En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/7002

LE SECRETAIRE GENERAL SOULIGNE QUE L'ONU SOUTIENT, DEPUIS DES DECENNIES, LES PROCESSUS DE PAIX EN AMERIQUE CENTRALE

4 juin 1999


Communiqué de Presse
SG/SM/7002
CA/20


LE SECRETAIRE GENERAL SOULIGNE QUE L'ONU SOUTIENT, DEPUIS DES DECENNIES, LES PROCESSUS DE PAIX EN AMERIQUE CENTRALE

19990604 L'allocution suivante a été prononcée à Stockholm le 25 mai par le Secrétaire général, Kofi Annan, à l'occasion de la réunion du groupe consultatif de la Banque interaméricaine de développement s'occupant de la reconstruction et de la transformation de l'Amérique centrale.

Je me réjouis tout particulièrement d'être parmi vous aujourd'hui.

La présence des chefs d'Etat d'Amérique centrale et de leurs nombreux partenaires internationaux témoigne de l'importance de cette réunion.

Je voudrais commencer par réaffirmer ma solidarité, et celle de l'ensemble des organismes des Nations Unies, avec les peuples d'Amérique centrale pour les efforts qu'ils déploient afin d'écrire un nouveau chapitre de leur histoire. Leurs luttes, leurs sacrifices et leurs réalisations nous ont beaucoup appris et ont inspiré notre action.

Des mots, tels que "transformation" sont souvent galvaudés, mais dans ce cas particulier, il nous faut vraiment parler de "transformation" devant les mutations que connaissent les pays d'Amérique centrale. Des pays précédemment ravagés par la guerre civile vivent maintenant une ère de paix. Là où, il y a peu, seules les armes parlaient, le dialogue triomphe lorsqu'il s'agit d'apaiser des dissensions.

Là où auparavant les droits de l'homme étaient bafoués en toute impunité, de plus en plus de gens peuvent se prévaloir des nouvelles institutions et législations et de la protection qu'elles offrent. Là où l'injustice sociale oppressait des millions de personnes, la paix et le développement nourrissent désormais la réconciliation et l'espoir. Là où réfugiés et personnes déplacées désespéraient de retrouver un jour un foyer, la plupart ont maintenant un toit au-dessus de leur tête et ont repris une vie normale.

Ces 15 dernières années, les pays d'Amérique centrale ont courageusement choisi de s'attaquer aux causes profondes des conflits et de l'instabilité.

- 2 - SG/SM/7002 CA/20 4 juin 1999

Ils se sont mis en devoir d'apporter une réponse à des questions aussi litigieuses que la structure de l'Etat, les pratiques judiciaires, les systèmes électoraux, le régime de propriété foncière et la participation des individus et des associations civiles aux décisions affectant leur vie. Ils ont compris qu'il leur fallait tirer les enseignements du passé, avec pour résultats une société plus forte et un avenir beaucoup moins incertain.

Il n'entre pas dans mes intentions de minimiser les problèmes et les tensions qui demeurent. Il reste en effet encore beaucoup de chemin à parcourir avant que la paix ne soit solidement ancrée en Amérique centrale.

Par ailleurs, en octobre dernier, l'ouragan Mitch nous a rappelé la toute puissance de la nature et la fragilité des efforts humains. Mitch nous a aussi montré que les catastrophes "naturelles" ne sont pas uniquement le fait de la nature, mais sont souvent aggravées par la main de l'homme.

En effet, certaines actions, entreprises au nom du progrès, comme déboiser des terrains pour y construire des logements ou s'y livrer à l'agriculture, ont exacerbé les conséquences de l'ouragan. Les gouvernements ont en outre omis de combler des lacunes sociales telles que lorsque la nature a frappé, de très nombreuses personnes — en particulier au Honduras et au Nicaragua — et notamment des enfants, ont tout perdu — maison, emploi, école et même l'espoir.

L'Amérique centrale doit maintenant s'atteler à deux tâches : d'une part, achever les réformes politiques et celles relatives aux droits de l'homme prévues dans le cadre des accords de paix, et, d'autre part, relever des ruines les pays dévastés par l'ouragan Mitch. Ces deux tâches sont liées et justifient la tenue de cette réunion. Il s'agit là d'objectifs qui convergent et se renforcent mutuellement. Les progrès accomplis dans un domaine nourrissent ceux réalisés dans l'autre. De même, les échecs dans l'un peuvent entraver les progrès obtenus dans l'autre, voire les réduire à néant.

Ces objectifs — asseoir la paix et reconstruire la région — portent tous deux sur des questions primordiales liées à la pauvreté, l'inégalité sociale, la pression démographique et la viabilité écologique.

Tous deux impliquent que l'on apporte des solutions à des problèmes aussi aigus que ceux qui se posent en matière de développement local, de décentralisation, de transparence, de gestion des affaires publiques et de renforcement des institutions. Tous deux nous donnent l'occasion de reconstruire non pas à l'identique, mais de jeter des bases novatrices fondées sur un nouvel ordre politique. Tous deux donnent l'occasion à la communauté internationale, c'est-à-dire à nous-mêmes, de se retrouver autour d'objectifs communs. Nous devons oeuvrer de manière cohérente en Amérique centrale en veillant bien sûr à articuler notre action.

- 3 - SG/SM/7002 CA/20 4 juin 1999

L'Organisation des Nations Unies est bien placée pour donner vie à ces objectifs.

Depuis plus de 10 ans, l'ONU soutient les processus de paix en Amérique centrale en étroite collaboration avec les différents Etats de la région.

Le Groupe d'observateurs des Nations Unies en Amérique centrale (ONUCA) avait été déployé dans les cinq pays d'Amérique centrale pour vérifier qu'il avait été mis fin à toute assistance aux forces irrégulières et aux mouvements insurrectionnels. Il a également supervisé la démobilisation des "contras" au Nicaragua. La Mission d'observation des Nations Unies chargée de la vérification du processus électoral au Nicaragua (ONUVEN) a été chargée de surveiller les élections organisées en 1990.

La Mission d'observation des Nations Unies en El Salvador (ONUSAL), l'une des opérations les plus complètes jamais montées par l'ONU, a été chargée de veiller à l'application des accords de paix dans ce pays. À la suite des négociations menées sous l'égide de l'ONU, la Mission de vérification des Nations Unies pour les droits de l'homme au Guatemala (MINUGUA) continue de veiller au respect des accords signés au Guatemala, notamment pour ce qui est des aspects relatifs aux droits de l'homme.

Ces opérations et d'autres programmes lancés par les organismes des Nations Unies ont fait date. Le Programme de développement en faveur des personnes déplacées, des réfugiés et des rapatriés d'Amérique centrale (PRODERE), établi à l'origine pour contribuer à la réinsertion des personnes déplacées par les guerres civiles, a par la suite permis de consolider la paix et de renforcer le processus démocratique.

De par l'ampleur et la diversité de ses opérations, l'ONU était déjà bien implantée en Amérique centrale lorsque l'ouragan Mitch a dévasté la région. Les réseaux de liaison et les infrastructures étaient déjà en place, prêts à servir.

De fait, après le passage de Mitch, tous les organismes, fonds et programmes des Nations Unies se sont mobilisés aux côtés d'organisations non gouvernementales et ont lancé des opérations de reconstruction et de développement aussi bien à court terme qu'à long terme. Il est important de noter que la réforme engagée dans l'ensemble du système des Nations Unies nous a donné des moyens accrus de monter des opérations coordonnées adaptées à de telles situations.

Si nous voulons aller de l'avant, chacun de nous doit assumer son rôle.

- 4 - SG/SM/7002 CA/20 4 juin 1999

Les gouvernements de la région doivent prêter une attention particulière aux membres les plus vulnérables de la société; tenir compte des droits et des besoins des femmes, des enfants et des populations autochtones; améliorer l'accès aux services de santé, à l'éducation et aux ressources en eau; poursuivre des réformes institutionnelles et démocratiques de grande ampleur; et tendre vers une plus grande continuité de sorte que les changements de gouvernement ne gênent en rien les mesures de planification préalable aux catastrophes ni le processus de maturation politique.

Les donateurs et les institutions financières internationales doivent continuer à apporter leur aide et à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour alléger davantage et plus rapidement le fardeau de la dette. Les organismes des Nations Unies doivent parler d'une seule voix, faire en sorte que les gouvernements mettent en place les dispositifs nécessaires pour faire face à la prochaine saison d'ouragans et aider les pays de la région à établir des sociétés plus justes.

À l'heure où nous nous réunissons, le monde a les yeux rivés sur le Kosovo, et en vient à oublier l'Amérique centrale.

Certes, le battage médiatique orchestré autour de la tragédie subie par l'Amérique centrale s'est tu, mais les travaux de reconstruction se poursuivent de manière soutenue, sans tambour ni fanfare, et méritent de bénéficier d'une aide internationale soutenue.

À mon sens, les événements dignes de retenir l'attention ne manquent pas. Toutes origines et toutes classes sociales confondues, les populations d'Amérique centrale ont passé outre aux clivages traditionnels et ont uni leurs efforts pour faire face à la catastrophe et s'atteler à la reconstruction. Dans le même esprit que celui qui a vu naître l'Accord d'Esquipulas II, les Etats travaillent de concert pour rapprocher leurs sociétés et leurs économies, artisans d'une coopération sans cesse plus étendue où progrès et paix sont les maîtres mots.

Il nous faut maintenant continuer à panser les vieilles blessures de la guerre civile et les nouvelles plaies infligées par les pluies torrentielles, les vents déchaînés, les inondations et les coulées de boue.

Les conflits armés ont fait des dizaines de milliers de victimes en Amérique centrale, mais ils ont pu être réglés par des négociations de paix qui ont redonné espoir à la région. Les catastrophes naturelles provoquent également de très nombreux décès, des milliers de personnes trouvant la mort chaque année parce que la prévention des catastrophes et l'atténuation de leurs effets sont encore insuffisamment intégrées aux stratégies de développement de la région.

- 5 - SG/SM/7002 CA/20 4 juin 1999

Il nous appartient de rapprocher et de lier les deux objectifs — celui de la paix et celui de la reconstruction — et de parvenir à un nouvel accord entre les pays de la région et la communauté internationale. Poursuivons notre mission essentielle qui consiste à accompagner tous les peuples d'Amérique centrale dans leurs efforts. C'est dans cet esprit que je vous souhaite de tirer pleinement parti de cette réunion. Je vous remercie de votre attention.

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