En cours au Siège de l'ONU

AG/795

PLAIDOYER A L'ASSEMBLEE GENERALE EN FAVEUR D'UN NOUVEAU MULTILATERALISME GARANTISSANT LA PARTICIPATION ET LA PROTECTION DE TOUS

23 septembre 1998


Communiqué de Presse
AG/795


PLAIDOYER A L'ASSEMBLEE GENERALE EN FAVEUR D'UN NOUVEAU MULTILATERALISME GARANTISSANT LA PARTICIPATION ET LA PROTECTION DE TOUS

19980923 La France propose la négociation d'une convention universelle contre le financement du terrorisme

L'Assemblée générale a poursuivi ce matin son débat général au cours duquel les intervenants ont mis l'accent sur la corrélation entre la paix et le développement, soulignant qu'en cette ère de mondialisation encore trop peu maîtrisée, l'universalisme, incarné par les Nations Unies, et le régionalisme sont absolument complémentaires. De nouvelles règles adaptées aux réalités actuelles sont cependant encore à définir, qui tiendraient compte des exigences de tous les pays, en particulier des pays en développement.

Le débat a ainsi permis au Président de la Colombie d'exposer le concept d'une "diplomatie pour la paix", une diplomatie à fort contenu social et économique, passant par l'investissement, la mobilisation des citoyens, de la technologie et des moyens financiers, provenant tant des capitaux intérieurs que de l'aide internationale, et permettant d'assurer une paix durable. Pour de nombreux intervenants, la mise en place d'un environnement propice à la prospérité économique passe également par la relance du processus de désarmement, tant nucléaire que classique, et par la lutte contre le terrorisme. A cet égard, le Ministre des affaires étrangères de la France a proposé la négociation d'une convention universelle contre le financement du terrorisme.

Les intervenants se sont accordés pour reconnaître que les Nations Unies offrent le cadre le plus approprié à la définition d'un multilatéralisme assurant la participation et la protection de tous. Dans cette optique, le Ministre des affaires étrangères de la Chine a estimé que le Conseil de sécurité ne devait pas être un club de pays riches et qu'il fallait rééquilibrer sa composition. Le Ministre des affaires étrangères de l'Italie a, à cet égard, demandé à ce que toute décision prise quant à l'élargissement de la composition du Conseil soit adoptée à la majorité des deux tiers. Le Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo (RDC) a, quant à lui, regretté la politique de "deux poids et deux mesures" menée parfois par le Conseil, qui s'attache à rétablir promptement la paix dans certains pays mais se contente de déclarations ambiguës en ce qui concerne le sien.

(à suivre 1a)

- 1a - AG/795 23 septembre 1998

L'Assemblée générale a entendu les allocutions des chefs d'Etat et de gouvernement suivants : Andrés Pastrana Arango, Président de la Colombie; Jules Wijdenbosch, Président du Suriname; Navinchandra Ramgoolam, Premier Ministre de Maurice; Jiaxuan Tang, Ministre des affaires étrangères de la Chine; Hubert Védrine, Ministre des affaires étrangères de la France; Lamberto Dini, Ministre des affaires étrangères de l'Italie; Rashid Abdullah Al-Noaimi, Ministre des affaires étrangères des Emirats arabes unis; et Jean-Charles Okoto Lolakombe, Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo.

L'Assemblée générale poursuivra son débat général cet après-midi, à partir de 15 heures, en entendant notamment les allocutions M. Hassan Gouled Aptidon, Président de la République de Djibouti; M. Ibrahim Maïnassara Baré, Président du Niger et M. Arnoldo Aleman Lacayo, Président de la République du Nicaragua.

- 2 - AG/795 23 septembre 1998

Allocution de M. Andrés Pastrana Arango, Président de la République de Colombie.

M. ANDRES PASTRANA ARANGO, Président de la République de Colombie : il y a quelques semaines, les plus importantes élections démocratiques se sont déroulées en Colombie, montrant qu'après les difficultés rencontrées, les institutions de la Colombie font à nouveau preuve de solidité. Aujourd'hui, les Colombiens ont retrouvé la confiance et se sont engagés sur la voie de la reconstruction et d'une insertion plus positive et plus dynamique dans la communauté internationale. La tâche la plus importante qui incombe aujourd'hui à la Colombie est de consolider la paix et son gouvernement y est entièrement dévoué. Toute notre énergie devra être mise au service de cet objectif. A cet égard, un programme est en train de se mettre en place dans lequel toutes les couches sociales de la société ont un rôle à jouer. Mais la paix dans le pays sera aussi cimentée par une stratégie de développement économique claire et une solide politique de justice sociale. Sur cette voie vers la paix, le soutien de la communauté internationale est complémentaire de nos propres efforts. La paix en Colombie exigera que des investissements importants soit faits dans les secteurs sociaux et au niveau des infrastructures des zones de conflit. C'est pourquoi nous avons créé un Fonds pour la paix dont une part importante sera alimentée par des capitaux intérieurs mais pour lequel l'aide internationale sera également indispensable. Ces actions font partie de ce que nous appelons la "diplomatie de la paix". C'est une diplomatie à fort contenu social et économique, c'est- à-dire passant par l'investissement, la mobilisation des citoyens, de la technologie, des moyens financiers dans le but d'instaurer une paix solide et durable. Cette paix sera également une contribution majeure au processus visant à débarrasser l'humanité du fléau de la drogue. Si nous pouvons apporter des solutions alternatives de développement à nos paysans ils seront moins dépendants des cultures illicites. A cet égard, l'aide internationale sera également cruciale et l'éradication des cultures illicites sera l'objectif fondamental des pourparlers de paix.

Au niveau international, les rivalités ethniques, religieuses, les conflits régionaux sont autant de menaces à la paix et à la sécurité internationales. A ce sujet, le Gouvernement et le peuple de Colombie tiennent à exprimer leur rejet total de toute forme de terrorisme. Il ne saurait y avoir de trêve et tous les Etats doivent coopérer à la lutte pour l'éliminer. Quant à la corruption qui entraîne la décomposition politique et sociale, elle constitue un frein à la démocratie dans de nombreux pays sans parler des drogues qui continuent d'être une des plus graves menaces contre les sociétés actuelles. Les droits de l'homme sont loin d'être pleinement respectés partout, les femmes sont victimes de traitements inégaux et les enfants, d'abus. Les groupes les plus vulnérables n'ont pas accès à la protection que les Etats leur doivent et la pauvreté continue de frapper des couches considérables de la population d'un monde où la prospérité de quelques uns doit être mise en parallèle avec la marginalisation du plus grand nombre.

- 3 - AG/795 23 septembre 1998

Face à la crise actuelle, l'Amérique latine s'est prononcée unanimement et s'est engagée dans des réformes structurelles. Mais il est indispensable que les nations les plus développées et les institutions internationales prennent des mesures pour régler cette crise et notamment pour rétablir la stabilité des marchés.

Fidèle à ses principes, la Colombie est fermement convaincue que universalisme et régionalisme sont complémentaires. C'est pourquoi un des objectifs de notre diplomatie est de renforcer les organisations régionales dans un contexte universel. Toute action repose sur la confiance dans le multilatéralisme incarné par le système des Nations Unies. Il faut certainement adapté ce système aux réalités présentes et donner aux réformes un poids réel. Avant tout, il leur faut les ressources adéquates afin de pouvoir continuer à mener à bien leurs missions et il est particulièrement important que la coopération pour le développement bénéficie d'une injection massive de financements afin de se maintenir et accomplir la tâche immense qu'est la sienne. Il faut un multilatéralisme à fort contenu social où l'être humain constitue la priorité centrale et dans lequel le développement est le principe directeur de la prise de décision. Il faut ouvrir la porte à une ère de multilatéralisme créateur et plus humain. Il faut renforcer le dialogue entre le Nord et le Sud, un dialogue authentique, productif et reposant sur une solidarité concrète. On ne peut ignorer la corrélation entre paix et développement. Les populations exigent plus d'efficacité et moins de rhétorique, un monde juste, solidaire et équitable.

Allocution de M. Jules Albert Wijdenbosch, Président de la République du Suriname

M. JULES ALBERT WIJDENBOSCH, Président de la République du Suriname : la restructuration du Conseil de sécurité revêt une importance fondamentale afin que cet organe reflète mieux la réalité internationale, économique et politique actuelle et soit en mesure de répondre pleinement aux nouveaux défis du millénaire à venir. C'est pourquoi les discussions ne devraient pas seulement porter sur l'accroissement du nombre des membres du Conseil mais envisager davantage les moyens d'améliorer son efficacité et le respect du principe de notre Charte qui pose l'égalité entre les Etats. A cet égard, le Suriname apporte son entier soutien à la position exprimée par le Mouvement des pays non alignés, lors du récent sommet de Durban en Afrique du Sud.

La communauté internationale doit condamner dans les termes les plus fermes ces actes inquiétants et ignobles que sont les attaques parfois meurtrières commises contre des fonctionnaires internationaux, y compris le personnel des Nations Unies en mission sur le terrain. Dans la mesure où ces héros, hommes et femmes, se consacrent à la cause humaine, les crimes à leur encontre doivent être traités et punis comme crimes contre l'humanité. De même, le Suriname condamne le terrorisme international, qui a encore frappé récemment en Afrique et en Europe, et il se félicite des accords régionaux et déclarations conjointes visant à combattre et éliminer le terrorisme sous toutes ses formes.

- 4 - AG/795 23 septembre 1998

Il est aujourd'hui reconnu que le phénomène de la mondialisation présente un réel défi pour la région des Caraïbes. Il exige des changements drastiques dans nos économies et dans le processus de développement de la région, alors que parallèlement le risque de marginalisation de nos économies vulnérables s'aggrave. C'est pourquoi, les petits Etats des Caraïbes devraient se voir accorder une période raisonnable d'ajustement à l'environnement international en mouvement, afin de leur permettre d'améliorer leur compétitivité. De plus, un système préférentiel non réciproque devrait être maintenu durant cette période de transition. Le Suriname tient à réitérer son attachement à la Déclaration universelle des droits de l'homme dont nous célébrons cette année le cinquantième anniversaire. Toutefois, nous estimons qu'il ne faut pas seulement porter notre attention sur la jouissance des droits politiques et civils, mais aussi sur la satisfaction des droits économiques et sociaux des peuples. La communauté internationale doit accorder au concept du "droit au développement", en particulier pour les populations des pays en développement, la même attention, d'autant que les droits de l'homme et le développement durable sont interdépendants. La promotion des droits de l'homme est en vérité particulièrement pertinente à l'heure de la mondialisation et des risques de marginalisation des Etats les plus petits et les plus faibles, notamment ceux disposant de peu de ressources, qui l'accompagnent.

Le Suriname est fier de prendre part au débat général de l'Assemblée générale, car il a démontré au monde son sens des responsabilités en matière de protection de l'environnement en assurant la préservation de l'une des forêts vierges de la planète. C'est ainsi que récemment une réserve naturelle de plus de 1,6 million d'hectares s'étend sur près de 12% du territoire a été créée au Suriname. Il s'agit de l'une des plus grandes réserves naturelles d'Amérique du Sud et probablement de la seule forêt tropicale vierge de tout le globe. Cette réserve constitue une véritable contribution à ce droit fondamental des hommes qu'est le droit à la vie. Nous espérons que d'autres Etats suivront cet exemple et oeuvreront à la protection des forêts du monde.

Les autoroutes de l'information facilitent les échanges et peuvent contribuer au développement et à la sensibilisation du public à l'échelle mondiale. Toutefois, il convient de se préoccuper des éventuels effets négatifs d'une mauvaise utilisation de cette technologie, sur toutes les couches de notre tissu social et principalement sur les jeunes. Ce problème mérite un examen sérieux afin d'élaborer et de mettre en place des moyens juridiques de prévention de tout usage impropre, sans remettre en cause le droit fondamental à la liberté d'expression.

Donnant suite à la récente session extraordinaire de l'Assemblée générale sur les drogues, le Suriname met actuellement la dernière main à l'organisation d'une conférence sous-régionale sur la question, dont l'objectif est d'établir un plan d'action pour lutter efficacement contre cette forme de crime organisé en coopération avec le Guyana, le Venezuela, le Brésil et la France.

- 5 - AG/795 23 septembre 1998

Il faut poursuivre le processus de revitalisation des Nations Unies, puisqu'il s'agit de notre seul instrument universel d'action concertée visant à rendre l'humanité meilleure. Il n'est pas inutile de rappeler encore que la majorité des conflits à travers le monde et des menaces qui pèsent sur la communauté des peuples ne peuvent être combattues que grâce au renforcement de ce mécanisme multilatéral.

Suite du débat général

M. NAVINCHANDRA RAMGOOLAM, Premier Ministre et Ministre de la défense et des affaires intérieures de Maurice : le Premier Ministre a déclaré que dans la région du Sud-Ouest de l'océan Indien, Maurice participe à l'effort pour trouver une solution pacifique à la crise des Comores, tout en soutenant l'unité et l'intégrité territoriale de la République fédérale des Comores.

Abordant ensuite la question des fardeaux de la dette sur l'évolution économique de l'Afrique, M. Ramgoolam a déploré le déclin des niveaux d'aide au développement des pays donateurs. Rappelant la spécificité des économies des petites îles, il a demandé l'octroi d'un nouveau régime de traitement préférentiel à leur égard, en attendant qu'elles soient prêtes à affronter le nouvel ordre économique mondial.

Maurice porte un intérêt particulier à la protection de l'environnement marin et attire l'attention de l'Assemblée générale sur l'important rapport élaboré par la Commission mondiale sur les océans au sujet de la survie de l'espèce humaine. Il nous faut, a poursuivi le Premier Ministre, nous attaquer sans plus tarder aux trois graves dangers qui menacent l'humanité à savoir : la surexploitation des ressources marines, le déversement des déchets toxiques et les effets du réchauffement de l'atmosphère. Nous regrettons que l'esprit de Rio semble s'être perdu dans des débats stériles et nous réclamons une attention renouvelée à ces questions essentielles dont notre survie dépend.

Après avoir indiqué que son pays proposera bientôt à sa propre assemblée la création d'une Commission des droits de l'homme, le Premier Ministre a renouvelé la demande de Maurice de restaurer ces droits sur l'île de Tromelin et l'archipel de Chagos. Dans ce dernier en particulier, quelque 1500 habitants ont été forcés de partir pour laisser la place à une base militaire il y a trente ans. Nous pensons que nous devons à ces personnes de rétablir leurs droits, en particulier leur droit au retour.

M. TANG JIAXUAN, Ministre des affaires étrangères de la Chine: La mondialisation de l'économie progresse avec impétuosité et l'interdépendance des pays va en s'approfondissant. Tous les efforts qui tendent à établir des relations internationales stables, pragmatiques et équilibrées favorisent la paix et le développement ainsi que l'instauration d'un nouvel ordre politique et économique international juste et rationnel. La course aux armements nucléaires a été un produit de la guerre froide.

- 6 - AG/795 23 septembre 1998

Aujourd'hui il est important de prévenir la prolifération nucléaire et de réaliser le désarmement nucléaire. Les essais indiens et pakistanais ont porté un coup dur au régime international de désarmement et de non- prolifération nucléaire. La Chine espère que l'Inde et le Pakistan appliqueront intégralement la résolution 1172 du Conseil de sécurité, renonceront à leur programme de développement d'armes nucléaires et adhéreront immédiatement et inconditionnellement au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et au Traité de non-prolifération (TNP). Elle appelle les deux parties à régler par voie pacifique leur litige sur le problème du Cachemire.

La crise financière en Asie de l'Est, qui a pour toile de fond la mondialisation économique, a affecté toute la planète. Le renforcement de la coopération internationale pour surmonter le plus vite possible cette crise représente non seulement les intérêts vitaux des pays de l'Asie orientale mais également ceux de la communauté internationale et des pays développés. La Chine espère que ces derniers, qui pèsent lourd sur l'économie de cette région, assumeront leurs responsabilités et prendront sans tarder des mesures énergiques et efficaces afin de contribuer, comme il se doit, à la préservation de la stabilité de l'ordre financier, au rétablissement et au développement de l'économie de la région. Face à cette crise, le Gouvernement chinois a adopté une attitude hautement responsable. Conformément aux dispositions prises dans le cadre du Fonds monétaire international (FMI) et par des canaux bilatéraux, la Chine a accordé des aides aux pays concernés. Elle a décidé, dans l'intérêt de la stabilité et du développement de la région, de ne pas dévaluer le yuan. Malgré de fortes pressions et de grands sacrifices, sa détermination de maintenir la stabilité du yuan ne faillira pas. Grâce à une grande solidarité nationale, la Chine vient de vaincre les inondations exceptionnelles. Une série de mesures a été prise afin d'approfondir la réforme et de relancer la demande intérieure pour garantir la croissance soutenue de l'économie et atteindre le taux de croissance de 8% du PIB fixé pour cette année. La Chine est convaincue que l'économie de l'Asie de l'Est, grâce aux efforts conjugués des pays de la région et de la communauté internationale, pourra s'engager de nouveau dans une voie de développement sain.

A l'aube du XXIème siècle, l'ONU assume de lourdes responsabilités en matière de défense de la paix mondiale, de promotion du développement du genre humain et d'instauration d'un nouvel ordre politique et économique international qui soit juste et rationnel. Son rôle à cet égard est irremplaçable. La Chine est convaincue qu'il est nécessaire de réformer de façon adéquate l'Organisation pour qu'elle puisse mieux s'adapter à l'évolution de la situation et mieux servir les Etats Membres. La réforme du Conseil de sécurité est capitale. La Chine estime que, puisque la réforme du Conseil touche aux intérêts de tous les pays, il convient de faire valoir le principe de la démocratie. Tous les pays Membres ont le même droit de se prononcer sur cette réforme.

- 7 - AG/795 23 septembre 1998

Le Conseil de sécurité n'est pas un club de pays riches. Sa réforme sera faite non pour répondre aux seules préoccupations de quelques grands pays, mais pour tenir compte surtout des intérêts et des souhaits des nombreux pays en développement. La représentativité des pays en développement et des pays développés nécessite un rééquilibrage. La Chine se félicite, en cette année marquant le cinquantenaire de l'adoption de la Déclaration des droits de l'homme, des progrès qui ont été faits à l'échelle mondiale pour protéger les droits de la personne ainsi que le droit au développement. Le peuple chinois n'a jamais joui autant d'égalité et de liberté. Le Gouvernement chinois, tout en développant son économie, continuera à poursuivre ses efforts inlassables pour faire s'épanouir la démocratie, consolider l'Etat de droit afin de mieux assurer la pleine jouissance des droits humains par son peuple. La Chine estime que la réalisation de sa modernisation dépend d'un environnement international fondé sur la paix et la stabilité.

La souveraineté d'Etat et la sécurité du pays restent la première préoccupation de la Chine. Taiwan fait partie intégrante du territoire sacré de la Chine. Le retour sans heurt de Hong Kong et celui de Macao dans un proche avenir ne manqueront pas de fournir des enseignements utiles et de créer des conditions favorables à la solution de la question de Taiwan. En ce qui concerne le maintien de la paix mondiale, la Chine est favorable à l'accélération de la démocratisation des relations internationales. Pourtant, si les affaires internationales doivent être gérées par l'ensemble des pays grâce aux discussions entre les uns et les autres, aucun pays ne doit imposer sa propre volonté à autrui.

M. HUBERT VEDRINE, Ministre des affaires étrangères de la France : nous n'avons pas à rougir de ce que nous avons fait, en tant que Nations Unies, durant ces 53 ans. Tout au long de ces décennies, le Conseil de sécurité, sauf quand il a été paralysé par un usage abusif du veto, a presque toujours réussi à assumer ses responsabilités principales dans la sécurité internationale. Quand il n'a pas pu le faire, aucune autre institution n'a pu le faire à sa place. Le cadre institutionnel prévu par la Charte a ainsi montré son utilité irremplaçable. Et pourtant, comme le Secrétaire général le soulignait il y a peu, "l'imprévisibilité et la surprise sont devenues notre lot". Notre monde n'est pas en train de progresser vers l'harmonie et plusieurs crises majeures l'ont récemment démontré, tels, la crise financière asiatique, le conflit en Afrique de l'Est ou encore dans l'Afrique des Grands Lacs. L'ONU et le système multilatéral n'ont pas aujourd'hui les moyens suffisants pour relever tous ces défis. Comment redonner à notre action la force nécessaire ?

Il faut d'abord préserver les pouvoirs dont la Charte a doté nos institutions. La première chose est de réserver au Conseil de sécurité le monopole de la coercition légitime en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression.

- 8 - AG/795 23 septembre 1998

Rien ne justifie qu'un Etat, un groupe d'Etats ou une organisation recourent à la force sans y avoir été préalablement autorisés par le Conseil de sécurité, sauf en cas de légitime défense. Il faut ensuite faire respecter l'autorité du Conseil de sécurité, et donc ses résolutions. Aujourd'hui, la question se pose particulièrement à propos de l'Iraq, qui doit satisfaire aux conditions imposées par les résolutions, mais seulement à celles-ci. Une fois cet objectif atteint, il faudra viser à réinsérer l'Iraq dans la communauté internationale et d'abord dans la région. Il convient également d'accroître la représentativité du Conseil de sécurité. C'est pourquoi, la France s'est prononcée en faveur d'un élargissement du Conseil à de nouveaux membres, permanents et non permanents. Cet élargissement doit en même temps préserver l'efficacité du Conseil et ne pas l'empêcher d'exercer les responsabilités inscrites dans la Charte.

Il faut aussi accroître la capacité de notre organisation à prévenir ou à régler les crises régionales. Il y a là beaucoup à faire, alors que la communauté internationale vient de célébrer dans la mélancolie le cinquième anniversaire des Accords d'Oslo. Nous ne devons pas renoncer à répondre à l'aspiration des peuples du Proche-Orient à une paix durable et juste et c'est pourquoi le Président Chirac et le Président Moubarak ont proposé de réunir si nécessaire une "conférence des pays décidés à sauver la paix". Dans une autre région, l'Afrique des Grands Lacs, 6 ou 7 Etats s'affrontent et il est illusoire d'espérer un règlement séparé dans chacun de ces Etats. Cette crise de nature régionale appelle une solution régionale. C'est pourquoi, la France rappelle le projet de Conférence pour la Paix dans la région des Grands Lacs, qui serait placée sous les auspices de l'ONU ou de l'OUA. Plusieurs initiatives africaines vont dans ce sens. Nous soutenons ces efforts. Parallèlement, le dispositif multilatéral du désarmement et de non- prolifération doit être conforté. Notre premier objectif devrait être l'entrée en vigueur la plus rapide possible du traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Un autre objectif : un Traité d'interdiction de la production de matières fissiles à usage militaire. Faisons également en sorte que la Convention d'interdiction des armes chimiques soit universelle et veillons à ce que la Convention d'interdiction des armes biologiques soit rendue véritablement efficace par un dispositif de vérification. Enfin, progresser dans la voie du désarmement classique, c'est faire en sorte que la Convention d'Ottawa sur l'interdiction totale des mines antipersonnel entre en vigueur au plus tôt.

La communauté internationale doit continuer à lutter contre le sous- développement, dont le lien avec les crises n'est plus à démontrer. La France, second bailleur mondial d'aide publique au développement, souhaite que les ressources du développement soient plus prévisibles et elle accueille avec un esprit constructif l'idée du Secrétaire général d'un "compte pour le développement". Ce faisant, il faut étendre les efforts de régulation mondiale à d'autres domaines. Il convient notamment d'étendre le domaine du droit dans toutes ses composantes.

- 9 - AG/795 23 septembre 1998

Le statut d'une Cour pénale internationale permanente, qui vient d'être adopté à Rome, constitue un progrès majeur dans la lutte contre l'impunité des plus grands criminels. Nous souhaitons que ceux des pays qui demeurent réticents puissent nous rejoindre. Il est nécessaire aussi de contenir et réduire le fléau du crime organisé, et d'abord de la drogue, et de combattre le terrorisme sous toutes ses formes. Pour cela, nous devons nous donner les moyens de traquer les financiers et les commanditaires des attentats. La France propose la négociation d'une convention universelle contre le financement du terrorisme, qui permettrait de définir des mécanismes concrets de répression et d'entraide judiciaire contre les financiers du terrorisme.

Enfin, il faut remédier non seulement aux diverses crises financières actuelles mais au dysfonctionnement du système financier international en tant que tel. La mondialisation financière est devenue un cheval fou. Il faut d'urgence dégager de nouveaux moyens et définir de nouvelles règles adaptées à la réalité d'aujourd'hui. Le Fonds monétaire mondial doit rester le pivot, mais un FMI plus légitime, plus efficace, travaillant sur la base d'orientations politiques et stratégiques claires et réalistes, veillant notamment à la transparence du système financier et à la prise en compte des réalités économiques, sociales et politiques des pays partenaires. Le monde actuel a donc besoin de règles et l'ONU doit en rester le cadre fédérateur et la Charte, la référence. Conserver ce qui a fait ses preuves, adapter ce qui l'exige et inventer de nouvelles formes de régulation, voilà trois axes pour notre travail.

M. LAMBERTO DINI, Ministre des affaires étrangères de l'Italie : les crises récentes traduisent un déséquilibre entre le pouvoir du marché et celui des institutions. Or, la mondialisation et la libéralisation, qui ont des mérites, requièrent un bon gouvernement. Il est donc nécessaire de renforcer la direction internationale et de coordonner l'action des gouvernements. Dans ce cadre, les Nations Unies doivent être la force entraînant les autres institutions.

Le premier pilier de la stabilité est la bonne gestion de l'économie, afin d'empêcher les crises de dégénérer en catastrophes. Les progrès technologiques peuvent mener à l'exclusion de nombreuses personnes du circuit de l'emploi. De plus, la croissance du marché ne correspond pas toujours à une prospérité pour l'Etat, et parfois accroît seulement le pouvoir des plus forts. Or, il ne peut y avoir d'économie saine sans gouvernement fort. Ainsi, les institutions financières internationales doivent proposer des politiques et des réformes qui minimisent les dangers moraux de leurs opérations de secours. Les forces qui activent la globalisation économique sont les mêmes qui favorisent les libertés fondamentales : la libre circulation de l'information et des idées, l'ouverture des frontières, le respect des lois et des droits de l'individu.

- 10 - AG/795 23 septembre 1998

Les Nations Unies et la communauté internationale peuvent compter sur la nouvelle cohésion de l'Union européenne. Avec l'émergence d'une nouvelle monnaie, l'Union européenne est en train de devenir un sujet politique et participe en tant que telle à la prise de décision au niveau mondial. Vers le Sud, l'Europe fait face à des vagues massives d'immigration, auxquelles elle ne peut répondre que par une politique ambitieuse de solidarité et de développement. Ainsi, dans le contexte de l'effort pour combler le fossé entre le Sud et le Nord, le Conseil économique et social, dont la présidence sera assumée par l'Italie, peut être utilisé pour éliminer la pauvreté et harmoniser les différences entre les besoins des deux hémisphères.

Le deuxième pilier de la stabilité est la sécurité. Les nations Unies ont un rôle essentiel à jouer, non pas seulement au niveau de son engagement dans les opérations de maintien de la paix pour lesquelles l'Italie fournit une forte base logistique, mais aussi au niveau de ses relations avec d'autres institutions, dont l'OTAN. L'Alliance se tourne en effet vers les Nations Unies dans sa recherche d'une plus grande légitimité afin d'élargir le champ de sa mission. De plus, la paix est mise en danger par les menaces d'utilisation d'armes nucléaires pour restaurer des équilibres régionaux, renforcer le prestige national, ou consolider une unité nationale. Bien que ces buts soient en soi légitimes, nous devons faire une priorité de l'effort pour compléter au contraire le régime de non-prolifération des armes de destruction massive et le rendre plus efficace. Nous devons également redoubler nos efforts communs dans la lutte contre un terrorisme nouveau qui devient de plus en plus irrationnel et qui menace des processus de paix encore fragiles.

Les droits des individus constituent le troisième pilier du renforcement institutionnel. Nous devons approfondir notre engagement à faire respecter les Droits de l'Homme. Le Statut de Rome pour créer une Cour criminelle internationale est certainement le progrès le plus important accompli depuis la Charte de San Francisco. Je lance un appel afin que les nombreux pays qui ne l'ont pas encore fait signent le Statut et travaillent à son application.

Concernant la question de l'élargissement du Conseil de Sécurité, le problème fondamental est un problème de principe et de critère. Nous soutenons la solution qui consiste à accroître le nombre de sièges non- permanents, qui permettrait à tous les Etats membres d'avoir accès au Conseil de Sécurité. Etant donné l'importance du sujet, nous croyons nécessaire qu'une décision soit adoptée à la majorité des deux tiers, selon l'article 108 de la Charte.

M. RASHID ABDULLAH AL-NOAIMI, Ministre des affaires extérieures des Emirats arabes unis : les événements politiques dans le monde et, en particulier, dans la région du Golfe, ont montré que des solutions durables aux différends régionaux ne peuvent être trouvées que par des moyens pacifiques.

- 11 - AG/795 23 septembre 1998

Partant de ce constat, les Emirats arabes unis ont recherché une solution pacifique au problème de l'occupation de ses trois îles - Grande Tomb, Petite Tomb et Abu Musa - par l'Iran. La poursuite par l'Iran de son occupation illégale de ces trois îles et la politique du fait accompli qu'il mène, sont incompatibles avec les principes de bonnes relations de voisinage, de coexistence pacifique et de l'établissement de la confiance autant qu'avec les principes de la Charte . Une fois encore, nous appelons le gouvernement de l'Iran à faire preuve de bonne volonté politique et à accepter notre initiative pacifique, soit en engageant un dialogue direct avec nous et des négociations bilatérales, soit en acceptant de recourir à l'arbitrage de la Cour internationale de Justice, afin de parvenir à un règlement juste et durable de cette question qui mette fin à l'occupation iranienne de ces îles.

Les Emirats arabes unis, tout en renouvelant leur soutien aux initiatives du Secrétaire général pour une reprise des travaux de la Commission spéciale en Iraq (UNSCOM), afin d'éviter toute nouvelle escalade de la tension dans la région, considèrent qu'il faut continuer à renforcer le programme "pétrole contre nourriture" et d'en améliorer sa mise en oeuvre afin de répondre aux besoins humanitaires du peuple irakien. Dans le même temps, nous appelons le gouvernement irakien à se conformer à toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité afin de parvenir à la levée des sanctions et à la reprise de sa place au sein de la communauté des nations. Le processus de paix au Moyen-Orient est dans une dangereuse impasse du fait de la politique israélienne et, notamment, la poursuite de la construction de colonies juives dans les territoires palestiniens et arabes occupés et, en particulier, à Jérusalem et sur le plateau du Golan. Ces violations continuelles et illégales nécessitent une action concrète de la part de la communauté internationale afin d'exercer une pression plus forte sur Israël pour qu'il se conforme à ses obligations et reprenne les négociations, sans conditions préalables, sur les différents volets du processus de paix sur la base du principe de la "terre contre la paix". Nous exprimons notre soutien continu au peuple palestinien dans sa quête pour l'auto-détermination et pour ses aspirations légitimes à établir un Etat indépendant sur son sol national, avec Jérusalem comme capitale. De même, nous apportons notre soutien au Gouvernement libanais dans ses efforts pour mettre fin à l'occupation militaire israélienne du sud de son territoire et de la plaine de la Bekaa.

La mise en place d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen-Orient et dans la région du Golfe est complémentaire du processus de paix. Dans cette optique, il incombe à la communauté internationale de demander à Israël d'adhérer au Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et de se soumettre au contrôle de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). De façon générale, nous appelons toutes les puissances nucléaires à reconsidérer leurs politiques en la matière et à mettre fin à la politique des deux poids, deux mesures et à promouvoir l'adoption de mesures équitables pour renforcer la confiance entre les Etats. La Communauté internationale doit agir afin de créer un monde débarrassé de cette menace.

- 12 - AG/795 23 septembre 1998

Les Emirats arabes unis sont préoccupés par l'absence de progrès dans les efforts à résoudre les conflits, notamment en Afghanistan, en Somalie, dans la région des Grands Lacs, en Angola ou, plus récemment, entre l'Ethiopie et l'Erythrée ou encore au Kosovo. Les Nations Unies et, en particulier, le Conseil de sécurité doivent prendre leurs responsabilités, en mettant un terme à ces conflits et en promouvant la participation des organisations régionales dans les efforts visant la recherche de solutions pacifiques. Nous condamnons également avec force les actes terroristes qui ont été perpétrés récemment dans certains pays africains.

M. JEAN-CHARLES OKOTO LOLAKOMBE, Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo : la 53ème session de l'Assemblée générale a lieu au moment où la République démocratique du Congo (RDC) est victime, depuis le 2 août de l'année en cours, d'une agression armée menée par ses pays voisins du Rwanda et de l'Ouganda. La gravité des actions menées par ces envahisseurs, Etats parties aux nobles idéaux contenus dans les Chartes de l'ONU et de l'OUA, demande que l'on fasse un rappel succinct des faits, dans l'espoir d'aider à une meilleure compréhension du drame qui se joue. Le 27 juillet 1998, le Président de la RDC, après consultation avec ses pairs rwandais et ougandais, prend la décision souveraine de mettre fin à la coopération technique militaire rwandaise et à la présence des troupes étrangères sur l'ensemble du territoire national. Lorsque les troupes rwandaises quittent le territoire congolais, certains Tutsi d'origine rwandaise, surnommés Banyamulenge, leur emboîtent le pas. Une semaine plus tard, les villes congolaises frontalières du Rwanda, à savoir, Goma, Bukavu et Uvira, passent sous le contrôle d'éléments armés venus de ce pays voisin. Dès le 6 août commencent les rotations d'avions entre Goma et Kitona, à l'Ouest du pays, et ce, via Kigali, sur une distance de plus de 2000 km. Après avoir abattu un des pilotes civils qui refusait de s'exécuter, ces aéronefs ont été détournés de l'aéroport de Goma pour acheminer des troupes et du matériel de guerre vers l'Ouest. Au même moment, des colonnes de véhicules blindés et autres équipements militaires, en provenance de l'Ouganda, franchissent la frontière sous prétexte de défendre leurs intérêts au Congo. Dans leur progression, en dépit des protestations du Gouvernement congolais qui a exigé leur retrait immédiat, les troupes ougandaises ont investi, le jeudi 13 août 1998, la ville de Bunia dans la Province orientale. Le même jour, le barrage hydro-électrique d'Inga est occupé par les forces de la coalition rwando-ougandaise. Ces dernières sabotent les installations aux fins de priver la capitale Kinshasa d'électricité et d'eau. Le 23 août 1998, les troupes ougandaises attaquent la ville de Kisangani, toujours dans la Province orientale, au nord-est, qu'elles occuperont plus tard.

Ces faits et actes de violence, confirmés par ailleurs de sources indépendantes prouvent à suffisance l'implication de Kigali et de Kampala dans le vaste complot visant la balkanisation de la RDC. Tout ceci est fait au mépris du droit international et du principe de l'intangibilité des frontières héritées de la colonisation, tel qu'il découle de la Charte de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA).

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L'un des deux pays assaillants, en l'occurrence l'Ouganda, ne s'est pas gêné pour reconnaître publiquement que ses troupes occupent certaines positions en RDC. Ce que certains médias appellent abusivement une rébellion venue de l'Est, n'est qu'une conspiration éhontée de déstabilisation politique et économique de la RDC, cachant mal la convoitise rwando-ougandaise sur les nombreuses ressources naturelles du pays. La RDC paie une fois de plus un lourd tribut de cette guerre qui lui est imposée de l'extérieur comme le soulignent les massacres de milliers de congolais innocents, dont des religieux, des femmes des enfants et des vieillards à l'Est tout comme à l'Ouest, les déportations massives des populations du Kivu vers le Rwanda dont le sort reste inconnu, ou encore les exécutions sommaires de prisonniers de guerre. Le démontage, le sabotage et la destruction des infrastructures industrielles, portuaires et économiques font que, à ce jour, les dégâts sont évalués à plus ou moins 3 milliards de dollars américains pour la seule ville de Matadi. La coupure pendant plus de trois semaines de la fourniture de l'énergie électrique et de l'eau dans la capitale Kinshasa, ville de plus de six millions d'habitants, a constitué un véritable drame humanitaire. Des stocks importants de vivres ont dû être déclarés impropres à la consommation et d'innombrables cas de décès ont été signalés dans les hôpitaux, faute de moyens pour les médecins d'intervenir. En dépit de cette situation d'agression, la RDC, nation éprise de paix et respectueuse des conventions internationales, réaffirme son attachement aux principes édictés par la Charte des Nations Unies et son désir inébranlable de favoriser la culture de la paix dans la région des Grands Lacs. La première manifestation de cet idéal a consisté pour le Gouvernement de Salut Public à saisir le Conseil de sécurité et le Secrétaire général de l'ONU en vue d'obtenir le retrait immédiat et inconditionnel des forces d'occupation. La réaction de la communauté internationale n'a pas été à la hauteur de la gravité de la situation. Le Conseil de sécurité s'est contenté de rendre publiques quelques déclarations pleines d'ambiguïtés appelant au cessez-le-feu et au retrait des troupes étrangères sans les nommer. Dans des cas comparables, que ce soit au Kosovo, en Bosnie et au Koweit, le Conseil s'est impliqué promptement et matériellement afin d'y rétablir la paix. Cette politique de deux poids et deux mesures du Conseil de sécurité risque de constituer un malheureux précédent susceptible d'entamer profondément la crédibilité de l'ONU et d'annihiler les efforts de réformes en cours.

La RDC, consciente de ses lourdes responsabilités de garantir l'intégrité territoriale du pays, s'est vue obligée de recourir à une réplique armée pour mettre fin à l'invasion. La RDC a fait appel à ses alliés pour faire face à l'agression ougando-rwandaise en application de l'article 51 de la Charte de l'Organisation. Aucune nation ne peut accepter que sa souveraineté et son intégrité territoriale deviennent des sujets de contestation. Le peuple congolais n'acceptera jamais ni l'assujettissement, ni l'oppression, ni l'imposition d'anti-valeurs comme la culture de génocide dont s'accommodent si bien certains Etats.

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La Cour criminelle internationale pour laquelle les actes constitutifs ont été signés il y a peu à Rome devra se mettre au travail et poursuivre ceux qui cherchent la destruction de l'humanité. L'échec des différents appels au cessez-le-feu ne peut être imputé à la RDC. Il est le résultat de l'entêtement, de la mauvaise foi et du cynisme du Rwanda et de l'Ouganda à la table des négociations tenues respectivement à Victoria Falls et à Addis- Abeba. La RDC estime que l'application du cessez-le-feu passe obligatoirement par le retrait immédiat et sans conditions des troupes étrangères de son territoire national. Malgré la situation qui prévaut en RDC, le Gouvernement reste fidèle au calendrier qui aboutira à la démocratisation de l'espace politique. La RDC informe l'Assemblée générale de la signature, ce 22 septembre 1998, par le Chef de l'Etat du décret-loi 122 relatif à l'organisation et à l'exercice du pouvoir dans le pays. Ce nouveau décret-loi confère à la Commission constitutionnelle les prérogatives dévolues à l'Assemblée constituante afin de finaliser l'avant-projet de Constitution à soumettre au référendum populaire qui sera organisé dès l'aube de l'année 1999. La reconstruction de la RDC et le développement socio-économique de l'Afrique en général sont des questions prioritaires pour le Gouvernement de la RDC. Il est essentiel que le rôle de l'ONU ne se limite pas à accompagner l'Afrique dans la concrétisation de mesures prises ou à prendre. Le système des Nations Unis doit traduire par les faits le partenariat organique qui le lie à l'Organisation de l'unité africaine. La RDC lance un appel pressant à l'ONU et plus particulièrement aux "amis du Congo" pour qu'ils contribuent activement au Fonds fiduciaire créé pour aider au relèvement économique et à la reconstruction du pays. La RDC appréciera toute action que l'ONU pourrait envisager en vue d'amener la République rwandaise à signer le Pacte de non- agression entre les Etats Membres du Comité consultatif permanent des Nations Unies sur les questions de sécurité en Afrique centrale.

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