AG/869

LES INGERENCES ETRANGERES DANS LE CONFLIT AFGHAN CONDAMNEES A L'ASSEMBLEE GENERALE

9 décembre 1998


Communiqué de Presse
AG/869


LES INGERENCES ETRANGERES DANS LE CONFLIT AFGHAN CONDAMNEES A L'ASSEMBLEE GENERALE

19981209 L'Assemblée nomme l'Algérie, l'Autriche, la Jamaïque, la Jordanie, le Kenya, le Népal et les Etats-Unis au Comité des Conférences

L'Assemblée générale a entamé ce matin son examen des points 20 c) et 45 de son ordre du jour, relatifs à l'assistance internationale d'urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre; la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales. Elle était saisie de trois rapports du Secrétaire général et d'un projet de résolution présenté par l'Allemagne.

Au cours du débat, les orateurs, dans leur grande majorité, ont exclu le recours à la force comme moyen de parvenir à un règlement durable du conflit en Afghanistan. Ils on appelé à l'instauration d'un cessez-le-feu, à l'amorce d'un dialogue politique et à la création d'un gouvernement à large assise, multiethnique et pleinement représentatif. A cet égard, ils ont dénoncé l'appui militaire fourni aux factions afghanes par des pays étrangers. L'accent a été mis sur le fait que le conflit afghan a des conséquences internationales qui dépassent le voisinage immédiat, notamment du fait de la recrudescence du trafic de drogue et de l'appui apporté au terrorisme international.

De nombreux participants ont exprimé leur vive préoccupation face aux violations persistantes des droits de l'homme et du droit humanitaire international, en particulier dans les zones contrôlées par les Taliban. Ils ont appelé les parties afghanes à assurer la sécurité des personnels humanitaires internationaux afin de leur permettre de s'acquitter de leur tâche. Beaucoup ont appelé à la constitution d'une commission d'enquête internationale sur les massacres de civils qui on été rapportés et ont demandé que les auteurs des meurtres de diplomates et de personnels humanitaires soient traduits en justice.

Le représentant du Pakistan a déploré la vision négative du projet de résolution sur la situation en Afghanistan et a estimé que le ton et la teneur d'ensemble de ce texte étaient déséquilibrés et partiaux en ne mettant en cause qu'une des parties au conflit, à savoir les Taliban. Il a appelé la communauté internationale a reconnaître le Gouvernement de Kaboul qui contrôle 90% du territoire où, selon lui, un climat de paix prévaut actuellement.

(à suivre 1a)

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Les représentants des pays suivants ont pris la parole: Fédération de Russie, Autriche, au nom de la l'Union européenne, Etats-Unis, Turquie, Japon, Egypte, République islamique d'Iran, Tadjikistan, Afghanistan et Pakistan.

A la fin du débat, le Président de séance a informé les Etats Membres qu'afin de donner le temps d'examiner les incidences du projet de résolution sur le budget-programme, l'Assemblée générale se prononcera sur ce projet à une date ultérieure.

En début de séance, l'Assemblée générale a également procédé à la nomination de l'Algérie, de l'Autriche, de la Jamaïque, de la Jordanie, du Kenya, du Népal et des Etats-Unis, comme membres du Comité des Conférences, pour un mandat de trois ans à compter du 1er janvier 1999.

L'Assemblée a décidé, sur proposition du Président, de reporter l'ajournement de sa présente session, initialement prévu pour le 11 décembre 1998, au jeudi 17 décembre 1998.

Lors de sa prochaine réunion qui aura lieu cet après-midi, à partir de 15 heures, l'Assemblée générale examinera les rapports de la Troisième Commission.

RENFORCEMENT DE LA COORDINATION DE L'AIDE HUMANITAIRE ET DES SECOURS EN CAS DE CATASTROPHE FOURNIS PAR L'ORGANISATION DES NATIONS UNIES, Y COMPRIS L'ASSISTANCE ECONOMIQUE SPECIALE : ASSISTANCE INTERNATIONALE D'URGENCE POUR LE RETABLISSEMENT DE LA PAIX ET DE LA NORMALITE EN AFGHANISTAN ET POUR LA RECONSTRUCTION DE CE PAYS DEVASTE PAR LA GUERRE : LA SITUATION EN AFGHANISTAN ET SES CONSEQUENCES POUR LA PAIX ET LA SECURITE INTERNATIONALES

Rapports du Secrétaire général

Assistance internationale d'urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre : (A/53/346)

Ce rapport est soumis en application de la résolution 52/211 de l'Assemblée générale en date du 19 décembre 1997. Il donne un aperçu de la situation humanitaire actuelle en Afghanistan, décrit l'assistance humanitaire fournie par les organismes des Nations Unies et leurs partenaires au cours de l'année écoulée et appelle l'attention sur les perspectives d'évolution. Selon le rapport, toutes les conditions sont réunies pour une situation d'urgence complexe dans un scénario catastrophe. L'exacerbation des conflits ethniques et religieux est jugée préoccupante, de même que les grandes quantités d'armes en circulation, l'anéantissement des capacités de gouvernement, le foisonnement de l'économie illégale, la dégradation de l'environnement et les violations constantes des droits de l'homme. Le rapport souligne les liens étroits entre les programmes d'assistance humanitaire et le processus de paix et insiste sur la nécessité d'une programmation commune. Malgré d'innombrables difficultés, des résultats positifs ont été obtenus, notamment pour l'amélioration de la sécurité alimentaire. Il est cependant nécessaire de renforcer l'assistance humanitaire et le Secrétaire général engage les donateurs à répondre encore plus généreusement à l'appel global de 1998 en faveur de l'Afghanistan.

Situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales : (A/53/455)

Le rapport porte sur l'évolution de la situation en Afghanistan sur la période écoulée depuis le dernier rapport du Secrétaire général en date du 19 juin 1998 (S/1998/532).

Le Secrétaire général note que durant la période écoulée, les événements en Afghanistan ont connu une évolution inquiétante. A la suite de la rupture des pourparlers intra-afghans au sein du Comité directeur mixte, les deux parties se sont livrées à des récriminations, chacune rejetant sur l'autre la responsabilité de l'échec des pourparlers et reniant leur engagement de s'abstenir de toute offensive militaire importante pendant les pourparlers du Comité directeur.

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Le Secrétaire général note que les combats se sont intensifiés entre le Front uni et les Taliban et relève que de nombreuses informations ont fait état d'actes d'ingérence extérieure, pour la plupart commis secrètement. C'est ainsi que la Mission spéciale a appris qu'un grand nombre de non- afghans, qui seraient pour l'essentiel d'origine pakistanaise, avaient participé à tous les stades des combats aux côtés des Taliban. Dans le même temps, les Taliban ont porté des contre-accusations contre les factions du Front uni concernant l'aide militaire massive qui leur serait constamment fournie sous forme de matériel ultraperfectionné par leurs sympathisants à l'étranger.

Le Secrétaire général appelle l'attention sur l'attaque meurtrière lancée contre des membres de la Mission spéciale à Kaboul le 21 août, blessant deux d'entre eux, un spécialiste des affaires politiques et le Conseiller militaire adjoint, le lieutenant-colonel Carmine Calo, ressortissant italien, qui devait succomber à ses blessures le lendemain; l'affaire des diplomates iraniens qui ont d'abord été portés disparus et dont on a admis ensuite qu'ils avaient été assassinés. Le Conseil de sécurité dans sa résolution 1193 (1998) du 23 août 1998 et l'ensemble de la communauté internationale ont condamné ces violentes attaques contre des représentants innocents des Nations Unies ainsi que l'assassinat de deux fonctionnaires afghans des Nations Unies le 13 juillet à Jalalabad.

L'avance des Taliban, en particulier vers les frontières des républiques d'Asie centrale, inquiète et alarme ces pays. Ils redoutent surtout l'afflux de réfugiés fuyant l'Afghanistan pour échapper à l'emprise et au harcèlement éventuels des Taliban. Ils craignent aussi que l'islamisme de type intégriste professé par les Taliban ne se répande et vienne jeter le trouble dans leurs sociétés civiles. C'est dans ce cadre qu'une réunion de haut niveau de quatre républiques d'Asie centrale s'est déjà tenue à Tashkent pour mettre au point une stratégie commune visant à prévenir ou à gérer les retombées de l'avance des Taliban. Pour le Secrétaire général la longue guerre civile en Afghanistan, qui constitue elle-même une énorme tragédie humanitaire, risque de dégénérer en conflit régional et pose un danger réel pour la stabilité de la région. S'ajoutant aux souffrances endurées depuis si longtemps par la population afghane, cette situation est un motif de profonde préoccupation pour le Secrétaire général et l'ensemble de la communauté internationale.

Le Secrétaire général souligne qu'il n'a pas cessé de lancer aux factions afghanes qui s'affrontent, ainsi qu'aux puissances étrangères qui continuent à entretenir le conflit, des appels en faveur d'un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel qui serait suivi de la reprise des négociations politiques. Il renouvelle son appel aux factions afghanes, en particulier aux Taliban, pour qu'elles respectent les droits de l'homme des populations sous leur contrôle et poursuit qu'il tient également à leur rappeler que la communauté internationale suit de près non seulement leurs paroles mais également leurs actes.

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Le Secrétaire général note que pendant la période à l'examen, son Envoyé spécial pour l'Afghanistan M. Lakhdar Brahimi, et le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques ont organisé trois réunions du groupe officieux "six plus deux" pour examiner la question de l'Afghanistan. Le groupe a appuyé la décision du Secrétaire général d'envoyer M. Brahimi dans la région pour y travailler en faveur des objectifs des points d'accord tels qu'ils apparaissent en annexe du présent rapport du Secrétaire général. Le Secrétaire général souligne que la mission de M. Brahimi revêt une importance capitale. Les résultats de ses efforts dépendront essentiellement de la détermination de toutes les parties, non seulement les factions afghanes mais également les voisins de l'Afghanistan, de parvenir à un règlement politique durable afin que les populations de l'Afghanistan puissent coexister dans la paix.

Le Secrétaire général renvoie à son rapport annuel à l'Assemblée générale sur la situation en Afghanistan, qui paraîtra prochainement et contiendra une analyse plus détaillée des implications des faits nouveaux qu'il a exposés dans le présent rapport, ainsi que ses recommandation concernant le rôle futur de l'ONU en Afghanistan.

Situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité : (A/53/695)

Le présent rapport est soumis en application de la résolution 52/211 B de l'Assemblée générale, en date du 19 décembre 1997, par laquelle l'Assemblée avait prié le Secrétaire général de lui présenter tous les trois mois les progrès de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan. Ce rapport, qui rend compte de l'évolution de la situation depuis le 14 novembre 1997, est également destiné au Conseil de sécurité qui a demandé à être régulièrement informé des principaux événements en Afghanistan, notamment dans les domaines militaire et politique, ainsi que des activités de la Mission spéciale. Il décrit également les activités de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, à New York, en Afghanistan et dans les pays voisins.

Le Secrétaire général fait observer que l'Afghanistan, après avoir été l'un des catalyseurs des rivalités entre superpuissances, est maintenant devenu le théâtre d'une nouvelle version, purement régionale, du "grand jeu", dans lequel interviennent les intérêts intérieurs, les enjeux économiques et les préoccupations liées à la sécurité nationale des pays voisins et de ceux qui les encouragent. Le pays se trouve maintenant dans un cercle vicieux : le fait que les factions afghanes sont incapables de s'entendre aux fins d'un règlement politique est à la fois la cause et l'effet de l'ingérence persistante d'éléments extérieurs dans les affaires de l'Afghanistan. Ces derniers mois, en raison des victoires militaires remportées par l'une des fonctions, la longue saga afghane est entrée dans une nouvelle phase. Depuis septembre 1998, les Taliban tiennent la plus grande partie du pays et le Front uni, à l'exception non négligeable des combattants d'Ahmed Shah Massoud, semble avoir été largement éliminé en tant que force d'intervention viable, tout au moins pour le moment. Toute solution politique reste néanmoins hors

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de portée. Les succès remportés par les Taliban sur le champ de bataille semblent plutôt avoir rendu certaines des parties encore moins désireuses de poursuivre les négociations, tout en renforçant la possibilité de voir s'intensifier la régionalisation du conflit.

Le Secrétaire général est convaincu qu'un règlement durable n'est possible que si, à la suite d'un cessez-le-feu, s'instaure un dialogue politique entre Afghans, conduisant à la réconciliation nationale et à l'établissement d'un gouvernement multiethnique véritablement représentatif; tant son Envoyé spécial que la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan continueront à promouvoir la réalisation de ces objectifs, mais il est évident que ceux-ci ne peuvent être atteints sans des efforts concertés de la part de toutes les puissances extérieures concernées. Les pays du groupe "six plus deux" - les six pays limitrophes de l'Afghanistan, à savoir la Chine, l'Iran, l'Ouzbékistan, le Pakistan, le Tadjikistan et le Turkménistan - ont joué un rôle utile pour l'examen de la question de l'Afghanistan. Le Secrétaire général exprime cependant sa déception de ce que certains de ces pays ne soient pas parvenus à rapprocher leurs positions et continuent de fournir des armes et autre matériel de guerre qui attisent le conflit en Afghanistan. Tout en comprenant qu'ils aient des intérêts légitimes à protéger en Afghanistan, le Secrétaire général estime paradoxal qu'au lieu de promouvoir réellement la paix et la stabilité en Afghanistan, ces pays continuent à fournir clandestinement un soutien militaire aux fractions afghanes qui ont leur faveur tout en déclarant que la prolongation du conflit menace leur propre stabilité.

Le Secrétaire général se félicite de ce que son Envoyé spécial soit parvenu à éviter le risque d'un affrontement militaire entre l'Iran et les Taliban au cours de sa récente visite dans la région, à la suite du meurtre abominable des diplomates et du journaliste iraniens à Mazar-i-Sharif en août 1998. Il exprime l'espoir que les efforts de son Envoyé spécial ne resteront pas sans lendemain et, notamment, que des poursuites seront engagées contre les responsables de ces meurtres et que seront libérés tous les Iraniens qui seraient encore prisonniers. Il est essentiel que l'Iran et les Taliban engagent un dialogue bilatéral dès que possible dans le but d'atténuer encore les tensions, en particulier le long de la frontière. L'ONU, en coopération étroite avec l'Organisation de la Conférence islamique, continuera à encourager un tel dialogue.

Bien que les résultats des travaux du groupe "six plus deux" puissent être considérés comme modestes, le Secrétaire général continuera à convoquer des réunions informelles de ces pays. Un élément prometteur au stade actuel est la proposition qui a été faite d'organiser une réunion ministérielle du Groupe à Tashkent, réunion qui devrait, de l'avis du Secrétaire général, faire l'objet de préparatifs adéquats et pouvoir compter sur la participation de toutes les principales factions afghanes. Il continuera également à avoir des consultations avec le Groupe des 21 Etats Membres ayant une influence en Afghanistan, qui constitue le complément indispensable du groupe "six plus

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deux". L'Envoyé spécial du Secrétaire général continuera à jouer le principal rôle dans la poursuite des activités des Nations Unies pour le rétablissement de la paix en Afghanistan.

Les informations faisant état de massacres et d'autres violations flagrantes des droits de l'homme et du droit humanitaire international en Afghanistan suscitent une grande préoccupation parmi la communauté internationale dans son ensemble et à l'ONU en particulier. Le Secrétaire général propose de créer un groupe distinct pour les affaires civiles, initialement composé de 12 contrôleurs qui, si la sécurité le permet, seraient déployés dans les principaux centres de l'Afghanistan. A cette fin, le Secrétaire général inclut des demandes de crédit préliminaires dans le rapport qu'il présentera concernant le projet de budget-programme de la Mission spéciale pour 1999, qui comportera un nouveau tableau d'effectifs et autres renseignements pertinents.

Au cours des mois à venir, le Secrétaire général compte que la Mission spéciale et tous les fonds et programmes des Nations Unies, en particulier le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, renforceront encore leur coordination dans le contexte du cadre stratégique pour l'Afghanistan. Il a le ferme espoir que les fonctionnaires des Nations Unies qui travaillent pour toutes ces entités pourront sous peu retourner en Afghanistan. Le Secrétaire général continuera à tenir l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité informés périodiquement de tous les éléments nouveaux intéressant la recherche d'une solution négociée et durable, ainsi que des résultats des efforts faits pour promouvoir une approche commune parmi les pays du groupe "six plus deux".

Projet de résolution (A/53/L.66)

Aux termes de la première partie de ce texte, intitulée "La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales", l'Assemblée générale demande à toutes les parties afghanes de cesser immédiatement toutes les hostilités armées, de renoncer à l'emploi de la force et d'amorcer, sans retard ni conditions préalables, un dialogue politique sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies en vue de parvenir à un règlement politique durable du conflit pas la création d'un gouvernement à large assise, multiethnique et pleinement représentatif qui protège les droits de tous les Afghans et respecte les obligations internationales de l'Afghanistan. Elle inviterait instamment tous les Taliban et les autres parties afghanes à s'abstenir de tous actes de violence, spécialement contre les civils. Elle condamnerait l'appui militaire étranger qui a continué d'être apporté aux parties afghanes avec la même intensité durant toute l'année 1998 et demanderait à tous les Etats de s'abstenir rigoureusement de toute ingérence de l'extérieur et de mettre fin immédiatement aux livraisons d'armes, de munitions et de matériel militaire à toues les parties au conflit en Afghanistan, ainsi qu'à l'entraînement et à toutes les autres formes d'appui militaire, et notamment de mettre un terme à la présence et à la participation de personnel militaire étranger, de personnel paramilitaire ou d'agents des services secrets.

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Elle prierait le Secrétaire général d'autoriser la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan, établie en vertu de la résolution 48/208 du 21 décembre 1993, à poursuivre ses efforts pour faciliter un cessez-le-feu immédiat et durable entre les parties afghanes et amorcer un processus de négociation conduisant à la formation d'un gouvernement d'unité nationale à large assise, multiethnique et pleinement représentatif. Elle appuierait la proposition du Secrétaire général d'établir, compte tenu des conditions de sécurité, un groupe des affaires civiles distinct, en confiant une nouvelle fonction de surveillance à la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan, avec pour objectif primordial de prévenir les violations graves des droits de l'homme, et de promouvoir le respect de normes humanitaires minimales dans l'avenir, et d'envoyer une mission d'évaluation en Afghanistan dès que les conditions de sécurité le permettront afin de déterminer le contenu exact du mandat des surveillants civiles, la composition de leurs effectifs et le lieu de leur implantation. Elle demanderait aux Taliban de fournir des garanties des garanties de sécurité pour permettre qu'une enquête soit menée sous les auspices du Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme à la suite des informations faisant état de massacres de civils innocents et d'exécutions collectives de prisonniers de guerre, et au sujet des meurtres qui auraient eu lieu à Mzar-e-Sharif et Bamyan. Elle demanderait instamment à toutes les parties afghanes, en particulier aux Taliban, de faire la preuve qu'elles sont pleinement décidées à assurer la sûreté et la sécurité de tout le personnel international et humanitaire, ce qui est une condition préalable de ses activités en Afghanistan, pour faciliter son travail. Elle inviterait instamment les Taliban à procéder immédiatement à une enquête approfondie sur les cas de décès, de blessures graves ou de disparition de fonctionnaires internationaux ou nationaux et d'autres personnes au service de l'Organisation des Nations Unies. Elle condamnerait vigoureusement le meurtre du personnel diplomatique et consulaire du consulat général de la République islamique d'Iran à Mazar-e-Sharif. Elle condamnerait la poursuite des violations largement répandues du droit international humanitaire en Afghanistan et demanderait d'urgence à toutes les parties de respecter rigoureusement toutes les dispositions de ce droit prévoyant une protection essentielle pour la population civile dans les conflits armés. Elle exigerait que toutes les parties, en particulier les Taliban, cessent d'accueillir des terroristes et leurs organisations et de permettre l'entraînement de terroristes, et que toutes les parties afghanes coopèrent aux efforts faits pour traduire devant les tribunaux les terroristes mis en accusation. Elle demanderait à nouveau à toutes les parties afghanes, en particulier aux Taliban, de cesser toutes les activités illégales en rapport avec les drogues et de soutenir les efforts internationaux visant à interdire la production illicite et le trafic de drogues.

Aux termes de la deuxième partie de ce projet de résolution, intitulée "Assistance internationale d'urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre", l'Assemblée générale demanderait à tous les organismes compétents des Nations Unies de continuer à coordonner étroitement l'aide humanitaire qu'ils apportent à l'Afghanistan en s'appuyant sur le cadre stratégique pour

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l'appel humanitaire en faveur de l'Afghanistan, et en particulier de veiller à adopter une approche cohérente sur les questions de principe, en matière de droits de l'homme et en matière de sécurité et engage les pays donateurs et les organismes à vocation humanitaire à coopérer étroitement avec l'Organisation des Nations Unies. Elle demanderait aux dirigeants de toutes les parties afghanes de placer la réconciliation nationale au premier rang de leurs priorités et exigerait que toutes les parties afghanes respectent le droit international humanitaire et, s'agissant plus particulièrement des Taliban, assurent la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation de l'ensemble du personnel humanitaire et protègent les locaux des organisations à vocation humanitaire, y compris des organisations non gouvernementales, et coopèrent sans réserve à l'action que mènent l'Organisation des Nations Unies et les organismes associés, ainsi que les autres organisations et organismes humanitaires, pour répondre aux besoins humanitaires du peuple afghan.

L'Assemblée condamnerait tout blocus ou autre entrave à l'acheminement des secours humanitaires destinés au peuple afghan et prendrait note du fait que les Taliban ont récemment levé le blocus dans le centre de l'Afghanistan. Elle demanderait instamment à toutes les parties afghanes de faire en sorte que l'aide humanitaire, en particulier les denrées alimentaires, les médicaments, les matériaux pour abris et les services de soins de santé, puisse être acheminée dans de bonnes conditions de sécurité et sans entrave, et de prévenir le pillage des locaux et des stocks de vivre des Nations Unies. Elle dénoncerait la discrimination dont les femmes et les filles, ainsi que les minorités religieuses, continuent de faire l'objet et les autres violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire en Afghanistan et demanderait à toutes les parties afghanes de respecter intégralement les droits individuels et les libertés fondamentales de tous, indépendamment du sexe, de l'appartenance ethnique ou de la religion, conformément à tous les instruments relatifs aux droits de l'homme.

L'Assemblée générale demanderait instamment à toutes les parties afghanes de mettre fin aux politiques discriminatoires et de reconnaître, protéger et promouvoir les droits égaux et la dignité des femmes et des hommes, y compris leur droit de participer pleinement sur un pied d'égalité à la vie du pays, la liberté de circulation, l'accès aux établissement d'enseignement et de soins, l'emploi en dehors du foyer, la sûreté de la personne et le droit en vertu duquel nul ne peut faire l'objet de mesures d'intimidation et de harcèlement, compte tenu en particulier des répercussions des politiques discriminatoires sur la distribution de l'aide. Elle demanderait à tous les Etats et à la communauté internationale de veiller à ce que l'ensemble de l'aide humanitaire apportée au peuple afghan tienne compte d'une démarche soucieuse d'équité entre les sexes en contribuant activement à promouvoir la participation des femmes, comme des hommes, et à ce que les femmes bénéficient de cette aide sur un pied d'égalité avec les hommes. Elle lancerait un appel pressant à tous les Etats, à tous les organismes et programmes des Nations Unies, institutions spécialisées et autres organisations intergouvernementales et non gouvernementales pour qu'ils continuent à apporter, dans la mesure où les conditions sur le terrain le

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permettent, toute l'assistance financière, technique et matérielle possible à la population afghane en vue de faciliter le retour librement consenti et en toute sécurité des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur du pays. Elle demanderait à la communauté internationale de répondre à l'appel global interinstitutions que doit lancer le Secrétaire général pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1999, en gardant également à l'esprit la possibilité de verser des contributions au fonds d'affectation spéciale d'urgence pour l'Afghanistan. Elle prierait le Secrétaire général de lui rendre compte des mesures prises et déciderait d'inscrire à l'ordre du jour provisoire de sa cinquante-quatrième session la question intitulée "Assistance internationale d'urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre."

Déclarations

M. DIETER KASTRUP (Allemagne) s'est déclaré convaincu qu'un règlement durable du conflit en Afghanistan ne peut être atteint que par un cessez-le- feu et le début d'un dialogue politique. Il a estimé que la principale responsabilité du règlement de ce conflit revient aux parties afghanes. Cependant la dégradation continue de la situation humanitaire en Afghanistan est préoccupante et il faut aussi déplorer l'hostilité croissante, manifestée notamment parmi les Taliban, envers le personnel humanitaire de la communauté internationale. La sûreté et la sécurité ne peuvent pas faire l'objet de négociations; elles constituent des conditions indispensables à l'acheminement de l'aide humanitaire a-t-il insisté. Les mines antipersonnel constituent également une question de la plus haute importance pour l'Allemagne et elle continuera à apporter son soutien pour 1999.

Le représentant a attiré l'attention sur les répercussions du conflit Afghan, non seulement pour les pays voisins comme on l'a vu dans les tensions entre l'Iran et les Taliban en octobre dernier, mais également pour d'autres pays bien au-delà de la région. Aussi, le projet de résolution appelle-t-il toutes les parties et en particulier les Taliban à arrêter d'abriter et d'entraîner des organisations terroristes. M. Kastrup a estimé qu'il est important que la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan maintienne et renforce ses contacts avec les factions afghanes, en particulier avec les Taliban et avec les autres parties et organisations intéressées, ainsi qu'avec les Etats voisins et ceux préoccupés par l'Afghanistan. Pour sa part l'Allemagne est favorable à l'établissement d'un bureau spécial des affaires civiles. Cette nouvelle fonction de supervision de la Mission aura pour but de prévenir les violations graves des droits de l'homme et de promouvoir le respect des normes humanitaires minimum dans l'avenir.

M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a regretté que, faisant délibérément fi de la volonté clairement exprimée de la communauté internationale d'un règlement pacifique du conflit en Afghanistan, ainsi que de la volonté du peuple afghan de parvenir à un accord national et au maintien de l'intégrité de leur pays, les Taliban ont à nouveau tenté de résoudre le problème afghan par la force, d'étendre leur loi à tout le territoire et

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d'imposer au peuple afghan leur régime fondé sur le fanatisme religieux, l'extrémisme et l'intolérance. La Russie considère que l'escalade de l'action militaire des Taliban au nord de l'Afghanistan constitue une réelle menace pour les frontières Sud de la Communauté des Etats indépendants (CEI), et, conjointement avec d'autres Etats membres de la CEI, se réserve le droit de prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité de leurs frontières, y compris le respect des obligations légales internationales. M. Lavrov a déclaré que le soutien militaire étranger apportés aux Taliban encourage leurs tendances agressives et compromet les efforts déployés par la communauté internationale pour lancer des négociations interafghanes. Le refus d'accepter un accord de cessez-le-feu, l'absence de coopération avec les représentants de forces politiques, les assassinats de diplomates étrangers, de journalistes et de membres des organisations internationales, les persécutions de masse, les déplacements forcés et les exécutions basées sur la nationalité ou la confession, les violations des droits de l'homme et en particulier la discrimination à l'encontre des fillettes et des femmes sont quelques unes des actions des Taliban bien connues par la communauté internationale. M. Lavrov a déclaré que cela nécessite des mesures d'urgence pour éviter une escalade du conflit fratricide en Afghanistan et éviter que ce conflit ne s'étende aux Etats voisins. Il a ajouté que les Taliban devraient respecter les résolutions pertinentes des Nations Unies, et en particulier celle adoptée hier par le Conseil de sécurité. La Fédération de Russie partage l'opinion du Secrétaire général selon laquelle les Taliban ne peuvent pas revendiquer le pouvoir à eux seuls dans un pays comme l'Afghanistan, marqué par le multinationalisme et le multiconfessionalisme. La Russie considère que les Nations Unies doivent jouer un rôle décisif de coordination et d'intégration dans la préparation d'un programme d'action en vue du règlement en Afghanistan. En outre, M. Lavrov a demandé instamment que les Taliban assurent la sécurité du personnel humanitaire international sur le terrain.

M. ERNST SUCHARIPA (Autriche), s'exprimant au nom de l'Union européenne (UE) et des pays associés, a déploré que depuis un an, la situation en Afghanistan se soit détériorée, entraînant notamment l'aggravation des massacres de civils et la détérioration de la situation humanitaire du fait, non seulement des combats mais des inondations et des tremblements de terre. L'Afghanistan continue d'être un lieu où les droits de l'homme et le droit humanitaire ne semblent pas exister pour les factions en conflit. Celles-ci ne doivent pas espérer de la communauté internationale qu'elle accepte leur refus obstiné de reconnaître, protéger et promouvoir les droits de l'homme, les libertés fondamentales et le respect du droit humanitaire international, a déclaré M. Sucharipa.

L'Union européenne condamne en outre les ingérences extérieures persistantes en Afghanistan et rappelle aux puissances qui fournissent une aide militaire aux factions afghanes que leurs activités ne passent pas inaperçues. Tout en réaffirmant son attachement à la souveraineté, l'indépendance, l'intégrité territoriale et l'unité nationale en Afghanistan, M. Sucharipa a souligné la responsabilité de ces tiers dans la situation qui

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prévaut dans le pays et a appelé tous les pays ayant une influence sur les parties afghanes à user de leur influence de façon positive et constructive, à l'appui des efforts des Nations Unies. A cet égard, il a rappelé que l'UE continue à appliquer un embargo sur les armes et demande aux autres pays de prendre des mesures similaires. Il a également rappelé qu'un règlement pacifique en Afghanistan ne pourrait se faire qu'à travers le dialogue et par l'établissement d'un gouvernement représentant l'ensemble de la société afghane. A cet égard, il a indiqué que les efforts des Nations Unies n'auront qu'un résultat limité si les factions afghanes et ceux qui continuent d'alimenter la guerre, ne s'engagent à restaurer la paix que du bout des lèvres.

M. Sucharipa a en outre réitéré la vive préoccupation de l'Union européenne face aux graves violations des droits de l'homme perpétrées par les Taliban lors de la chute de Mazar-e-Sharif et Bamyan et la détérioration de la situation des femmes et des fillettes, en particulier dans les zones contrôlées par les Taliban. L'UE soutient fermement la proposition du Secrétaire général d'ajouter à la Mission spéciale en Afghanistan une nouvelle fonction d'observation et de promotion du respect des droits de l'homme et du droit humanitaire et prévenir les violations futures en établissement une unité séparée pour les affaires civiles au sein de la Mission.

L'Union européenne a exprimé également sa vive préoccupation face à l'attitude de plus en plus hostile manifestée contre les personnels étrangers cette année, en particulier chez les Taliban, et les entraves imposées aux travaux des institutions humanitaires internationales, ce qui a amené l'UE a suspendre son aide. M. Sucharipa a estimé que l'attaque contre deux employés de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan était l'exemple le plus choquant de cette hostilité et a demandé instamment aux Taliban de coopérer entièrement et de répondre aux demandes d'explication concernant ce meurtre et de faciliter l'enquête dont il fait l'objet. Ces attaques fatales et les autres menaces contre la sécurité des personnels des Nations Unies ont forcé l'ONU a évacuer tout ses employés internationaux. L'UE soutient entièrement l'appel du Secrétaire général pour des informations sûres sur les récents meurtres et pour des assurances crédibles de la part des Taliban sur leur détermination à assurer la sécurité des personnels de l'ONU comme préalable à une reprise des activités des Nations Unies dans le pays. L'UE condamne également le meurtre de diplomates iraniens et s'inquiète de ses répercussions régionales graves, estimant que des efforts additionnels de la part des Taliban seront nécessaires pour assurer une enquête sérieuse et complète sur ces meurtres.

M. Sucharipa a indiqué que les répercussions de la guerre civile en Afghanistan ne touchaient pas seulement ses voisins immédiats, mais le trafic illégal de drogues et le soutien aux terrorisme international qu'elle entraîne, concernent tous les pays. L'UE a réitéré son appel aux factions afghanes, en particulier aux Taliban, pour que les bases d'entraînement pour terroristes soient fermées et qu'elles participent à l'effort international de lutte contre le terrorisme. Elle les appelle aussi à participer aux programmes de déminage.

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M. PETER BURLEIGH (Etats-Unis) a rappelé que malgré les dix ans de guerre civile, il serait erroné de considérer l'Afghanistan comme un pays perdu et a exprimé son soutien à l'Envoyé spécial du Secrétaire général afin de promouvoir un cessez-le-feu et la réconciliation nationale, tout en indiquant que les Nations Unies ne peuvent régler ce problème seules. C'est pourquoi, a-t-il ajouté, les Etats-Unis ont rejoint la Fédération de Russie et les Etats voisins de l'Afghanistan pour former le Groupe six plus deux sous l'égide du Secrétaire général. Il a reconnu que les pays voisins de l'Afghanistan ont eu à subir le poids d'un grand nombre de réfugiés afghans depuis dix ans et en a appelé à l'Iran et au Pakistan pour qu'ils interviennent activement en faveur de la paix en Afghanistan. Il s'est félicité de l'initiative du Président Ouzbek d'accueillir la prochaine Réunion du Groupe six plus deux, avec la possible participation des factions afghanes.

M. Burleigh a déploré que la conquête de la majeure partie du territoire afghan par les Taliban ait créé de nouveaux problèmes au lieu d'apporter des solutions aux anciens. Il a mentionné les massacres des Hazara de Mazar-e- Sharif qui ont aggravé les divisions ethniques et pratiquement conduit à un déclenchement des hostilités avec l'Iran. Il a condamné les meurtres des huit diplomates et du journaliste iraniens lors de la prise de Maza-e-Sharif et s'est déclaré préoccupé par la présence de terroristes internationaux sur le sol afghan et par le fait que l'Afghanistan soit devenu le deuxième producteur mondial d'opium et d'héroïne. Il a demandé l'extradition des terroristes, et notamment Usama Bin Ladin inculpé par la justice américaine. M. Burleigh a indiqué que la communauté internationale se tient prête à fournir une aide massive pour la reconstruction de l'Afghanistan, à condition toutefois que les Taliban et les autres factions afghanes se mettent d'accord sur la formation d'un gouvernement qui a l'appui du peuple, respecte les droits de l'homme, y compris des femmes et des jeunes filles, et reconnait les principes de la Charte des Nations Unies. Il a salué les efforts du personnel des Nations Unies engagés dans les efforts de paix en Afghanistan et a exprimé l'espoir de voir aboutir la mission confiée à M. Brahimi par le Secrétaire général.

M. VOLKAN VURAL (Turquie) a déclaré que le conflit Afghan a pris des proportions inquiétantes. Les dangers d'une régionalisation portent en elles des menaces potentielles à la paix et la sécurité en Asie du Sud-Ouest. De plus, a-t-il rappelé, les "produits dérivés" de la crise tels que le problème des réfugiés, la production et le trafic illicites de stupéfiants et l'installation de bases pour le terrorisme international ont pris des dimensions qui vont au-delà des frontières afghanes avec des implications internationales. La lutte contre ces fléaux requiert la détermination de tous, a-t-il ajouté. Le représentant a, par ailleurs, rappelé que la nature ethnique et religieuse du conflit a entraîné de graves violations des droits de l'homme, des meurtres et le déplacement de populations dans le Nord de l'Afghanistan. De plus, le caractère discontinu de l'aide humanitaire ajoute encore à la souffrance des populations.

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M. Vural a insisté sur le fait que les conditions de la reprise de l'aide humanitaire fournie par les Nations Unies doivent être créées. A cet égard, les Taliban doivent honorer leurs engagements car la seule solution viable au problème demeure l'établissement d'un gouvernement à large assise multietnique, où toutes les parties seront représentées. Cependant, ce processus de réconciliation ne peut pas reprendre avant qu'un cessez-le-feu ne soit déclaré et qu'un dialogue réel ne s'instaure entre les parties. Les activités de l'Envoyé spécial du Secrétaire général devraient recevoir tout le soutien diplomatique requis de la part de la communauté internationale a-t-il estimé. Enfin, le Groupe des six plus deux et le Groupe des vingt-et-un pays doivent intensifier leurs délibérations sur la question en vue de parvenir à une position harmonieuse.

M. MASAKI KONISHI (Japon) regrette que les parties au conflit afghan n'aient pas fait preuve de volonté de donner suite aux souhaits de la communauté internationale et pour entamer des négociations directes en vue d'un accord de cessez-le-feu, voire de la paix. Il a observé que la dégradation de la situation sur le terrain ainsi que le non-respect des différentes résolutions et des déclarations présidentielles du Conseil de sécurité sont autant de raisons de graves inquiétudes. Le Japon partage l'opinion du Secrétaire général selon laquelle il est nécessaire de consolider les résultats obtenus par M. Lakhdar Brahimi, son Envoyé spécial en Afghanistan, en envoyant une équipe pour enquêter sur les assassinats de diplomates iraniens à Mazar-e-Sharif. Il partage également la recommandation du Secrétaire général de confier à la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan, le contrôle de la situation humanitaire en Afghanistan, à condition que les conditions de sécurité des membres de cette mission soient assurées, et que son mandat soit clairement défini. Le Japon persiste à croire qu'en plus de ses activités de maintien de la paix, les Nations Unies doivent jouer un rôle central dans les autres aspects du problème afghan, en particulier les aspects humanitaires en fournissant une assistance aux personnes déplacées et réfugiées, et en participant à la lutte contre le trafic illégal de drogues. Pour sa part, le Japon a accueilli la 4ème Réunion du Groupe de soutien pour l'Afghanistan les 7 et 8 décembre, ce qui fait partie des efforts de la communauté internationale pour compléter ceux des Nations Unies. En outre, depuis le début de la guerre civile en Afghanistan, le Gouvernement japonais a alloué 400 millions de dollars à l'assistance à l'Afghanistan. Le Japon appelle les parties au conflit afghan à faire preuve de retenue et à oeuvrer en vue d'un règlement pacifique. Il reste convaincu que la situation ne peut se régler par la voie militaire, mais uniquement grâce à une solution politique.

M. NABIL ELARRABY (Egypte) a estimé qu'il fallait arrêter d'urgence les flux d'armes et de munitions et l'ingérence étrangère pour mettre un frein à la guerre en Afghanistan. Les succès militaires remportés par les Taliban ont imposé un fait accompli qui rend plus difficile une solution politique, a noté M. Elarraby qui a souligné la nécessité d'intensifier les efforts afin de relancer le dialogue, instaurer un cessez-le-feu et établir un gouvernement élargi et représentatif de toutes les sensibilités de la société afghane.

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L'Egypte condamne avec force les meurtres des diplomates iraniens à Mazar-e- Sharif qui ont provoqué une recrudescence de la tension entre les deux pays ainsi que les meurtres des personnels des Nations Unies qui ont entraîné le retrait des personnels internationaux de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan. L'Egypte demande que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice. Elle préconise également le renforcement des efforts du HCR afin de permettre le retour des réfugiés chez eux.

Il faut lutter contre la culture et le trafic de drogues et empêcher l'Afghanistan de donner asile et entraînement aux terroristes du monde entier, a ajouté M. Elarraby. Pour cela, il faut que les fonctionnaires des Nations Unies retournent en Afghanistan et que leur sécurité soit garantie. Toutefois en l'absence de conditions de sécurité suffisantes et au regard de la piètre situation humanitaire, l'Egypte considère qu'il n'est pas nécessaire et prématuré de déployer des observateurs civils. Profondément préoccupée par la détérioration des droits de l'homme et de la situation humanitaire qui accentue les clivages ethniques et religieux, l'Egypte demande qu'une enquête internationale soit faite sur les massacres. M. Elarraby a en outre déclaré partager la frustration du Secrétaire général face à l'impuissance des Etats du Groupe six plus deux et leur incapacité à rapprocher leurs points de vue, et à contribuer à l'édification d'une société afghane réconciliée, dans la paix et la sécurité. L'Egypte, qui déploie beaucoup d'efforts pour la restauration de la paix en Afghanistan, espère que les autres Etats accorderont la plus haute importance à ce sujet, notamment en adoptant le projet de résolution présenté qui pourrait conduire à un règlement pacifique rapide si les parties en respectent les dispositions.

M. HADI NEJAD HOSSEINIAN (République islamique d'Iran) a déclaré que son pays est déterminé à ce que les responsables des meurtres à l'encontre du personnel diplomatique et du correspondant de l'agence de presse de la République islamique à Mzar-e-Sharif soient appréhendés et traduits devant la justice conformément aux normes internationales. Le représentant estime que le problème afghan va bien au-delà de sa confrontation avec L'Iran. Il est constitué par la menace que le statu quo pose à la paix et à la sécurité régionales et internationales et par la situation inacceptable, inhumaine et horrible à laquelle des millions d'Afghans sont soumis. L'instabilité régionale due à la situation en Afghanistan est susceptible d'accroître et de fomenter la haine ethnique et religieuse dans toute la région. Le représentant a notamment exprimé la préoccupation de la communauté internationale et des pays voisins de l'Afghanistan face à la persistance du statu quo en Afghanistan. Ces préoccupations sont engendrées par les effets destabilisants que la poursuite du conflit représente pour la région et le rejet par les Taliban de tout cessez-le-feu et d'une solution politique ainsi que les tueries méthodiques des minorités ethniques et religieuses dans le Nord de l'Afghanistan organisées par les Taliban.

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Le représentant s'est déclaré partisan d'un gouvernement multiethnique pleinement représentatif qui protège les droits du peuple afghan sans distinction. Il a déclaré qu'alors que la responsabilité ultime de restaurer la paix revient au peuple afghan, le Gouvernement de la République islamique d'Iran soutient les efforts des Nations Unies qui ont un rôle central à jouer pour parvenir à une réconciliation nationale et à un règlement politique durable incluant la participation de toutes les parties au conflit et de tous les segments de la société afghane.

M. RASHID ALIMOV (Tadjikistan) s'est déclaré préoccupé par l'évolution de la situation en Afghanistan et a regretté que les appels en vue d'un règlement pacifique ne soient pas entendus par les Taliban qui pensent régler le conflit militairement avec une aide extérieure. L'opposition farouche aux Taliban risque d'aggraver le conflit, faisant peser une énorme menace sur toute la région. Il a rappelé les terribles violations des droit de l'homme auxquelles se livrent les Taliban et a cité en exemple le massacre des huit diplomates et d'un journaliste iraniens à Mazar-e-Sharif, ainsi que la discrimination violente à l'égard des femmes. Il a jouté que l'assassinat des diplomates iraniens a rallumé les tensions dans la région et pourrait amener des problèmes à la frontière avec le Tadjikistan, qui a vu son nombre de réfugiés afghans augmenté massivement.

Dans un contexte plus large, il a rappelé la tendance à l'utilisation de ce territoire comme plate-forme de l'extrémisme religieux, du terrorisme international et du trafic de drogues. Le représentant a annoncé que le Gouvernement du Tadjikistan a pris des mesures de renforcement de sa frontière et se concerte avec ses partenaires ouzbek et russes sur la voie à suivre. Il a exhorté à un cessez-le-feu immédiat et à l'ouverture de négociations afin de mettre en place un gouvernement à large représentativité et respectueux des droits de l'homme. Il a exprimé l'espoir que la prochaine rencontre des Etats du Groupe six plus deux permettra d'avancer dans la voie d'un règlement de la question afghane. Il s'est déclaré favorable à la résolution adoptée par le Conseil de sécurité hier et a souhaité l'adoption du projet de résolution dont l'Assemblée est saisie.

M. RAVAN FARHADI (Afghanistan) a déploré qu'en dépit de la résolution adoptée l'année dernière par l'Assemblée générale, la politique hégémonique du Pakistan, qui soutient l'attitude de rejet belliqueux des Taliban, a voué à l'échec tous les rêves de sécurité et de paix en Afghanistan. Après avoir passé en revue la situation qui prévaut en Afghanistan, il a rappelé que Kaboul est devenu une ville fantôme où les hommes et les femmes se cachent de peur d'être arrêtés par la police religieuse des Taliban. Le droits des femmes et des jeunes filles au travail, dans les services sociaux et dans l'éducation est également complètement bafoué. Les Taliban sont assistés dans leur politique de déportation, de meurtres, de viols, d'exécution sommaire, d'enlèvements et de détention arbitraire par du personnel militaire pakistanais. Au mépris du souhait exprimé par la communauté internationale, a-t-il déclaré, les services de renseignements pakistanais (ISI) et leur personnel militaire se sont engagés plus avant dans les opérations menées par

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les Taliban à l'intérieur de l'Afghanistan, y compris dans les massacres de Mazar-e-Sharif. A cet égard, le représentant a exprimé sa déception quant à l'attitude des Nations Unies qui ont, jusqu'à présent, voulu ménager des sensibilités comme à l'époque de la guerre froide, et ont évité de mentionner explicitement la présence de l'armée pakistanaise en Afghanistan.

En ce qui concerne le terrorisme, M. Farhadi a insisté sur la présence de camps d'entraînement de terroristes en Afghanistan et sur le fait que l'ISI entraîne des terroristes dans ces camps afin qu'ils participent aux batailles menées en Afghanistan, avant de les lancer de par le monde. Il a ajouté que lors de l'attaque du consulat iranien à Mazar-e-Sharif, on a constaté que les Taliban donnaient leurs ordres en urdu du Pakistan. Le représentant a également fait état de préoccupations concernant le trafic de drogues dont il a estimé la production en territoire taliban à 96,3% de la production nationale. Il a signalé que d'après le Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID), la culture du pavot a augmenté de 9% sur les territoires contrôlés par les Taliban. Le représentant s'est également inquiété de la destruction du patrimoine culturel afghan, notamment par la vente d'une des statues colossales du Bouddha et la destruction de la bibliothèque Naser Khisraow-i-Balkhi qui renfermait 5 5000 volumes d'ouvrages irremplaçables en farsi.

Le représentant s'est élevé contre l'idée d'un possible règlement militaire du conflit afghan et a cité l'opposition de plus en plus farouche que rencontrent les Taliban à l'intérieur du pays, y compris parmi les Pashtoons de l'est et du sud du pays. Il s'est également défendu contre ceux qui assimilent son Gouvernement à une faction du même type que les Taliban et a jugé que cette accusation va à l'encontre de la Charte des Nations Unies. Il a par ailleurs exprimé son soutien total à la résolution adoptée hier, mardi 8 décembre, par le Conseil de Sécurité et a jugé d'une grave importance le paragraphe dans lequel le Conseil déclare qu'il est prêt à prendre des mesures en vue d'assurer l'application des résolutions des Nations Unies.

M. AHMAD KAMAL (Pakistan) a déclaré que le Pakistan n'est pas partisan d'une solution militaire au conflit afghan et accorde la plus haute importance au rétablissement de la paix en Afghanistan. Il a fait observer que dans près de 90% de la zone sous contrôle des autorités de Kaboul, la paix prévaut actuellement et il a estimé qu'il fallait reconnaître cette réalité et traiter avec les autorités de Kaboul, qui sont le seul véritable Gouvernement en Afghanistan actuellement. Le Pakistan déplore les tueries de femmes et d'enfants innocents qu'entraîne le conflit fratricide en Afghanistan, et condamne l'assassinat des diplomates iraniens à Mazar-e-Sharif, ainsi que celui des membres du personnel humanitaire et des conseillers militaires des Nations Unies. M. Kamal a toutefois noté que, parmi les développements positifs de cette année, se trouve la levée du blocus de Hazarajat en Afghanistan central. Il a déclaré que le peuple afghan a besoin d'une aide humanitaire substantielle pour pouvoir subvenir à ses besoins à cause de la destruction massive de l'économie afghane après 10 ans de conflit avec la Russie et une guerre civile. M. Kamal estime qu'il n'existe pas d'espoir de

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remédier à cette situation sans une aide internationale, et pour le moment le peuple afghan dépend largement du Pakistan pour la nourriture et autres produits nécessaires à sa survie. M. Kamal a remarqué également que la situation des réfugiés n'a pas évolué au cours de l'année et a souligné le fait que le Pakistan accueille environ 1.5 millions de réfugiés afghans en dépit de la limitation de ses propres moyens et de la contraction de l'aide internationale. Il a regretté que le programme de rapatriement du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ait été sapé par la crise financière actuelle, ce qui s'est traduit par la suspension au cours de cette année de toutes les activités de rapatriement. Le Pakistan demande instamment à la communauté internationale de contribuer généreusement au rapatriement et à la réhabilitation des réfugiés afghans. En outre, le Pakistan soutient la proposition du Secrétaire général d'ajouter une fonction de contrôle à la Mission spéciale des Nation Unies en Afghanistan avec pour objectif principal de promouvoir le respect des normes humanitaires minimales. M. Kamal estime qu'il existe actuellement une opportunité pour la paix en Afghanistan qui dépend toutefois de la cessation de toute ingérence étrangère dans le conflit afghan. Le Pakistan a poursuivi jusque là une politique de promotion de la paix et d'un règlement négocié en Afghanistan.

En ce qui concerne le projet de résolution dont l'Assemblée est aujourd'hui saisie, le Pakistan regrette qu'il brosse un tableau pessimiste de la situation en Afghanistan en dépit du fait que la paix prévaut dans 90% du pays. Le ton général de ce texte est biaisé par rapport à l'une des parties au conflit. En outre, ce texte comprend souvent la mention " en particulier les Taliban" ce qui sous-entend que tous les actes de violence et problèmes sociaux sont de leur fait. M. Kamal a évoqué un certain nombre d'autres réserves du Pakistan en ce qui concerne ce projet de résolution, et a déclaré que, pour toutes ces raisons, le Pakistan ne votera pas en sa faveur.

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