LES ONG D'AMERIQUE DU NORD PLAIDENT POUR LA PROMOTION D'UNE IMAGE PLUS JUSTE ET PLUS HUMAINE DU PEUPLE PALESTINIEN
Communiqué de Presse
GA/PAL/783
LES ONG D'AMERIQUE DU NORD PLAIDENT POUR LA PROMOTION D'UNE IMAGE PLUS JUSTE ET PLUS HUMAINE DU PEUPLE PALESTINIEN
19980616 Le Colloque des ONG d'Amérique du Nord sur la question de Palestine a poursuivi ce matin son débat sur le thème "des stratégies de remise en question de l'avenir". Les questions relatives au respect de la légitimité internationale, à la nécessité d'assurer au peuple palestinien protection et appui de la communauté internationale et à la mobilisation de l'opinion publique ont été largement évoquées par les participants.Des participants se sont élevés contre l'ignorance dans laquelle est maintenue l'opinion publique et contre le processus de déni de la réalité pratiqué par les décideurs politiques sur la question de Palestine. Ils ont souligné l'urgence de mettre en place des stratégies de lutte contre ce qu'ils ont appelé le confort psychologique de l'ignorance. Nous ne pouvons pas accepter de compromis sur la réalité, a souligné un intervenant. Une diplomatie plus audacieuse, des campagnes d'information systématiques en faveur de la création d'un Etat de Palestine et la mise en place d'une nouvelle coalition de conscience qui dépasse les clivages ethniques et religieux ont été prônés.
Des questions et des critiques sur le rôle que jouent les médias et l'industrie du film aux Etats-Unis ont été formulées. La promotion d'une image plus juste et plus humaine des Palestiniens en particulier et des Arabes en général a été demandée par certains intervenants comme le début d'un changement de perception indispensable à une meilleure prise de conscience des injustices dont est victime le peuple palestinien. Un intervenant a vivement critiqué l'attitude du Congrès américain, jugé comme le plus antipalestinien qu'aient jamais connu les Etats-Unis.
Les personnalités suivantes ont fait une déclaration: Mme Ruhama Marton, Présidente de Physicians for Human Rights; M. Michael Lynk, Professeur de droit à l'Université d'Ottawa et membre de Lawyer labour; M. Keith Jennings, Directeur de African-American Human Rights Foundation et Mme Amira Hass, journaliste pour le quotidien Ha'aretz.
Le débat général a été suivi d'une série de questions-réponses.
La prochaine séance plénière du colloque aura lieu mercredi 17 juin à dix heures.
CONSCIENCE: UNE STRATÉGIE DE REMISE EN QUESTION DU FUTUR
Respect de la légitimité internationale
Mme RUHAMA MARTON (Présidente de Physicians for Human Rights) a déclaré que toutes les ONG en Israël devront bientôt faire face aux mêmes paramètres. Il existe deux entités qui ne peuvent être dissociées du travail des ONG. Il s'agit, d'une part, de l'opinion publique et des décideurs politiques, d'autre part. Chaque groupe repose sur des fondements différents et il nous faut en être conscients pour pouvoir les influencer, a souligné Mme Marton. Il faut également garder à l'esprit les liens entre les décideurs et l'opinion publique, d'où la nécessité de ne pas négliger un des ces grands groupes et de faire la distinction entre deux processus psychologiques. Puisque les gens ne connaissent pas la réalité de certaines choses, il est important de pénétrer leur esprit pour qu'ils en prennent conscience. Il faut savoir que l'opinion publique a une vision du monde qui résiste aux changements et qu'il est par conséquent difficile de la modifier. Mais les ONG, par un processus long et difficile, peuvent changer les perceptions grâce à des stratégies efficaces qui doivent constamment lutter contre le confort psychologique de l'ignorance.
Mme Marton a souligné l'importance d'une coopération étroite entre les ONG palestiniennes et les ONG israéliennes. Il s'agit de montrer par cette unité ce qu'est la réalité. Nous avons beaucoup de chose en commun. Au cours des dix dernières années, nous avons, avec d'autres ONG, contribué à une prise de conscience du public notamment en matière de lutte contre la torture. Ce travail de promotion de la réalité doit être cependant suivi d'actions concrètes. En 1993, le terme "torture" était tabou en Israël et le recours systématique à la torture n'était pas accepté par les médias ni par les décideurs politiques ou l'opinion publique israélienne. Ce déni de la réalité doit prendre fin. L'action que nous déployons pour que des changements aient lieu dans la vie politique et militaire passe par certaines pressions politiques. Ceci est valable pour tous les types d'autorité. Les interventions directes doivent reposer sur une action persistante et permanente et placer la question des droits de l'homme à l'ordre du jour. Il faut également fournir des informations à la presse étrangère comme moyen de pression. Nous ne pouvons pas accepter de compromis sur la réalité.
Nécessité d'assurer au peuple palestinien protection et appui de la communauté internationale
M. MICHAEL LYNK (Membre de "Lawyer Labour et Professeur de droit à l'Université d'Ottawa") a déclaré qu'il est important de réfléchir au processus qui va mener la communauté internationale à résoudre le problème du Moyen Orient. Ce processus doit être basé sur le droit international dont le droit à la protection est le chapitre qui doit s'appliquer à la cause palestinienne. Les communautés nationales doivent se plier à des règles qui
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permettraient de maintenir une certaine harmonie dans les relations internationales. La communauté internationale doit appliquer des principes juridiques stricts dans un monde ou la distribution de la justice est bien souvent inéquitable.
Les Palestiniens ont le droit de ne pas connaître l'occupation dont ils sont victimes de la part d'Israël. Le fait de respecter les principes du droit international permettrait d'éviter les abus politiques sur lesquels repose la politique d'occupation israélienne. Seuls les principes du droit permettraient d'équilibrer les relations entre populations et entités dans cette région difficile du monde. Le fait de respecter les principes du droit permettrait aussi une amélioration du respect des droits de l'homme.
Le respect permettrait de mettre fin aux comportements qui mettent en danger les possibilités et les perspectives de souveraineté et d'autodétermination auxquels le peuple palestinien a droit. La déclaration des droits de l'homme et les autres fondements des droits de l'homme reconnus par la communauté internationale et mis en place par les Nations-Unies doivent être pleinement appliqués. Ces documents sont contenus dans la Charte des droits internationaux. La torture devrait cesser d'exister dans les mesures mises en oeuvre par Israël contre les Palestiniens. Chacun a aussi le droit à sa liberté de mouvement. Et chaque être humain a le droit a une nationalité. Le droit à la propriété qui est violé chaque jour par Israël devrait être rétabli en faveur des Palestiniens par la communauté internationale. Les raisons de sécurité invoquées par Israël ne peuvent justifier les violations de la réglementation internationale. Les déportations et les transferts par la force de populations, ne devraient pas être tolérées par le droit international.
Aucun pays n'a jamais accepté les thèses israéliennes sur les territoires occupés. De multiples résolutions du Conseil de Sécurité et les arrêts rendus par les juristes internationaux ont toujours demandé à Israël de respecter les obligations contenues dans la 4ème Convention de Genève, que le Gouvernement israélien a pourtant signée. Israël a annexé et contrôle les ressources des territoires palestiniens, y compris les ressources aquifères, ce qui est contraire à l'esprit de la Convention. Les dispositions de cette Convention qui s'appliquent à la protection des populations des territoires ne sont pas respectées, et l'Etat d'Israël continue de mettre en danger la survie même des populations palestiniennes par ses mesures de sanctions économiques et de fermeture des territoires palestiniens sous prétexte de sécurité militaire.
Bien que l'UNRWA ait apporté une aide et une protection aux réfugiés palestiniens, la Convention sur le statut des réfugiés n'a jamais été totalement appliquée aux Palestiniens, à cause de certaines insuffisances des textes élaborés en 1949. Mais les raisons de ces insuffisances sont aujourd'hui largement caduques, étant donné qu'en 1949, on pensait que le problème de la Palestine allait être provisoire.
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Mobilisation de l'opinion publique
M. KEITH JENNINGS (Directeur de la Fondation africaine-américaine des droits de l'homme à Washington) a dit que la plupart des Américains ne connaissent pas réellement le problème palestinien. Ils n'ont pas les informations nécessaires ou alors ont très peu accès à des informations justes et crédibles sur le processus de paix, sur les notions de mise en résidence surveillée, les conflits fonciers, les constructions de colonies, les camps de réfugiés, l'importance du statut de Jérusalem et la condition du peuple palestinien vivant sous occupation. Les images de manifestants jetant des pierres face à des soldats israéliens qui se servent de leurs fusils d'assaut M-16, ont concentré l'attention sur les auteurs d'attentats-suicides qui frappent des innocents dans les transports en commun.
L'état d'esprit actuel des Américains a été forgé par un nombre de facteurs allant des stéréotypes et des préjugés les plus négatifs, à une franche hostilité du Congrès à la cause palestinienne. M. Jennings a exposé, dans ce contexte, les vues d'un professeur de communication de masse de l'Université "Southern Illinois" M. Jack Shaheen qui dénonce certaines productions cinématographiques de même que les médias américains dans lesquels les Arabes sont dépeints soit comme des milliardaires ou des poseurs de bombes. Ils sont aussi représentés comme des danseurs du ventre, des brigands Bédouins ou de pauvres femmes vêtues de noir. Selon le Professeur Shaheen, dans ces médias l'Arabe est quelqu'un qui utilise le pétrole ou le terrorisme comme arme contre les sociétés "civilisées", traite les femmes arabes comme des objets de plaisir, mais à un penchant pour les femmes blanches qu'il kidnappe et viole. Cette idée déformée que le public américain se fait de l'Arabe remonte à 1980, a dit M. Jennings. D'autre part, citant le film "Delta Force", qui relate l'action d'un groupe paramilitaire américain libérant des otages détenus par des terroristes arabes, M. Jennings a estimé que ce genre de production déclenche les bravos de l'assistance, et renforce le sentiment que le bien, symbolisé par un groupe, triomphe toujours du mal dont est responsable un autre groupe ethnique.
Mme AMIRA HASS (Journaliste, correspondante pour le quotidien israélien Ha'aretz) a déclaré que s'il n'est pas possible de refaire l'histoire, il est important toutefois de garder en mémoire les faits historiques pour envisager l'avenir. Elle a remis en questions certaines déclarations faites hier qui trahiraient la réalité. On ne peut pas en effet aborder l'histoire d'Israël sans évoquer l'holocauste et la dépossession des juifs dans le monde entier, a-t-elle souligné. Elle a évoqué par ailleurs la situation des Palestiniens employés par les Bureaux de coordination et de liaison qui font partie intégrante de l'accord d'Oslo et dont le but est de coordonner toute action civile entre les deux parties. Beaucoup des employés des bureaux de coordination sont des anciens militants du Fatah. Au cours des dernières années, j'ai vu ce regard commun aux Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie qui traduit un mélange de colère, de tristesse et d'impuissance. Au terme de l'accord d'Oslo, la partie palestinienne aurait du avoir son mot à dire sur un
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certain nombre de choses concernant sa population civile mais ce n'est pas le cas dans la réalité. L'amélioration de la situation économique était invoquée comme un mantra dans les accords de paix et la consolidation de l'entité politique à Gaza et en Cisjordanie faisait également partie des promesses. Mais c'est l'effet inverse qui s'est produit.
De 1992 à 1996, il y a eu une diminution de 18 % du PNB. Chaque famille au cours des 4 ou 5 dernières années a vu une réduction importante de ses dépenses de base, a indiqué Mme Hass. Ces promesses de prospérité économique reposaient entre autres sur l'expansion des échanges entre Gaza et la Cisjordanie et sur l'idée d'une modernisation de l'économie palestinienne. Il se produit un phénomène anti-modernisation notamment en matière de transport. Mme Hass a évoqué les routes de contournement israéliennes qui contribuent à l'isolement des territoires palestiniens. Les promesses de prospérité économique n'ont donc pas été tenues. Pour ce qui est de l'intégrité territoriale de Gaza et de la Cisjordanie, Mme Hass a évoqué le démantèlement des territoires palestiniens. Israël continue de contrôler l'existence des Palestiniens tout en s'étant dégagé de tous liens avec la population occupée. L'occupation s'est donc perpétuée mais sous une forme différente. De plus, les Israéliens ont réussi à contrôler l'élite palestinienne en leur accordant un certain degré de liberté de mouvement. C'est cette même élite qui transmet aux autorités israéliennes les demandes de circulation engendrant ainsi la méfiance au sein du même peuple. On commence à parler de pots-de-vin et de corruption. Cette élite détient également des monopoles commerciaux dont les objectifs sont contraires à la philosophie du Fonds monétaire et de la Banque mondiale. L'impression générale qui se dégage est que l'on se préoccupe peu du bien-être de la population palestinienne.
Questions-réponses
Une intervenante a déclaré que, vivant au Liban pendant l'invasion israélienne, le bâtiment dans lequel elle se trouvait avait été bombardé par l'aviation israélienne, et devant ses yeux une femme avait perdu toute sa famille. Personne ne peut ressentir ce que vivent les familles affectées par les violences israéliennes. Juridiquement, y a-t-il un obstacle qui empêcherait l'exclusion des Etats-Unis et d'Israël de l'Organisation des Nations-Unies? Cette réunion ne peut-elle réfléchir sur cette question, ou alors ne sera-t-elle simplement qu'une rencontre comme les autres?
M. Graybeal a répondu que La Charte des Nations-Unies prône la promotion de la paix. Des tentatives et des propositions ont été faites dans le passé demandant l'exclusion d'Israël, mais des avis ont toujours prévalu qui sont allés vers la tenue d'un dialogue pouvant mener à une solution équitable du problème palestinien dans le respect des textes et des résolutions de l'ONU.
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Le Secrétaire de la Fédération arabe canadienne a demandé à M. Lynk et à Mme Marton une question sur un projet de loi visant à sanctionner Israël sur les destructions faites pendant l'Intifada aux biens palestiniens et sur les tortures subies par les prisonniers Palestiniens. Où en est cette proposition faite à la Knesset?
Réponse de Mme Hass: La loi dont vous parlez n'a pas été approuvée par la Knesset. Un intense lobbying des partis radicaux a bloqué son passage devant le Parlement.
Réponse de Mme Marton: Les médecins de l'Association des droits de l'homme ont fait des efforts depuis 4 ans pour que les victimes de tortures pendant l'Intifada soient dédommagées. Mais si un tribunal arrive à être mis en place pour traiter de ce problème, ce sera déjà une victoire et une reconnaissance. Quant au projet de loi devant la Kneset, les ONG devraient le soutenir au plan international et pousser l'opinion internationale à mieux connaître cette proposition.
Question à Mme Hass: Historiquement, l'Holocauste est utilisé comme une excuse par Israël pour justifier certaines de ses politiques. Pourquoi en avez-vous parlé dans votre intervention?
Réponse de Mme Hass: J'en ai parlé parce que ce thème a été oublié hier dans les présentations qui ont été faites. On ne peut pas oublier ce fait historique même s'il ne faut pas l'utiliser comme excuse. La plupart des Juifs qui émigraient avant l'Holocauste n'étaient pas tous des sionistes. Le peuple juif est avant tout un peuple de diaspora. Le sionisme a été utilisé par certains Juifs comme un outil de combat contre la façon dont ils avaient été traités et je pense que les Palestiniens n'ont pas suffisamment compris cette dimension de la mentalité juive. L'Holocauste a, c'est vrai, été utilisé comme moyen de compensation par les Juifs d'Israël. Pour pouvoir parler des abus de l'utilisation de l'Holocauste, il faut comprendre la complexité de l'histoire d'Israël et le fait qu'aujourd'hui les Juifs d'Israël ne se considèrent plus comme d'Europe de l'Est ou d'ailleurs, ils sont simplement Israéliens.
Un participant a demandé s'il était possible d'éviter les chocs et explosions sociales au regard de la situation économique du peuple palestinien et de la répression accrue. Mme Marton a répondu que la paix n'existe pas mais qu'on assiste au contraire à un autre type d'occupation déguisée. Le Premier Ministre israélien est le grand gagnant de ce drame. Il a réussi à tuer ce processus sans déclarer la guerre. Il nous incombe donc de montrer ce qu'est réellement cette paix. Mme Hass a défini les Accord d'Oslo comme un bouclier devant amortir les explosions. Le bouclage des territoires est un phénomène qui existait auparavant et qui était exploité par le gouvernement travailliste. Pour ce qui est du manque d'eau, Mme Hass a rappelé que les Américains investissent dans l'amélioration des systèmes d'adduction en place.
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Un autre participant a évoqué la force nucléaire d'Israël qui constitue une menace internationale. Le moment est venu pour Israël de révéler la vérité au sujet de son arsenal nucléaire. Que peut-on faire à ce sujet, a-t- il demandé.
Un représentant du Croissant Rouge palestinien a réfuté les propos de Mme Hass. Il a critiqué certaines de ses déclarations notamment celles tendant à accuser l'Autorité palestinienne d'échouer dans ses efforts. Mme Hass a répondu que le problème est la non application des Accords d'Oslo. Il ne s'agit pas de reprocher ceci ou cela mais je me borne à décrire la situation avec exactitude sur la base des faits. Beaucoup de Palestiniens partagent mon avis.
Un participant a dit ne pas comprendre pourquoi l'holocauste n'a pas érigé un mur contre les violations des droits de l'homme. Un autre participant a demandé au Comité de revoir son mandat en matière de violations des droits des Palestiniens en faisant valoir que les violations des droits de l'homme ont été commises aussi bien par les membres du gouvernement travaillistes que par le Likoud.
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