AG/809

L'ALBANIE DEMANDE L'INTERVENTION MILITAIRE DE L'OTAN AU KOSOVO ET LA MISE EN ACCUSATION DE MILOSEVIC POUR CRIMES DE GUERRE

2 octobre 1998


Communiqué de Presse
AG/809


L'ALBANIE DEMANDE L'INTERVENTION MILITAIRE DE L'OTAN AU KOSOVO ET LA MISE EN ACCUSATION DE MILOSEVIC POUR CRIMES DE GUERRE

19981002 Le différend territorial entre l'Equateur et le Pérou en voie de règlement

Le Ministre des affaires étrangères de l'Albanie a demandé ce matin, une intervention militaire immédiate de l'OTAN au Kosovo. M. Paskal Milo a formulé cette demande au cours de son intervention à l'Assemblée générale qui poursuivait son débat général dont la fin est prévue pour cet après-midi. Il a ajouté qu'il se proposait également de demander au Procureur général du Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie de lancer une enquête en vue de la mise en accusation de M. Milosevic pour crimes de guerre.

Auparavant, le Président de l'Equateur, dans son allocution, avait annoncé une rencontre avec le Président du Pérou, demain à New York, pour finaliser les pourparlers en vue du règlement de leur différend territorial qui dure depuis des décennies, et arrêter le tracé de la frontière.

Les conditions d'un règlement du conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée telles qu'elles ont été énoncées par le Ministre des affaires étrangères de l'Erythrée prévoient une démarcation technique fondée sur les traités coloniaux reconnus, la possibilité d'un recours à l'arbitrage en vertu du principe de l'intangibilité des frontières coloniales et un cessez-le-feu en attendant de trouver une solution juridique durable.

L'afflux d'un grand nombre d'armes légères et de petit calibre en Afrique continue de préoccuper gravement les dirigeants sur ce continent, c'est la raison pour laquelle l'initiative prise par le Mali d'un moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication d'armes légères a été favorablement accueillie par la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'OUA et par les pays non alignés, a déclaré M. Modibo Sidibe, le Ministre malien des affaires étrangères et des Maliens de l'extérieur.

Outre l'allocution du Président constitutionnel de la République de l'Equateur, ont participé au débat les Ministres des affaires étrangères des Comores, de l'Albanie, du Mali, de la Guinée équatoriale, de Madagascar et de l'Erythrée et le représentant de Trinité-et-Tobago.

L'Assemblée générale poursuivra son débat général cet après-midi à partir de 15 heures.

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Allocution de M. Jamil Mahuad Witt, Président constitutionnel de la République de l'Equateur.

M. JAMIL MUHUAD WITT, Président de l'Equateur : j'ai pris la présidence de mon pays il y a moins deux mois et j'ai rappelé les principes indiens qui nous amènent, entre autres, à vivre en harmonie avec nos voisins et à rester attachés au passé, car le passé au fond est la seule chose que nous puissions connaître. Le futur, en revanche, on ne le voit pas, on le pressent, on le ressent comme une charge sur nos épaules. Dans cette enceinte des Nations Unies, je voudrais parler de l'harmonie que nous entretenons avec nos voisins. A l'heure de la mondialisation, tous les Etats occupent une place dans notre réseau commun, une sorte d'immense toile d'araignée où toutes les vibrations sont ressenties par tous. L'Amérique latine a oeuvré pour réduire ses déficits et participer au commerce mondial. Nous avons estimé que l'intégration était la voie du progrès et nous avons ainsi mis en place des marchés régionaux. Toutefois, nous avons dû nous rendre à l'évidence que nos efforts pouvaient parfois être réduits à néant par la mondialisation. Nous pouvons comprendre la mécanique d'un système qui peut ne pas être équitable. C'est pourquoi nous demandons aux pays industrialisés de nous éviter tous les effets néfastes de la mondialisation. Dans une crise qui frappe déjà durement les pays industrialisés, les petits pays comme l'Equateur ne peuvent faire grand-chose si ce n'est en appeler à la réflexion.

En Amérique latine, nous nous efforçons de nous comporter comme une région. Les pays d'Amérique latine ne se sont pas contentés de demander des ressources financières, ils ont pris aussi des positions communes et ils espèrent qu'elles produiront des effets. Tant que l'on ne modifiera pas les taux d'intérêt, la tendance actuelle va s'accentuer, une baisse de 0,5% n'est pas suffisante.

Parallèlement à cette crise mondiale, nous devons résoudre notre crise territoriale avec le Pérou qui dure depuis des décennies. La paix est notre objectif et nous espérons entrer dans la phase finale des négociations. La paix est indispensable à nos économies car elle offre la possibilité d'un prêt de trois millions de dollars pour des réalisations à la frontière. C'est une somme très importante pour nos deux pays. Nous discutons depuis trois ans avec le Pérou et sommes parvenus à des accords de commerce. Il nous reste à conclure le tracé de la frontière pour lequel nous avons eu trois rencontres en moins de deux mois. J'ai eu hier soir un entretien avec M. Fujimori qui a proposé de venir demain à New York pour que nous parvenions à finaliser cet accord.

Nous devons entrer dans le 21ème siècle avec une vision claire et positive, et souscrivons sans réserve aux principes des Nations Unies. Le Pérou et l'Equateur ont tous deux signé la Convention d'Ottawa sur l'interdiction complète des mines antipersonnel. Nous sommes également favorables à la réduction des budgets militaires et les sommes ainsi épargnées devraient être consacrées au développement.

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Nous soutenons toutes les formes de désarmement classique et saluons la décision du MERCOSUR de faire de notre région une zone exempte d'armes nucléaires. Le Président péruvien et moi-même sommes d'accord sur tout cela malgré notre différend.

Ce cinquantième anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme s'illustre particulièrement dans cette recherche de la paix entre deux présidents démocratiquement élus et nous espérons que cette paix une fois conclue contribuera à améliorer les conditions de vies de nos populations.

Suite du débat général

M. SALIM HADJI HIMIDI, Ministre des affaires étrangères et de la coopération de la République fédérale islamique des Comores : notons que, depuis 1889 jusqu'à l'organisation du référendum d'accession à l'indépendance de mon pays, toutes les lois, et autres textes réglementaires appliqués par l'ancienne puissance coloniale, avaient reconnu et consacré l'unité et l'intégrité territoriales de l'archipel des Comores. C'est ainsi que, depuis l'admission de mon pays comme Membre à part entière des Nations Unies en 1975, à l'occasion de chacune des sessions ordinaires de l'Assemblée générale, des résolutions successives sont adoptées à l'effet de rappeler que la persistance de l'emprise juridique, administrative et militaire de l'ancienne puissance coloniale, sur l'île comorienne de Mayotte, constitue une violation flagrante de la Résolution 1514 (XV) des Nations Unies et des principes essentiels de sa Charte. Nous souhaitons que le Comité ad hoc des sept de l'OUA sur l'île comorienne de Mayotte, présidé par son Excellence Monsieur Omar Bongo, Président de la République du Gabon, réactive son travail et qu'il puisse rétablir le dialogue entre les Comores et la France sur cette question. Je voudrais lancer devant cette assemblée un appel d'assistance à mon pays pour qu'une solution à son démembrement soit trouvée et que mon pays puisse entrer dans le 21ème siècle en tant que pays réunifié.

Le Gouvernement comorien exhorte les Nations Unies, et ses agences spécialisées, à tout mettre en oeuvre pour une mise en application rapide et totale des recommandations soumises par le Secrétaire général dans son rapport au Conseil de sécurité sur la situation en Afrique, présenté en avril dernier. Il lance également un appel à la communauté internationale pour une coopération conjointe afin de lutter efficacement contre le terrorisme sous toutes ses formes. En ce qui concerne les Comores, mon Gouvernement coopère franchement avec les autorités américaines pour faire la lumière sur la participation suspecte d'un ressortissant de mon pays aux attentats terroristes perpétrés cet été en Afrique de l'Est.

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Comme les Comores sont un exemple de foyers de tensions qui mobilisent les ressources de la communauté internationale, il me plaît de rappeler que depuis un an et demi, l'Organisation de l'Unité africaine (OUA) est saisie, en collaboration avec la Ligue des Etats arabes, l'Organisation de la Conférence islamique (OCI) et le Mouvement des non-alignés (NAM), de la crise séparatiste sur l'île d'Anjouan et des liens à établir avec le précédent de l'amputation de notre Etat-archipel, par le maintien de l'île de Mayotte sous administration étrangère.

Compte tenu des revendications et des droits reconnus aux uns et aux autres par nos institutions et traditions d'une société pluri-insulaire, S.E. El-Hadj Mohamed Taki Abdoulkarim, Président de la République, s'est déclaré disposé, depuis le Sommet de l'OUA à Ouagadougou et encore récemment, lors du Sommet du NAM, à oeuvrer, dans un esprit d'ouverture et de réconciliation, pour une décentralisation et une autonomie plus large pour chacune des quatres îles composant notre Etat-archipel.

M. PASKAL MILO, Ministre des affaires étrangères de l'Albanie : il y a presque trois semaines, l'Albanie s'est trouvée au centre de l'attention de la communauté internationale en raison des événements violents qui visaient à renverser ses fragiles institutions démocratiques. Nous avons largement apprécié et nous remercions la communauté internationale pour le soutien qu'elle nous a apporté en ces temps difficiles. Nous accueillons favorablement l'établissement du Groupe des "Amis de l'Albanie" qui constitue un élément important de nos efforts de stabilisation et de consolidation des structures et institutions étatiques. Nous sommes conscients des difficultés et des conséquences négatives auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui. Nous sommes également conscients du fait que la population de l'Albanie est considérée comme la plus armée d'Europe. Nous devons faire face à cette réalité et, compte tenu également de la menace que cette situation pose à la région tout entière, nous avons sollicité l'aide des Nations Unies. Nous sommes prêts à travailler de concert avec les Nations Unies à la collecte des armes qui sont tombées entre les mains de la population civile au cours des émeutes de 1997.

Nous travaillons activement à l'établissement de la règle du droit dans notre pays. Nous avons à cet égard largement progressé dans l'élaboration d'une constitution qui reconnaît la nécessité de partager le pouvoir et de promouvoir les droits de l'homme. Je souhaite que d'ici à la fin de l'année, le peuple albanais soit en mesure de se prononcer sur ce projet de constitution. La reconstruction de notre économie exige l'aide de la communauté internationale. A cet effet, nous nous sommes efforcés de briser des décennies d'isolationnisme pour devenir membre de la communauté des Nations. Pour cela, l'engagement de l'Albanie en vue de son intégration euro- atlantique s'est traduit par la mise en place de normes nationales acceptables dans les domaines de la sécurité, des droits de l'homme et de l'économie de marché. Notre coopération avec l'Union européenne, la Communauté européenne et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe a été renforcée.

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Nous ne pouvons pas ignorer que dans les Balkans, subsistent des enclaves où les droits de l'homme, les droits nationaux, les libertés fondamentales telles que le droit à la vie sont violés tous les jours. Je veux parler du problème du Kosovo. Au cours des derniers mois, le gouvernement de Belgrade a ignoré les appels de la communauté internationale pour l'obtention d'une solution. Ce gouvernement a systématiquement refusé toute solution pacifique, encourageant ainsi l'option de la violence. La résolution 1199 adoptée par le Conseil de sécurité a attribué la responsabilité première de ce qui se passe au Kosovo aux autorités de Belgrade. Nous formons l'espoir que ce signal clair, le message vigoureux que le Secrétaire général des Nations Unies a transmis hier ainsi que les avertissements lancés par l'OTAN et les dirigeants du monde seront les derniers et imposeront à Belgrade une solution politique.

Belgrade s'est distingué par ses manoeuvres mensongères et ses fausses déclarations. Le soi-disant retrait des forces de sécurité spéciales serbes du Kosovo et la fin des combats contre les "terroristes" s'ajoutent à la liste des mensonges. Il s'agit d'un vieux scénario du type bosniaque que nous avons toute les raisons de rejeter. Ce qui se passe actuellement est l'histoire d'une tragédie prévisible. Milosevic a, en fait, ordonné la mise en oeuvre d'une politique de nettoyage éthnique contre les Albanais sous prétexte de lutter contre les soi-disant terroristes albanais. Par voie de propagande , le Gouvernement serbe a tenté de justifier ses attaques discriminatoires, le massacre et les atrocités commises par l'armée yougoslave qui ont été relatés dans les médias récemment. Des nouveaux-nés, des femmes enceintes et des personnes âgées ont été massacrés de façon bestiale. Le Gouvernement albanais condamne fermement cette politique et déclare ouvertement que Milosevic devrait être tenu responsable du crime de génocide. Nous demandons instamment la mise en place de mécanismes de contrôle et d'assistance de la part de la communauté internationale au Kosovo et d'une intervention militaire immédiate de l'OTAN au Kosovo. Nous demandons également au Procureur général du Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie de lancer une enquête en vue de la mise en accusation de Milosevic pour crime de guerre.

Le conflit au Kosovo menace la stabilité des pays voisins. Nous sommes en faveur d'un arrêt immédiat du conflit et de la mise en oeuvre de négociations entre Belgrade et Pristina sous les auspices de la communauté internationale. Ces négociations devraient viser à définir le statut futur du Kosovo. Toute solution à cette crise doit prendre en compte la volonté des Albanais à l'autodétermination et le respect des conventions internationales qui rejettent les modifications violentes des frontières. Des milliers d'Albanais du Kosovo - femmes, enfants, personnes âgées - ont trouvé refuge en Albanie. Maintenant, l'hiver approche et par conséquent nous demandons aux organisations humanitaires de poursuivre leur assistance jusqu'à ce que la crise humanitaire touche à sa fin et que les Albanais retournent dans leurs foyers.

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GEORGE WINSTON MC KENZIE (Trinité-et-Tobago) : pendant trop longtemps, le désintérêt flagrant pour le droit international a permis que des crimes haineux et choquants soient commis sans qu'ils soient jamais punis. Le Gouvernement de Trinité-et-Tobago est fier du rôle joué par M. Arthur N.R. Robinson, Président de la République de Trinité-et-Tobago, qui a attiré l'attention sur la nécessité de créer une cour pénale internationale permanente. A la conférence diplomatique, Trinité-et-Tobago, avec le soutien de la Communauté des Caraïbes, a réussi à s'assurer que les crimes constitués par le trafic illicite des drogues et des stupéfiants entrent dans la juridiction de la cour. Le trafic de drogue, le blanchiment de l'argent et le trafic d'armes constituent de graves menaces pour la société, l'économie et la stabilité politique des Caraïbes. C'est pourquoi nous nous félicitons des recommandations adoptées par la 20ème session spéciale de l'Assemblée générale sur le problème mondial de la drogue en juin 1998, et réaffirmons notre volonté de coopérer aux niveaux international, national et régional pour que les objectifs fixés par cette session spéciale soient atteints. Trinité-et- Tobago continuera de faire des efforts au niveau régional pour établir un type de coopération permettant de combattre ce fléau qu'est le trafic de drogues. Le succès d'une telle action suppose que le plan d'action de la Barbade de 1996, qui facilite la coopération en matière de contrôle du trafic de drogues soit appliqué. De plus, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a créé, avec l'assistance du Canada, du Royaume Uni et des Etats-Unis, un Programme de protection des témoins. L'éradication du trafic de drogues, du blanchiment de l'argent et du trafic d'armes est une tâche qui concerne l'ensemble des Etats Membres. Elle est la condition sine qua non du développement, et permet de garantir la paix, la sécurité et la justice internationales.

En 1992, au Sommet de la terre tenu à Rio, la communauté internationale avait, pour la première fois, établi un lien entre les questions environnementales et économiques. Le Programme d'action de la Barbade adopté deux ans plus tard et qui traitait des problèmes spécifiques posés aux petits Etats insulaires en développement, constitue un complément au plan sur le développement durable adopté à Rio. Le programme d'action (SIDS) qui doit faire l'objet d'un nouvel examen lors d'une session spéciale de l'Assemblée générale l'année prochaine, est par conséquent d'une importance cruciale pour les petits Etats insulaires. Nous sommes d'avis que les résultats de ce nouvel examen seront plus optimistes que les précédents.

La mondialisation et la libéralisation économique ont accentué les difficultés auxquelles sont confrontés les pays en développement. C'est pourquoi je souhaiterais renouveler l'appel lancé par le Ministre des affaires étrangères de Trinité-et-Tobago, M. Ralph Maraj, en faveur de la convocation d'une conférence des Nations-Unies sur l'économie mondiale. Dans cet environnement économique instable, la vulnérabilité des petits Etats insulaires s'est accentuée. De plus, tout progrès sur la voie du développement économique peut être anéanti d'un seul coup par des catastrophes naturelles.

- 7 - AG/809 2 octobre 1998

Les dégâts causés par le récent ouragan Georges en sont un exemple flagrant. Trinité-et-Tobago partage le chagrin de ses voisins pour les pertes de vies et les dommages matériels provoqués par l'ouragan et continue de faire tous les efforts possibles pour porter assistance aux îles affectées. Mais les besoins des petits Etats insulaires ne pourront être assurés que par un soutien sans réserve et une coopération de la communauté internationale. Il faut que les programmes pour le développement durable des Nations Unies soient orientés plus spécifiquement vers la création d'emploi. On ne saurait parler de développement sans accorder une attention particulière aux questions du développement social, de l'éradication de la pauvreté et du soutien au développement économique. La communauté internationale doit plus que jamais conjuguer ses efforts pour rechercher les moyens d'assurer le bien être économique et social des peuples. Trinité-et-Tobago accorde une importance particulière à la convocation en l'an 2000 d'une session spéciale de l'Assemblée générale ayant pour objet l'examen des résultats du Sommet pour le développement social de 1995 et sur les actions futures.

M. MODIBO SIDIBE, Ministre des affaires étrangères et des Maliens de l'extérieur du Mali : il apparaît aujourd'hui, que l'interdépendance accrue et la mondialisation de l'économie contribuent fortement à la montée de nouvelles tensions et créent des déséquilibres profonds pour les pays en développement. Partout, au Nord comme au Sud, les travailleurs vivent sous la menace constante des règles du marché de jour en jour opaques et impitoyables, et les crises financières risquent fort de saper les efforts de réformes économiques des pays en développement. Le Mali est d'avis que pour réussir un développement social réel et une réduction de la pauvreté, une croissance économique forte est nécessaire, de même que les pays en développement ont besoin d'un accès aux marchés pour mieux participer à l'économie mondiale de manière durable. Le Mali encourage une participation plus active des pays développés dans l'élaboration de nouvelles normes internationales, ainsi qu'une plus grande transparence de ces normes, notamment l'abolition de barrières non tarifaires appliquées aux pays africains et aux pays les moins avancés, l'adoption de l'allégement du fardeau de la dette, qu'il s'agisse de convertir en dons les dettes publiques des pays les plus pauvres ou d'assouplir les conditions d'accès à l'initiative en faveur des pays pauvres lourdement endettés. Toutefois, l'enjeu véritable, c'est une mondialisation centrée sur le développement humain durable. Le respect des droits de l'homme et des peuples fait partie intégrante de la prospérité économique et de l'équité sociale, comme de la promotion et de la prévention de la paix et de la sécurité. Nous pouvons arriver à un tel respect et résorber ces déséquilibres si, dans un dialogue politique renouvelé parce que franc et responsable, nous abordons les défis avec une vision globale et solidaire, avec la conviction d'un véritable partenariat, d'une responsabilité commune dans la construction d'un monde meilleur. De nombreux pays, notamment en Afrique, qui grâce aux réformes courageuses entreprises, ont renoué avec la croissance économique, dépendent néanmoins de l'aide publique au développement, et, par conséquent, la communauté internationale doit redresser la tendance à la baisse de cette aide.

- 8 - AG/809 2 octobre 1998

Dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales, les Nations Unies sont désormais confrontées à des conflits internes ayant souvent de graves conséquences internationales. Il est crucial d'améliorer le système de prévention et de renforcer la capacité de l'Organisation à organiser et conduire les opérations de maintien de la paix avec efficacité et succès. Les graves crises qui secouent le monde, et singulièrement l'Afrique, renforcent notre conviction que les Nations Unies, l'OUA et les organisations sous- régionales doivent étroitement coopérer dans la recherche de moyens efficaces de prévision et de prévention des conflits, de gestion des crises et de maintien de la paix. Le Mali estime que l'avenir du continent africain ne réside pas dans l'émergence de républiques ethniques qui nous conduiront vers une situation d'anarchie généralisée, et qu'il ne s'agit pas non plus de remettre en question les frontières héritées de la colonisation. En outre, il faut arriver à gérer les défiances électorales sans jamais remettre en cause l'expression plurielle et les possibilités d'alternance. Une nouvelle Afrique est en marche, qui veut définir son avenir et assumer son développement.

En matière de désarmement, le Mali, tout en accueillant avec satisfaction les progrès réalisés dans le dispositif normatif sur les armes de destruction massive, reste fortement préoccupé par les armes conventionnelles qui demeurent non soumises à des normes internationales. Soulignant que les récents conflits en Afrique sont alimentés non par des armes de destruction massive, mais par des armes légères, le Mali a pris, en rapport avec les Nations Unies et les pays de la sous-région ouest africaine, des initiatives concrètes pour lutter contre ce phénomène. Il se réjouit en particulier de l'accueil favorable fait à l'initiative du Président Konare de décider d'un moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication d'armes légères par la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'OUA et par les pays non-alignés. Les pays de la CEDEAO s'apprêtent à proclamer dans les semaines à venir une déclaration de moratoire, ce qui sera une première et marquera la volonté de l'Afrique de mieux prévenir les conflits en agissant sur les moyens qui y incitent et qui les alimentent.

M. MICHEL OYONO NDONG MIFUMU, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du la République de Guinée Equatoriale : en ce qui concerne la mondialisation, nous continuons à nous poser certaines questions et à exprimer certaines inquiétudes à l'égard de ceux qui trouvent des excuses pour retarder l'établissement du libre-échange, de la libre circulation des biens et des personnes, les transferts de technologie et qui établissent des barrières douanières qui empêchent les nations en développement d'atteindre une croissance stable et durable. Nous pensons, par exemple, que l'Uruguay Round est un instrument de discrimination à l'égard des pays du continent africain. Nous n'ignorons pas que le paiement des arriérés de la dette est un moyen d'exporter du capital vers des pays qui n'en ont pas besoin. La mondialisation doit commencer par la fixation d'un juste prix pour nos matières premières.

- 9 - AG/809 2 octobre 1998

Sans prétendre que les problèmes de l'Afrique n'ont aucun lien avec la mauvaise gestion, la corruption et les conflits, nous pensons néanmoins que ces facteurs ne justifient en rien les injustices qui nous frappent. En Afrique, nous avons fait beaucoup pour intégrer nos pays dans le processus de mondialisation, comme en atteste la progression de l'intégration régionale et sous-régionale. La mondialisation doit résulter en un marché libre de barrières administratives et douanières afin que les produits du Sud puissent accéder aux marchés du Nord. La charge de la dette constitue également un réel obstacle au décollage des économies de nombreux pays en développement. Nous ne demandons pas seulement à être assistés mais nous souhaitons que nos efforts soient appréciés à leur juste valeur.

Une grave menace pèse sur aujourd'hui sur nos frontières et à l'intérieur de mon pays. La Guinée équatoriale a subi récemment deux actions armées déstabilisatrices. En mai 1997, un vaisseau plein d'armes et de mercenaires a été arrêté par la police angolaise dans ses eaux territoriales. Puis le 27 janvier 1998, une bande armée a attaqué plusieurs localités du pays et assassiné six personnes civiles et militaires de sang froid. Certains pays appliquent au sujet du terrorisme deux poids deux mesures suivant leurs intérêts propres, ou sous prétexte de mettre fin à des régimes dictatoriaux. Cette double morale est à l'oeuvre dans le cas présent. Le Gouvernement espagnol a condamné les attaques dans mon pays, mais le Parti nationaliste basque, la gauche espagnole et le Parti socialiste ont envoyé des communiqués de solidarité aux auteurs de ces actes terroristes. Depuis, les mêmes groupes tentent de créer un problème ethnique en Guinée équatoriale. En outre, plusieurs résolutions ont été prises contre mon pays, notamment par le Parlement européen et à l'Assemblée paritaire de la communauté des Etats Afrique-Caraïbe-Pacifique (ACP), pour justifier les actes sus-mentionnés.

Mon gouvernement dans ses efforts pour établir un état de droit en Guinée équatoriale a tenu un procès public sous le contrôle d'observateurs internationaux et les quinze peines de mort qui avaient été prononcées ont été transformées en peine de prison à perpétuité par notre Président, M. Obiang Nguema Mbasogo, dans son souci protéger la cohésion sociale de la nation. Fidèle à son engagement mon gouvernement a fait de la paix et la stabilité des réalités quotidiennes en Guinée équatoriale. Les investissements affluent et les signes de croissance économique sont réels. Les réformes politiques sont irréversibles. Mon gouvernement a passé des accords et des programmes d'assistance technique avec diverses organisations internationales et pays amis qui nous aideront à renforcer l'économie, la démocratie, les droits de l'homme et la bonne gestion. Nous avons également entamé une collaboration avec la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Notre coopération avec les institutions de Bretton Woods est également positive. Ainsi nous en appelons au concours de la communauté internationale afin qu'elle soutienne nos efforts pour consolider le processus démocratique.

- 10 - AG/809 2 octobre 1998

Nous exhortons la communauté internationale à oeuvrer pour obtenir un cessez-le-feu dans la région des Grands lacs, pour que la paix soit restaurée en Angola, en Guinée Bissau, en Sierra Leone, en Erythrée et en Ethiopie. Nous réaffirmons les engagements de la Convention de Bata, adoptée lors de la Conférence sous-régionale sur la paix et la démocratie en Afrique qui s'est tenue en mai 1998 sous les auspices des Nations Unies pour garantir une démocratie durable en Afrique centrale et au cours de laquelle mon Président a proposé la création d'un sous-parlement qui aurait la charge de garantir la paix et la sécurité dans la sous-région.

Mme LILA RATSIFANDRIHAMANANA, Ministre des affaires étrangères de Madagascar : Madagascar n'a jamais dévié de son engagement en faveur du désarmement et est à ce titre signataire de plusieurs conventions internationales. Nous nous félicitons des perspectives de négociation d'un traité sur l'arrêt de la production de matière fissiles à usage militaire et nous saluons l'appel en faveur d'une conférence internationale sur l'élimination complète des armes nucléaires. Il convient de considérer la question de la sécurité par une approche multidimensionnelle englobant les aspects militaire, économique et social aux niveaux international, régional et national. La pauvreté, la persistance des déséquilibres entre pays développés et pays en développement, pays moins avancés, pays pauvres et pays endettés, sont des facteurs de tension et constituent des entraves à l'instauration d'une paix véritable et durable. Telle est la réalité de mon continent, l'Afrique. La Déclaration du Caire de 1993 avait défini l'objectif premier du mécanisme de l'OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits en Afrique. Cependant, sans le soutien et l'appui de la communauté internationale, ses actions demeurent dérisoires. La résolution 1170 du Conseil de sécurité relative à l'évaluation systématique des actions accomplies en faveur de la paix en Afrique doit être saluée. Pour Madagascar, il s'agit de la confirmation de la volonté de coordination des actions des Nations Unies avec l'Organisation panafricaine et les mécanismes régionaux.

En attendant une mobilisation conséquente des ressources nécessaires à la mise en oeuvre des actions dans le cadre de l'Agenda pour le développement, il nous apparaît fondamental que les pays en développement puissent apporter leur contribution en proposant la mise en place d'un dispositif leur permettant de concrétiser leurs aspirations communes et affirmer leur solidarité. C'est dans cet esprit que les chefs d'Etat et de Gouvernement des non-alignés ont pris en considération une proposition visant la création au sein des non-alignés, de trois fonds alimentés par nos propres moyens respectifs, à concurrence, par exemple, de 0,1 % du PIB national et d'un pourcentage des recettes d'exportation. Ce mécanisme contribuera à intégrer les activités des pays en développement dans le processus de globalisation financière et à résoudre du moins partiellement les problèmes financiers et l'endettement. Ce mécanisme de trois fonds pourrait figurer parmi les documents de base d'une réflexion pour une nouvelle architecture financière mondiale.

- 11 - AG/809 2 octobre 1998

Pour la concrétisation des différentes résolutions prises par la communauté internationale, la mise en place de réglementations conformes aux aspirations concertées, la bonne gestion des affaires publiques, la mise en place d'un système de suivi et de contrôle adéquats ainsi que le respect de la règle démocratique sont nécessaires. Madagascar a fait siennes ces valeurs. A ce titre, le processus de démocratisation, la bonne gestion et les règles de droit, assortis de réformes économiques et structurelles, sont mis en oeuvre pour acheminer le pays vers le statut de partenaire crédible dans le système international. Les autorités malgaches s'attachent actuellement à la mise en oeuvre de programmes de redressement visant l'intensification de la lutte contre la pauvreté. S'inscrivent au titre du volet institutionnel, la mise en place des provinces autonomes et des institutions prévues par la Constitution, la poursuite de la réforme de la fonction publique et du système judiciaire. A plan économique, l'Etat poursuit son désengagement du secteur productif en vue de la mise en place d'un environnement compétitif, l'assainissement de l'administration fiscale et la création d'organismes de régulation. Sur le plan social, les dépenses publiques reflèteront les priorités, à savoir l'éducation, la santé, la sécurité et l'aide aux populations les plus démunies.

M. HALE WENDENSAE (ERYTHREE) : dans mon discours de l'année dernière, j'ai déclaré que la politique étrangère de l'Erythrée était fondée sur deux principes : la soumission aux principes d'égalité et de justice, et l'idée que les conflits peuvent trouver une issue au moyen de négociations pacifiques. L'application de ces deux principes par le Gouvernement de l'Erythrée, a permis de désamorcer le conflit avec la République du Yémen en parvenant à une compréhension mutuelle s'agissant de l'archipel érythréen de Hanish-Zuqar en mer rouge. De la même façon, le Gouvernement de l'Erythrée insiste sur le fait que la paix avec l'Ethiopie passe par une stricte application des principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et des décisions de l'Organisation de l'Unité africaine sur les frontières coloniales. Une fois de plus, l'Erythrée appelle la communauté internationale et en particulier les deux organisations précitées à assurer le respect de leurs principes et décisions. L'Erythrée est d'autant plus surprise et préoccupée par la naissance du conflit avec l'Ethiopie qu'elle espérait qu'en dépit des désaccords datant des périodes de lutte armée, elle pouvait garder l'espoir de parvenir à une solution amicale et durable. L'attaque subie par les troupes érythréennes dans la région de Badme de la part de l'armée éthiopienne est à l'origine du conflit. L'occupation de larges étendues de notre territoire par l'Ethiopie constitue une violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Erythrée et explique l'escalade de la violence. Après la publication en 1997 de la carte officielle de la zone administrative du Tigray, nous avons pris l'exacte mesure de l'aventure éthiopienne. L'Erythrée n'a jamais franchi ses frontières internationalement reconnues, mais l'Ethiopie contrôle encore d'autres territoires de l'Erythrée dans le sud- ouest et le sud-est.

- 12 - AG/809 2 octobre 1998

Le Gouvernement éthiopien diffuse une propagande absurde visant à donner de notre pays une image belliqueuse, ce qui est très loin de la vérité. Nous sommes en fait victimes d'une agression, et ne négocierons pas, tant que l'Ethiopie ne se sera pas retirée de ce qu'elle considère, à tort, comme "ses territoires". Encore aujourd'hui, l'Ethiopie menace de faire la guerre si nous ne nous retirons pas de territoires qui sont pourtant internationalement reconnus comme étant les nôtres. Elle a disposé la quasi totalité de son armée le long de la frontière et proféré de graves menaces de guerre.

Ce conflit a uniquement une origine frontalière, et toute tentative de lui imputer une autre nature doit être considérée comme une manoeuvre du Gouvernement éthiopien pour dissimuler une politique agressive et expansionniste. Il est évident que c'est l'Ethiopie qui a délibérément violé les frontières de l'Erythrée et qui a sapé nos efforts pour trouver, grâce à la Commission de la frontière commune, une issue pacifique au conflit qui a eu lieu du 6 au 12 mai. Ce différend frontalier n'aurait jamais dû exister, car nos frontières communes avec l'Ethiopie sont clairement définies et ont fait l'objet de dispositions détaillées dans les traités internationaux.

Nous souhaitons une fois encore, proposer les bases d'une solution à notre dispute : une démarcation technique des frontières sur la base des traités qui les ont clairement définies, la possibilité, à la demande de l'une des parties, de recourir à un arbitrage, puis, dans l'attente d'une solution juridique, une cessation immédiate des hostilités et un cessez-le-feu placé sous le contrôle des Nations Unies. J'aimerais déclarer avec force et clarté, que le Gouvernement de l'Erythrée est prêt à mettre en oeuvre une décision émanant de cette auguste assemblée qui prévoierait un accord de cessez-le-feu, et une voie pacifique pour résoudre le conflit, seule solution acceptable.

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