaux cet après-midi à 15 heures. Elle poursuivra son débat sur la suite donnée au Sommet mondial pour le développement social. Le débat sur le rapport du Secrétaire général sur l'activité de l'Organisation se poursuivra demain vendredi à 15 heures.

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RAPPORT DU SECRETAIRE GENERAL SUR LES TRAVAUX DE L'ORGANISATION

Suite du débat général

M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a estimé que la période considérée par le rapport qui a été marquée par les crises du Kosovo et de l'Iraq, a montré que la communauté internationale ne dispose pas d'un autre instrument plus universel que l'ONU pour régler de manière conjointe et efficace les relations internationales. Le renforcement global de l'ONU constitue l'un des éléments clefs de l'initiative visant à l'élaboration du "Concept du monde au 21ème siècle" lancée par le Président russe Boris Eltsine. Une ONU vigoureuse et efficace permettra de parvenir à l'objectif principal de cette initiative. En dernier ressort, la communauté internationale peut recourir à des mesures coercitives, y compris l'utilisation de la force, mais cette option ne peut être choisie qu'en stricte conformité avec la Charte et à la suite d'une décision du Conseil de sécurité. A cet égard, la Fédération de Russie partage entièrement les conclusions du Secrétaire général lorsqu'il affirme que le recours à la force sans l'autorisation du Conseil et au mépris de la Charte sape le système de sécurité international.

De l'avis de la Fédération de Russie, il faut définir collectivement le concept d'intervention humanitaire, ainsi que les critères spécifiques et le cadre juridique dans lequel doivent s'inscrire les actions de la communauté internationale afin de parvenir à des décisions concertées dont la légitimité ne soit pas mise en question. Il est important, à cet égard, de veiller à éviter les deux poids et deux mesures. C'est dans cet esprit que le Président russe a proposé d'examiner, à l'occasion du Sommet du millénaire, les aspects juridiques du recours à la force dans les relations internationales. La Russie appuie à cet égard la proposition de l'Egypte visant à élaborer, dans le cadre du Groupe de travail de l'Assemblée générale sur l'Agenda pour la paix, des recommandations concertées relatives à la réponse internationale aux crises humanitaires à l'attention de l'Assemblée générale. M. Lavrov a estimé que le rapport du Secrétaire général contenait des idées et des recommandations prometteuses en ce qui concerne l'élargissement de l'arsenal de mesures préventives dont dispose la communauté internationale. Ces mesures doivent toutefois reposer sur une base juridique solide, ce qui présuppose le respect de la souveraineté nationale et du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d'un autre Etat. L'achèvement des travaux sur l'amélioration du potentiel de l'ONU en matière de maintien de la paix est essentiel. La mise en oeuvre pratique des arrangements relatifs aux forces en attente constitue le meilleure moyen de parvenir à cet objectif. Le contrôle politique strict du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix, y compris son autorisation, doit rester un principe essentiel et un critère fondamental pour le maintien de la paix internationale. De l'avis de la Fédération de Russie, la coopération entre l'ONU et les organisations régionales doit être fondée sur une répartition équitable des tâches, mais ne doit en aucun cas aboutir à une dilution du rôle du Conseil de sécurité.

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M. Lavrov a encore souligné la nécessité de renforcer la lutte contre la "société incivile" et a appelé l'ONU à jouer un rôle de chef de file dans la mobilisation des efforts multilatéraux en vue de combattre le terrorisme, la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogue. A cet égard, il a plaidé en faveur de la conclusion rapide d'une convention internationale sur la criminalité transnationale organisée. Il s'est félicité des progrès réalisés jusqu'à présent en ce qui concerne la création d'une cour pénale internationale et a estimé que celle-ci constituerait un élément important du système de sécurité international. De l'avis de la Fédération de Russie, pour poursuivre la réforme de l'ONU et rendre l'Organisation plus efficace dans sa réponse aux situations d'urgence, il est essentiel de résoudre la situation financière de l'Organisation, à savoir le non-paiement par certains Etats Membres de leur contribution financière et la disparité entre le barème des quotes-parts et la capacité réelle des Etats à s'acquitter de leur contribution. Malgré ses difficultés, la Fédération de Russie s'acquitte de sa contribution au budget régulier de l'ONU et a réduit considérablement ses arriérés de contribution, ce qui témoigne de son soutien continu à l'Organisation, a souligné M. Lavrov.

M. GELSON FONSECA JR. (Brésil) a fait remarquer que les défis de ces dernières années ont conduit la communauté internationale à donner des réponses pragmatiques aux nombreuses questions posées par le Secrétaire général et ce, non seulement au travers des agences humanitaires mais aussi par le biais du Conseil de sécurité ou d'actions unilatérales. Cependant, dans les cas les plus récents, les résultats demeurent insuffisants, a-t-il regretté. Le représentant s'est interrogé sur les critères qui permettent de juger qu'une situation humanitaire ne peut plus être réglée par des mesures préventives et qui par conséquent requiert une intervention des Nations Unies. Toutefois, avant qu'une opération soit lancée, il est indispensable d'obtenir l'assentiment du pays concerné et s'assurer de l'impartialité de ceux qui interviennent. Il a également recommandé que dans le cas des tragédies humanitaires, tout le système des Nations Unies soit impliqué et que ces actions s'effectuent parallèlement aux mesures de prévention.

Si la volonté internationale de défense des valeurs humaines doit se trouver au centre des préoccupations d'une Cour pénale internationale, il est vrai aussi qu'il faut respecter la souveraineté des Etats. Le représentant a estimé qu'une approche universelle des problèmes humanitaires n'implique pas nécessairement l'affrontement des souverainetés nationales mais se fonde plutôt sur la concertation et consensus. Le Brésil considère que le Conseil de sécurité doit contribuer à développer un climat propice à la concertation et que, comme l'a prouvé le récent débat sur la protection des civils dans les conflits armés, le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale peuvent oeuvrer ensemble. Ainsi, le représentant a insisté sur le fait qu'il est primordial de définir une liste de critères qui dicteront les réponses de la communauté internationale à des crises telles que celle du Kosovo, du Timor oriental et de l'Angola. L'utilisation de la force devrait toujours constituer la

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dernière solution, a-t-il ajouté. Dans le but d'établir ces critères d'intervention, le représentant a recommandé que soit pris en compte le respect absolu de la Charte des Nations Unies et des compétences du Secrétaire général comme la nécessité de porter une attention égale aux problèmes du même ordre.

Mme CLAUDIA FRITSCHE (Liechtenstein) a déclaré que comme le souligne le Secrétaire général dans son rapport, la prévention permettrait de sauver des centaines de milliers de vies et d'économiser des milliards de dollars qui pourraient être utilisés à d'autres fins.

A l'époque présente, caractérisée par une grande majorité de conflits armés internes, toute approche préventive pourrait être perçue comme une menace à la souveraineté. En tant que petit pays, le Liechtenstein est sensible au concept de souveraineté nationale, a-t-elle déclaré. Toutefois, la notion classique de souveraineté ne permet plus de faire face aux réalités du monde et en particulier de la mondialisation. Si la souveraineté des Etats reste la pierre angulaire de l'Organisation, il faudrait cependant l'interpréter de manière plus souple.

En conclusion la représentante a souhaité que la communauté internationale examine les causes profondes des souffrances humaines et a préconisé la mise au point de mécanismes permettant aux Etats de faire face aux causes profondes des conflits et de promouvoir un dialogue entre les Etats concernés et les communautés.

Mme ASHIPALA MUSAVYI (Namibie), a évoqué la question de la coopération pour le développement, indispensable pour les pays en voie de développement. Car la pauvreté est en effet toujours largement répandue, notamment en Afrique, et se conjugue souvent avec le sida et les pénuries alimentaires. La lutte contre la pauvreté demande, de la part de l'ONU, des stratégies de prévention précoce, a-t-elle ajouté en se félicitant du programme "liberté face à la pauvreté".

Mme Musavyi s'est ensuite alarmée de la situation économique de l'Afrique, et a estimé qu'il fallait une action sérieuse de la part de l'ONU sur ce continent, et que soit appliqué le Programme du Secrétaire général, afin d'éliminer la pauvreté et d'intégrer l'Afrique à l'économie mondiale. Elle a d'autre part évoqué les problèmes soulevés par les guerres, le maintien de la paix et le désarmement. Selon elle l'ONU devrait appliquer les mêmes normes de maintien de la paix dans toutes les régions du monde. Elle s'est ensuite déclarée favorable aux efforts de renforcement de la paix et aux rapprochements entre l'ONU et les organisations régionales en matière de diplomatie préventive. Elle a indiqué son opposition à toute action qui serait lancée sans mandat du Conseil de sécurité.

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M. VOLODYMYR YEL'CHENKO (Ukraine) a estimé que le rapport du Secrétaire général met en avant certaines des questions les plus fondamentales auxquelles est confrontée la communauté internationale aujourd'hui, à savoir, les perspectives concernant la sécurité humaine et l'intervention au siècle prochain. De l'avis de l'Ukraine, il ressort du débat en plénière qu'il y a unanimité sur trois points. Tout d'abord, la communauté internationale n'a pas d'autre alternative viable en ce qui concerne la sécurité internationale que le système fondé sur la Charte de l'ONU, malgré ses imperfections. Ensuite, le monopole de l'ONU concernant l'autorisation du recours à la force ne peut être remis en question car cela menacerait les fondements mêmes du système de sécurité international. Enfin, aucun développement récent ne doit constituer un précédent en ce qui concerne l'utilisation de la force, sans autorisation du Conseil de sécurité, sous prétexte de fournir une assistance humanitaire. Ces conclusions ne résolvent toutefois pas tous les dilemmes auxquels la communauté internationale doit faire face aujourd'hui. C'est pourquoi, il est important que les Etats Membres poursuivent leur réflexion en vue de parvenir à un accord sur toutes les questions sans réponse, a affirmé le représentant. Il a estimé que le Président de l'Assemblée générale pouvait jouer un rôle important à cet égard, en menant des consultations officieuses sur la base du débat sur le rapport du Secrétaire général.

Le représentant a appuyé les conclusions du Secrétaire général en ce qui concerne la nécessité de renforcer le potentiel préventif de l'ONU pour passer d'une culture de la réaction à une culture de la prévention. De l'avis de l'Ukraine, ceci doit toutefois se faire dans le respect de la souveraineté, de l'indépendance politique, de l'intégrité territoriale et de la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats. L'une des innovations importantes du rapport est le fait que la partie consacrée au développement contient une section distincte sur l'Afrique, s'est réjoui le représentant. A cet égard, il a plaidé en faveur de mesures concrètes et efficaces pour aider les pays africains à développer leur potentiel et relever les défis auxquels ils font face. Tout en se déclarant satisfait du rapport du Secrétaire général, le représentant a souhaité que les rapports ultérieurs tiennent compte des demandes de l'Assemblée générale en ce qui concerne à la fois le fond et la forme.

Mme ANA MARIA MOGLIA (Argentine) a noté que le rapport du Secrétaire général invite la communauté internationale à songer à la manière de traverser au mieux le seuil de l'an 2000. Face à la recrudescence des conflits armés et des ravages des catastrophes naturelles, la représentante a sollicité une réponse internationale adéquate, formulant des stratégies de prévention plus efficaces et des mécanismes de secours rapides. Il est inacceptable, a-t-elle dit que l'assistance soit accordée en fonction de l'attention suscitée par les médias ou en fonction d'une primauté établie par le système international, a-t-elle dénoncé. La représentante a estimé que les Nations Unies possèdent les capacités de réagir face aux nombreux problèmes, mais que pour réussir dans cette tâche, l'Organisation doit aller d'une

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culture de la réaction à une culture de la prévention. Les Nations Unies doivent s'attacher à promouvoir la paix après les conflits. De plus, la diplomatie et les actions préventives permettant d'éviter que des conflits non violents ou d'anciennes guerres ne dégénèrent en affrontements violents. Il faudrait surtout aborder les causes profondes des conflits, telles que la pauvreté, l'inégalité et les violations des droits de l'homme et oeuvrer en faveur de la paix par le développement économique et à la bonne gouvernance, a-t-elle recommandé. Mme Moglia a réaffirmé que ces tâches incombent à l'Organisation et en particulier au Conseil de sécurité qui se doit d'adopter des méthodes de travail plus transparentes. Dans ce cadre, l'Argentine a, par le passé, encouragé la tenue de débats publics pour la consolidation de la paix et leur succès est un indicateur de l'intérêt grandissant de la communauté internationale pour ces questions.

M. NASTE CALOVSKI (ex-République yougoslave de Macédoine) a déclaré s'être intéressé à deux points en particulier du Secrétaire général: la pertinence de la Charte des Nations Unies et celle des institutions et des mécanismes prévus par cette même Charte pour le présent et l'avenir. Selon le délégué, les buts de la Charte, qui n'ont pas changé en 55 ans, demeurent la démocratisation des relations internationales et la réaffirmation des règles du droit international. Mais une interprétation novatrice et moderne de ces principes par la Cour internationale de justice et sous le contrôle de l'Assemblée générale serait utile pour l'avenir, de préférence avant le début de l'Assemblée du millénaire, a préconisé le délégué.

Suite aux interventions au Kosovo et au Timor oriental et à l'inaction de la communauté internationale au Rwanda, les discussions s'articulent autour de la souveraineté des Etats et les droits de l'homme, a rappelé le délégué. Se basant sur l'expérience de son pays, qui lors de la crise humanitaire de ce printemps a ouvert ses frontières à quelque 360 000 réfugiés du Kosovo, le délégué a plaidé en faveur de la primauté de l'humanisme et d'une interprétation non dogmatique du principe de souveraineté, tout en respectant les principes de l'inviolabilité des frontières et de la non-immixtion dans les affaires intérieures des Etats.

Il s'est également félicité de l'attention apportée par le Secrétaire général à la prévention des conflits, l'ex-République yougoslave de Macédoine ayant fait figure de pionnier pour éprouver cette pratique avec la mission de l'ONU FORDEPRENU. Il a qualifié l'action de la FORDEPRENU d'important succès pour les Nations Unies et son pays, regrettant sa fin à un moment où la mission aurait été le plus utile.

Enfin, le délégué s'est prononcé en faveur d'un rôle plus important de l'Assemblée générale au sein du système des Nations Unies, son potentiel n'étant pas encore pleinement utilisé. Il a expliqué que pour éviter que l'Assemblée générale soit davantage marginalisée, il faudrait qu'elle se

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réunisse plus souvent dans l'année pour délibérer de questions ayant trait à la paix et à la sécurité. Pour sa part, le Conseil de sécurité deviendrait l'organe véritablement exécutif de l'Organisation pour toutes les questions ayant trait au maintien de la paix et de la sécurité internationales.

M. HADI NEJAD-HOSSEINIAN (Iran) a principalement abordé dans son allocution les questions de l'intervention humanitaire, de l'ingérence dans un conflit et des réformes nécessaires de l'ONU dans ce contexte. La crise au Kosovo a engendré à la fois un consensus sur la nécessité d'une intervention, et un désaccord sur les modalités d'actions, a-t-il déclaré. L'Iran pense que toute action, et particulièrement l'utilisation de la force doit émaner du Conseil de sécurité. Toutefois, quand le consensus est impossible, l'Assemblée générale, véritable organe démocratique et universel de l'ONU, doit prendre le relais. En toutes circonstances, l'absence de consensus, à cause du droit de veto que l'on devrait par ailleurs limiter, n'autorise aucun pays à s'engager unilatéralement dans un conflit et à violer la souveraineté d'un autre Etat, a-t-il déclaré. Selon M. Nejad, le renforcement du rôle et de l'efficacité de l'Assemblée devrait rester au programme pendant encore des décennies. Le besoin de développer une "culture de prévention", préconisée par le Secrétaire général, devrait également être étudié attentivement, tout en approfondissant les échecs de la communauté internationale. Le Rwanda a déjà remis en cause la cohérence de l'action internationale et l'ONU ne devrait pas permettre à certains facteurs d'affecter la manière dont elle répond aux crises.

Au sujet des catastrophes naturelles, M. Nejad a suggéré de mettre en place des stratégies de prévention. L'impact de ces catastrophes est aggravé par la pauvreté dont l'éradication devrait d'ailleurs faire partie de toute étude visant à lutter contre les catastrophes naturelles. La prévention réduira dans tous les cas les coûts d'intervention.

M. GERHARD PFANZELTER (Autriche) a déclaré que même lorsque la prévention des conflits reste la priorité des Nations Unies, l'interdépendance entre sécurité, développement et droits de l'homme, clairement visible dans les récents conflits, implique le recours à tous les instruments de gestion: de la diplomatie préventive à l'utilisation ciblée des instruments de coopération pour le développement afin de s'attaquer aux racines des conflits, en passant par les mesures de construction de la paix dans les phases post- conflits. Pour remédier à l'insécurité humaine à l'intérieur-même des pays, qu'il considère comme la principale cause de conflits, le délégué a insisté sur la nécessité de se doter de meilleurs moyens de bonne gouvernance. Le représentant a préconisé une réflexion sur les moyens à mettre en oeuvre pour remédier aux problèmes existants avant qu'ils ne se transforment en conflits majeurs. Il a annoncé que l'Autriche travaille elle-même à une stratégie cohérente de prévention des conflits.

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M. SAEED HASAN (Iraq) a rejeté la manière dont la crise en Iraq est décrite dans le rapport du Secrétaire général, en particulier lorsque celui-ci parle du non-respect par l'Iraq de ses obligations. Ceci n'est absolument pas vrai, a dit le représentant. L'Iraq a respecté ses engagements conformément au Mémorandum d'accord signé avec le Secrétaire général en 1998. La partie qui n'a pas respecté ses engagements, c'est Richard Butler, le Président exécutif de la Commission spéciale pour l'Iraq (UNSCOM). Grâce à lui, les Etats-Unis ont ainsi pu perpétuer le blocus contre l'Iraq. Des agents de la CIA ont participé aux travaux de la Commission spéciale, espionnant et contrôlant ainsi les officiers iraquiens au profit des Etats-Unis. M. Butler recevait directement ses instructions de la Secrétaire d'Etat américaine, Mme Albright, ce qui a été reconnu par l'ex-inspecteur de l'UNSCOM, Scott Ritter, et n'a pas été démenti par les Etats-Unis. Le Secrétaire général lui- même a dit, au cours d'une interview à la BBC, que "les accusations portées contre la Commission spéciale étaient un peu vraies". C'est après avoir reçu des instructions des Etats-Unis que M. Butler a procédé au retrait des inspecteurs de la Commission spéciale hors de l'Iraq en décembre 1998, sans attendre une décision du Conseil de sécurité. Son rapport, dans lequel il évoque la non-coopération de l'Iraq, a été reçu de manière défavorable par la majorité des membres du Conseil dont certains ont reconnu "le rôle disgracieux" de M. Butler et sa distorsion des faits. Un autre membre permanent a dit que la crise avait été créée artificiellement, en partie par M. Butler. Celui-ci a, en effet, présenté un rapport qui dépeint un tableau déformé de la situation et conclu que l'Iraq ne respectait pas ses obligations.

Pour les Iraquiens, le recours à la force contre leur pays par les Etats-Unis et le Royaume-Uni, le 16 décembre 1998, alors que le Conseil était réuni pour discuter de la situation en Iraq, constitue une violation de la Charte et des résolutions du Conseil de sécurité. Cette agression a d'ailleurs été désapprouvée et critiquée par certains membres du Conseil de sécurité, a fait remarquer le représentant. L'un des membres du Conseil, estimant que cette agression faisait peser une menace sur la paix et la sécurité, a demandé que les Etats-Unis et le Royaume-Uni, en soient tenus responsables. L'agression a également été dénoncée par le Mouvement des non alignés. Tout cela montre que la communauté internationale désapprouvait dans sa majorité cet acte d'agression. Nous avions espéré que le rapport du Secrétaire général refléterait le point de vue de la communauté internationale, a déclaré le représentant. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni sont juridiquement responsables de l'acte d'agression du 16 décembre 1998 qui a coûté des centaines de vies humaines et endommagé gravement les infrastructures. L'Iraq est en droit de demander des réparations. Le Conseil doit se montrer équitable et ne pas agir de manière sélective en appliquant deux poids et deux mesures.

L'Iraq s'associe à la majorité des Etats Membres, en particulier les Etats du Sud pour agir au niveau international dans le respect des principes de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de la non-ingérence dans

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les affaires d'autres Etats. La question des droits de l'homme ne devrait pas être invoquée pour s'ingérer dans les affaires intérieures d'autres Etats. La Charte et d'autres mécanismes internationaux fournissent un cadre pour faire face aux violations des droits de l'homme. Il faut approfondir ces mécanismes sans chercher à imposer de nouvelles idées, comme le concept d'intervention humanitaire, dangereux pour la paix et la sécurité, et dont les pays faibles seraient les premières victimes. L'action internationale doit plutôt se concentrer sur la prévention des conflits dont la plupart trouvent leur source dans la pauvreté et l'absence de développement.

M. ABOUL GHEIT (Egypte) a noté que le rapport est centré sur l'idée d'un élargissement des mesures préventives, fondées sur la discussion, et sur la légitimité de l'intervention humanitaire. Décrivant le manque de réaction de la communauté internationale et les critiques faites suite à la crise du Kosovo, le représentant a réaffirmé qu'une telle situation est surtout liée aux obstacles des modalités de la prise de décisions du Conseil de sécurité et ses méthodes de travail. Reconnaissant l'existence de problèmes humanitaires à caractère d'urgence, l'Egypte ne peut cependant accepter l'idée que les considérations pratiques l'emportent sur les principes de la Chartre. S'il s'agit de combler les lacunes de la Charte, il faut le faire par la voie juridique, a jugé le représentant. Il a estimé que le respect du droit est un devoir sacré et que l'absence d'accords précis sur une autorité légale est dangereux et ne peut être accepté par les pays les moins développés. Le représentant a répété que la notion de redéfinition du concept d'Etat est une chose qui doit être examinée avec attention en pensant à étoffer le droit qu'ont les nations à vivre dans la sécurité et la paix en maintenant leur équilibre interne. Il a également insisté sur le fait que la communauté internationale doit accorder la même importance à toutes les situations quel que soit le lieu et n'accorder aucune préférence à un groupe d'Etats en particulier.

M. LEE SEE-YOUNG (République populaire démocratique de Corée) a mis l'accent dans son discours sur les catastrophes naturelles et les guerres civiles, principales menaces actuelles indiquant que l'ONU devrait d'avantage se mobiliser pour faire face à ces tâches gigantesques.

Il s'est ensuite déclaré préoccupé par la paix et la sécurité, la communauté internationale n'ayant pas fait preuve de consistance lors des récents conflits, remettant ainsi en cause certaines règles internationales. Parfois la souveraineté a prévalu, parfois ce fut l'humanitaire. Selon lui la communauté internationale commence à privilégier l'aspect humain et il considère que l'intervention humanitaire doit suivre des principes et règles établis au sein de l'ONU, et respectant à la fois la souveraineté et les droits de l'homme.

M. See-Young a d'autre part déclaré que les avantages de la mondialisation ne sont pas répartis de façon égale. Un partenariat mondial devrait rectifier les inégalités, et l'ONU devrait prendre des mesures dans ce

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sens. Enfin le délégué a précisé qu'il fallait éliminer la pauvreté pour que les droits fondamentaux puissent s'épanouir dans les pays en développement, ce à quoi la Corée contribuait. Enfin selon lui, les crimes contre l'humanité ne doivent plus rester impunis, et que par conséquent nous devrions nous doter d'un meilleur cadre juridique. Pour conclure, il a évoqué la question de l'aide humanitaire et du soutien nécessaire aux réfugiés et aux pays voisins des conflits, qui doivent par ailleurs respecter leurs obligations d'accueil.

M. DUMISANI KUMALO (Afrique du Sud) a relevé l'importance des débats qui préoccupent les Nations Unies au sujet des actions humanitaires. Il a rappelé qu'à l'époque de l'apartheid, le Gouvernement sud-africain refusait que des pays comme l'Inde, d'autres Etats africains, de même que les Nations Unies se penchent sur cette question sous prétexte qu'il s'agissait des affaires intérieures de l'Afrique du Sud.

Parlant des interventions d'ordre humanitaire, M. Kumalo a expliqué qu'il fallait tenir compte des intérêts des Etats mais aussi des principes figurant dans la Charte, à savoir le pluralisme, les droits de l'homme et le règne du droit. A cet effet, il faudrait démocratiser les relations internationales, notamment en procédant à une restructuration des Nations Unies. Il a plaidé pour une réforme, dans les meilleurs délai, du Conseil de sécurité, afin que celui-ci devienne plus représentatif du monde contemporain. Seul une organisation universelle peut prétendre à des actions humanitaires légitimes et à la prévention efficace des conflits à venir. Il est inacceptable que l'Afrique et d'autres régions sous-développées ne soient pas représentées de manière adéquate dans le principal organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il ajouté.

M. AMER (Jamahirya arabe libyenne) a appuyé le rapport du Secrétaire général, en particulier la partie consacrée aux difficultés rencontrées par l'ONU en ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité internationales. La question d'une intervention sans l'aval du Conseil de sécurité a suscité la controverse. De l'avis de la Libye, les principes de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de la non-ingérence dans les affaires intérieures d'autres Etats ne doivent pas être transgressés. La Libye s'oppose fermement à toute intervention dans un pays sous prétexte de considérations humanitaires. Tout action qui s'écarterait du cadre fixé par la Charte violerait les principes du droit international. La Charte stipule les mécanismes pour traiter de tout problème humanitaire ou autre. Il faut s'opposer fermement à toute tentative de porter atteinte à ces mécanismes, a insisté le représentant. M. Amer s'est réjoui du fait que de nombreux conflits régionaux et internationaux ont été réglés par des négociations.

La Libye se réjouit aussi des progrès réalisés à cet égard en Afrique, mais estime que d'autres efforts doivent être déployés pour régler les conflits qui subsistent. De l'avis de la Libye, il faut donner la priorité aux questions définies par l'Afrique elle-même, agir en coopération avec

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l'Organisation de l'unité africaine (OUA) et apporter un appui international aux efforts déployés par l'Afrique. Les pays africains ne peuvent éliminer le fléau de la pauvreté et atteindre l'objectif du développement sans une annulation de la dette, a estimé le représentant. L'Afrique a aussi besoin d'un plan d'action international pour éradiquer le paludisme et le sida qui touchent durement le continent. L'ONU et ses institutions doivent s'attacher, pour leur part, à chercher les moyens de développer les ressources africaines sur place, de même que les infrastructures.

Le représentant s'est indigné du fait que les sanctions sont souvent infligées par esprit de vengeance. Ainsi, sur de simples soupçons, des sanctions ont été infligées à la Libye qui coûtent très cher au pays. Pour des raisons de politique intérieure, les Etats-Unis empêchent le Conseil de lever cet embargo et demandent à la Libye des compensations pour les familles des victimes de l'accident de la Pan Am alors que le procès n'a pas encore eu lieu. Cela va à l'encontre de la présomption d'innocence reconnue internationalement. Malgré les appels répétés au respect du droit international, un Etat fait fi de ces appels et continue d'adopter des lois extraterritoriales unilatérales, comme les lois Helms-Burton et d'Amato. La communauté internationale doit s'opposer à ces lois et exercer des pressions pour qu'elles soient annulées, car il s'agit d'une violation de la souveraineté des Etats et une ingérence dans leurs affaires intérieures.

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