En cours au Siège de l'ONU

AG/912

NOUVEL ORDRE MONDIAL ET RENFORCEMENT DU ROLE DES NATIONS UNIES SOUVENT EVOQUES AU COURS DU DEBAT GENERAL

22 septembre 1999


Communiqué de Presse
AG/912


NOUVEL ORDRE MONDIAL ET RENFORCEMENT DU ROLE DES NATIONS UNIES SOUVENT EVOQUES AU COURS DU DEBAT GENERAL

19990922

Un Conseil de sécurité élargi et plus efficace, droits de l'homme et coopération renforcée à l'ordre du jour de l'ONU pour le prochain millénaire

Il faut reconnaître que malgré toutes ses imperfections, le monde a mis en place un nouvel ordre mondial dans lequel nous sommes tous nécessaires, a fait observer, ce matin, lors de la poursuite du débat général, le Président du Honduras, M. Flores Facussé, posant ensuite la question du rôle de l'Organisation Nations Unies durant le prochain millénaire. Comme les autres intervenants, il a énuméré les défis multiples que l'ONU devra relever à l'avenir, au premier rang desquels on compte la paix et l'élimination de la pauvreté et la défense des droits de l'homme. Pour le Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne, il n'y a en fait aucune alternative aux objectifs et aux valeurs de l'Organisation, même si, malheureusement ils ne sont pas toujours respectés, et c'est pourquoi la réforme de l'ONU et notamment celle du Conseil de sécurité, organe central de maintien de la paix, revêt une telle importance, celle-ci devant permettre d'assurer l'efficacité des réponses aux situations de conflit et d'éviter les blocages décisionnels intervenus à plusieurs occasions malheureuses. De concert avec M. Fischer, la quasi totalité des intervenants a plaidé en faveur de l'augmentation du nombre des membres du Conseil, permanents ou non, et d'une modération, voire une suppression, du droit de veto. M. Fischer a, à cet égard, suggéré qu'une obligation soit faite aux Membres permanents recourant au droit de veto d'en expliquer les raisons à l'Assemblée générale, le Président du Paraguay ayant, quant à lui, demandé qu'un siège permanent soit attribué au Brésil, dont la présence au Conseil garantirait une bonne représentation des intérêts de l'Amérique latine.

Sur la scène mondiale, ce n'est plus la force économique ou militaire d'un Etat, mais ses valeurs morales et sa capacité de protéger les droits humains qui comptent, a estimé le Président du Honduras, illustrant ainsi la part que le respect des droits de l'homme prendra dans le rôle de l'Organisation. L'adoption du Statut de la Cour pénale internationale, l'été dernier à Rome, a, sur ce point, été jugée comme une étape essentielle vers l'établissement d'une véritable culture du droit et de la justice.

(à suivre - 1a)

- 1a - AG/912 22 septembre 1999

Le Ministre des affaires étrangères et des affaires politiques de Saint-Marin s'est, à ce sujet, particulièrement félicité de constater que la peine de mort n'ait pas été retenue parmi les sanctions prévues par la Cour pénale, avant de regretter que cette question ne soit pas davantage au centre des débats de l'Assemblée générale. La prise de conscience quasi universelle de la nécessité de respecter les droits de l'homme et les nouvelles relations entre les Etats et la communauté internationale justifient, aux yeux du Ministre des affaires étrangère de l'Italie et de nombreux autres intervenants, la reformulation du principe de non-ingérence, qui en l'état actuel fait que certains Etats négligent leurs devoirs envers leurs citoyens. En désaccord sur ce point, le Ministre des affaires étrangères de la Chine, a estimé qu'il n'était pas question d'accepter la confrontation et l'ingérence dans les affaires intérieures d'autres pays au nom des droits de l'homme.

La communauté internationale doit par ailleurs concentrer son attention sur les causes des conflits et pas seulement sur leurs symptômes, à savoir principalement la pauvreté et les effets négatifs de la mondialisation sur les pays en développement. C'est le sentiment du Président du Honduras qui s'est inquiété de constater que l'effondrement du système financier provoqué par des mouvements spéculatifs dans une région du monde, se répercute dans une autre partie du monde, rendant plus chers les produits de consommation, appauvrissant la population et rendant leurs conditions de vie plus difficiles. La mondialisation doit créer de nouvelles opportunités et non pas de nouvelles inégalités, a-t-il insisté. Le renforcement des activités de coopération doit donc devenir l'une des tâches principales des Nations Unies, et la proposition du Secrétaire général d'élaborer, au sein d'un partenariat secteur public/secteur privé, un "Pacte mondial" de valeurs et de principes communs entre les Nations Unies et les plus grandes entreprises du globe pour donner un visage humain à la loi du marché, a été appuyée par le Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne. En matière de coopération et de développement durable, la protection de l'environnement ne doit pas être oubliée, et, à cet égard, un appel a été lancé pour que les négociations sur la protection contre les changements climatiques sortent de l'impasse et que le Protocole de Kyoto soit appliqué. En fin de compte, c'est la qualité et l'engagement de chaque Etat qui détermineront le succès ou l'échec de nos efforts communs, a mis en garde la Présidente de la Lettonie.

Ont participé ce matin au débat général : le Président du Honduras, M. Carlos Roberto Flores Facussé; le Président du Paraguay, M. Luis Angel Gonzalez Macchi; la Présidente de la Lettonie, Mme Vaira Vike-Freiberga; le Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne, M. Joschka Fischer; le Ministre des affaires étrangères de la Chine, M. Tang Jiaxuan; le Ministre des affaires étrangères de l'Italie, M. Lamberto Dini et le Ministre des affaires étrangères et des affaires politiques de Saint-Marin, M. Gabriele Gatti.

Le débat général se poursuivra cet après-midi, à partir de 15 heures.

Allocution de Son Excellence M. Carlos Roberto Flores Facussé, Président de la République du Honduras

M. CARLOS ROBERTO FLORES FACUSSE, Président de la République du Honduras : il y a un an, l'Amérique centrale a été tragiquement affectée par le passage de l'un des ouragans les plus terribles de ce siècle. Le Honduras, pays le plus touché avec des pertes qui se chiffrent en milliards de dollars, a vu son économie gravement fragilisée et ses infrastructures détruites à 70%. Il y a eu plus de 15 mille morts, blessés et disparus et plus d'un million de victimes directes ou indirectes. L'ouragan Mitch et les catastrophes naturelles mettent en relief la vulnérabilité physique de nos pays et la nécessité de mettre en place des moyens de prévenir et de réagir rapidement face à de telles catastrophes. Des mesures doivent être prises aux niveaux national, régional, continental, voire planétaire pour atténuer les conséquences, car aucun pays ne peut supporter à lui seul le choc de tels phénomènes. Il s'agit là d'un nouveau défi lancé à l'Organisation des Nations Unies, qui, si elle se penche sérieusement sur cette question, sera en mesure de sauver des milliers et des milliers de vie. Plus que de simples voisins, nous devons être frères. La solidarité est une excellente chose mais la fraternité est encore plus forte et plus humaine.

Les défis que devra relever l'ONU durant le siècle prochain seront multiples et toujours plus nombreux. La paix, l'exode rural, les problèmes alimentaires, le fossé qui sépare un petit nombre de pays riches des pays les plus pauvres, l'élimination des armes de destruction massive, l'expansion de la démocratie, la défense des droits de la femme et de l'enfant sont autant de questions qui font appel à la créativité des peuples et des gouvernements. Nous luttons quotidiennement pour encourager la démocratie, afin que ce régime soit digne, crédible, porteur d'espérance, et constitue la meilleure réponse à apporter aux aspirations des peuples. Il faut sans cesse s'employer à rechercher les moyens de faire bénéficier tous les peuples de cette conquête.

Au fil des ans, les peuples d'Amérique centrale ont appris que la fraternité est une valeur plus élevée que les simples relations de bon voisinage, et qu'il n'y a pas de différend qui ne puisse être réglé de façon pacifique et harmonieuse. La région s'apprête à franchir le pont du millénaire, plus intégrée que jamais, car les républiques qui en font partie souscrivent à un idéal commun de faire de l'isthme un point stratégique pour des échanges mondiaux et un exemple pour la communauté internationale. Le processus de mondialisation, qui va se poursuivre, inquiète nos peuples qui ne comprennent pas pourquoi l'effondrement du système financier provoqué par des mouvements spéculatifs dans une région du monde, doit se répercuter en rendant plus chers les produits de consommation, en appauvrissant la population et en rendant leurs conditions de vie plus difficiles. La mondialisation doit créer de nouvelles opportunités et non pas de nouvelles inégalités. En outre, il ne suffit pas de supprimer les frontières et de multiplier les marchés, il faut aussi tenir compte de la diversité culturelle. L'uniformisation serait aussi grave et impensable que la destruction de la biodiversité de la planète.

Il faut reconnaître que malgré toutes ses imperfections, le monde a mis en place un nouvel ordre mondial dans lequel nous sommes tous nécessaires. Sur la scène mondiale, ce n'est plus la force économique ou militaire d'un Etat, mais ses valeurs morales et sa capacité de protéger les droits humains qui comptent. Les crises au Timor oriental ou au Kosovo, la nucléarisation du sous-continent indien, le terrorisme en Colombie et en Russie sont des questions qui nous préoccupent aujourd'hui. Les interventions récentes du Conseil de sécurité illustrent l'efficacité du système des Nations Unies qui fait de nous des frères, des amis et des coopérants. Néanmoins, le nombre restreint de nations présentes au Conseil exclut des Etats qui y auraient leur place. Il faudrait aussi pouvoir limiter le droit de veto à certaines questions ou certaines circonstances ; ce veto ne doit plus être le dernier mot de l'Organisation. L'entrée de trois nouveaux Membres à l'ONU est réjouissante et nous espérons que la République de Chine à Taïwan pourra bénéficier de la même reconnaissance. La solidarité exprimée au lendemain du passage de l'ouragan Mitch a été remarquable. Si les blessures ne sont pas encore toutes cicatrisées et si nous devons déjà faire face à de nouvelles difficultés, nous restons toutefois prêts à relever le défi que nous a lancé cette tragédie. Nous souhaitons remercier toutes les nations et réaffirmons la disposition du Honduras à se conduire de la même façon pour rendre au monde ce qu'il nous a donné dans ces heures difficiles. Le Honduras, pays fondateur des Nations Unies, plaide en faveur d'une réforme de l'Organisation, car la terre n'a pas été créée pour les plus forts et les plus puissants , mais pour tous les êtres humains.

Allocution de Son Excellence M. Luis Angel Gonzalez Macchi, Président de la République du Paraguay

M. LUIS ANGEL GONZALEZ MACCHI, Président de la République du Paraguay : le Paraguay traverse en ce moment une période cruciale de sa vie politique et de ses perspectives socio-économiques. A la suite de la crise constitutionnelle que notre pays a connue au mois de mars 1999 et qui a mis en danger notre démocratie, crise qui, de par sa gravité a fait l'objet de commentaires dans les médias internationaux, un Gouvernement d'unité nationale a été constitué sur la base de la Constitution de notre pays. Ce Gouvernement, au nom duquel nous exprimons devant cette Assemblée, intègre tous les partis politiques démocratiquement représentés au Parlement. Il doit sortir le Paraguay de l'état d'iniquité sociale dans lequel il se trouve. Nous lançons un appel à la solidarité et à la coopération aux organismes bilatéraux et multilatéraux pour qu'ils nous aident à mener à bien nos programmes de développement, notamment ceux de la lutte contre la pauvreté. Nous sommes parvenus à un stade de consensus national sur cette question et la démocratie chaque jour, se renforce chez nous.

Notre pays souscrit aux principes adoptés lors des grandes conférences internationales sur les questions de développement social, car nous pensons que c'est une voie d'accès au développement durable. La protection de l'environnement est essentielle pour le développement humain. Nous avons mis en oeuvre les recommandations de la Conférence du Caire et avons notamment adopté un Plan national de santé en matière de procréation. Nous intégrons, par des mesures spéciales, les femmes à nos actions socioéconomiques. Les indices de développement humain de notre pays s'améliorent. Mais la situation mondiale actuelle sur le plan économique exige plus de concertation entre pays, c'est pourquoi nous avons décidé d'intégrer le marché commun du Sud de l'Amérique, le MERCOSUR, et attendons avec intérêt les négociations visant à créer un cadre de libre-échange avec l'Union européenne.

Le Paraguay réaffirme sa volonté de respecter la multilatéralité qui est le fondement de l'Organisation des Nations Unies, et nous appuierons toute action allant dans le renforcement de la paix et de la coopération entre les nations. Le Conseil économique et social doit voir son rôle renforcé, et la coordination entre les différents organes de l'ONU doit être améliorée. Mais les Etats Membres, pour leur part, doivent s'acquitter de leurs obligations vis-à-vis de l'Organisation, notamment en ce qui concerne les aspects financiers. Le Conseil de sécurité quant à lui, doit voir ses méthodes de travail et sa composition modifiées. Le Paraguay demande qu'un siège permanent soit attribué au Brésil, dont la présence au Conseil garantirait une meilleure représentation des intérêts des l'Amérique latine, et nous demandons aussi la suppression du droit de veto.

Le Paraguay est en faveur des mesures visant à renforcer le maintien de la sécurité internationale. Le Gouvernement du Paraguay a informé l'ONU qu'il était prêt à fournir des membres de ses forces armées pour participer aux opérations de maintien de la paix. Un bataillon d'officiers d'élite est en train d'être formé à cet effet. Nous condamnons d'autre part, tous les actes de terrorisme, notre pays ayant été victime de ce genre d'acte. Notre Vice-Président, le Dr. Luis Maria Argana, a été assassiné cette année, victime d'un attentat. Sur un autre plan, la lutte contre les trafics de drogue doit être renforcée. Nous sommes en faveur de la défense des droits de l'homme et notre pays est ouvert aux groupes qui oeuvrent pour leur défense. Les engagements pris par le Paraguay en vertu d'instruments juridiques internationaux sur les droits de l'homme ont été intégrés dans la législation interne. Concernant la situation qui prévaut dans le détroit de Chine, nous pensons qu'elle doit être réglée dans le cadre du droit international, par des moyens pacifiques.

Allocution de Son Excellence Mme Vaira Vike-Freiberga, Présidente de la République de Lettonie

Mme VAIRA VIKE-FREIBERGA, Présidente de la Lettonie : les nobles idéaux qui ont guidé les Nations Unies au fil des années n'ont toujours rien perdu de leur actualité ni de leur pertinence. La paix dans le monde, la lutte contre la pauvreté, la défense des droits de l'homme - voilà un programme qui demeure en vigueur, avec des buts on ne saurait plus clairs. Il n'est pas possible de renoncer au combat, il n'est pas permis de relâcher notre vigilance, certainement pas si le monde que nous voulons construire est un monde de civilisation. Les Nations Unies ne cessent de tendre vers la réalisation de leur objectif de représentativité universelle. A cet égard, je souhaite exprimer mes félicitations à la République de Kiribati, la République de Nauru et le Royaume des Tonga, pour leur admission en tant qu'Etats Membres de l'Organisation.

La réforme des Nations Unies est en cours et mon pays, la Lettonie, la soutient pleinement. Les Etats Membres sont, après tout, ceux à qui revient la responsabilité de décider de l'avenir de l'Organisation. En fin de compte, c'est la capacité et l'engagement de chaque Etat qui détermineront le succès ou l'échec de nos efforts communs.

Certains des sentiments négatifs qui sont exprimés au sujet des Nations Unies découlent d'attentes exagérées. Les Nations Unies ne sont pas une panacée, surtout pour ce qui est des décisions concernant des problèmes régionaux de longue date, ou lorsque des actions préventives au niveau régional se font attendre depuis longtemps. Toutefois, même dans de tels cas, un système onusien moderne doit mettre au point des systèmes de réponses rapides et efficaces, ce qui n'a pas été le cas en Europe du Sud-Est, au Timor oriental et au Moyen-Orient. Il faut souligner que la difficile crise des réfugiés du Kosovo ne pouvait pas être résolue sans l'engagement direct des Nations Unies et des institutions onusiennes. Malheureusement, les Nations Unies ne peuvent pas toujours fonctionner au mieux de leurs possibilités, à cause de préjugés, d'une absence de volonté politique, ou du fait d'ambitions politiques. N'oublions pas que le prix à payer pour nos hésitations à lancer une action est extrêmement élevé.

Le mandat des Nations Unies est de servir l'humanité, et les Nations Unies doivent se conformer au principe d'universalité. Les Nations Unies conservent leur capacité en matière de prévention des conflits et de diplomatie préventive, et il faudrait accorder davantage d'attention à la promotion du respect de ces principes partout dans le monde.

Même en ce moment où nous nous adressons à vous, de nombreuses personnes dans le monde sont victimes de terroristes ou vivent sous leur menace. Toute action terroriste doit être universellement condamnée et il faut prendre des mesures afin de renforcer la réponse internationale à ce problème.

Pour que les Nations Unies deviennent une organisation véritablement moderne, elles doivent refléter les nouvelles réalités d'un contexte international qui a changé. La réforme du Conseil de sécurité est une étape fondamentale de la revitalisation du programme des Nations Unies et doit refléter les besoins de la communauté internationale ainsi que les réalités d'aujourd'hui. L'acquisition ou la possession d'armes nucléaires ne doivent plus être le fondement du statut de grande puissance et le rôle futur du Conseil de sécurité doit refléter cette réalité. Le modèle de Conseil de sécurité à venir doit aussi s'ouvrir davantage aux vues et aux contributions des petits Etats et des membres non permanents.

Comment la Lettonie considère-t-elle sa contribution aux nouvelles Nations Unies ? Mon pays fait partie des nations qui n'ont pas pu devenir Membre des Nations Unies à leur conception. Nous accordons une place privilégiée dans nos coeurs aux Nations Unies, car il s'agit de la première organisation internationale dont nous sommes devenus Membres, à la suite de notre indépendance, en 1991. L'appartenance aux Nations unies représente la première étape vers l'affirmation de nos droits nationaux et de nos droits de l'homme. Qui plus est, nous avons reconnu notre responsabilité d'aider d'autres nations à s'engager dans cette voie. Cinquante ans d'occupation nous ont légué un lourd héritage dans les domaines économique, social et psychologique, mais nous avons fait des efforts immenses pour le surmonter en tous points. Les Nations Unies nous ont fourni un soutien inestimable afin de nous aider dans cette lourde tâche, et je souhaite réitérer la reconnaissance profonde de la Lettonie pour la précieuse assistance que les Nations Unies nous ont fournie.

Notre objectif est de fournir à tous les habitants de notre pays la possibilité de contribuer à une identité civique dont les objectifs et les valeurs sont partagés dans toute l'Europe. Dans ce cadre, mon pays continuera d'attribuer une importance particulière au renforcement du rôle de la langue lettonne. La Lettonie croit en la complémentarité des efforts régionaux et mondiaux et considère ses efforts d'intégration en Europe et au sein des structures transatlantiques comme un moyen de contribuer concrètement aux efforts conjoints en Europe et dans la zone de l'Alliance atlantique.

Suite du débat général

M. JOSCHKA FISCHER, Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne : la présente session étant la dernière d'un siècle de "tous les extrêmes", il est temps de tirer un bilan. Depuis sa création, l'Organisation des Nations Unies a largement contribué à améliorer les relations entre les peuples. Le développement du droit international, la protection des droits de l'homme, la décolonisation, l'assistance humanitaire et la prise de conscience des problèmes majeurs qui se posent à l'humanité, comme la pauvreté et

la dégradation de l'environnement, sont autant d'activités inconcevables sans les Nations Unies. Il n'y a en fait aucune alternative aux objectifs et aux valeurs de l'Organisation, même si, malheureusement ils ne sont pas toujours respectés. En cette fin de siècle, en effet, l'ONU et ses membres ne sont pas en mesure d'exercer pleinement leur mission essentielle, à savoir le maintien de la paix et de la sécurité. Certes la question du maintien de la paix doit aujourd'hui être envisagée sous un jour bien différent de celui qui prévalait lors de la Guerre froide. Les conflits sont davantage internes qu'internationaux, et le rôle de l'Etat-nation est considérablement relativisé par l'importance accrue des droits de l'homme et la mondialisation de l'économie et de la société. Le conflit au Kosovo représente, à cet égard, un tournant puisque la communauté internationale ne pouvait tolérer plus longtemps ce conflit qui déchirait un même peuple, faisant de la terreur et de l'expulsion un instrument politique. Il faut désormais que la communauté sache, comme l'a prouvé encore tout récemment le conflit au Timor oriental, comment prévenir les violations massives des droits de l'homme. Deux voies semblent possibles. La première serait que la pratique "des interventions humanitaires" évolue en dehors du système des Nations Unies. Cette approche est cependant très problématique, car elle peut être la porte ouverte au recours à la force extérieure sous prétexte d'apporter une assistance humanitaire. La seule solution, en vérité, est de renforcer davantage encore le système des Nations Unies et de telle manière qu'il soit à l'avenir en mesure d'intervenir rapidement en cas de graves violations des droits de l'homme. A condition cependant que tous les recours en vue d'un règlement pacifique aient été épuisés.

C'est vers ces principes que doit s'orienter la réforme du Conseil de sécurité, organe central de maintien de la paix mondiale. Les résultats désastreux du blocage au sein du Conseil du processus de décision concernant les conflits au Rwanda, au Kosovo et au Congo justifient à eux seuls une réforme, qui doit se traduire par une augmentation du nombre des membres, permanents et non permanents du Conseil, et par l'obligation faite aux Membres permanents recourant au droit de veto d'en expliquer les raisons à l'Assemblée générale. Afin de rendre le système international de maintien de la paix plus efficace, il faudrait aussi, par le biais du Chapitre VIII de la Charte, renforcer les systèmes régionaux de sécurité et redistribuer les tâches entre ces derniers et l'ONU. Le désastre du Timor oriental, mais également plusieurs exemples sur le continent africain, démontrent en effet combien une coopération étroite entre le Conseil de sécurité et les pays de la région concernée par un conflit est nécessaire. La communauté internationale doit par ailleurs concentrer son attention sur les causes des conflits et pas seulement sur leurs symptômes. A cet égard, il est urgent de faire des progrès dans les quatres domaines suivants : l'alerte et la réaction rapide ainsi que le développement de la diplomatie préventive; la conduite d'opération de maintien de la paix avant même que le conflit n'éclate;

un nouvel élan dans le désarmement et la non-prolifération; et la mission croissante de prévention qui s'attache désormais aux opérations de maintien de la paix, comme le montre la présente mission au Kosovo s'efforçant de créer un système juridique efficace et de rétablir l'ordre public.

Pour ce qui est des droits de l'homme, il faut se réjouir des avancées intervenues en faveur de l'élargissement des fondements juridiques des relations entre les Etats. La détention de Pinochet et l'inculpation de Milosevic sont des étapes essentielles vers la création d'un monde où prévaut la règle du droit. La même stratégie doit être appliquée aux meurtriers de Dili et à ceux dont ils ont reçu leurs ordres. Parce qu'elle permet de combler une lacune importante du droit international, l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale doit recueillir la signature rapide de tous les Etats. La troisième tâche majeure des Nations Unies, après le maintien de la paix et la défense des droits de l'homme, est la réconciliation entre les pays riches et les pays pauvres. La communauté internationale se doit en effet d'inverser la tendance actuelle de la mondialisation qui conduit à l'élargissement du fossé entre les pays riches et les pays pauvres. L'individu et non le marché doit être au centre du débat sur la mondialisation! Le développement des activités de coopération doit donc devenir l'une des tâches principales des Nations Unies. L'autre question qui a des effets croissants sur la sécurité internationale, à savoir la destruction de l'environnement doit être le plus rapidement possible stoppée par la communauté internationale. Les négociations sur la protection contre les changements climatiques doivent par conséquent sortir de l'impasse où elles se trouvent et le Protocole de Kyoto doit entrer en application.

Il apparaît donc qu'au prochain millénaire le principe d'Etat-nation continuera de diminuer au profit de réponses multilatérales aux principaux problèmes mondiaux. C'est pourquoi, j'appuie la proposition du Secrétaire général d'élaborer, au sein d'un partenariat secteur public/secteur privé, un "Pacte mondial" de valeurs et de principes communs entre les Nations Unies et les plus grandes entreprises du globe afin de donner un visage humain à la loi du marché. L'ONU doit en fait devenir le gardien de la bonne gouvernance mondiale. Pour ce faire, il faut assurer sa sécurité financière, car avec plus de 6 milliards d'habitants, la population mondiale et les Etats auront besoin d'une Organisation capable de prendre des décisions.

M. TANG JIAXUAN, Ministre de affaires étrangères de la République populaire de Chine : la cinquante-quatrième session de l'Assemblée générale, la dernière du siècle, revêt une signification particulière. "Se souvenir du passé peut servir de guide pour l'avenir". Le siècle passé a connu deux grandes guerres dévastatrices et a connu la guerre froide, et aujourd'hui, le monde continue de connaître la mentalité de cette guerre froide; l'hégémonisne et la politique du plus fort gagnent du terrain; les blocs militaires, et l'interventionnisme militaire relèvent la tête et progressent.

Ces faits sont la première cause de l'instabilité du monde d'aujourd'hui. Une organisation militaire, contournant l'ONU, au nom de l'humanité et des droits de l'homme, a lancé au Kosovo une action militaire d'envergure contre un pays souverain et créé un mauvais précédent dans les relations internationales, violant la Charte de l'ONU, l'affaiblissant dans son rôle de maintien de la paix, et compromettant l'autorité du Conseil de sécurité. Durant cette guerre, l'ambassade de Chine à Belgrade en République fédérale de Yougoslavie, a été bombardée, et des membres de son personnel tués. La Chine est d'avis que la question du Kosovo doit être résolue dans le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la République fédérale de Yougoslavie. Le nouvel ordre politique et économique international doit reposer sur la coexistence pacifique, le respect de la Charte de l'ONU et des normes des relations internationales reconnues.

La République populaire de Chine insiste sur un certain nombre de points, dont le premier est l'égalité en droits souverains des Etats et la non-ingérence dans les affaires intérieures des nations. On fait depuis un certain temps un grand tapage autour de doctrines telles que "la supériorité des droits de l'homme sur les droits souverains des nations" et "l'intervention humanitaire". Nous pensons, sur ce point, que chaque pays doit travailler de façon souveraine dans le respect de ses réalités nationales et de ses lois internes, et il n'est pas question d'accepter la confrontation et l'ingérence dans les affaires intérieures d'autrui au nom des droits de l'homme. Le Kosovo a prouvé que sans le mandat du Conseil de sécurité, ni le consentement du pays concerné, la soi-disant "intervention humanitaire" contre un pays souverain est vouée à l'échec. Le deuxième point sur lequel nous insistons est celui du règlement pacifique des litiges internationaux. Il faut leur trouver, ainsi qu'aux conflits régionaux, un règlement juste et équitable par voie de négociations et de consultations menées sur un pied d'égalité au lieu de recourir à la force en se prévalant de sa supériorité militaire. En troisième point, nous défendons le renforcement du rôle de l'ONU et la défense de l'autorité du Conseil de sécurité. Le Gouvernement chinois estime que les buts et principes de la Charte de l'ONU ne sont pas périmés et en condamne toute interprétation irresponsable et toute falsification. L'autorité du Conseil doit être préservée, et les tentatives menées en vue de lui imposer la volonté de quelques pays comportent des dangers extrêmes. Notre quatrième point est celui de la nécessité d'un nouveau concept de sécurité et la sauvegarde de la sécurité internationale. Ce concept doit être centré sur la confiance mutuelle, l'avantage réciproque, l'égalité et la coopération. La Chine s'oppose aux tentatives de certains de se doter, sous des prétextes invraisemblables, de forces militaires qui dépassent leurs vrais besoins, tout en essayant dans le même temps d'affaiblir d'autres pays au nom du désarmement et de la non-prolifération nucléaire, ceci en vue de s'assurer une supériorité unilatérale absolue. Enfin, nous demandons une réforme du système économique international et la promotion du développement commun de tous les pays du monde. Une réforme de l'actuel

système économique et financier international s'impose, et il appartient aux Nations Unies et aux institutions financières internationales de mettre en place un cadre solide de prévention et de gestion des risques financiers et autres risques économiques. Aucun pays ne doit , en s'appuyant sur sa supériorité économique, technique et financière, nuire à la sécurité, et au développement économique des autres pays.

La République populaire de Chine fêtera bientôt ses 50 ans. Après le retour de Hong Kong en 1997, le Gouvernement chinois va reprendre l'exercice de sa souveraineté sur Macao. Il n'y a qu'une Chine dans le monde, et Taïwan fait partie intégrante du territoire chinois. Le Gouvernement de la République populaire de Chine est l'unique Gouvernement légal de la Chine tout entière. Notre territoire et notre souveraineté sont inaliénables, et nous tiendrons fermement à ces principes pour la solution du problème de Taïwan. Il n'y a pas "d'indépendance de Taïwan", "deux Chine" ou "une Chine, un Taïwan", et la réunification de la Chine se fera.

M. LAMBERTO DINI, Ministre des affaires étrangères de l'Italie : face à une crise, la culture de la prévention doit l'emporter sur la culture de la répression. Les causes des conflits sont connues : fossé grandissant entre les niveaux de vie, migrations massives des pays pauvres vers les pays riches, différences culturelles, fanatisme, actes criminels visant à glorifier, voire à créer une nation. La force ne doit être utilisée qu'en tout dernier ressort, quand les armes économiques et politiques se sont avérées inefficaces. Il y a dix ans, ce sont ces derniers instruments qui ont permis de mettre fin au totalitarisme communiste. Dans les Balkans et au Timor oriental, les opérations de maintien de la paix ont été mises en place en réponse à des atteintes massives et systématiques aux droits de l'homme. La décision d'envoyer des troupes a été prise après de multiples avertissements, et après que les voies diplomatiques aient été épuisées. En Iraq et en Serbie, des dirigeants autoritaires ont été sérieusement affaiblis, mais ils sont toujours en place. Dans quelle mesure des sanctions peuvent-elles compléter ou remplacer le recours à la force ? Nous devons mettre l'accent davantage sur les encouragements que sur les sanctions.

Il faut aussi définir des règles. Le monde occidental et les institutions euro-atlantiques ne représentent aucune menace ni à l'intégrité, ni à la liberté et ni à la prospérité de qui que ce soit. Nous devons toutefois perfectionner les instruments garants du droit international et inviter les pays à ratifier en priorité les instruments existants, en particulier le Statut de la Cour pénale internationale adopté l'an dernier à Rome. Il appartient à chaque pays de renforcer ses propres institutions. C'est dans cet esprit que nous avons invité le Haut Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, à prendre la parole devant le Parlement italien. Il faut aussi apprendre à mieux apprécier le jugement des autres.

Le monde ne tolère plus l'oppression des faibles, ce qui implique une révision des principes de non-ingérence et de souveraineté nationale qui ont eu cours ces trois cents dernières années. Il est indispensable que les Nations Unies aient le dernier mot car les normes internationales ne peuvent constituer la prérogative d'un groupe d'Etat particulier. Toute culture, toute tradition doit participer à la défense des libertés et des droits humains. Les institutions doivent, enfin, être renforcées. La fin de la guerre froide a montré que les grands regroupements politiques et économiques sont le meilleur moyen de garantir la coexistence ethnique, la tolérance religieuse et le développement économique. Seules les grandes institutions, qu'elles soient régionales comme l'Union européenne et l'Alliance atlantique ou universelles, comme les Nations Unies, sont en mesure de combler le fossé entre l'élaboration des règles démocratique et leur application effective. La redéfinition des relations entre les Etats et la communauté internationale passe par une reformulation du principe de non-ingérence qui fait que certains des Etats négligent leurs devoirs envers leurs citoyens. Bien que les Nations Unies soient une organisation d'Etat, les droits et les idéaux qu'elles protègent sont ceux des individus.

Les Etats continueront d'avoir des perceptions différentes des intérêts nationaux et il faudra toujours tenter de les réconcilier de façon pacifique. Pour mieux relever les défis du siècle à venir, nos codes de conduite doivent s'établir dans un cadre institutionnel plus solide. Le Conseil de sécurité des Nations Unies devrait, en particulier, avoir une composition plus représentative et démocratique, comme l'ont suggéré un certain nombre d'Etats Membres. Tous les citoyens du monde devraient pouvoir s'identifier aux Nations Unies et se sentir impliqués dans les prises de décision et les processus législatifs. Et ce, au nom de la souveraineté universelle, qui n'est pas le privilège de quelques-uns, mais le droit de tous.

M. GABRIELE GATTI, Ministre des affaires étrangères de la République de Saint-Marin : je souhaite féliciter les trois nouveaux Etats qui ont récemment rejoint la grande famille des Nations Unies. Je suis profondément convaincu que des pays qui n'ont jamais été engagés dans des guerres possèdent une richesse inestimable et peuvent transmettre au monde entier leur histoire de paix et de tolérance, contribuant ainsi à l'accomplissement des principes des paragraphes préambulaires de la Charte.

La République de Saint-Marin croit que l'Organisation des Nations Unies est, et doit rester, le forum pour les négociations internationales qui convient le mieux aux attentes des Nations. Nous réaffirmons le rôle central que jouent les Nations Unies dans la prévention et la gestion des crises internationales, et particulièrement dans le domaine de la paix et de la sécurité, par le biais de l'actualisation des organes principaux et au premier chef du Conseil de sécurité.

La République de Saint-Marin est opposée à toute intervention visant à porter atteinte à la légitimité du Conseil de sécurité qui est l'un des organes de décision des Nations Unies. La réforme est liée à la nécessité, de revoir la composition et le mode de fonctionnement de l'organe le plus important des Nations Unies en fonction d'un environnement international profondément transformé.

Saint-Marin a une responsabilité internationale et ressent la nécessité de mobiliser toutes ses forces afin de trouver des solutions solidaires au grave problème de la dette extérieure des pays en développement. Au cours des dernières années, convaincue qu'une telle institution est indispensable au futur ordre mondial, la République a été l'un des premiers pays à ratifier le Statut de la Cour pénale internationale.

Nous apprécions les travaux de grande valeur du Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants touchés par les conflits armés. Ces travaux contribuent à combler le profond fossé qui existe entre la théorie et la pratique, et à souligner l'absolue nécessité pour la communauté des Etats d'appliquer pleinement le droit international, et de le respecter.

La République de Saint-Marin apprécie vivement la récente résolution du Conseil de sécurité établissant une force de paix multinationale, créée pour corriger la situation née de la crise du Timor oriental. Le Gouvernement de Saint-Marin accueille avec une grande satisfaction la nouvelle impulsion donnée aux négociations dans le cadre du processus de paix israélo-arabe. Saint-Marin accueille avec la même satisfaction la présente recherche de solutions politiques suite à la fin du conflit des Balkans.

La population de Saint-Marin regrette que l'importante question de la peine de mort ne figure pas à l'ordre du jour de l'Assemblée générale. Bien entendu, nous considérons comme un pas en avant la récente adoption par la Sous-Commission pour la prévention et la protection des droits de l'homme d'une résolution condamnant la peine capitale appliquée aux mineurs, ainsi que le fait qu'un tel verdict n'ait pas été prévu parmi les sanctions retenues par la Cour pénale internationale.

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