AG/SHC/394

POUR TROUVER DES SOLUTIONS DURABLES AU PROBLEME DES REFUGIES, IL FAUT AGIR TANT SUR LE PLAN POLITIQUE QU'HUMANITAIRE

11 novembre 1998


Communiqué de Presse
AG/SHC/394


POUR TROUVER DES SOLUTIONS DURABLES AU PROBLEME DES REFUGIES, IL FAUT AGIR TANT SUR LE PLAN POLITIQUE QU'HUMANITAIRE

19981111 Après les conflits, il importe d'assurer la continuité entre l'aide d'urgence, l'aide à la reconstruction et l'aide au développement à long terme

La nécessité d'agir tant sur le plan politique qu'humanitaire face aux situations de crise et d'assurer la continuité entre l'aide d'urgence et l'aide à la reconstruction dans les situations d'après-conflit a été soulignée par plusieurs délégations au cours du débat cet après-midi, les questions relatives aux réfugiés, aux rapatriés et aux personnes déplacées et les questions humanitaires. Seize des vingt pays les plus pauvres du monde sont des pays sortant de conflits; les quatre autres ont accueilli des flux importants de réfugiés, a fait remarquer le représentant de la Banque mondiale. Dans le cadre de ses efforts visant à créer un environnement favorable à un développement stable, condition essentielle d'une paix durable, la Banque a établi une Unité d'après-conflit chargée de développer une capacité de réponse rapide et efficace aux besoins sur le terrain. Tout en soulignant la nécessité de coordonner les efforts des divers acteurs, le représentant a estimé qu'il faut maintenir une division claire entre les activités de maintien de la paix et celles des organisations de développement. Reconnaissant que le fardeau de la guerre ne doit pas être remplacé par celui de la dette, la Banque examine actuellement les moyens de réduire les créances des pays sortant de conflits.

Les représentants des pays suivants ont pris la parole au cours du débat : Japon; Brésil; Chine; Guatemala; République-Unie de Tanzanie; Soudan; Argentine; Côte d'Ivoire; Turquie et Canada. L'Observateur de l'Ordre militaire souverain de Malte, les représentants de la Banque mondiale et de l'Organisation internationale des migrations (OIM) sont également intervenus.

La Commission poursuivra l'examen de ces questions jeudi à partir de 10 heures.

Suite du débat général sur les questions relatives aux réfugiés, aux rapatriés et aux personnes déplacées et questions humanitaires

M. YUKIO SATOH (Japon) a estimé que le problème des réfugiés requiert une approche globale, combinant de multiples efforts, y compris la prévention des conflits, la protection des réfugiés, la recherche de la paix, le rapatriement, la reconstruction. Les efforts de développement sont essentiels, tant pour la prévention que pour le renforcement de la paix après les conflits. Le représentant a souligné dans ce contexte l'importance d'une coordination et d'une coopération des actions de tous les acteurs au niveau international. Ceci est particulièrement vrai en Afrique où les réfugiés sont sans cesse confrontés à des conflits sans aucun espoir de paix ou de réinstallation. L'"Agenda pour l'Action", adopté lors de la Deuxième Conférence de Tokyo sur le développement de l'Afrique identifie la bonne gouvernance, la prévention des conflits et le processus de reconstruction après les conflits comme étant les domaines d'actions importants et les "fondements du développement". L'Agenda pour le développement spécifie aux Etats africains et à leurs partenaires pour le développement les buts et les objectifs ainsi que les dispositions qui doivent être prises afin de les atteindre.

Le représentant a cité le besoin d'une meilleure préparation des partenaires dans le développement pour soutenir les efforts en temps de crise ainsi que ceux déployés après les conflits pour la réhabilitation, la reconstruction et le développement et ce, afin de faciliter le passage du secours d'urgence à l'assistance au développement. Selon le délégué, le processus mis en place par la Deuxième Conférence de Tokyo, permettra de poursuivre une meilleure coopération et coordination internationale notamment entre les Etats africains et leurs partenaires dans les domaines concernant les réfugiés.

Le délégué a condamné les attaques contre le personnel humanitaire. Selon lui il est devenu essentiel d'assurer la protection du personnel civil employé par le HCR et autres organisations humanitaires. Il a fait part de l'intention du Japon de verser un million de dollars au Fonds spécial des Nations Unies pour la sécurité du personnel.

M. BENEVIDES (Brésil) a déclaré que le Brésil souscrit pleinement aux principaux instruments juridiques internationaux mis en place pour la protection des réfugiés. Les dispositions de ces instruments visent généralement la protection d'individus persécutés pour des raisons politiques, de race, de religion ou de nationalité. Le Brésil a élargi l'interprétation de ces instruments pour inclure également la protection de toute personne fuyant les situations de conflits ouverts intraétatique ou interétatique. Le Brésil encourage tous les pays qui ne l'ont pas encore fait, à devenir signataires de la Convention de 1951 et de son Protocole de 1967.

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Le Gouvernement brésilien a par ailleurs pris des mesures importantes afin d'améliorer la situation des réfugiés dans le pays, c'est ainsi que les réfugiés ont le droit d'exercer pleinement leurs droits civiques conformément à la Réglementation sur les citoyens étrangers. Des mesures sont aussi appliquées pour faciliter l'accès des réfugiés au marché de l'emploi en leur délivrant visas, documents d'identité et permis de travail. L'accès à la sécurité sociale et la santé publique est également assuré. Une nouvelle loi fédérale visant à réglementer la situation des réfugiés a été adoptée dans le cadre du Programme national pour les droits de l'homme. Cette législation reconnaît entre autres le droit qu'ont les individus victimes de "sérieuses violations des droits de l'homme" de bénéficier du statut de réfugié. A cet égard le droit interne se fonde et va même plus loin que les dispositions de la Convention de 1951. Un autre développement important est l'établissement d'une Commission nationale pour les réfugiés incluant des représentants du Gouvernement ainsi que des représentants non gouvernementaux. Cette initiative a été applaudie par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés comme étant la proposition juridique la plus avancée en Amérique latine dans le domaine de la protection des réfugiés.

M. REN YISHENG (Chine) a rappelé que le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) a récemment connu une crise financière importante et que le régime de protection des réfugiés a fait face à de sérieux défis, notamment les attaques nombreuses dont étaient victimes les réfugiés et le personnel humanitaire, ainsi que la militarisation des camps de réfugiés. Il a insisté sur le fait que les réfugiés représentent un problème mondial qui nécessite des efforts à l'échelle mondiale de la part de toutes les parties prenantes, y compris les pays développés et en développement, les pays d'origine, les pays d'asile, et les organisations internationales.

La Chine considère que les pays en développement qui accueillent un nombre important de réfugiés sont aussi des pays donateurs dans la mesure où ils font des contributions et des sacrifices importants. Dans ce contexte, elle lance un appel à la communauté internationale, et en particulier aux pays développés occidentaux, pour qu'ils apportent une aide plus importante à ces Etats et pour qu'ils offrent aux réfugiés davantage de possibilités d'installation. M. Yisheng a déclaré également que la solution du problème des réfugiés consiste en l'élimination de ses causes, notamment les conflits armés, le racisme, la pauvreté et le sous-développement. Il estime que les pays développés devraient aider les pays en développement à dépasser leurs difficultés et à réaliser leur développement durable. Il a en outre lancé un appel aux pays occidentaux, qui persistent à avoir des politiques d'asile restrictives, à adopter des mesures en vue de sauvegarder les droits de l'homme des demandeurs d'asile. La Chine, en tant que pays signataire de la Convention sur les réfugiés et de son Protocole, demande instamment aux Etats non signataires de les ratifier. En outre, la Chine encourage le renforcement de la coopération entre le HCR et le Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme.

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M. ALFREDO SFEIR-YOUNIS, représentant de la Banque mondiale, a souligné le lien entre des stratégies de développement efficaces et le renforcement de la paix. Convaincue de ce que la construction d'une paix durable dépend de la création des conditions nécessaires à un développement stable, la Banque mondiale oeuvre en ce sens avec ses partenaires de l'ONU et de la société civile. Seize des vingt pays les plus pauvres du monde sont des pays sortant de conflits; les quatre autres ont accueilli des flux importants de réfugiés, a fait remarquer le représentant. Au cours des dix dernières années, 17% des prêts totaux de la Banque et 25% de ceux de l'Association internationale de développement (IDA) sont allés aux pays sortant de conflits. La Banque joue également un rôle de coordination important entre les donateurs et les institutions. Elle travaille aussi sur la dimension préventive des opérations de développement. Ainsi, les stratégies d'assistance aux pays incluent, chaque fois qu'approprié, une analyse des causes et conséquences de la violence. La Banque a établi des directives opérationnelles pour le financement des activités de déminage.

M. Sfeir-Younis a fait état de la mise en place d'un nouveau cadre pour la reconstruction des pays sortant de conflits, ainsi que d'une unité d'après conflit, créée en juillet 1997, afin de développer une capacité de réponse rapide et efficace aux besoins sur le terrain. La Banque travaille avec le Haut Commissariat pour les réfugiés et le Comité international de la Croix- Rouge. Elle a signé récemment un Mémorandum d'accord avec le HCR et approfondit ses relations avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Bureau de la coordination de l'assistance humanitaire, la Croix-Rouge internationale, l'Union européenne et d'autres acteurs participant aux efforts de reconstruction. L'unité d'après conflit fait fonction de secrétariat pour le nouveau Fonds post-conflit qui bénéficie d'une allocation annuelle de huit millions de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD).

La Banque s'efforce de voir comment réduire le fardeau de la dette pour les pays sortant de conflits. Elle reconnaît, en effet, que le fardeau de la guerre ne doit pas être remplacé par le fardeau de la dette. Dans les situations suivant les conflits, la coordination des rôles est fondamentale. Il y a des défis clefs dans ce contexte. Les populations doivent apprendre à partager des ressources limitées, former un gouvernement d'union nationale, apprendre à tolérer des origines ethniques et culturelles différentes. Cela requiert davantage que la cessation des hostilités. Avec une coordination renforcée et en établissant une division claire entre les activités de maintien de la paix et celles des organisations de développement, la communauté internationale peut contribuer à assurer une paix stable, a déclaré le représentant.

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M. JOSE ANTONIO LINATI-BOSCH, Observateur de l'Ordre militaire souverain de Malte, a déclaré que le problème des réfugiés et personnes déplacées compte au nombre des priorités de l'Ordre militaire souverain de Malte, qui a une longue tradition de soutien aux réfugiés. C'est ainsi qu'aujourd'hui l'Ordre parraine l'Association pour l'étude du problème mondial des réfugiés. Récemment, l'Ordre a été également actif dans le domaine de l'aide matérielle, la fourniture d'abris, de soins médicaux et de conseils aux réfugiés en provenance de la Hongrie, la Yougoslavie, l'Ethiopie, le Rwanda, le Burundi, le Soudan, le Kosovo et la Bosnie.

Les corps auxiliaires de l'Ordre, les volontaires du Melitensis, oeuvrent dans divers pays d'Afrique, d'Asie et d'Europe. Plus récemment encore, afin d'accroître son efficacité, l'Ordre militaire souverain de Malte a ouvert un bureau en Ouganda et a l'intention d'en établir un autre au Montenegro. Afin de faire face aux nouveaux défis, l'Ordre a modifié le statut du corps d'urgence de l'Ordre militaire souverain de Malte afin que l'action de celui-ci ne se limite pas aux mesures d'urgence. Le statut souverain de l'Ordre, unique parmi huit organisations, lui donne un certain avantage pour acheminer l'aide là où le besoin est le plus pressant, et ce d'autant plus lorsque la représentation diplomatique est présente dans le pays.

Selon l'Observateur, il y a un besoin pressant de définir un plan de solidarité afin de consolider la paix ainsi qu'un plan mondial de solidarité en faveur des réfugiés et des personnes déplacées. Le délégué a estimé que dans leur tentative de faire face à l'exode massif, les premiers pays d'asile risquent de perdre de vue la situation désespérée des individus qui ont une peur bien fondée d'être persécutés s'ils sont rapatriés. C'est une menace sérieuse et présente même dans des pays développés qui ont une tradition d'asile. La procédure d'appel au niveau des tribunaux internationaux, dans de tels cas, doit être renforcée. D'autre part, la plupart des flux massifs de population se font dans les pays dits en voie de développement. Les pays hôtes n'ayant même pas les moyens nécessaires pour offrir une aide d'urgence, le rapatriement est la solution idéale si les garanties d'un retour pacifique sont réunies. Les rapatriements doivent inclure des garanties de stabilité et de paix afin d'être effectifs.

M. LUIS CARRANZA (Guatemala) a indiqué que son pays avait ratifié la Convention (1951) et le Protocole (1964) relatifs au statut des réfugiés, ainsi que la Déclaration de Carthagène (1984). Le représentant a indiqué que l'augmentation du nombre de rapatriés guatémaltèques est le fruit des initiatives du Gouvernement pour promouvoir une paix stable et durable, et établir un système de coordination multi-institutions et interministériel des mesures d'assistance en faveur des personnes déracinées. La dynamique du rapatriement, sous l'impulsion de la Commission nationale pour l'aide aux personnes rapatriées, réfugiées et déplacées, a rendu possible le retour, entre 1986 et 1998, de 38 639 réfugiés au Honduras, Belize, Costa Rica, ainsi qu'au Mexique.

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Au cours de l'année écoulée, des progrès considérables ont été enregistrés quant à l'aide aux réfugiés guatémaltèques. Rien qu'en 1997, le Gouvernement, avec l'aide du Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) a contribué à rapatrier 3 753 réfugiés du Mexique. Le Gouvernement s'est félicité de ce que le rapatriement collectif des réfugiés guatémaltèques soit en train de prendre fin, de même que le processus de leur réinsertion.

Le représentant a signalé le dialogue intergouvernemental auquel prend part son pays, sur les questions relatives aux déplacements depuis 1996 dans le cadre du "Processus de puebla". Le Parlement a promulgué, le 1er octobre 1997, la Loi 75-97 "spéciale de documents personnels", facilitant l'obtention par les ressortissants faisant l'objet d'un déplacement involontaire de documents d'identité, ceci en vue de faciliter leur réinsertion sociale, économique et politique. La délégation a prié les Etats accueillant des réfugiés de protéger leurs droits et de veiller à ce qu'aucune infiltration d'éléments armés ne se produise dans les camps les abritant.

M. DAUDI N. MWAKAWAGO (République-Unie de Tanzanie) a rappelé que son pays accueillait et accordait sa protection à des centaines de milliers de réfugiés. Le Gouvernement, a dit le représentant, travaille à promouvoir des solutions politiques en faveur des réfugiés et des personnes déplacées du Burundi grâce à l'établissement, sous l'égide présidentielle, d'un dialogue dans le cadre du processus de paix d'Arusha.

L'année dernière, la délégation faisait montre d'un certain optimisme en raison du rapatriement de près de 500 000 réfugiés rwandais, et de la signature d'un Accord tripartite avec la République démocratique du Congo et le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés en vue du rapatriement de réfugiés congolais ayant fui le territoire de l'ancien Zaïre. En octobre 1997, près de 70 000 réfugiés figuraient sur les registres de rapatriement et leur retour s'effectuait sans encombre. Mais ce processus a été brutalement interrompu le 2 août dernier par des tensions internes en République démocratique du Congo, et la République-Unie de Tanzanie a dû faire face à un nouvel afflux de réfugiés. Le 20 septembre, 10 000 réfugiés avaient déjà franchi ses frontières, et leur nombre, qui ne cesse d'augmenter, s'élève aujourd'hui à 300 000.

Le Gouvernement de la République-Unie de Tanzanie s'est engagé, devant la communauté internationale, à continuer de donner asile aux réfugiés, mais a indiqué que leur présence accroissait les risques de tensions internationales. Les pays d'accueil, a noté le représentant, font, de la part d'autres Etats, l'objet de critiques et de demandes qui outrepassent le cadre du devoir d'asile. S'agissant de l'allégation selon laquelle une infiltration d'éléments armés se produit au sein de certains camps de réfugiés, le représentant a estimé qu'une telle infiltration pose un dilemme entre les priorités du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et celles des pays d'accueil - ainsi que l'illustre la situation dans la région des Grands Lacs.

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La Convention relative au statut des réfugiés de 1951 ne prévoyant pas de dispositions sur la neutralité des camps de réfugiés, la République-Unie de Tanzanie a engagé la communauté internationale à établir des normes en la matière. Le Gouvernement a déclaré, en outre, qu'il n'estimait pas raisonnable d'installer des camps de réfugiés loin des frontières, alors que les camps existants sont précisément situés aux zones frontalières. Selon le représentant, un tel éloignement serait, notamment, préjudiciable aux droit des réfugiés à un rapatriement aisé et rapide. Le représentant a cité à l'appui de cette thèse le rapatriement volontaire de réfugiés rwandais en 1996.

La Tanzanie a lancé un appel à la communauté internationale en vue d'une allocation de ressources financières et d'assistance technique pour l'accueil aux réfugiés, dont le coût matériel, financier, social et culturel pour les pays hôtes perdure bien au-delà de la fin des hostilités et du processus de rapatriement. Le Gouvernement a, par ailleurs, exprimé sa préoccupation de ce que les camps de réfugiés forment souvent des îlots de prospérité dans la pauvreté ambiante, ce qui génère des situations conflictuelles. Il a demandé, dans ce contexte, au HCR et à d'autres organisations compétentes de prévoir, au sein de leurs activités consacrées aux réfugiés, un volet social pour les populations des pays d'accueil.

M. EL A'AS (Soudan) a déclaré que le rapatriement volontaire représente la solution la plus appropriée au problème des réfugiés. Le Soudan qui accueille un grand nombre de réfugiés s'est efforcé de favoriser leur retour dans leur pays d'origine. Il a déploré la diminution notable du niveau d'assistance aux réfugiés qui se trouvent au Soudan et qui ne couvre actuellement que 20% des besoins réels des réfugiés. De l'avis du Soudan, il y a un déséquilibre dans la répartition de l'aide accordée aux pays qui accueillent des réfugiés. Certains pays qui hébergent moins de réfugiés que le Soudan reçoivent une assistance plus grande, a-t-il dit, en rappelant que de nombreux réfugiés vivant au Soudan sont installés hors des camps. Il a lancé un appel en faveur d'un partage plus équitable du fardeau des réfugiés afin de réduire les risques de tensions et les conséquences de la présence importante de réfugiés sur l'environnement et la situation économique et sociale de son pays.

M. El A'as a fait remarquer que l'assistance aux réfugiés installés au Soudan avait été interrompue sans explication et a appelé le Haut Commissaire à ne pas politiser cette question et à se fonder uniquement sur des considérations humanitaires. Le dernier rapatriement de réfugiés éthiopiens s'est déroulé le 31 mai 1998. Les opérations de rapatriement ont ensuite été interrompues en raison du manque de nourriture dans les camps d'accueil et de l'arrivée de l'automne. Le représentant a demandé à l'Erythrée d'encourager ses citoyens à rentrer chez eux. Le Gouvernement soudanais continue également à s'intéresser au sort de ses propres citoyens réfugiés à l'étranger et réaffirme sa disposition à les voir rentrer au Soudan.

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M. HERNAN PLORUTTI (Argentine) a souligné l'augmentation des demandes d'asile dans le monde. Ainsi, en Argentine, ces demandes, dont un grand nombre provient de pays lointains, ont doublé depuis 1996. L'Argentine a récemment fait savoir au Bureau du Haut Commissaire pour les réfugiés à Buenos Aires qu'elle acceptait d'accueillir un groupe de familles originaires de l'ex-Yougoslavie. Des efforts sont actuellement déployés en vue de reformuler les procédures et normes internes visant à faciliter le processus d'intégration des personnes auxquelles le Gouvernement argentin a accordé le statut de réfugié. Parmi les activités entreprises au niveau régional, le représentant a cité des cours de formation organisés pour les forces de maintien de la paix et de police civile, ainsi que des initiatives visant à mieux faire connaître le problème des réfugiés.

L'aide du Gouvernement argentin aux réfugiés dépasse le cadre régional et s'inscrit dans le cadre de sa détermination à partager ce fardeau. Cette aide tient compte du principe du regroupement familial, qui est un droit fondamental des réfugiés et favorise leur intégration dans les pays d'accueil. Le représentant a souligné l'importance du Bureau régional du Haut Commissaire pour l'Amérique du Sud en ce qui concerne l'accueil des réfugiés, la recherche de solutions favorables pour ceux-ci et le lancement d'actions de solidarité dans les situations de crise. De l'avis de l'Argentine, une plus grande solidarité permettra d'éviter le développement de politiques restrictives dans les pays les plus affectés par les flux de réfugiés.

Mme D. KABA CAMARA (Côte d'Ivoire) a déclaré que l'une des causes profondes des guerres ethniques en Afrique remonte à l'époque coloniale où, tel un gâteau, le continent a été l'objet d'un morcellement répondant aux appétits des puissances coloniales. Le découpage ethnique a été consacré, en 1963, par la décision de l'OUA de maintenir les frontières issues de la colonisation au nom du principe de l'intangibilité des frontières. La représentante a estimé que si ce principe a permis d'éviter des conflits territoriaux entre les Etats africains pendant près de trois décennies, il subit maintenant à l'intérieur des structures étatiques fragiles, le contrecoup du multipartisme mal maîtrisé. En effet, les nouveaux Etats n'ont pas eu le temps suffisant pour cultiver des valeurs patriotiques dans leurs peuples et forger une nation avant de faire face au défi du multipartisme.

Ce multipartisme souvent confondu au tribalisme a fait éclater des antagonismes latents, allant jusqu'à la confrontation armée pour l'exercice du pouvoir politique qui souvent est assorti du pouvoir économique. A cet héritage, il faut ajouter la pauvreté qui engendre l'instabilité politique et les conflits sociaux pouvant déboucher sur des coups d'Etat militaires et des conflits armés. La représentante a rappelé que son pays a pris de nombreuses initiatives pour la paix et la réconciliation nationale en Angola, au Libéria, en Sierra Leone et plus récemment en Guinée-Bissau. Le Gouvernement ivoirien a su gérer le problème des réfugiés libériens en les intégrant dans des communautés d'accueil villageoises. Le rapatriement librement consenti

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d'un grand nombre a été encouragé, a-t-elle ajouté, mais nous assistons, ces derniers jours, à quelques mouvements de retour de populations de la tribu Krahn, originaire du comté du Grand Guédé dont est ressortissant M. Johnson, opposant du Président élu. Ce mouvement nous inquiète et nous souhaitons vivement la paix et la réconciliation qui permettront à tous les Libériens de retrouver, dans la sécurité, leur terroir.

La Côte d'Ivoire est préoccupée par la question de la sécurité dans les camps de réfugiés et la protection du personnel humanitaire. Elle sait gré à Mme Ogata de l'avoir portée au niveau du Conseil de sécurité, qui doit assurer la protection du personnel humanitaire par le déploiement des forces de maintien de la paix ou de police. Le HCR devrait travailler en étroite collaboration non seulement avec le Conseil mais aussi avec le Haut commissariat aux droit de l'homme dans le cadre des crises.

M. AHMET S. ARDA (Turquie) a estimé que la complexité croissante de la situation des réfugiés exige le renforcement des capacités institutionnelles d'organismes tels que le HCR. Le lien entre les conflits armés, internes et externes, et les déplacements forcés de populations s'est fait plus évident depuis la fin de la guerre froide. La cause des réfugiés a beaucoup changé, et rend difficile le mandat d'assistance du HCR qui, en tant que coordinateur et garant des droits des populations réfugiées, doit faire preuve de souplesse dans la recherche de solutions nouvelles. La Turquie soutient les options de rapatriement volontaire et de réinsertion dans les pays tiers, principalement dans les cas où l'afflux de réfugiés, formant obstacle aux programmes de développement nationaux, est préjudiciable à l'environnement et perturbe la paix.

La Turquie a déclaré avoir fait l'expérience d'une solidarité internationale inadéquate lorsqu'elle a dû accueillir un demi million de personnes sur son territoire en 1991. La délégation est d'avis qu'un déplacement massif de population est souvent le résultat d'un conflit, mais aussi la cause de nouveaux conflits. Au moment de la négociation des processus de paix, il importe, a déclaré le représentant, de créer des conditions de coexistence pacifique entre les communautés. Ces conditions doivent être également promues après la paix.

Le Gouvernement turc, a noté le représentant, soutient les initiatives de coopération et de consultation régionales telles que le processus de suivi de la Conférence sur les réfugiés dans la Communauté d'Etats indépendants (CEI) et le Processus de Conseil régional de l'Asie centrale et du Moyen-Orient, qui regroupe 14 pays, dont la Turquie. La Turquie a, dans ce cadre, exprimé sa crainte de voir les partenariats régionaux dégénérer en l'établissement de blocs ayant chacun sa politique envers les réfugiés, ce qui risquerait de mener à un partage inégal du fardeau.

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Mme JENNIFER LUTFALLAH (Canada) a souligné l'importance de la sécurité dans les camps de réfugiés, et fait part de son impatience de lire le rapport préparé par le HCR en collaboration avec le Département des opérations de maintien de la paix, qui doit énoncer les moyens d'améliorer cette sécurité.

L'expérience a montré qu'une réponse intégrée aux situations de conflit doit effectivement prendre en considération la dimension politique, en plus de répondre aux besoins humanitaires immédiats, a-t-elle poursuivi. L'action humanitaire ne peut pas remplacer l'action politique. Par ailleurs, la communauté internationale doit s'attarder davantage aux situations d'après conflits pour assurer un retour des réfugiés en toute sécurité, leur réadaptation ainsi qu'une paix durable. Le Canada partage le point de vue de Madame Ogata quand elle déclare que nous devons résoudre le déplacement forcé en misant davantage sur la coopération et la solidarité internationales.

La communauté internationale doit faire en sorte que les principes du droit d'asile soient respectés et que les mesures de sécurité soient en place pour soutenir les interventions humanitaires, a déclaré Mme Lutfallah. Le Canada reconnaît que la protection des réfugiés et le respect des droits humains sont de nature complémentaire. Il appuiera le HCR dans ses efforts d'intégrer ces deux aspects en collaboration avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme. Il appuie l'objectif du HCR de rendre universel d'ici l'an 2000 l'accès à la Convention de 1951 et au Protocole de 1967.

Comme chaque Etat a une capacité différente de résoudre le problème des réfugiés, selon la représentante, l'un des grands défis à relever est de faire la différence entre les immigrants clandestins et ceux qui ont vraiment besoin de protection. De plus en plus les migrants utilisent le droit d'asile comme un moyen de se faire admettre dans un autre pays. L'image du réfugié ayant besoin de protection ne doit pas être remplacée par celle d'un migrant qui réussit à se faire admettre. Le Canada croit que la coopération internationale est un outil important pour lutter contre cette pratique insidieuse et que le problème ne pourra être réglé unilatéralement. Les trafiquants de migrants ne font pas la différence entre les personnes qui craignent d'être persécutées, les chercheurs d'emploi et les criminels. Nous devons résoudre ces problèmes, si nous voulons protéger l'intégrité du système international d'asile dans son ensemble, a affirmé la représentante. Aucun pays, aucune région n'est à l'abri des répercussions des mouvements de réfugiés.

Chaque nation a été, à des époques différentes, un pays source, un pays d'accueil, un pays de protection temporaire, de réétablissement ou un pays qui a fourni des ressources pour venir en aide à des personnes en déplacement, a rappelé la représentante. Fermer la porte -- ou simplement dresser des barrières pour interdire l'entrée -- n'est pas la solution. Bien que nous reconnaissions que le contrôle frontalier soit nécessaire et légitime

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pour tout Etat souverain, nous devons nous assurer que les vrais réfugiés continuent de bénéficier de notre protection. L'équilibre à maintenir entre ces deux pôles est fragile, et nous nous efforçons tous de le maintenir.

M. SCHATZER, Organisation internationale pour les migrations (OIM), a estimé que le problème des réfugiés exige des démarches régionales. Lorsque les flux sont composites, la coordination et la collaboration entre les organisations concernées sont essentielles, comme en témoigne le suivi de la Conférence sur les réfugiés dans la Communauté d'Etats indépendants (CEI). Dans ce cadre, l'essentiel du travail de l'OIM est d'aider au développement de la capacité institutionnelle des gouvernements à trouver des solutions durables aux problèmes de déplacement des populations. Un tel processus à long terme est déjà en cours dans la plupart des pays de la CEI. Le travail réalisé au cours des deux dernières années commence d'ailleurs à porter ses fruits, a souligné le représentant. Les programmes nationaux de gestion des migrations sont bien installés dans huit pays, bien qu'il reste toujours un écart important entre la législation et la capacité de mise en oeuvre des dispositions prévues. Malgré cette évolution positive, il est clair que l'assistance technique internationale continuera d'être nécessaire au-delà de l'an 2000. Il est d'ailleurs temps de réfléchir à la forme qu'elle devrait prendre, a déclaré le représentant, en soulignant l'appui décevant des donateurs au suivi de la Conférence.

Nombre des problèmes migratoires ont des causes qui requièrent l'attention des organisations chargées des questions de migration mais ne relèvent ni de leur mandat ni de leurs capacités, a poursuivi le représentant. A cet égard, il s'est réjoui de l'implication croissante d'autres entités, et en particulier des organisations non gouvernementales, aux côtés du HCR, de l'Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE) et de l'OIM. Un autre processus de consultation, appuyé par l'OIM et le HCR, a lieu en Asie, a-t-il expliqué. Les consultations Asie-Pacifique fournissent, en effet, un cadre informel aux gouvernements pour discuter des questions d'immigration, de réfugiés et de personnes déplacées.

L'OIM et le HCR ont récemment tenu des consultations sur les questions du retour et de la sécurité qui ont permis aux deux organisations d'explorer les possibilités de coopération. Toutes deux mettent l'accent sur l'importance du retour dans la sécurité et dans la dignité et veillent à ce que ces retours n'exacerbent pas les crises que ces individus ont fui. A l'instar du HCR, l'OIM dispose de bureaux sur le terrain où est occupé environ 85% de son personnel. Le représentant a estimé que l'ampleur de la catastrophe causée par l'ouragan Mitch exigeait une réponse adéquate et concertée de la communauté internationale. L'OIM est disposée à faire son maximum pour aider à satisfaire les besoins immédiats des populations affectées et estime qu'il faut, dès à présent, se pencher sur les déplacements potentiels de population qui risquent d'exacerber les effets de la crise actuelle.

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