En cours au Siège de l'ONU

FEM/1074

LE COMITE CELEBRE LE VINGTIEME ANNIVERSAIRE DE LA CONVENTION SUR L'ELIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION A L'EGARD DES FEMMES

7 juin 1999


Communiqué de Presse
FEM/1074


LE COMITE CELEBRE LE VINGTIEME ANNIVERSAIRE DE LA CONVENTION SUR L'ELIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION A L'EGARD DES FEMMES

19990607 Il ouvre les travaux de sa vingt et unième session

C'est par la célébration du Vingtième anniversaire de l'adoption de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, et en présence de Mme Nane Annan ainsi que diverses responsables de l'Organisation, que le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a entamé, aujourd'hui, les travaux de sa vingt et unième session, qui se tiendra au Siège jusqu'au 25 juin.

Dans son discours liminaire, la Présidente en exercice du Comité, Mme Aïda Gonzalez Martinez, experte du Mexique, a rappelé que les premiers efforts en matière de reconnaissance des droits des femmes remontent au milieu du XIXe siècle et que de nombreuses étapes ont précédé l'adoption de la Convention, le 18 décembre 1979. Elle a souligné que l'article 5, qui vise à supprimer les comportements socioculturels discriminatoires, s'est avéré l'un des plus difficiles à appliquer et que les stéréotypes sont encore largement répandus aujourd'hui encore. Elle a également insisté sur l'importance de l'article 12 relatif à la santé et salué la recommandation relative à ce domaine adoptée par le Comité lors de sa vingtième session.

La Vice-Secrétaire générale de l'ONU, Mme Louise Fréchette, a souligné que la Convention prenait racine dans l'histoire même de l'Organisation et dans ses efforts pour codifier les droits de l'homme. Elle a rappelé que l'égalité entre les hommes et les femmes exigeait une lutte sur tous les fronts, d'autant que même en cette journée anniversaire et à l'aube d'un nouveau millénaire, les droits des femmes continuent d'être bafoués et violés un peu partout dans le monde. C'est pourquoi elle s'est particulièrement réjouie du résultat obtenu l'an passé lors de la Conférence de Rome, qui a abouti à la codification dans le Statut de la future cour pénale internationale du viol et autres violences sexuelles lors des conflits armés comme crime contre l'humanité.

(à suivre - 1a)

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C'est par le biais d'un message écrit, que la Haute Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, s'est adressée aux membres du Comité pour réaffirmer que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes est un jalon sur la voie de l'égalité des femmes, quels que soient leur origine et l'endroit où elles vivent, car ses trente articles garantissent que les droits des femmes ne sont pas seulement respectés de jure mais aussi et surtout de facto. Pour Mme Robinson, la Convention doit servir d'inspiration, afin que, conformément à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration universelle des droits de l'homme, les femmes partout dans le monde puissent vivre dans la dignité, la paix et la liberté. Mme Angela King, Sous-Secrétaire général et Conseillère spéciale pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme, a souligné le caractère unique de la Convention, qui rassemble en un instrument juridique contraignant une série d'obligations pour les Etats parties en vue notamment d'éliminer les discriminations et d'assurer l'égalité entre les hommes et les femmes, et qui est le seul texte international à poser les droits reproductifs des femmes.

Le Comité a aussi entendu les interventions de M. Nitin Desaï, Sous-Secrétaire général aux affaires économiques et sociales, de Mme Yakin Ertürk, Directrice de la Division de la Condition de la femme, et de Mme Luvsandanzangyn Ider, Première Présidente du Comité.

Dans l'après-midi, le Comité a tenu une Table ronde sur les effets de la Convention au niveau national. Divisée en trois parties, elle a été conduite, sous la présidence de Mme Aïda Gonzalez Martinez, successivement par Mmes Elizabeth Evatt (Australie), Salma Khan (Bangladesh) et Ivanka Corti (Italie), toutes trois anciennes présidentes du Comité. Les intervenants, anciens présidents, membres anciens ou actuels du Comité, représentants d'organismes des Nations Unies et d'organisations non gouvernementales ou invités spéciaux, ont tous reconnu l'importance de la Convention pour la défense des droits des femmes dans le monde. Tout en soulignant les progrès accomplis, nombre d'entre eux ont ajouté que beaucoup restait à faire en ce qui concerne l'application de facto de la Convention. En effet, si les droits des femmes sont la plupart du temps protégés par les législations, les discriminations persistent et un changement de mentalité s'impose pour accéder à l'égalité complète entre hommes et femmes.

La prochaine réunion du Comité aura lieu demain, mardi 8 juin, à partir de 10 heures.

CELEBRATION DU VINGTIEME ANNIVERSAIRE DE L'ADOPTION DE LA CONVENTION SUR L'ELIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION A L'EGARD DES FEMMES

Déclarations

Dans sa déclaration liminaire, la Présidente du Comité, Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, a rappelé que le 18 décembre prochain marquera le vingtième anniversaire de l'adoption de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes par l'Assemblée générale. Il faut remonter au milieu du XIXe siècle pour voir les premiers efforts entrepris par des femmes, et certains hommes, en vue de la reconnaissance des droits de la femme et de l'égalité avec les hommes en matière politique, sociale et économique. Mme Gonzalez Martinez a ensuite rappelé les différentes étapes ayant, au cours de l'Histoire, conduit à l'adoption de la Convention, et a cité en particulier le Traité de Versailles de 1919 et la Déclaration des droits de l'homme de 1948. Tous ces textes n'ayant pas réussi à éliminer la discrimination de jure et de facto, il a fallu mettre au point un texte spécifique consacré aux femmes, d'où la naissance de la Convention en 1979.

Mme Gonzalez Martinez a fait observer que la définition de la discrimination contre les femmes, qui figure à l'article premier de ce texte, a été adoptée après de longues négociations. Les auteurs se sont notamment demandé s'il fallait parler de discrimination contre les femmes ou, de manière plus globale, de discrimination fondée sur le sexe. Ils se sont également demandé s'il fallait faire référence à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. L'une des caractéristiques de la Convention, apparente dans l'article 2, est que le texte fait non seulement référence à la responsabilité de l'Etat pour lutter contre la discrimination, mais inclut également le secteur privé.

Les auteurs de la Convention qui avaient choisi de modifier les schémas socioculturels, communément appelés stéréotypes, en vue d'éliminer les préjugés qui dévalorisent la femme, n'imaginaient sans doute pas qu'il s'agirait là d'un des articles dont l'application serait la plus difficile. Malgré les efforts entrepris au cours de ces 20 années, il subsiste en effet dans le monde entier des schémas sociaux qui maintiennent la femme dans une situation d'infériorité à l'égard de l'homme. La Convention définit également le principe d'égale participation des hommes et des femmes dans les organisations internationales, dans l'éducation et l'emploi. Après de longues discussions, les auteurs de la Convention ont choisi de consacrer un article spécifique au domaine de la santé, même s'il est concis et très limité. Heureusement, le Comité a adopté depuis la recommandation numéro 24 sur la Femme et la santé, qui permet de renforcer l'article 12 de la Convention. Autre question ayant fait l'objet de longs débats : la Condition de la femme et sa place dans la famille, le mariage, et son rôle par rapport aux enfants.

Pour conclure, Mme Gonzalez Martinez a rappelé qu'à quelques mois de l'entrée dans un nouveau siècle, les femmes et les filles d'aujourd'hui, qui seront les femmes de demain, ont le droit de ne pas faire l'objet de discrimination à cause de leur sexe.

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Pour la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, Mme LOUISE FRECHETTE, la célébration aujourd'hui du vingtième anniversaire de l'adoption de la Convention est tout à fait justifiée, dans la mesure où ce texte prend racine dans l'histoire même de l'Organisation et dans ses efforts pour codifier les droits de l'homme. Tout comme les législations nationales, les textes internationaux ne se mettent pas en place d'eux-mêmes, et c'est pourquoi l'égalité entre les hommes et les femmes exige une lutte sur tous les fronts, que ce soit pour l'établissement d'une volonté politique réelle, la mise en place d'un environnement juridique favorable, la prise de conscience du grand public ou encore la défense des droits acquis. Une égalité véritable requiert aussi des projets et programmes permettant aux femmes d'accéder aux ressources et de saisir les opportunités s'offrant à elles, tant dans la sphère publique que privée, et tant dans la politique que dans l'économie.

Au niveau intergouvernemental et depuis plus d'un demi-siècle, la Commission de la condition de la femme a fait office de guide sur tous les sujets liés à l'émancipation de la femme. Elle a permis non seulement l'organisation de quatre conférences mondiales sur les femmes, mais aussi aux intéressées de faire pression pour augmenter les crédits publics dans les secteurs qui les touchent particulièrement, tels l'éducation et la santé. Pourtant en cette journée anniversaire et à l'approche d'un nouveau millénaire, les droits des femmes continuent d'être bafoués et violés un peu partout dans le monde, sous diverses formes et à des degrés différents. Les femmes sont victimes de viols et de violences sexuelles dans leur propre foyer ainsi qu'en temps de guerre; elles constituent la majorité des personnes frappées par la pauvreté et l'illettrisme; et elles travaillent à des niveaux de salaires et dans des conditions d'emploi toujours inférieures à celles des hommes. En outre, leur travail en tant que soutien de famille continue d'être largement ignoré et de trop nombreuses femmes encore n'ont toujours pas accès aux soins médicaux de base.

Partant de ce constat, comment ne pas penser que ces insuffisances et échecs sont liés à la sous-représentation constante des femmes dans presque tous les forums politiques ? Les choses changent, certes, mais à un rythme bien trop lent, a déploré la Vice-Secrétaire générale. Ainsi l'an passé, sous l'influence de la Convention et des efforts communs du Comité, des diplomates et des participants des organisations non gouvernementales, la Conférence de Rome a permis de garantir la codification, dans le Statut du Tribunal pénal international, du viol et des autres violences sexuelles commises lors des conflits armés comme crime contre l'humanité. Même si le Statut n'est pas encore entré en vigueur, son influence a déjà pu être constatée en septembre dernier lorsque le Tribunal international pour le Rwanda a condamné Jean-Paul Akayesu pour crime contre l'humanité, en raison des viols et violences sexuelles dont il était responsable. Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a donc été un agent des changements collectifs et individuels dont les femmes ont pu bénéficier et c'est pourquoi il faut saluer son travail et son courage et oeuvrer en faveur de la ratification universelle de la Convention d'ici l'an 2000, a conclu Mme Fréchette.

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Mme LUVSANDANZANGYN IDER, qui avait été la première Présidente du Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, a rappelé que, sous sa présidence, les membres du Comité avaient alors eu entre eux de véritables relations amicales, ce qui est souvent le cas entre femmes, a rappelé Mme Ider. Il n'y avait à l'époque qu'un seul membre masculin, le représentant de la Suède et tout ce qu'il suggérait était d'ailleurs adopté sans contestation. Cette expérience au Comité figure parmi les plus intéressantes et les plus heureuses de ma vie, a-t-elle affirmé.

Durant ces 20 dernières années, le monde a été témoin des progrès en matière d'égalité entre hommes et femmes, égalité de jure aussi bien que de facto. Un grand nombre d'Etats ont adhéré à la Convention, témoignant de leur attachement à ce principe. C'est aussi grâce aux efforts et à la mobilisation des femmes qu'il a été possible d'inscrire la question de l'égalité en tant que sujet prioritaire pour lequel l'ONU et de nombreuses autres organisations se sont mobilisées ces dernières années. Des problèmes demeurent toutefois quand il s'agit d'appliquer la Convention. Il faut du temps pour parvenir à une véritable égalité entre hommes et femmes; à cet effet, il est nécessaire d'intensifier les efforts aux plans national et international.

M. BACRE WALY NDIAYE, Directeur du Bureau de New York du Haut commissariat aux droits de l'homme, a lu un message de la Haute Commissaire aux droits de l'homme Mme Mary Robinson. Cette dernière y réaffirme que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes est un jalon sur la voie de l'égalité des femmes, quels que soient leur origine et l'endroit où elles vivent. Aujourd'hui, il convient de rendre hommage aux personnes qui ont permis l'adoption de cette Convention, sans oublier que la mise en oeuvre n'en est toutefois pas encore pleine et entière, a fait observer la Haute Commissaire. Les trente articles de la Convention donnent des normes aux Gouvernements pour améliorer les conditions de vie des femmes, et pour garantir que leurs droits ne sont pas seulement respectés de jure mais aussi et surtout de facto. On ne peut en effet parvenir à la justice sociale sans exiger l'égalité entre les hommes et les femmes et la fin des discriminations. Pour cela, il faudrait que l'Assemblée générale adopte rapidement le projet de Protocole facultatif à la Convention. Il faudrait également que tous les Gouvernements sans exception ratifient la Convention et retirent toutes les réserves qu'ils ont pu y émettre.

Pour sa part, le Haut Commissariat s'efforce constamment de promouvoir la Convention et de renforcer ses liens avec les organes de protection du droit des femmes. Il estime d'ailleurs, et tout particulièrement en cette année anniversaire, que la Convention doit être une source d'inspiration, afin que conformément à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration universelle des droits de l'homme, les femmes partout dans le monde puissent vivre dans la dignité, la paix et la liberté.

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Pour M. NITIN DESAI, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, le XXe siècle a vu de très grands progrès en matière de défense des droits de la femme. Il y a cent ans, l'immense majorité des pays n'étaient pas libres et n'avaient pas de régime démocratique. Cent ans plus tard, dans la plupart des pays, il y a des régimes démocratiques et les femmes ont le droit de vote. Pour M. Desai, la décolonisation, la démocratisation et la promotion de la femme sont les trois changements majeurs de ce siècle.

L'action de l'ONU en matière d'égalité vise avant tout à refléter les souhaits avancés par les mouvements de femmes actifs et dynamiques. Les engagements pris par les Gouvernements ne sont qu'un début, ils doivent être suivis de programmes concrets. Nos activités de programmation doivent être conçues pour aider les gens à exercer leurs droits reconnus par différentes conventions, a poursuivi M. Desai. Dans ce Comité, le lien a été particulièrement clair et tangible et l'examen, par ce même Comité, d'une cinquantaine de rapports nationaux, a permis de faire de gros progrès. L'an prochain, nous ferons le point des engagements pris par le Sommet mondial pour le développement social de Copenhague. L'un des engagements concerne directement l'égalité des hommes et des femmes. La réduction de la pauvreté, l'emploi, l'intégration sociale sont liées à cette question. Aux Nations Unies, l'égalité ne relève pas seulement des organes concernant directement les femmes; il y a des passerelles avec tous les autres domaines. M. Desai espère que le siècle à venir marquera des progrès encore plus importants en matière d'égalité entre hommes et femmes dans tous les aspects de la vie politique et sociale.

Prenant ensuite la parole, la Sous-Secrétaire générale et Conseillère spéciale pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme, Mme ANGELA KING, a rappelé que la Convention, adoptée le 18 décembre 1979, rassemble en un instrument juridique contraignant unique une série d'obligations pour les Etats parties, afin notamment d'éliminer les discriminations et d'assurer l'égalité entre les hommes et les femmes, tant dans la sphère publique que privée. La Convention est également le seul texte international posant les droits des femmes en matière de reproduction et a identifié la culture et la tradition comme des facteurs déterminants du rôle entre les hommes et les femmes et les relations au sein de la famille. Avec l'élan de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, tenue à Beijing, le Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a pu achever une série de travaux très importants, et a pu sensiblement améliorer ses méthodes de travail. Il a également vu sa notoriété et son influence largement accrues. Ces progrès ont également conduit la Commission de la Condition de la femme à adopter par consensus lors de sa dernière session le texte d'un Protocole facultatif à la Convention, que l'Assemblée générale devrait adopter rapidement et qui pourrait ainsi entrer en vigueur dès l'an 2000.

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Cette évolution positive est largement due à la contribution des 23 membres du Comité, et notamment aux sept présidentes qui se sont succédées à sa tête, a fait observer ensuite Mme King. La Conseillère spéciale a aussi rendu un hommage particulier aux fonds, agences et institutions du système ainsi qu'aux ONG pour leur soutien constant en faveur de la condition des femmes.

Mme YAKIN ERTURK, Directrice de la division pour la promotion de la femme, s'est souvenue du dialogue très constructif qu'elle avait eu avec le Comité lors de la présentation des rapports de son pays, la Turquie, en janvier 1997. Mme Erturk s'est dite convaincue que le Comité s'emploiera à mettre en oeuvre le protocole facultatif avec le même sérieux et la même efficacité que la Convention. Le Comité a bénéficié de la sagesse des 72 experts élus depuis la première session du Comité, en janvier 1982. Au fil des années, le pourcentage de juristes a baissé, au profit de sociologues ou encore de défenseurs des droits des femmes. Mme Erturk a également fait remarquer que plusieurs ministres ont siégé au Comité, et cité les cas de Mme Ryoko Akamatsu, Ministre de l'Education du Japon de 1993 à 1994 ou encore de Mme Rakel Surlien, Ministre de l'Environnement de la Norvège de 1983 à 1986. Mme Erturk a ensuite décrit la carrière de plusieurs anciens membres du Comité, indiquant en particulier que plusieurs membres du Comité venant des pays nordiques sont devenues ombudsman dans leur pays. En conclusion, Mme Erturk a souligné que c'est notamment grâce au travail des membres du Comité que les droits de la femme jouissent dans le monde d'une attention sans précédent.

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Table ronde sur les effets de la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes au niveau national

Ouvrant la Table ronde, la Présidente du Comité, Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique, a rappelé que 163 Etats sont aujourd'hui parties à la Convention. Jusqu'ici, le Comité a examiné une cinquantaine de rapports d'Etats, permettant un suivi et un contrôle de l'application de ce texte. Le Comité examine la manière dont les Etats parties respectent la Convention et vérifient jusqu'à quel point les femmes jouissent des droits de la personne. L'existence de la Convention et les travaux du Comité ont un impact aux niveaux international et national. Des organisations internationales, des organes du système des Nations Unies collaborent avec les gouvernements et jouent un rôle très important dans l'application de la Convention. La Convention a également un impact sur le travail des Organisations non gouvernementales qui défendent les droits de l'homme et en particulier les droits de la femme. Cet après-midi, nous allons écouter d'anciens membres et des membres actuels du Comité ainsi que des personnalités qui nous ferons part de leurs commentaires quant au rôle et à l'application de la Convention, a expliqué la Présidente.

Lors de la première partie de la Table ronde, menée par Mme ELIZABETH EVATT, experte de l'Australie, Présidente des huitième et neuvième sessions du Comité, les intervenants ont mis l'accent sur l'influence de la Convention sur les textes de lois nationaux et sur le renforcement des mécanismes nationaux de protection des droits de la femme. Il a en effet été expliqué que la ratification de la Convention amène les gouvernements à modifier les lois existantes qui contiennent des mesures discriminatoires ou à promulguer de nouveaux textes afin de permettre la réalisation de l'égalité entre les hommes et les femmes. Pour les intervenants, il est clair que ces modifications ont été apportées également afin de tenir compte des observations et recommandations formulées par le Comité lors de son examen des rapports périodiques des pays. Si la Convention est un instrument qui fait réellement la différence pour la condition des femmes, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes est un outil précieux qui permet de garantir que les droits inscrits dans la Convention deviennent une réalité. Une intervenante a estimé que la Convention n'avait de sens que si elle se traduisait par une amélioration concrète sur le terrain de la situation des femmes, avant d'ajouter que l'aspect le plus important de ce texte était l'obligation faite aux Etats d'obtenir des résultats tant sur le plan juridique que dans les faits. A cet égard, le travail d'élaboration du Comité en matière de droit a été souligné.

Le Directeur du Bureau international du Travail, M. Juan Somavia, dont un message a été lu, a d'une manière plus générale souligné l'importance des instruments juridiques et en particulier des documents des Nations Unies qui ont un poids particulier car ils reflètent les vues de la communauté

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internationale. La représentante et fondatrice de l'IWRAW (International Women's Rights Action Watch), fondée en 1985, a fait observer que la collaboration entre les ONG et les organismes officiels de l'ONU confèrent plus de pouvoir que chacune des parties prises isolément pour amener les gouvernements à appliquer la Convention.

Participant également au dialogue, les représentants du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM) et du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) ont fait part de leur expérience sur le terrain et de la manière dont ils avaient tiré partie de la Convention. Ainsi, le Directeur de la Division des techniques et des politiques du FNUAP, a indiqué qu'il n'était pas exagéré de dire que depuis la Conférence de Beijing, les travaux du FNUAP sur le terrain reposent très largement sur la Convention, lui permettant notamment de faire en sorte que les femmes aient accès aux services de santé reproductive dans certains pays, marqués par une opposition traditionnelle des autorités locales dans ce domaine. La représentante de l'UNIFEM s'est pour sa part dite d'accord avec la proposition selon laquelle l'UNIFEM pourrait devenir pour le CEDAW ce que l'UNICEF est au Comité des droits de l'enfant.

Formulant quelques commentaires de conclusion, Mme Evatt a mis l'accent sur l'interaction très complexe entre les normes édictées par les instruments internationaux, la jurisprudence nationale, les travaux des Nations Unies, les mécanismes nationaux et les efforts des organisations féminines. Elle s'est dite impressionnée de constater à quel point la Convention et les travaux du Comité ont servi de catalyseur en faveur de l'amélioration de la situation des femmes.

Les personnalités suivantes ont participé à cette première partie de la Table ronde, tenue sous la Présidence de Mme Aïda Gonzalez, Présidente en exercice du Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes : Mme ELIZABETH EVATT (Australie), ancienne Présidente du Comité; Mmes EMNA AOUIJ (Tunisie), ZELMIRA REGAZZOLI (Argentine), FENG CUI (Chine), membres en exercice du Comité; Mmes RYOKO AKAMATSU (Japon), ALMA MONTENEGRO DE FLETCHER (Panama), RAKEL SURLIEN (Norvège), anciennes membres du Comité; Mme ARVONNE FRASER, Fondatrice de l'IWRAW (ONG); Mme FLAVIA PANSIERI, Directrice adjointe de l'UNIFEM; le représentant du BIT, au nom de son Directeur, M. JUAN SOMAVIA (Chili); M. MOHAMED NIZAMUDDIN, Directeur de la Division des techniques et politiques du FNUAP;

La seconde partie de la Table ronde conduite par Mme SALMA KHAN, experte du Bangladesh et ancienne Présidente du Comité, a été plus particulièrement consacrée à l'influence de la Convention sur les changements de mentalités et sur la réalisation de l'égalité de facto. Mme Khan a indiqué que la Convention a beaucoup influencé son pays, le Bangladesh, où un système de quotas réserve 10 % des sièges du Parlement aux femmes. Les ONG y ont été le moteur de la sensibilisation des femmes notamment en ce qui concerne la diffusion de la Convention et la suppression des stéréotypes.

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Présente lors de ce dialogue, la Présidente du Comité des droits de l'homme, Mme Cecilia Medina-Guiroga (Chili), a indiqué que la Convention a permis de rappeler aux Etats que les femmes sont des personnes humaines auxquelles il faut garantir des droits. En Amérique latine par exemple, elle a engendré des réformes du Code civil, du Code pénal ou encore de l'éducation. La Convention a aussi et surtout permis de provoquer une relecture du droit dans une perspective d'égalité entre hommes et femmes. Une experte actuellement membre du Comité a estimé, pour sa part, que la ratification de la Convention par les Etats marque de la part de ces derniers un engagement officiel qui légitimise la notion des droits de la femme en tant que droits de l'homme fondamentaux. Mme Liliana Gurdulich de Correa (Argentine), ancien membre du Comité, a ainsi indiqué que le retour de la démocratie, en 1983, a permis à son pays d'agir en faveur des droits des femmes.

Quelques voix se sont élevées pour regretter que dans beaucoup de pays encore, l'effet de la Convention est surtout visible au niveau des politiques publiques et pas assez au niveau de la société civile. Or, avec la perspective de la future entrée en vigueur du protocole facultatif à la Convention, il est indispensable que la société civile soit pleinement impliquée dans l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Il faudrait notamment provoquer un changement d'attitude en diffusant une information appropriée, dans le but de parvenir à une égalité complète. Plusieurs intervenants ont insisté sur la difficulté d'obtenir l'égalité intégrale, c'est-à-dire le respect de facto de la Convention, arguant que la discrimination indirecte était aussi significative que la discrimination directe. A cet égard, l'exemple de la région de l'Asie a été évoqué, où, sous l'effet de la Convention, des mesures ont été mises en place pour sensibiliser le public sur la question notamment du trafic des femmes et des petites filles à des fins de prostitution et pour combler l'écart entre les dispositions des lois et la situation réelle.

La représentante de l'UNICEF a déclaré que le droit des femmes doit commencer par la reconnaissance des droits des petites filles. Les inégalités dont les femmes sont victimes sont en effet perpétuées par la discrimination dans la socialisation des petites filles. Or aujourd'hui il est possible d'avoir un cadre mondial d'action pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes et des petites filles. Pour ce faire, il faut notamment déterminer qui est vulnérable en priorité et où ces personnes se situent-elles sur le globe. Le défi consiste à concrétiser les engagements par des actions réelles, planifiées et exécutées dans le cadre de programmes bien déterminés dans le temps. C'est pourquoi, la ratification universelle de la Convention et le retrait des réserves émises par les Etats ne devraient plus être retardés davantage. Le représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), s'exprimant au nom de Mme Gro Harlem Brundtland, a indiqué que c'est grâce à l'influence de la Convention qu'un nombre toujours croissant de jeunes filles et de femmes sont désormais à l'abri des violences sexuelles,

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des mariages précoces et autres pratiques traditionnelles dommageables, telle que la mutilation génitale féminine. L'OMS s'est particulièrement réjouie de l'adoption récente par le Comité de la recommandation générale sur l'article 12 de la Convention portant sur la santé. L'OMS prépare actuellement à l'intention des gouvernements des directives sur la manière de présenter les questions relatives à la santé dans les rapports périodiques qu'ils soumettent au Comité. Pour sa part, la représentante du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a indiqué que la lutte contre la discrimination envers les femmes va de pair avec la lutte contre la pauvreté. Le PNUD veut relever le défi d'une approche du développement axée sur les droits, en renforçant notamment les capacités des législateurs, des juges ou des fonctionnaires locaux.

En guise de conclusion, Mme Salma Khan a estimé que la Convention a eu un effet positif sur les pays en développement en provoquant des changement sociaux, économiques et juridiques. Dans moins de vingt ans, il faut espérer que l'égalité entre hommes et femmes ne sera plus un rêve mais un fait, a-t-elle souhaité pour finir.

Les personnalités suivantes ont participé à cette deuxième partie de la Table ronde : Mme Salma Khan (Bangladesh), ancienne Présidente du Comité; Mme Cecilia Medina-Quiroga (Chili), Présidente du Comité des droits de l'homme; Mmes YUNG-CHUNG KIM (République de Corée), SILVIA CARTWRIGHT (Nouvelle-Zélande), YOLANDA FERRER GOMEZ (Cuba), FERIDE ACAR (Turquie), membres du Comité; Mmes LILIANA GURDULICH DE CORREA (Argentine), GRETE FENGER-MOLLER (Danemark), anciennes membres du Comité; Mme KARIN SHAM POO, de l'UNICEF; M. BASSANI, de l'Organisation mondiale de la santé; Mme EIMI WATANABE, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

Animant la troisième partie de la Table ronde, Mme IVANKA CORTI (Italie), ancienne présidente du Comité et actuel membre en exercice, a mis l'accent sur les résultats remarquables obtenus. En effet, en 20 ans, le Comité s'est efforcé et a réussi à maintenir son indépendance, tout en défendant les droits fondamentaux de la femme dans le monde entier, en établissant un dialogue constructif avec les Etats parties et en renforçant la participation des ONG. De plus, aujourd'hui la réputation de la Convention est faite dans l'ensemble du système des Nations Unies, preuve en est le niveau de participation lors de la dernière élection des membres du Comité. Le Comité a permis aussi de mettre clairement en lumière le fait que l'égalité de facto est bien plus difficile encore à réaliser que l'égalité de jure. L'un des facteurs clefs pour y parvenir est l'éducation, moyen de changer les mentalités et les attitudes, a insisté Mme Corti, avant de rappeler que le Comité est en fait constamment en train d'essayer d'améliorer son travail, à la lumière de l'expérience acquise.

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Ce faisant, le dialogue s'est orienté vers l'importance du rôle des organisations non gouvernementales pour éliminer les stéréotypes persistants et sensibiliser tous les acteurs de la société civile. A cet égard, plusieurs intervenants ont fait part des espoirs qu'ils placent dans le protocole facultatif à la Convention, qui doit être prochainement adopté par l'Assemblée générale.

La représentante de l'IWRAW pour la région Asie-Pacifique, a expliqué que la Convention oblige les acteurs de la société à regarder en face le processus sournois de la discrimination, qui est toujours sous-jacent à l'inégalité et l'injustice. Les progrès peuvent se mesurer par les actions entreprises mais aussi par les objectifs réalisés. Ainsi au Bangladesh, des études ont permis de mettre en lumière que c'est parce que les enseignants étaient majoritairement des hommes dans les zones rurales, que les parents étaient réticents à envoyer leurs petites filles à l'école. Il est donc important de comprendre les conditions et les raisons de l'inégalité. La Convention oblige aussi à réfléchir sur les effets des discriminations passées. Il faut comprendre aussi que la Convention ne donne pas automatiquement aux femmes les droits inscrits et qu'il faut au niveau pratique concrétiser leur respect, notamment en donnant la prévalence aux traités et conventions internationaux.

Dans un message lu aux membres du Comité, le Directeur général de l'UNESCO a rappelé que pour défendre ses droits, il faut d'abord les connaître et pour les connaître il faut que l'information parvienne aux personnes les plus concernées. C'est pourquoi, l'UNESCO s'attache à produire et à diffuser des documents d'information auprès notamment des adolescents. Le Directeur du bureau de liaison de New York de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a, quant à lui, rappelé le rôle crucial des femmes dans la production de vivres. Pourtant, leur participation à l'agriculture n'est pas reconnue et leurs besoins ne sont pas pris en compte, notamment en ce qui concerne l'outillage agricole. La mise en oeuvre de la Convention passe par la capacité des Gouvernements à utiliser des statistiques ventilées par sexe, notamment dans le secteur agricole.

Outre Mme CORTI, les personnalités suivantes ont participé à cette troisième et dernière partie de la Table ronde : Mmes ROSARIO MANALO (Philippines), HANNA BEATE SCHOPP-SCHILLING (Allemagne), CHARLOTTE ABAKA (Ghana), membres en exercice du Comité; Mmes PIRKKO ANNELI MAKINEN (Finlande), VINITHA JAYASINGHE (Sri Lanka), NGUYEN NGOC DUNG (Viet Nam), MIRIAM ESTRADA (Equateur), anciennes membres du Comité; Mme SHANTI DAIRIAM (Malaisie), Directrice de l'IWRAW pour la région Asie-Pacifique; M. BOUBACAR TOURE, Directeur du Bureau de liaison de New York de la FAO; Mme NINA SIBAL, Directrice du Bureau de liaison de New York de l'UNESCO, lisant un message du Directeur général de l'UNESCO.

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