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L/211

LA COMMISSION PLENIERE POURSUIT SON EXAMEN DE LA PROPOSITION DE SON BUREAU

14 juillet 1998


Communiqué de Presse
L/211


LA COMMISSION PLENIERE POURSUIT SON EXAMEN DE LA PROPOSITION DE SON BUREAU

19980714 Rome, 13 juillet -- La Commission plénière de la Conférence diplomatique de plénipotentiaires des Nations Unies sur la création d'une Cour criminelle internationale a poursuivi, cet après-midi et ce soir, l'examen du texte de proposition du Bureau, en particulier le chapitre II du projet de statut relatif aux questions de compétence, de la recevabilité et du droit applicable. La proposition du Bureau suggère des variantes - fruit des différentes positions des Etats - résultant, notamment, des délibérations au sein de la Commission, sur les crimes relevant de la compétence de la cour (article 5, 5 bis, 5 ter et 5 quater), et sur les éléments constitutifs des crimes (article xx), les conditions préalables à l'exercice de la compétence et sur l'acceptation de la compétence (article 7 et 7 bis), ainsi que sur le rôle du Conseil de sécurité (article 10), sur le pouvoir du procureur (article 12) et sur les décisions préliminaires concernant la recevabilité (article 16).

La Commission, avant d'entamer ses délibérations sur le texte de proposition de son Bureau, a entendu le Représentant du Secrétaire général et Conseiller juridique des Nations Unies, M. Hans Corell, qui a indiqué qu'à moins qu'une solution aux questions de fond ne soit trouvée dans un avenir très proche, il sera difficile de procéder à l'adoption d'un projet de statut à la fin de la semaine. Il a regretté que l'engagement des Etats Membres en faveur de la création d'une cour criminelle internationale se heurte aux positions très fermes de certaines délégations fondées sur des considérations d'ordre national. Il faudra donc faire montre d'un effort déterminé pour parvenir à un consensus, a-t- il suggéré tout en notant qu'à l'heure actuelle, une approche agréée bénéficie d'un large appui. Il faut donc prier instamment les délégations qui insistent sur leur position de n'épargner aucun effort pour trouver un terrain d'entente, a-t-il déclaré ensuite.

La Commission, quant à ses travaux proprement dits, a félicité le Bureau de son initiative. Des délégations ont en revanche regretté que le Bureau n'ait pas pris dûment compte de leurs propositions qui ne s'harmonisent pas avec celles contenues dans le texte proposé par le Bureau et qui porte notamment sur l'article 5 relatif aux crimes relevant de la compétence de la cour. Nombre de délégations, dont l'Union européenne et le Mouvement des pays non alignés, ont regretté qu'en plus du crime de génocide, du crime contre l'humanité et du crime

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de guerre, la proposition du Bureau ne cite pas le crime d'agression. Elles ont espéré que ce crime figurera dans l'Acte final ou dans une résolution annexe. Le Cameroun a estimé qu'un consensus pourrait être dégagé si le projet de statut prévoyait que les éléments constitutifs du crime d'agression seraient déterminés par l'assemblée des Etats parties. D'autres délégations, comme la Jamaïque, la Turquie ou le Sri Lanka, ont regretté que le document du Bureau ne mentionne pas le terrorisme ou le trafic de drogues, les embargos économiques imposés (en violation du droit international), auxquels ont fait allusion le Burundi et l'Iraq. Ces délégations ont jugé que la distinction faite entre le noyau dur des crimes et les crimes définis dans les conventions est tout à fait discutable. Pour sa part, Israël a souhaité que la compétence de la cour ne concerne pas les actes individuels.

Quant aux violences sexuelles, citées parmi les crimes contre l'humanité, la Jordanie, appuyée par d'autres délégations, dont les Etats-Unis et les pays nordiques, a appelé les délégations réticentes à son inclusion et à ne pas condamner en la matière le lien entre grossesse forcée et avortement. La grossesse forcée est une véritable torture à laquelle on ne saurait opposer le droit à la vie. Contrairement à la majorité des pays de l'Amérique latine, le Pérou s'est prononcé en faveur de l'inclusion des violences sexuelles. Pour ce qui est de l'article 5 quater, consacré au crime de guerre, des délégations, dont l'Union européenne, ont regretté que le recours aux armes nucléaires ne soit pas décrit comme crime de guerre. Le Mozambique et le Nicaragua ont particulièrement insisté sur l'utilisation des mines antipersonnel.

La Commission a entendu des délégations qui ont réitéré leur opposition au fait que les crimes de guerre comprennent également des actes commis dans un conflit ne présentant pas un caractère international. Pour la Turquie, par exemple, les mesures prises par les pays pour lutter contre le terrorisme ou le trafic des stupéfiants sur leur propre territoire ne doit, en aucun cas, relever de la compétence de la cour. Pour sa part, l'Afrique du Sud, au nom de la Communauté pour le développement de l'Afrique australe, a adopté une position contraire arguant que le nouveau chapeau des sections C et D, relatives à cette question restreint non seulement le champ d'application de l'article 5 quater relatif aux crimes de guerre mais exclut également de manière implicite les conflits opposant des groupes armés organisés. Pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), le seuil supplémentaire imposé dans la section D fait que bien des conflits ne seraient pas couverts par le statut et donc dans la pratique nombre d'atrocités ne pourraient être jugés en vertu du statut. A cet égard, la Sierra Leone a fait observer que les rebelles, qui n'ont pas de base structurée, commettent de graves violations du droit international humanitaire. Aussi, a-t- il proposé d'apporter un amendement au texte en vue de l'appliquer aux conflits sur le territoire d'un Etat entre les forces armées gouvernementales et des groupes armés organisés ou entre deux ou plusieurs groupes armés organisés. Pour sa part, l'Australie a estimé qu'il est illogique d'interdire l'utilisation de certaines armes dans les conflits armés internationaux et de passer sous silence leur utilisation dans les conflits armés internes.

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La Commission, en ce qui concerne les éléments constitutifs des crimes (article XX), a entendu des suggestions qui ont notamment porté sur l'opportunité d'inclure de simples directives ou des dispositions de caractère contraignant pour la cour. L'examen de cette question, ont insisté des délégations, ne devrait pas contribuer à l'entrée en vigueur du statut. Ainsi des délégations ont souhaité donner au procureur une certaine latitude quant à la définition des éléments constitutifs des crimes. Les conditions préalables à l'exercice de la compétence et l'acceptation de la compétence de la cour (article 7 et 7 bis) ont également nourri les débats de la Commission plénière. Plusieurs délégations se sont prononcées en faveur d'une compétence automatique de la cour en ce qui concerne le noyau dur des crimes - crime de génocide, crime de guerre et crime contre l'humanité. EIles se sont opposées à la distinction établie par la proposition du Bureau qui suggère la compétence automatique pour le crime de génocide tout en le subordonnant au consentement des Etats pour les deux autres crimes.

La Commission, sur le rôle du Conseil de sécurité, a observé que la plupart des délégations se sont prononcées en faveur de la variante qui autorise le Conseil, en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, à demander à la cour de suspendre l'information ou les poursuites engagées par le procureur pendant un laps de temps donné. L'autre variante suggérait un délai de 12 mois. L'Algérie s'est opposée à cette notion de "laps de temps donné" dans un texte qui exige, a souligné son représentant, une rigueur juridique. Les autres délégations ont reconnu qu'une période de douze mois serait trop longue. Pour d'autres délégations, comme le Pakistan, il faut éviter toute disposition permettant au Conseil de retarder ou de paralyser le fonctionnement de la cour, donc d'éviter que cette dernière ne devienne un organe subsidiaire du Conseil. Les délégations se sont opposées à toute hiérarchisation entre le Conseil et la cour en privilégiant le principe de compétences parallèles. La Tanzanie s'est opposée à toute référence au Conseil de sécurité au motif que la cour ne doit pas seulement être indépendante mais doit être considérée comme indépendante. Pour la Bosnie-Herzégovine, à l'instar d'autres délégations, il faut prendre des dispositions pour assurer la protection des preuves et des témoins.

La Commission, pour ce qui est du pouvoir du procureur (article 12), a entendu les délégations qui ont réitéré leur souhait de voir un procureur indépendant doté de pouvoir ex officio. Ces délégations ont émis des réserves quant à la nécessité de garanties supplémentaires avant que le procureur n'agisse. Comme l'ont souligné la Belgique et l'Italie, si le procureur s'oriente dans des initiatives partiales, l'assemblée des Etats parties pourraient toujours se saisir de la situation. Pour sa part, le Chili s'est déclaré ouvert à toute négociation sur les garanties supplémentaires à moins qu'elles ne constituent un prétexte pour compromettre le fonctionnement de la

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cour. Pour la plupart des délégations, l'article 16 sur les décisions préliminaires concernant la recevabilité introduit une procédure complexe qu'il convient de réviser. Pour certaines d'entre elles, à l'instar du Venezuela et le Portugal, cet article contient des dispositions inacceptables, notamment en ce qui concerne le statut des Etats parties qui peuvent se prévaloir de droits et prérogatives sans assumer les obligations qui incombent aux Etats parties. Cette position a été notamment défendue par le Venezuela et le Portugal. Le Cameroun est intervenu sur le principe Ne bis in idem (article 18), qui prévoit que nul ne peut être jugé deux fois pour les mêmes chefs d'accusation à moins que la procédure devant l'autre juridiction ait eu pour but de soustraire la personne concernée à sa responsabilité pénale ou si le procès n'a pas été mené dans le respect des garanties prévues par le droit international. Le représentant s'est opposé à cette précision en demandant de savoir qui pouvait être juge d'un "bon ou d'un mauvais procès".

Les pays suivants sont intervenus dans les délibérations de cet après-midi et de ce soir : Suède, Trinité-et-Tobago, Jamaïque, Nouvelle-Zélande, Japon, Pays-Bas, Belgique, Azerbaïdjan, Turquie, Afrique du sud, Iran, Syrie, Cuba, Colombie, Jordanie, Fédération de Russie, Thaïlande, Cameroun, Brésil, Soudan, Pologne, Australie, Mexique, Autriche, Egypte, Lesotho, Sierra Leone, Grèce, Nigéria, Italie, Tunisie, Burundi, Ouganda, Israël, Afghanistan, Algérie, Indonésie, Argentine, Finlande, Venezuela, Sri Lanka, Tanzanie, Liechtenstein, Pakistan, Qatar, Philippines, Lituanie, Ethiopie, Iraq, Canada, Danemark, Mozambique, Nicaragua, Portugal, Hongrie, Estonie, Namibie, Roumanie, Swaziland, îles Salomon, Irlande, Madagascar, Botswana, Norvège, Libye, Angola, Congo, Chili, Oman, Pérou, Malta, Slovénie, Zimbabwe, Bangladesh, Costa Rica, Bolivie, Andorre, Bosnie-Herzégovine, Cameroun, Slovaquie, Lettonie.

La prochaine réunion de la Commission plénière aura lieu mardi 14 juillet à partir de 15 heures. Elle devrait entendre une allocution de M. Lamberto Dini, Ministre des affaires étrangères de l'Italie.

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