AG/SHC/368

LE TRAVAIL DES ENFANTS, LEUR EXPLOITATION SEXUELLE ET L'IMPACT DES CONFLITS ARMES SUR LES ENFANTS AU COEUR DES DEBATS DE LA COMMISSION

21 octobre 1998


Communiqué de Presse
AG/SHC/368


LE TRAVAIL DES ENFANTS, LEUR EXPLOITATION SEXUELLE ET L'IMPACT DES CONFLITS ARMES SUR LES ENFANTS AU COEUR DES DEBATS DE LA COMMISSION

19981021 Une meilleure protection des droits des enfants exige la promotion de l'accès universel à l'éducation et aux soins de santé

Le travail des enfants, et en particulier ses formes les plus intolérables, ainsi que l'exploitation sexuelle des enfants, ont été au coeur du débat de la Commission des questions sociales, humanitaires et culturelles (Troisième Commission) ce matin. Parmi les 250 millions d'enfants qui travaillent à temps plein ou temps partiel, 61% se trouvent en Asie, 32% en Afrique et 7% en Amérique latine, a indiqué le représentant de l'Organisation internationale du travail (OIT). Plusieurs délégations ont d'ailleurs souligné le lien entre la pauvreté, le sous-développement et l'analphabétisme d'une part et l'exploitation des enfants de l'autre. Pour promouvoir une protection efficace des enfants et leur jouissance de tous les droits consacrés dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, elles ont plaidé en faveur de l'accès universel à l'éducation et aux soins de santé. Le représentant de l'Iraq a, pour sa part, vivement dénoncé l'impact des sanctions économiques imposées à son pays sur la santé et le développement des enfants, affirmant qu'il s'agit d'une forme de génocide. Si l'on veut améliorer la situation des enfants iraquiens, il faut commencer par lever l'embargo imposé depuis 8 ans à l'Iraq, a-t-il dit.

La situation des enfants affectés par les conflits armés a également été jugée particulièrement préoccupante par les délégations qui ont dans leur ensemble exprimé leur appui au travail du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question, M. Olara Otunnu. Tout en attirant l'attention sur le recrutement d'enfants de 13 ans par le mouvement séparatiste des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE), le représentant du Sri Lanka a cependant mis le Représentant spécial en garde contre toute tentative d'intervenir dans le règlement des conflits.

Les représentants des pays suivants ont fait une déclaration au cours du débat : Uruguay; Ukraine; Chine; Pakistan; Fidji; Koweït; Egypte; Liban; Mexique; Brésil; Cuba; Sri Lanka; Argentine; Canada; Turkménistan; Trinité-et-Tobago; Iraq; Pérou; Kenya; et Ouganda. L'Observateur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le représentant de l'Organisation internationale du travail (OIT) sont également intervenus.

La Commission poursuivra ses travaux cet après-midi à partir de 15 heures.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L'ENFANT

Suite du débat général

Mme IMELDA SMOLCIC (Uruguay) a indiqué que son pays a entamé un processus approfondi de modernisation de sa législation nationale, et en particulier du Code de l'enfant, à la lumière de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Un accord a été signé avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) pour évaluer la situation en ce qui concerne le travail des enfants de 14 ans et moins. Si l'Uruguay a de bons indicateurs de base, les problèmes de l'abandon scolaire et des enfants des rues sont particulièrement préoccupants. Un programme pédagogique intensif a été lancé pour améliorer l'apprentissage scolaire dans les écoles fonctionnant à horaire complet pour tous les enfants à partir de 4 ans. Pour s'attaquer au problème des mauvais traitements infligés aux enfants, un système a été développé dans le cadre de l'Institut national de la famille et de la femme. On a mis en place une centrale téléphonique pour recevoir les appels des enfants maltraités ou de proches qui veulent dénoncer ces comportements. Le nombre croissant d'enfants affectés par le sida constitue également un problème préoccupant. C'est pourquoi, le Gouvernement a lancé une campagne nationale sur les orphelins du sida, intégrée dans des activités de prévention.

M. MYKOLA MELENEVS'KY (Ukraine) a estimé que la situation des enfants dans de nombreuses régions du monde est épouvantable. Nous assistons à des violations sans fin des droits fondamentaux de l'enfant. Bien que la situation varie de pays en pays, le problème le plus alarmant qui exige une réponse immédiate est le sort des enfants dans les conflits armés, l'exploitation sexuelle des enfants, la situation des enfants handicapés, les enfants des rues et le problème des enfants qui travaillent. Nous ne pouvons pas ignorer les efforts déployés par la communauté internationale pour améliorer la situation et pour élaborer les différents instruments juridiques internationaux.

Nous réitérons l'importance de l'appel lancé par la Conférence mondiale des droits de l'homme sur la nécessité d'obtenir une ratification universelle de la Convention relative aux droits de l'enfant et sa mise en oeuvre par tous les Etats parties. Il est important de créer un mécanisme universel qui condamnerait et pénaliserait les auteurs de tels crimes contre les enfants, en particulier dans les conflits armés. Nous soutenons les travaux d'élaboration d'un protocole facultatif se rapportant à la Convention des droits de l'enfant sur la situation des enfants dans les conflits armés.

L'exploitation sexuelle des enfants est une autre source de préoccupation et constitue une violation des droits de l'enfant. La prévention et l'élimination de la vente des enfants, de la prostitution et de la pornographie impliquant les enfants exigent un examen approfondi et des mesures efficaces de la part des gouvernements, des organisations internationales et de la société civile. Le système judiciaire, les médias et les institutions scolaires devraient être plus actifs dans la protection de l'enfant.

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Le représentant a expliqué que son gouvernement attache une importance particulière au renforcement de son régime juridique dans le domaine de la protection des droits de l'enfant. Malheureusement, la situation économique actuelle en Ukraine a touché les adultes mais également les enfants. Ceux-ci subissent en outre les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl. Nous souhaitons que la visite récente de Carol Bellamy, Directrice de l'UNICEF, donnera un élan à la promotion de la coopération entre le Fonds et le Gouvernement ukrainien.

M. DU ZHENQUAN (Chine) a estimé que des efforts à long terme devraient être déployés pour que les principes de la Convention relative aux droits de l'enfant soient intégrés aux législations nationales et fassent partie de la vie quotidienne. Garantir une meilleure protection de l'enfant et la promotion de ses droits constitue un des principaux défis de notre temps et du futur. Aujourd'hui, les questions de la traite des enfants, de l'adoption illégale, du travail des enfants, de l'exploitation sexuelle et de l'abus des enfants, de la protection des enfants dans les conflits armés et de l'installation des enfants réfugiés sont des sources de préoccupation. Bien que la communauté internationale ait condamné à plusieurs reprises l'exploitation sexuelle des enfants, la situation n'a guère changé. La pornographie enfantine continue de progresser sur Internet. En qualité d'Etat partie à la Convention, le Gouvernement chinois soutient le travail effectué par les groupes de rédaction des protocoles facultatifs pertinents.

Nous estimons qu'il faut placer sur un pied d'égalité la lutte contre ce phénomène maléfique qu'est le trafic des enfants ainsi que leur exploitation sexuelle et les efforts en vue de réduire l'offre et la demande. Toutes les mesures adéquates doivent également être prises pour garantir la réhabilitation psychologique et physique des enfants victimes de tels traitements et pour promouvoir leur réhabilitation dans la société. Abordant la situation des enfants dans les conflits armés, le représentant a indiqué son soutien à la Déclaration présidentielle faite en juin au Conseil de sécurité. Nous demandons instamment à toutes les parties en conflit de respecter strictement le droit humanitaire international. Le représentant a également évoqué les souffrances imposées aux enfants à la suite de l'imposition de sanctions économiques. Il est important d'agir avec prudence lors de l'adoption de telles mesures.

M. MUNAWAR SAEED BHATTI (Pakistan) a rappelé que le problème du travail des enfants est plus aigu dans les pays en développement en raison essentiellement de la pauvreté, du sous-développement et de l'analphabétisme. Environ 1,3 milliard de personnes vit sous le seuil de pauvreté. Selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), les enfants représentent environ la moitié des pauvres du monde. Ce nombre a augmenté de 4% par an au cours des dernières années. En outre, la crise financière en Asie du Sud-Est menace de renvoyer 50 millions de personnes de plus dans la pauvreté dans un seul pays. Le fardeau de la dette est l'une des autres raisons expliquant la persistance de la pauvreté. Le déclin de l'aide publique au développement (APD) au cours

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des dernières années a affecté négativement la cause des enfants du monde. Le représentant a déploré l'utilisation de l'Internet pour la pornographie et la prostitution enfantine. La communauté internationale doit adopter des mesures efficaces pour mettre fin et prévenir l'utilisation de l'Internet et d'autres moyens technologiques modernes pour des activités illégales et contraires à l'éthique.

La situation des enfants affectés par les conflits armés préoccupe particulièrement le Pakistan. Dans certains cas comme au Kosovo, en Palestine ou au Cachemire, les gouvernements ont délibérément brutalisé une population tout entière en vue de la soumettre, a souligné le représentant. Les Nations Unies doivent renforcer leurs capacités en vue de trouver une solution aux causes profondes des conflits armés et mettre fin aux souffrances et à l'agonie de millions de femmes et d'enfants dans le monde, a insisté le représentant. Il a indiqué que son pays avait retiré l'an dernier ses réserves à la Convention relative aux droits de l'enfant et avait pris un certain nombre de mesures pour éliminer le travail des enfants. Ainsi, le travail des enfants dans les secteurs de la fabrication des tapis et des ballons de football a pu être supprimé. La loi sur l'abolition du système de servage est appliquée. Le Pakistan pense que la promotion de tous les segments de la société par l'accès universel à l'éducation, aux soins de santé de base et aux services sociaux est essentielle pour éliminer l'exploitation du travail des enfants dans le pays. C'est pourquoi, le Gouvernement a dégagé des sommes importantes et élaboré un Programme d'action pour la période 1997-2002 en vue de promouvoir l'éducation primaire et secondaire.

M. POSECI W. BUNE (Fidji) a déclaré que son pays a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant en août 1993, et a présenté son rapport initial, qui a été soumis à l'examen du Comité des droits de l'enfant, en mai de cette année. En vue d'assurer la protection effective des enfants contre l'exploitation et la discrimination, le Gouvernement a créé un Comité de coordination pour les enfants, dont les représentants sont des ministres et des membres de la société civile et d'organisations non gouvernementales.

Fidji n'est pas à l'abri de la pédophilie ayant une origine externe. En 1997, un ressortissant étranger a été arrêté et sanctionné pour ses activités illicites, mais ses complices ont pris la fuite. Cet incident est à l'origine d'un amendement législatif. La Loi sur la protection de la jeunesse de Fidji, promulguée en 1997, stipule que tout individu se livrant, directement ou indirectement, à des activités liées à la pornographie infantile est coupable d'un délit auquel s'attachent des sanctions allant d'une amende de $25.000 à un emprisonnement de 14 ans pour une première offense. Des amendes plus fortes ou l'emprisonnement à vie sont prévus en cas de récidive. La Loi prévoit aussi la saisie du matériel incriminé. Le Commissariat de police tient un registre des noms et adresses des contrevenants. Le Gouvernement a adopté une Loi en 1997 sur l'assistance mutuelle dans les affaires criminelles qui réglemente l'aide

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réciproque entre Etats dans ce domaine. Cet instrument permet à Fidji de demander ou de procurer de l'aide à d'autres pays pour ce qui concerne les enquêtes et poursuites criminelles. Les délits graves sont passables de la peine de mort. L'Etat a créé au sein des Départements de la sécurité sociale et de la police des mécanismes administratifs tels que l'Unité du bien-être des enfants et l'Unité des crimes sexuels.

Les enfants nés de mères citoyennes et de pères étrangers ont droit à la nationalité, suivant une disposition de la nouvelle Constitution de 1997. La nouvelle Constitution prévoit, par ailleurs, l'éducation obligatoire jusqu'à 13 ans. 98% des enfants sont inscrits dans les écoles primaires. Le Gouvernement veille à promouvoir l'instruction en milieu pauvre, urbain et rural.

Fidji est un Etat multiethnique, où coexistent des visions différentes sur l'opportunité des châtiments corporels ou sur l'âge minimum requis pour contracter un mariage. La position du Gouvernement est que le châtiment corporel contribue à inculquer aux enfants le sens de la discipline. Malgré les réserves du Comité des droits de l'enfant à ce sujet, le Gouvernement estime qu'il est culturellement inacceptable d'interdire à Fidji le châtiment corporel dans les maisons et les écoles. Le Ministère de l'éducation distribue des circulaires aux directeurs d'école et aux instituteurs leur stipulant qu'ils sont seuls à pouvoir administrer ce genre de châtiments.

M. ALKHURAINEJ (Koweït) a indiqué que la législation koweïtienne sur la famille garantit la protection de la famille et en particulier des enfants. Tous les moyens disponibles sont mis en oeuvre pour fournir des soins complets aux femmes et aux enfants et le Gouvernement s'efforce d'éliminer tous les obstacles à la promotion des femmes et donc des familles. De nombreuses crèches et centres pour les femmes et les enfants ont été créés. 85% des enfants de 1 à 5 ans sont vaccinés, ce qui a permis de faire baisser la mortalité infantile à moins de 10,7 pour mille. Conscient de l'importance de l'éducation, le Koweït a rendu celle-ci obligatoire pour tous les enfants aux niveaux primaire et secondaire. L'occupation iraquienne a provoqué des souffrances indicibles, physiques et psychologiques, chez les enfants. Beaucoup ont été tués ou sont morts en raison de l'absence de soins médicaux, a affirmé le représentant.

M. ELATWY (Egypte) a déclaré que l'Egypte, afin de promouvoir et protéger les droits de l'enfant, a créé le Conseil national pour la mère et l'enfant, qui veille à ce que des soins et de la nourriture soient distribués aux enfants malades, handicapés et orphelins. La Loi 12-86, récemment promulguée, stipule le devoir de l'Etat de protéger les mères et les enfants, et de procurer à ces derniers de bonnes conditions de vie, ainsi que l'accès à l'éducation. Le gouvernement s'attache à éviter l'exploitation économique des enfants, et, dans ce cadre, veille, avec l'aide des syndicats, des patrons et des ONG, à ce que les dispositions concernant l'âge minimal de travail des enfants et le quota de leurs heures de travail soient respectées. Le pays ne souhaite cependant pas réduire

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ses exportations, aussi a-t-il mis en oeuvre des Programmes de formation destinés à la force de travail réelle que représentent les enfants. Le représentant a indiqué qu'en Egypte, le travail de l'enfant provient souvent d'un choix délibéré de l'enfant lui-même, désireux d'aider ses parents et de gagner de l'argent. Empêcher l'enfant de travailler pourrait l'engager à se lancer dans des activités de délinquance. L'Egypte souhaite préserver un équilibre entre le respect des droits de l'enfant et le développement des capacités de celui-ci.

Le pays encourage l'adoption du texte de Protocole facultatif sur les conflits armés. En Egypte, un âge minimum est fixé pour le service militaire obligatoire, et toute tentative de mobiliser des enfants dans les conflits armés est un délit sanctionné par la loi.

M. HASSAN KASSEM NAJEM (Liban) a indiqué que le Gouvernement libanais a pris des mesures spécifiques en vue d'appliquer la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et a élaboré un large programme national en faveur de ceux-ci. Les domaines de l'éducation et de la santé des enfants constituent des priorités du Gouvernement libanais. Le représentant a indiqué que les programmes de télévision violents et encourageant la déviance étaient censurés dans son pays et que des sanctions sévères étaient appliquées contre ceux qui commettent de telles infractions. Une étude a été réalisée concernant l'application de la Convention au niveau national et la compatibilité de la législation nationale avec cet instrument.

M. Najem a attiré l'attention sur les pratiques israéliennes au Sud-Liban. Les enfants qui vivent dans cette région connaissent la terreur de l'occupation. Ils sont bombardés tous les jours ce qui les oblige à quitter leur village, leur école et les empêche de travailler. Israël viole les principes les plus simples de la vie, a affirmé le représentant, qui a appelé la communauté internationale à faire pression sur Israël pour qu'il cesse ces pratiques et applique la résolution 425 des Nations Unies qui demande le retrait total d'Israël du territoire occupé du Liban.

Mme MARIA ANTONIETA MONROY (Mexique) a fait part des efforts de son pays pour améliorer les conditions de vie des enfants. Cela passe notamment par l'amélioration du système éducatif et des services de santé. Le Mexique tente également d'harmoniser sa législation fédérale et nationale avec les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. Au mois de juin 1998, le Système national pour le développement de la famille a mis en place la Commission nationale interinstitutions pour prévenir, contrôler et éradiquer le commerce d'enfants, la prostitution infantile et l'utilisation des enfants à des fins pornographiques. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), ainsi que des organisations nationales et non gouvernementales, collaborent à ce programme. Le Système national pour le développement de la famille souhaite également promouvoir la création d'agences spécialisées dans les problèmes des mineurs et donner la capacité aux institutions publiques de mieux aider les mineurs victimes d'exploitation sexuelle.

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La représentante a en outre mentionné les efforts de son pays pour modifier la législation de façon à mieux protéger les enfants et augmenter la sévérité des peines envers les personnes coupables de prostitution de mineurs et de pornographie impliquant des enfants. La représentante a fait cependant remarquer qu'en dépit des efforts de la communauté internationale, la crise financière mondiale et les catastrophes naturelles freinent le développement des programmes d'aide à l'enfance, en particulier dans les pays en voie de développement.

M. MARCELA MARIA NICODEMOS (Brésil) a noté qu'en matière de protection des droits de l'enfant, de nombreux obstacles restent à franchir pour traduire les engagements pris en réalités tangibles. A cet égard, elle a rappelé les termes de la Déclaration et du Programme d'action de Vienne qui encouragent la coopération et la solidarité internationales et qui considère que les droits de l'enfant devraient constituer une priorité dans le programme pour les droits de l'homme des Nations Unies.

La représentante a évoqué la décentralisation des politiques menées dans son pays en matière d'éducation et de santé, afin d'accroître la participation publique dans l'allocation des fonds publics. En ce qui concerne les enfants dans les situations de conflits armés, elle a souligné la nécessité d'un Protocole facultatif qui viserait à augmenter le niveau minimum de protection prévu dans l'article 38 de la Convention des droits de l'enfant. Le Brésil coparraine également un projet de protocole optionnel sur la vente d'enfants, la prostitution et la pornographie impliquant des enfants. Un réseau national pour combattre l'exploitation sexuelle des enfants a été créé en 1996 par les organisations non gouvernementales (ONG) brésiliennes. La représentante a enfin relaté les mesures prises par son gouvernement pour lutter contre le travail des enfants : renforcement des mécanismes de surveillance avec la coopération des syndicats, assistance accrue aux familles pour lesquelles le travail des enfants est une question de survie.

Mme MERCEDES DE ARMAS (Cuba) a indiqué que son pays a mis en oeuvre depuis de nombreuses années un Programme national d'action qui fonctionne comme un instrument de politique sociale en appui aux programmes développés dans le pays en faveur du développement intégral des enfants. Elle a indiqué qu'un grand nombre d'objectifs fixés lors du Sommet mondial pour les enfants de 1990 était une réalité à Cuba depuis longtemps. Même dans les conditions les plus difficiles, le Gouvernement cubain a toujours garanti l'accès universel à l'éducation et aux soins de santé gratuits pour toute la population, et en particulier pour les enfants. Cela a permis entre autres de faire baisser la mortalité infantile à 7,2 pour mille, d'éliminer la diphtérie, la polio, le tétanos infantile, la méningite et la tuberculose, et d'assurer une scolarisation à 100% pour l'éducation primaire. Ces réalisations montrent que la volonté politique joue un rôle essentiel dans la mobilisation des ressources disponibles. Les efforts au niveau national doivent toutefois s'accompagner d'une nouvelle philosophie de solidarité internationale qui permette de générer des ressources

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nouvelles pour aider les pays en développement à mettre en oeuvre les objectifs du Sommet. En effet, dans un grand nombre de pays, les gouvernements n'ont même pas les moyens de fournir les cahiers et les crayons nécessaires pour le fonctionnement de l'école élémentaire.

Cuba appelle les rares Etats qui ne l'ont pas encore fait à adhérer à la Convention relative aux droits de l'enfant afin de réaliser l'objectif de ratification universelle. Toutefois, cela ne suffit pas. Il est essentiel de prendre des mesures plus sévères et prospectives tant au niveau national qu'international pour réaliser les objectifs de cet instrument, a indiqué Mme de Armas.

M. JOHN DE SARAM (Sri Lanka) a commenté le rapport du Représentant spécial du Secrétaire général, en apportant le soutien de son gouvernement à la plus grande partie de ce texte. Il a cependant émis des réserves au sujet de la section 4 du Chapitre V, dans laquelle le Représentant spécial paraît mettre sur un même pied les représentants des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE), et le gouvernement du Sri Lanka, ce qui est une perception totalement inacceptable pour le gouvernement sri-lankais. En dépit du prétendu engagement donné au Représentant spécial de ne pas recruter des enfants de moins de 17 ans et de ne pas envoyer au combat des enfants de moins de 18 ans, les LTTE continuent à utiliser des enfants de 13 ans au front, ainsi que le prouve l'expérience récemment découverte de jeunes garçons et filles formés et envoyés au combat, qui se sont rendus aux forces du Gouvernement sri-lankais plutôt que de se suicider comme on leur avait inculqué de faire. Ainsi, le Gouvernement de Sri Lanka considère qu'il est temps que le Représentant spécial fasse une déclaration publique sur l'abus d'enfants pratiqué par les LTTE.

En ce qui concerne le Chapitre X, le représentant a exprimé son désaccord sur le paragraphe 139, considérant que la protection de l'enfance ne concerne pas le domaine de la politique étrangère mais celui au contraire de la politique intérieure de chaque gouvernement. Il a enfin exprimé le souhait que les intentions du Représentant spécial concernant la prévention des conflits armés internes, contenues dans les recommandations finales, ne constituent qu'une généralisation abstraite et ne seront pas suivies d'une tentative d'opérer dans le domaine de la résolution des conflits.

M. RICARDO LUIS BOCALANDRO (Argentine) a fait savoir que son Gouvernement a pris diverses dispositions liées à l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant. En août 1997, le Procureur général a décidé que les juges devraient accepter, dans tous les cas, que les dispositions de la Convention sont directement applicables et priment sur la législation nationale. La Loi 24.540 sur l'identité, promulguée en 1995, définit les critères d'identité des nouveaux-nés. A cette Loi s'ajoutent les procédures établies par la Commission des représentants des secteurs public et privé, et le projet de loi sur l'identité et la filiation visant à préserver l'intégrité du binome mère-enfant et à déterminer la nationalité.

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Les enquêtes judiciaires se multiplient, en Argentine, sur les disparitions d'enfants qui ont eu lieu de 1976 à 1983, sous le gouvernement militaire. Le Gouvernement examine un projet de loi intitulé "Défenseur des droits de l'enfant". En matière d'adoption, la Loi 24.779 modifie le Code civil en mettant l'accent sur la protection des intérêts du mineur. La Convention interaméricaine sur le trafic international des mineurs est en cours d'examen, pour approbation législative. Les Etats, a noté le représentant, doivent veiller, dans le cadre des actions contre la traite transnationale d'enfants, à ce que les différences entre les systèmes juridiques nationaux n'affectent pas les intérêts des mineurs. Les dispositions de la Convention interaméricaine traitent, entre autre, de ce problème.

Depuis 1884, l'Argentine dispose d'un système d'enseignement gratuit, laïque et obligatoire pour les enfants de 6 à 18 ans. La Loi 24.195 de 1993 a réduit la période de scolarité obligatoire à 10 ans, et en a confirmé la prise en charge par l'Etat.

Mme DREWAN LYNNE MCVEY (Canada) a souligné l'importance d'un partenariat entre gouvernements et organisations non gouvernementales afin de trouver les moyens d'aider les enfants aux prises avec la guerre. C'est dans ce but que le Canada a été l'hôte de deux tables rondes, la première qui a réuni les représentants d'ONG internationales et qui a permis d'explorer la préoccupation commune devant le phénomène croissant du recours aux enfants soldats. La seconde table ronde tenue avec des membres d'ONG nationales a permis l'examen des priorités à adresser dans le cadre général des enfants touchés par la guerre. Le Canada a par ailleurs consacré des fonds à des projets communautaires visant la démobilisation des enfants soldats et leur réinsertion dans la société.

Sur la question du protocole facultatif relatif aux enfants en situation de conflit armé, le Canada continue d'appuyer la conclusion d'un texte solide et a entrepris de revoir sa législation en matière de défense afin d'être en mesure de ratifier le protocole dès qu'il aura été adopté. C'est dans le domaine des enfants soldats que le Canada se félicite de l'adoption du Statut de Rome de la Cour pénale internationale et a en l'occurrence appuyé l'inclusion dans le Statut d'une disposition visant à criminaliser le recrutement d'enfants soldats.

Le Canada souscrit à la recommandation du Représentant spécial M. Otunnu visant le renforcement des règles régissant le personnel de maintien de la paix et plus précisément sa recommandation voulant que les politiques, procédures et opérations des agences et des organismes de l'ONU tiennent systématiquement compte des normes humanitaires et relatives aux droits humains en vue de protéger les enfants touchés par la guerre.

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Dans le domaine du travail des enfants, le Canada a contribué au Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) et plus récemment cette année, au Programme de renseignements statistiques et de contrôle sur le travail des enfants (SIMPOC) de l'Organisation internationale du Travail (OIT) et soutient les efforts de l'OIT pour faire adopter, en juin 1999, une nouvelle convention visant l'élimination des formes les plus inacceptables du travail des enfants.

Le Canada appuie les recommandations du Rapporteur spécial sur la vente des enfants, la prostitution et la pornographie impliquant des enfants. C'est dans ce cadre que le Gouvernement canadien a été l'hôte du Sommet de Victoria (Colombie-Britannique) en mars dernier, Sommet qui a vu l'adoption d'une déclaration et d'un plan d'action.

Comme bien d'autres pays, le Canada est préoccupé par l'utilisation faite de l'Internet pour disséminer la pornographie impliquant des enfants et la prostitution enfantine. A notre avis, c'est là un abus auquel il faut mettre fin. L'objectif ne consiste pas à contrôler l'Internet en soi, mais plutôt à viser ceux qui en font un mauvais usage à des fins criminelles et autres activités illégales. Dans le cadre de l'OCDE, des Nations Unies et d'autres organisations, nous collaborons avec d'autres gouvernements pour éviter que l'Internet ne devienne un refuge sûr pour ceux qui cherchent à nuire aux enfants.

M. ENVER RAHMANOV (Turkménistan) a fait savoir que son pays, en collaboration avec l'UNICEF, a mis en place avec succès des mécanismes sociaux efficaces pour aider les enfants. Les efforts se sont en particulier concentrés sur les questions d'éducation, de santé, de mortalité maternelle et infantile, et sur le problème de la fourniture d'eau potable à la région de la Mer d'Aral. La catastrophe écologique que subit cette région continue de menacer la population. De nombreux enfants y naissent avec des handicaps, et les femmes, qui souffrent souvent d'anémie, risquent de mourir durant les accouchements. Le représentant lance un appel aux pays donateurs pour qu'ils continuent à soutenir l'UNICEF dans ses efforts pour aider les enfants dans la région de la mer d'Aral.

Le représentant a insisté sur l'importance d'adopter un protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant afin de fixer l'âge minimum du recrutement militaire et de la participation aux combats à 18 ans. Le Turkménistan a été parmi les premiers pays à signer et à ratifier la Convention sur l'interdiction de l'utilisation, du stockage, de la production et du transfert de mines antipersonnel et sur leur destruction. Le représentant souhaite que de telles armes, responsables de la mort et de la mutilation de millions d'enfants à travers le monde soient éliminées durant le siècle prochain.

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M. GEORGE WINSTON Mc KENZIE (Trinité-et-Tobago) a fait savoir que le taux de mortalité à la naissance dans son pays était tombé à 17% en 1996. Les programmes de vaccination mis en place ont permis de faire reculer les maladies infectieuses. Pas un seul cas de rougeole, de tétanos ou de poliomyélite n'a été enregistré à Trinité-et-Tobago depuis 1990. Le Gouvernement a fait des efforts pour améliorer la santé par le biais de services de santé dans les écoles et la formation des professeurs. Des études récentes ont montré un recul de la malnutrition chez les enfants à Trinité-et-Tobago. Cette amélioration est sans doute due aux programmes gouvernementaux permettant à des milliers d'enfants de bénéficier de trois repas chauds par jour. Des provisions sont également fournies chaque mois aux familles les plus nécessiteuses. Le représentant a fait remarquer que, dans toutes les régions de son pays, la proportion d'enfants allant à l'école primaire n'a cessé d'augmenter depuis 1990.

La législations consacre la scolarité obligatoire pour les enfants âgés de 5 à 12 ans. 96% des enfants vont à l'école primaire et les efforts se poursuivent pour éviter que certains, surtout les garçons, n'abandonnent l'école trop tôt. En collaboration avec l'UNICEF, Trinité-et-Tobago a demandé que des études soient réalisées concernant les enfants les plus défavorisés du pays. Le Gouvernement soutient financièrement ceux qui viennent en aide aux enfants des rues. Un foyer d'accueil pour ces enfants a été ouvert à Port of Spain. Le représentant a également mentionné la mise en place d'un registre centralisant les cas d'enfants ayant besoin d'aide.

M. MOHAMMED A.M. AL-HUMAIMIDI (Iraq) a déclaré que les enfants ont droit à une protection spéciale qui doit leur être assurée par une législation et des mesures spécifiques. Leur développement et leur croissance devraient avoir lieu dans des conditions normales, de liberté et de dignité. Il a noté qu'il y a de graves violations des droits des enfants dans de nombreux pays. Il s'agit d'ailleurs souvent de pays contre lesquels des sanctions économiques ont été imposées, a déclaré le représentant.

Le Gouvernement iraquien s'efforce, pour sa part, de protéger les enfants par le biais de différentes lois qui ont pour objectif d'assurer son développement pour qu'il devienne un élément créatif de la société. Mais, tous ces efforts ont été interrompus par l'embargo imposé à l'Iraq il y a 8 ans. Depuis, la santé des enfants s'est détériorée de façon dramatique. L'étude nutritionnelle réalisée en coopération avec l'UNICEF du 16 au 18 mars derniers sur 15.000 enfants montre que la situation n'a pas vraiment beaucoup changé depuis un an. 27% des enfants souffrent de malnutrition chronique, 9% de malnutrition sévère et 24% n'ont pas le nécessaire. Le rapport de l'UNICEF 1998 résume les souffrances des enfants iraquiens et indique une augmentation de 90.000 morts par an. La soi-disant formule "pétrole contre nourriture" que l'Iraq a dû accepter sous la pression internationale n'a pas mis fin à cette situation et n'a pas assuré une meilleure protection

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des enfants iraquiens contre la malnutrition. Les enfants iraquiens restent privés de leurs droits essentiels. Les souffrances de ces enfants montrent la futilité de ceux qui souhaitent en réalité la poursuite de l'embargo et la destruction du peuple iraquien. Il s'agit d'une forme de génocide qui devrait être sanctionnée, a souligné le représentant. La première chose à faire pour améliorer la situation des enfants iraquiens est de lever les sanctions économiques contre l'Iraq pour qu'ils puissent bénéficier de tous leurs droits consacrés par la Convention relative aux droits de l'enfant.

M. DAUL MATUTE (Pérou) a assuré que le Gouvernement de son pays veille à l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant. A la fin des années 90, le Pérou a connu une conjoncture difficile, avec la crise financière, le terrorisme, le trafic des drogues illicites et l'accroissement de la pauvreté. Le Gouvernement a organisé des réformes structurelles pour pacifier le pays, assainir l'économie et éliminer le terrorisme et le trafic de drogues. Le Pérou connaît à présent une croissance économique soutenue et un développement humain en plein essor. La politique sociale du pays est axée sur la lutte contre la pauvreté et le développement des femmes, des adolescents et des enfants. La Commission multisectorielle de haut niveau s'est engagée à élaborer un plan national d'action pour l'enfance 1992-1995, et a coordonné les actions des organismes compétents en la matière. Le Code des enfants et adolescents, promulgué en 1992, est la base juridique de référence pour ce qui concerne la protection et la promotion de leurs droits. En octobre 96 fut créé le Ministère de la promotion de la femme et du développement humain, qui a instauré un système national d'attention aux enfants et aux adolescents, et élaboré un Plan national d'action pour la période courant de 1996 à 2000.

Le Pérou a proposé que se tienne à Lima, en novembre de cette année, la IVème Réunion ministérielle sur l'enfance et la politique sociale. Les rencontres antérieures ont eu lieu au Mexique (92), en Colombie (94) et au Chili (96). L'objectif de ces rencontres est d'évaluer les progrès réalisés depuis le Sommet mondial en faveur de l'enfance de 1990. La réunion de Lima tendra à renforcer la mise en oeuvre des objectifs de la décennie, à coordonner les programmes prévus par le Plan régional d'action et encourager le dévelopement durable dans les pays de la région.

Mme R.A. ODERA (Kenya) a exprimé, en ce qui concerne la protection des enfants dans les conflits armés, son soutien aux recommandations du Représentant spécial du Secrétaire général, telles que celles relatives à la priorité qui doit être donnée aux droits de l'enfant dans les accords de paix, à l'encouragement aux gouvernements à lutter contre la prolifération des armes de petit calibre et à l'augmentation de l'âge minimum du recrutement militaire. Elle a également noté que la communauté internationale a montré sa détermination à criminaliser les actes spécifiques de violence contre les enfants à travers la caractérisation récente de l'utilisation d'enfants soldats comme crime de guerre par le Statut de la Cour pénale internationale.

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La représentante a évoqué le problème du tourisme sexuel visant les enfants auquel le Kenya est exposé en tant que destination touristique majeure. A cet égard, elle a appelé à une collaboration internationale plus étroite.

Abordant la question de la Convention des droits de l'enfant, elle a regretté que l'accession à la Convention ne soit pas toujours suivie d'actions spécifiques concrètes. Elle a rappelé les efforts faits par le Kenya pour promouvoir les droits de l'enfant, en particulier dans le domaine de l'éducation primaire, en s'inquiétant de ce que le poids de la dette extérieure menace les progrès obtenus dans ce secteur vital.

M. FRED BEYENDEZA (Ouganda) a annoncé que l'Ouganda a signé et ratifié la Convention des droits de l'enfant (1990), ainsi que la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant. Un Conseil national pour l'enfance a été créé, et un Plan national d'action pour l'enfance adopté, en 1992. Une Loi sur le statut des enfants a été promulguée en 1996. Suivant l'article 19 de la Convention des droits de l'enfant, le Gouvernement a aboli, l'année dernière, la pratique des châtiments corporels dans les établissements scolaires. Le Gouvernement s'attache à diffuser les termes de la Convention des droits de l'enfant, de façon à sensibiliser les avocats, les administrateurs, les ONG et le public en la matière. Les mesures en matière d'éducation comprennent l'accès gratuit à l'école primaire, à raison de quatre enfants par famille.

Le représentant a indiqué que, cette dernière décennie, alors qu'une partie de l'Ouganda progressait sur la voie de la croissance économique et de la stabilité, le nord du pays, surtout dans les districts de Gulu et Kitgum, a connu une situation de conflit imposée dans la région par l'Armée de résistance du Seigneur. L'enlèvement d'enfants compte parmi les tactiques utilisées par l'Armée de résistance du Seigneur pour terroriser la population et soutenir les rebelles. D'après les données récoltées par l'Association des parents des enfants disparus, les 8.000 ou 10.000 enfants enlevés ont entre 12 et 16 ans et ont été enrôlés de force dans le groupe. 20% d'entre eux sont âgés de 4 à 11 ans. Le Gouvernement déplore les mauvais traitements auxquels sont soumis les enfants pris dans ce conflit, tels que le rapt systématique, la torture, la détention, l'esclavage, la mutilation et le meurtre. Il reconnaît son devoir de leur assurer une protection et s'efforce d'appliquer les dispositions de la Convention des droits de l'enfant dans ce contexte.

M. JOVANOVIC, Observateur, Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a déclaré que le problème des enfants emportés dans la tourmente de la guerre ne cesse de préoccuper profondément le CICR dont le mandat est de protéger et d'assister les victimes des conflits armés. Partant, le CICR réaffirme son engagement à collaborer activement avec M. Otunnu dans sa mission, notamment par la mise à disposition de son expertise en matière

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de droit international humanitaire. Pour encourageante qu'elle soit, la mobilisation de l'opinion publique mondiale, des organisations internationales et non gouvernementales, et de la communauté des Etats doit encore être renforcée pour que cette conscience universelle se traduise en une ferme volonté d'action des Etats, a souligné le représentant.

L'action du CICR contribuant à la protection des enfants dans les situations de conflit armé s'articule autour de deux axes. Sur le plan opérationnel, le CICR concentre ses efforts sur l'identification et l'enregistrement des enfants non accompagnés; les visites aux enfants prisonniers, détenus, arrêtés ou internés pour lesquels il demande une libération ou un internement dans des quartiers séparés des adultes, sauf si ces enfants sont détenus avec leurs familles; l'assistance nutritionnelle et les soins médicaux. Le CICR travaille également à la promotion, la mise en oeuvre et le développement des normes internationales afin d'assurer à l'enfant le double bénéfice de protection générale des personnes civiles ainsi que de la protection à laquelle il a droit.

M. Jovanovic a jugé alarmante l'augmentation du nombre d'enfants recrutés ou engagés volontaires dans les groupes armés. Malgré une interdiction formelle, il arrive fréquemment que des enfants de moins de douze ans soient armés et amenés à commettre les pires atrocités. Le CICR salue l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale qui considère comme crime de guerre le fait de procéder à la conscription ou à l'enrôlement d'enfants de moins de quinze ans, ainsi que de les faire participer aux hostilités. Pour le CICR, cette notion de participation doit s'entendre à la fois dans le sens de participation directe au combat et dans celui de participation active à des activités en rapport avec le combat, telles que la reconnaissance, l'espionnage, le sabotage, tout comme l'utilisation d'enfants comme leurres, messagers ou aux postes de contrôles militaires. Certaines normes peuvent et doivent être améliorées comme, par exemple, l'âge du recrutement et de la participation aux hostilités. A cet égard, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge s'emploie à promouvoir le relèvement de l'âge minimal de recrutement et de participation aux hostilités à 18 ans. Le CICR soutient l'adoption d'un protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfants qui interdirait toute forme de recrutement et de participation aux hostilités des enfants de moins de 18 ans. Une telle interdiction doit s'appliquer à toutes les parties au conflit, y compris aux groupes, a souligné le représentant.

Le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a adopté un Plan d'action en faveur des enfants victimes de conflits armés. Ce Plan vise non seulement à promouvoir le principe de non-participation et de non-recrutement de personnes de moins de 18 ans, mais aussi à développer des actions concrètes pour les protéger et les assister. Il inclut des mesures pour favoriser leur réhabilitation à la suite de conflits et leur réinsertion

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dans la société civile. M. Jovanovic a insisté sur l'importance de la synergie des efforts de tous ceux qui oeuvrent de manière concrète en faveur des enfants dans les conflits armés.

M. FRANKLYN LISK, Représentant de l'Organisation internationale du travail (OIT), a rappelé qu'environ 250 millions d'enfants travaillent à temps plein ou temps partiel dans le monde. Environ 61% d'entre eux se trouvent en Asie, 32% en Afrique et 7% en Amérique latine. Bien qu'il s'agisse essentiellement d'un problème des pays en développement, le travail des enfants existe aussi dans les pays industrialisés et constitue un problème émergeant dans de nombreuses économies en transition d'Europe centrale et orientale. On constate toutefois une détermination croissante d'interdire et d'éliminer les formes les plus intolérables et les plus extrêmes de travail des enfants. A cet égard, la stratégie de l'OIT est double : élaborer et adopter des normes juridiques internationales pour aider les Etats à abolir progressivement le travail des enfants; et fournir une assistance technique aux Etats pour le développement d'actions pratiques. Cette assistance technique est fournie via le Programme internationale pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) qui est actuellement opérationnel dans plus de 50 pays et financé par les contributions de plus de 20 pays et organisations donateurs.

L'instrument le plus important de l'OIT en ce qui concerne le travail des enfants est la Convention sur l'âge minimum (No 138), adoptée en 1973 dont la ratification a augmenté de manière substantielle. En juin dernier, la Conférence internationale du travail a convenu d'un projet d'instrument international sur l'élimination des pires formes de travail des enfants, qui devrait être adopté lors de la prochaine Conférence internationale du travail en juin 1999. Ce projet de convention qui sera applicable à tous les enfants de moins de 18 ans appelle à l'interdiction et l'abolition immédiate des pires formes de travail des enfants, y compris toutes les formes d'esclavage et les pratiques similaires, comme la vente et le trafic d'enfant, le travail forcé et obligatoire, l'esclavage pour dette et le servage; l'utilisation, l'achat ou l'offre d'enfants à des fins de prostitution, pour la production de matériel et de spectacles pornographiques; l'utilisation, l'achat et l'offre d'enfants pour des activités illégales, en particulier pour la production et le trafic de stupéfiants; et toute autre forme de travail ou d'activités qui, par leur nature ou les circonstances, sont susceptibles de mettre en danger la santé, la sécurité ou moralité des enfants. Pour réaliser ces objectifs, il est essentiel d'adopter des mesures de prévention et d'aide directe à la réhabilitation et la réintégration sociale des enfants. Parmi ces mesures, le représentant a cité l'accès universel à l'éducation gratuite pour tous les enfants en âge scolaire. Pour s'attaquer aux dimensions internationales de ce fléau, il importe également que les Etats prennent des mesures en vue de renforcer la coopération et l'assistance internationale.

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Le représentant a expliqué que l'IPEC s'efforce pour sa part de renforcer les capacités nationales et de susciter un mouvement mondial de lutte contre le travail des enfants, en donnant la priorité à l'action en ce qui concerne le travail des enfants dans des conditions dangereuses, l'esclavage des enfants, la prostitution enfantine et le trafic d'enfants et en accordant une attention particulière aux enfants les plus vulnérables, c'est-à-dire les plus jeunes (en dessous de 12 ans) et les fillettes.

Documentation

Rapport sur la protection des enfants touchés par les conflits armés (A/53/482)

Ce rapport, transmis par une note du Secrétaire général, a été établi par M. Olara Otunnu, son Représentant spécial chargé de la question.

Le Représentant spécial est le porte-parole des enfants traumatisés par le chaos, la cruauté, et l'anarchie qui caractérisent les conflits armés contemporains. Il est un facilitateur et un expert au service des organismes et organes présents sur le terrain.

Le Représentant spécial rappelle que dès les premiers mots du préambule de la Charte des Nations Unies, notre premier devoir est de "préserver les générations futures du fléau de la guerre". Il affirme que nous avons lamentablement failli à cette tâche. Des millions d'enfants non seulement continuent d'être victimes de la guerre, mais encore en sont trop souvent les principales cibles dans les guerres de destructions réciproques d'aujourd'hui, les enfant sont particulièrement visés par des stratégies destinées à éliminer la prochaine génération d'adversaires potentiels. Dans le même but, les enfants, en particulier les filles, ont été massivement soumis à des sévices sexuels et à des violences sexistes. Avec le plus grand cynisme, des enfants ont été contraints de devenir des instruments de guerre, recrutés ou enlevés pour devenir des enfants soldats et obligés à traduire en actes violents la haine des adultes. On estime que jusqu'à 300 000 enfants âgés de moins de 18 ans combattent dans des conflits en cours, au sein des forces armées gouvernementales ou de groupes d'opposition armés. En tout, ce sont environ 2 millions d'enfants qui ont été tués dans des situations de conflit armé depuis 1987, tandis que sont trois fois plus nombreux ceux qui ont été grièvement blessés ou rendus invalides à jamais.

Les conflits d'aujourd'hui sont souvent caractérisés par la diabolisation de la communauté ennemie et l'orchestration d'odieuses campagnes d'incitation à la haine. Au coeur de ce phénomène grandissant de violence de masse et de désintégration sociale, se trouve une crise de valeurs. Cela a donné lieu à un "vide éthique", dans lequel les normes internationales sont bafouée avec impunité et où les systèmes de valeur locaux n'ont plus d'emprise.

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Le Représentant spécial s'est attaché à ce que, lors de l'élaboration du Statut de la Cour pénale internationale, il soit tenu compte de l'intérêt supérieur des enfants et de la nécessité de protéger au maximum ceux d'entre eux qui sont touchés par les conflits armés. Il se félicite que le Statut de la Cour réponde à la plupart des préoccupations qu'il avait exprimée dans le cadre de son mandat.

Depuis qu'il a été nommé, le Représentant spécial s'est personnellement rendu en République fédérale de Yougoslavie (Kosovo), au Libéria, en Sierra Leone, à Sri Lanka et au Soudan. Son bureau a également mené des mission d'évaluation en Afghanistan. Au cours de ces voyages, il s'est entretenu avec des responsables gouvernementaux ainsi qu'avec des représentants d'organismes des Nations Unies, d'organisations non gouvernementales locales et internationales et des représentants de la société civile, soulignant le caractère humanitaire de ses missions dont certains spécifiques figurent dans le rapport.

Le Représentant spécial estime que la promotion des droits et du bien-être des enfants dans les situations de conflit armé requiert la participation des organisations régionales et sous-régionales. Il s'emploie à établir des partenariats efficaces avec l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est, le Conseil de l'Europe, l'Union européenne, la Ligue des Etats arabes, l'OUA, l'Organisation des Etats américains (OEA), l'Organisation de la Conférence islamique et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Afin de mettre en oeuvre une vaste stratégie de plaidoyer et de concertation, le Représentant spécial s'emploie à établir des partenariats avec des entités appartenant ou non au système des Nations Unies. Compte tenu des efforts du Secrétaire général visant à rationaliser les activités de l'ONU tant au Siège que dans les bureaux extérieurs, le Représentant spécial a commencé à collaborer très étroitement avec tous les organismes compétents des Nations Unies afin de mettre au point une approche commune au sujet des droits, de la protection et du bien-être des enfants dans le contexte d'un conflit armé. Il a eu une série de consultations avec les responsables de l'UNICEF, du HCR, du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, du PNUD, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, du Département des opérations de maintien de la paix et du Département des affaires politiques, afin d'élaborer un cadre de coopération institutionnelle et opérationnelle en vue de la réalisation du programme d'action.

Un groupe consultatif informel chargé d'appuyer les travaux du Représentant spécial, composé de représentants de l'UNICEF, du HCR, du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, du PNUD, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, du Département des affaires politiques et du Département des opérations de maintien de la paix, a été créé pour formuler des recommandations sur les activités de programme et coordonner l'action de ces partenaires essentiels du Représentant spécial.

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Le Représentant spécial est également membre du mécanisme mis en place par le Département pour les affaires de désarmement en vue de coordonner les efforts que déploie l'Organisation des Nations Unies pour contrôler l'accumulation excessive et la prolifération des armes de petit calibre.

Le Représentant spécial a rencontré collectivement et individuellement les chefs de quelque 200 organisations non gouvernementales internationales et d'autres organisations de la société civile dans beaucoup de pays, actives principalement dans les secteurs de l'action humanitaire, des droits de l'homme et du développement. Il s'est efforcé de les faire participer activement à l'élaboration d'un programme de travail et de s'informer de leurs points de vue sur ses activités. Il s'est aussi efforcé tout particulièrement de faire passer son message dans les principaux groupes et réseaux qui guident l'opinion-chefs religieux, juristes, universitaires, hommes d'affaires, organisations féminines et associations professionnelles.

Plusieurs Etats membres, pour concrétiser leur appui, ont créé un groupe officieux, le Groupe des Amis du Représentant spécial. Le Représentant spécial se propose de constituer un groupe d'appui analogue composé des représentants des principales ONG.

Sur la base de l'expérience acquise au cours de l'année écoulée, le Représentant spécial formule une série de recommandations pour stimuler la réflexion et le débat et pour servir de base à un dialogue permanent avec les gouvernements, les partenaires du système des Nations Unies, les ONG et d'autres acteurs de la société civile.

Il estime que le discours écrit ne peut pas sauver les enfants en péril. Il importe que les gouvernements concernés fassent une place importante à la protection des enfants dans leur politique extérieure. Les gouvernements ainsi que d'autres acteurs internationaux clefs doivent être prêts à utiliser aux maximum leur puissance et leur influence collective pour refuser toute légitimité politique et toute reconnaissance diplomatique aux livraisons d'armes et à l'aide financière à ceux qui sont responsables d'atrocités et de sévices contre les enfants.

Le Représentant spécial demande instamment que le Conseil de sécurité continue à s'occuper activement de la question. Les droits à la protection et le bien-être des enfants touchés par les conflits devront être une préoccupation centrale et permanente.

Il faut s'employer de façon plus énergique à prévenir ou atténuer les souffrances des enfants qui se trouvent pris au milieu de conflits notamment par le biais d'initiatives concrètes sur le terrain dans plusieurs domaines: accès aux populations dans la détresse; recrutement et emploi des enfants; surveillance et restriction des fournitures d'armes, surtout d'armes légères,

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dans les zones de conflit; actions plus efficaces pour satisfaire les besoins des populations déplacées. Les initiatives du Représentant spécial en faveur des enfants pourront être beaucoup plus efficaces si les gouvernements en question les approuvent et les appuient concrètement.

Dans les situations postconflictuelles, l'assistance à la construction doit comprendre un volet essentiel sur les besoins des enfants et en particulier sur la crise des jeunes.

Il est essentiel de construire dans les pays des capacités locales de plaidoyer en faveur des enfants touchés par les conflits armés. Une telle capacité est nécessaire aussi bien au coeur du conflit que dans les situations postconflictuelles. Le Représentant spécial s'emploie à promouvoir deux types de projets à cet effet : constitution d'un groupe officieux de personnalités éminentes qui se feront les hérauts de la cause des enfants à l'intérieur d'un pays et création de stations ou programmes de radio locaux - la voix des enfants - qui se spécialiseront dans la question des intérêts et des besoins des enfants. Ces projets devront être inspirés d'initiatives locales mais auront besoin d'un appui énergique de partenaires internationaux.

Le Représentant spécial estime qu'il importe au plus haut point de renforcer les institutions et réseaux qui transmettent traditionnellement les valeurs et qui protègent les enfants et s'emploient à assurer leur bien-être, telles que les parents, les familles étendues, les anciens, les enseignants, les écoles et les institutions religieuses. Cet effort doit se reposer avant tout sur les communautés locales. Il faut ensuite intégrer dans ce processus communautaire les normes contemporaines mises au point à l'échelon international, qui pourront que le renforcer.

La communauté internationale doit exercer une action politique plus énergique et concertée pour s'attaquer directement aux causes réelles des conflits. C'est la seule façon de mettre fin aux souffrances de tant d'enfants et de femmes. L'action humanitaire, si importante qu'elle soit - car elle aide à sauver des vies - ne doit pas se substituer à l'action politique.

La cause profonde des conflits armés est à rechercher dans l'inégalité structurelle et dans les diverses pratiques d'exclusion et de marginalisation. Dans trop de sociétés contemporaines, des relations de centre à périphérie se sont développées, ce qui crée des déséquilibres systématiques dans la répartition des ressources nécessaires au développement et du pouvoir politique entre les différentes régions géographiques et les différents secteurs d'un même pays. Pour prévenir les conflits, qui détruisent la vie des enfants, les acteurs internationaux et nationaux doivent les uns comme les autres prendre des mesures politiques, économiques et sociales propres à remplacer dans les communautés le désespoir par l'espoir, l'exclusion par l'inclusion et la participation, l'aliénation par l'appartenance. Il est de même essentiel d'établir des pratiques authentiquement démocratiques et l'état de droit car c'est à long terme un moyen non violent et quotidien d'arbitrer entre les revendications rivales qui se font jour au sein des sociétés.

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