ENV/DEV/430

LA DIMENSION SOCIALE ET HUMAINE DE L'EAU EST MISE EN AVANT PAR PLUSIEURS INTERVENANTS AU COURS DU DEBAT DE HAUT NIVEAU

29 avril 1998


Communiqué de Presse
ENV/DEV/430


LA DIMENSION SOCIALE ET HUMAINE DE L'EAU EST MISE EN AVANT PAR PLUSIEURS INTERVENANTS AU COURS DU DEBAT DE HAUT NIVEAU

19980429 La Commission du développement durable a poursuivi cet après-midi son débat de haut niveau, à participation ministérielle, sur les thèmes prioritaires de la session.

Au cours de ce dialogue, que certains ont souhaité moins formel et plus interactif, plusieurs intervenants ont insisté sur le fait que l'eau ne constituait pas seulement un bien économique mais aussi un bien social, voire spirituel, et ont préconisé de tenir compte dans les politiques de gestion de la dimension humaine de l'eau. Les participants ont à nouveau souligné l'importance des transferts de technologies écologiquement rationnelles des pays développés vers les pays en développement, ainsi que la nécessité d'assurer un appui financier adéquat aux efforts de ces derniers en vue de parvenir à un développement durable.

Les représentants des pays suivants sont intervenus au cours du débat : Ghana, Pakistan, Lituanie, Argentine, Thaïlande, Algérie, Philippines, Egypte, Chine, France, Mozambique, Afrique du Sud, Pays-Bas, Panama, Arabie saoudite, Zimbabwe et Ethiopie. Les représentants de Westvaco Corporation, du syndicat des employés de la confection, de l'industrie et du textile et d'AFL-CIO (UNITE), du Caucus des populations autochtones et du Caucus des femmes ont également pris la parole.

La Commission poursuivra son débat de haut niveau demain, jeudi à partir de 10 heures.

Suite du débat

M. JOHN E. AFFUL, Ministre de l'environnement, de la science et de la technologie du Ghana, a déclaré que son pays fait actuellement face à une crise importante en ce qui concerne ses ressources en eau. L'électricité est actuellement rationnée, ce qui nuit non seulement à la population ghanéenne mais également à l'industrie et aux activités économiques du pays. A cause de cette situation, davantage de personnes utilisent du charbon, c'est-à-dire que davantage d'arbres sont coupés. Plusieurs communautés du pays font face à des pénuries d'eau potable et le pire est à craindre pour le Ghana. Les précipitations sont irrégulières et il aurait fallu avoir une meilleure gestion des ressources en eau douce. Le Ghana a engagé une action pour développer un système de gestion intégré en eau douce. Le Ghana partage ses ressources en eau avec ses pays voisins, à savoir le Burkina Faso et la Côte d'Ivoire, et reconnaît qu'une coopération est nécessaire pour arriver à une meilleure gestion de l'eau douce. L'insuffisance en eau conduit à un problème non seulement économique mais également social. L'eau est nécessaire au bien être et à la santé de la population. Les communautés, du fait qu'elles assument la responsabilité de gérer le système d'approvisionnement en eau, doivent avoir conscience des nécessités du développement durable. Le secteur industriel doit contribuer à la protection de l'environnement et être plus responsable. Il faut que des ressources financières adéquates soient allouées aux pays en développement afin de leur permettre d'atteindre les objectifs du développement durable.

M. MAKHDOOM SYED AHMAD MAHMUD, Ministre d'Etat de l'environnement, de l'administration local et du développement rural du Pakistan, a déclaré que dans son pays moins de 20% de la population avait accès à l'eau potable et aux infrastructures sanitaires. La prise en compte de tous les coûts dans la tarification de l'eau priverait une large majorité de la population d'un accès à l'eau douce. En outre, l'économie du pays étant fondée sur l'agriculture, il est difficile de mettre en place des mécanismes tenant compte de tous les facteurs dans la fixation du prix de l'eau pour les agriculteurs. Le Gouvernement pakistanais travaille en étroite collaboration avec le secteur industriel pour promouvoir le développement durable. Ainsi, il encourage l'industrie à respecter les normes nationales relatives à la qualité de l'environnement, à utiliser des outils de gestion modernes, comme l'amélioration des conditions de travail et le respect de ISO 14000. Le transfert de technologies écologiquement rationnelles demeure essentiel pour pouvoir réaliser les objectifs d'Action 21. Le marché ne peut assurer seul les investissements adéquats pour le développement de technologies écologiquement rationnelles, ni promouvoir le transfert de ces technologies sur une base consensuelle des pays développés vers les pays en développement. Le rôle des gouvernements doit donc aller au-delà de la création d'un cadre propice, en assurant le transfert de technologies non brevetées et non commercialisées financées par des fonds publics. S'agissant de la protection

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des océans et des mers, et d'un tourisme durable, il a souligné l'importance d'une large participation de la société civile au dialogue sur ces questions et a appuyé la proposition du Secrétaire général de créer un fonds visant à promouvoir la participation des grands groupes des pays en développement. Le développement durable est une réalité incontournable. Mais, cinq ans après Rio, les résultats enregistrés sont décevants, a déploré le Ministre, en soulignant que la durabilité requiert un niveau sans précédent de coopération et de coordination, ceci pour pouvoir réaliser des objectifs à long terme et résoudre conjointement les problèmes.

M. ARTURAS DAUBARAS, Vice-ministre de la protection de l'environnement de la Lituanie, a déclaré qu'un Conseil national pour le développement durable a été créé au mois de mars de cette année dans son pays, pour promouvoir une plus grande coopération entre le gouvernement, l'industrie et la société civile dans ce domaine. Ce Conseil comprend 39 membres dont des représentants du Parlement, des membres de la communauté scientifique, du secteur industriel, des autorités locales et des organisations non gouvernementales. Le Ministre de la protection de l'environnement dirige le Conseil, qui mettra en oeuvre dans tous les domaines les principes du développement durable, entre autres, dans la sphère du développement économique et social, et dans celle de la protection environnementale. Le Conseil supervisera aussi l'exécution de la Stratégie de protection de l'environnement, et celle du Plan d'action approuvé l'an dernier par le gouvernement lituanien.

M. Daubaras a précisé que dans le cadre de la priorité donnée cette année aux ressources en eau potable, la Stratégie de protection de l'environnement traitera aussi des problèmes liés à la planification de l'usage des ressources aquatiques, de même que de ceux touchant à la protection des réserves en eau contre leur surexploitation. La prévention de nouvelles modifications de la structure des réseaux hydrographiques naturels, ainsi que les activités de régulation et d'investissements en infrastructures, font également partie des actions de la Stratégie de protection de l'environnement. La participation publique aux problèmes écologiques est l'un des facteurs essentiels pour une exécution réussie de la stratégie environnementale lituanienne. Pour ce faire, il faut que la société lituanienne ait suffisamment de connaissance, de savoir-faire et d'expertise en vue d'atteindre le développement durable; une bonne information du public sur les problèmes d'environnement et son intérêt dans la recherche de solutions sont également nécessaires.

M. JOHN LUCKE, Président de Westvaco Corporation, a déclaré que la communauté des affaires s'est vue confrontée à de nombreux défis lors du Sommet de Rio. Aujourd'hui, même si de nombreux progrès ont été faits, beaucoup reste à faire. Des efforts de coopération entre les différents acteurs concernés sont nécessaires. Les entreprises doivent contribuer à l'élaboration de solutions écologiquement viables. L'écoefficacité demande

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une amélioration écologique et économique et contribue aux progrès réalisés dans le domaine du développement durable. Les entreprises doivent continuer à développer des théories en matière d'écoefficacité. Les marchés doivent être plus libres et plus ouverts afin de favoriser la création de chances égales, la suppression des barrières commerciales, et la promotion des technologies écologiquement viables. Les entreprises peuvent jouer un rôle important dans le domaine de la gestion des eaux douces en développant de nouvelles techniques. M. Lucke a suggéré que les tarifs soient ajustés afin que les populations les plus pauvres aient accès à l'eau. Une coopération entre les différents secteurs concernés est nécessaire pour atteindre les objectifs du développement durable.

Mme MARIA JULIA ALSOGARAY, Secrétaire aux ressources naturelles et au développement durable de l'Argentine, a déclaré que son pays a été l'un des chefs de file en matière de privatisation du secteur public. La privatisation est une question difficile dans le domaine de l'eau car il faut prendre en compte son aspect économique, écologique et social. Mme Alsogaray a évoqué la différence entre l'eau utilisée par l'agriculture, l'industrie et pour les besoins domestiques. Elle a souligné la nécessité d'un partenariat entre le secteur privé et le secteur public et a déclaré qu'il était important d'établir des politiques nationales de gestion de l'eau. L'Argentine encourage une participation de tous les acteurs concernés afin de pouvoir atteindre les objectifs du développement durable.

M. TECHAPAIBUL, Vice-Ministre de la technologie et de la science de la Thaïlande, a indiqué que le développement durable et la protection de l'environnement, constituaient des priorités du Gouvernement thaïlandais. Le Gouvernement a pris plusieurs mesures pour lutter contre la pollution et a adopté des stratégies de protection de l'environnement, introduisant notamment le concept du pollueur-payeur. La politique actuelle est, en outre, liée à des mesures visant à une production industrielle durable. Le Gouvernement a ainsi commencé à mettre en oeuvre une campagne de promotion d'ISO 14000 bien avant l'annonce d'ISO 14001. La réponse du secteur industriel a été encourageante et de nombreuses entreprises ont été certifiées. Le développement et le transfert de technologies écologiquement rationnelles sont essentiels pour un développement économique durable. Il a souligné l'importance des institutions des Nations Unies et des organisations régionales dans l'appui aux pays en développement, notamment pour ce qui est du renforcement des capacités institutionnelles, le transfert de technologie et la formation. Pour le représentant, les investissements directs ne peuvent remplacer l'aide publique au développement (APD), en particulier dans les pays les plus pauvres.

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M. JAY MAZUR, Président de l'Union des employés de la confection, de l'industrie et du textile (UNITE) et du Comité des affaires internationales, AFL-CIO, Etats-Unis, a déclaré que les bénéfices de l'ouverture des marchés n'avaient pas aidé les pauvres à sortir de la pauvreté. Ainsi, l'écart entre riches et pauvres a augmenté au Mexique depuis la conclusion de l'Accord de libre-échange nord américain (ALENA). Face à l'accélération de la mondialisation, il faut donc se préparer pour le changement. Deux approches différentes et opposées de la mondialisation se côtoient actuellement. Dans l'approche durable du développement, du commerce et des investissements, la mise en oeuvre de normes environnementales et les droits des travailleurs seront tout aussi importants que la protection du capital ou des droits de propriété intellectuelle, et les gens et l'environnement jouiront de la même protection dans les accords commerciaux que les droits d'auteur. Le représentant a préconisé l'arrêt de la course mondiale aux salaires les plus bas qui menace les conditions de vie dans tous les pays, y compris les travailleurs pauvres des pays en développement et les classes moyennes des pays industrialisés. L'indifférence des corporations multinationales va continuer à provoquer des tensions importantes, parfois sur les questions environnementales, en raison du fait que pour ce secteur, les profits ne sont jamais assez importants, et que les objectifs du développement durable sont toujours secondaires. En conséquence, les populations des pays en développement connaissent aujourd'hui la pire pollution de l'air et de l'eau dans le monde entier. Dans le même temps, ils font face à un chômage et une pauvreté importants. Le représentant a encore souligné le rôle important des syndicats dans la mise en oeuvre d'Action 21. Il a estimé que des solutions réelles à la pauvreté et à la dégradation de l'environnement pouvaient être apportées en planifiant des changements économiques qui bénéficieront à toutes les populations des pays en développement, et pas seulement aux riches. Cela signifie l'intégration de normes minimales du travail et de protection de l'environnement dans les lois nationales et les politiques de développement, ainsi que dans les accords internationaux. Ainsi, le nouveau traité sur les changements climatiques doit inclure des dispositions spécifiques et applicables garantissant la reconnaissance au niveau national des normes minimales de travail.

M. MOHAMED GUENDIL, Secrétaire général du Ministère de l'intérieur, des collectivités locales et de l'environnement de l'Algérie, a indiqué que son pays, souffre de la rareté d'eau puisqu'avec une disponibilité par habitant de 703m3 qui baissera à 430 en 2020, l'Algérie se trouve bien en-deçà du seuil des 1000m3 fixé par la Banque mondiale. L'alimentation en eau potable a donc toujours constitué un élément essentiel du processus de développement économique et social qui a amené le pays à investir 20 milliards de dollars pour la seule période allant de 1970 à 1993 soit une moyenne de 1,78% du produit intérieur brut (PIB). Malgré l'effort consenti, tous les usagers n'ont pu bénéficier d'un approvisionnement en eau continu ni d'un assainissement urbain adéquat, a dit le représentant, qui a en outre souligné

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que les pouvoirs publics ne pourront probablement pas engager les investissements nécessaires à la mobilisation et l'adduction de nouvelles ressources. L'Algérie, a-t-il poursuivi, s'est engagée depuis quelques années dans une démarche de gestion intégrée de l'eau potable.

En 1996, elle a créé cinq agences régionales de bassin hydrographiques venant compléter l'édifice institutionnel existant. Au niveau des régions, des comités de bassin ont été créés où siègent les collectivités locales, les usagers et l'administration locale. La nouvelle démarche préconise également d'autres mesures tendant à la rationalisation de l'utilisation de l'eau et notamment l'introduction d'une tarification régionale de l'eau, l'ouverture du service public de l'eau à la concurrence et une meilleure maîtrise de la pollution qui risque de constituer la cause essentielle de la pénurie d'eau à l'avenir. Un plan national de l'eau a été élaboré permettant l'adéquation régionalisée entre ressources et besoins et une nouvelle législation ouvre désormais le marché de l'eau, à l'investissement privé national et étranger, favorisant ainsi le partenariat avec les entreprises étrangères. Le représentant a conclu en soulignant l'importance pour beaucoup de pays de l'aide financière directe nécessaire à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'une politique nationale adéquate en matière de gestion des ressources en eau.

M. LOTILLA, Vice-Secrétaire général pour la planification économique des Philippines, a déclaré que son pays a élaboré un plan d'action de développement national en coopération avec les différents secteurs de la société. Les Philippines estiment qu'il faut promouvoir une démarche intégrée de la gestion de l'eau qui tienne compte des besoins de tous les secteurs concernés. De nombreuses initiatives ont été prises afin d'atteindre les objectifs du développement durable. Les Philippines estiment que la décentralisation et l'approche communautaire sont des éléments clefs qui doivent permettre de mettre en oeuvre de façon plus efficace les politiques de développement durable. La promulgation de la loi sur les peuples autochtones de 1997 est importante et doit contribuer au développement d'activités économiques qui respectent l'environnement. Les pauvres doivent avoir accès à l'eau et il est nécessaire que les gouvernements garantissent cet accès. Les nouvelles politiques mises en oeuvre aux Philippines tendent à encourager la participation du secteur privé au processus de développement durable. M. Lotilla a évoqué la question du système des égouts qui est un élément important de la gestion de l'eau. Il est essentiel d'assurer une qualité de l'eau qui soit conforme aux normes internationales.

M. MUSTAPHA TOLBA, ancien Ministre de la recherche scientifique et Conseiller principal pour les questions d'environnement de l'Egypte, aurait souhaité que les interventions des participants à la réunion de haut niveau se fondent davantage sur le rapport du Secrétaire général préparé à cette intention. Il a regretté qu'il soit très difficile, en plénière, de s'écarter des déclarations écrites et a préconisé un dialogue plus dynamique entre

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les participants. Il y a eu une représentation déséquilibrée entre le Nord et le Sud lors du dialogue consacré à l'industrie. Il faut que tous les partenaires contribuent financièrement pour que les pays en développement soit représentées de la même façon que les pays développés. S'agissant de l'eau, il a souligné le fait que l'eau est un bien économique car elle a une dimension sociale, et une dimension écologique qu'on ne peut oublier et auxquelles il faut accorder un prix. Pour ce qui est de la protection des océans, il a souhaité que le Secrétariat examine les obstacles à l'application de la Convention sur le droit de la mer.

M. SHEN GUOFANG (Chine) a déclaré que le Gouvernement chinois a toujours attaché une grande importance aux questions de l'environnement et de développement. La Chine s'est efforcée de respecter les engagements qu'elle a pris lors du Sommet de Rio. Elle a ainsi promulgué toute une série de lois visant à protéger et à mieux gérer les ressources en eau. Le Gouvernement a encouragé la participation de toute la société aux efforts déployés à cet effet. Le secteur industriel doit être associé à la recherche de solutions au problème de l'eau. Le remplacement des produits polluants et le traitement des déchets industriels ont été encouragés. Des mesures ont été prises pour établir des méthodes de production qui respectent l'environnement. Des ressources financières insuffisantes et des retards technologiques ont empêché la Chine d'atteindre tous les objectifs de Rio. Les pays industrialisés doivent aider les pays en développement notamment dans le domaine du transfert de technologies propres. La Commission doit jouer un rôle plus important pour renforcer la coopération internationale. La Chine est disposée à s'associer à tout effort international visant à promouvoir la réalisation des objectifs du développement durable.

M. JACQUES ANDREANI (France) s'est félicité du Programme de travail pluriannuel de la Commission. Il a souligné l'importance du processus de discussion et de négociation au sein de la Commission qui peut être facilité par les décisions ou les échanges d'expériences en dehors des sessions de la Commission. Il a souhaité que les résultats de la Conférence sur l'eau organisée en mars dernier à Paris, ainsi que des conférences de Harare et de Pétersburg soient reprises dans les conclusions de la Commission. Parmi les recommandations de la Conférence de Paris, il a mentionné l'idée que l'eau a des coûts qui doivent être récupérés d'une manière ou de l'autre, tout en tenant compte de la situation des plus pauvres. Le principe du pollueur- payeur a également été mis en avant. Il est aussi important de mettre l'accent sur le développement des capacités institutionnelles et humaines. M. Andréani s'est, en outre, félicité du fait que les débats, en particulier celui sur l'industrie, aient été marqués par un esprit de partenariat. Il a toutefois souhaité que les ONG, les syndicats et les associations de consommateurs aient davantage le droit à la parole. Il s'est déclaré très favorable aux accords volontaires dans le secteur de l'industrie, estimant toutefois qu'ils doivent s'inscrire dans un cadre réglementaire.

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Pour parvenir à un développement durable, tous les acteurs doivent se mobiliser, et en particulier l'Etat qui doit donner l'exemple et l'impulsion. En tant que consommateur, il peut d'ailleurs favoriser les produits verts, a-t-il souligné.

M. FERRAZ (Mozambique) a rappelé que son pays a participé activement à la Conférence de Rio en 1992. Depuis, des efforts importants ont été déployés afin d'établir des cadres institutionnels pour promouvoir le développement durable au niveau national et local. Une loi sur l'eau a été promulguée et le Conseil national de l'eau a été créé pour encourager une meilleure gestion des ressources en eau. La politique nationale sur l'eau prend en considération les questions relatives à l'assainissement et à l'approvisionnement en eau des populations les plus vulnérables. Le programme agricole national est fondé sur l'adoption de stratégies locales de conservation de l'eau. L'industrie a un rôle important à jouer en ce qui concerne la gestion des ressources en eau. Le Mozambique compte sur l'industrie pour sa croissance économique et il est essentiel que celle-ci respecte l'environnement. Il encourage le renforcement de l'éducation et la sensibilisation de l'opinion publique aux questions du développement durable. Des cadres institutionnels ont été établis ces dernières années malgré des ressources humaines et financières limitées. Il est cependant difficile de mettre en oeuvre les politiques visant à promouvoir le développement durable sans ressources adéquates. Le Mozambique estime qu'il est nécessaire que les pays développés aident les pays en développement afin que ceux-ci puissent avoir une croissance économique qui respecte les engagements pris à Rio.

M. KADER ASMAL, Ministre des eaux et forêts de l'Afrique du Sud, a indiqué que bien que n'ayant pas participé au processus de Rio, son pays prenait les dispositions d'Action 21 tout à fait au sérieux. La Constitution sud-africaine garantit explicitement une série de droits socio-économiques, y compris l'accès à l'eau et le droit à ce que l'environnement soit protégé pour les générations présentes et futures. La réforme de la loi sur l'eau a fourni une base rationnelle pour une gestion durable des ressources en eau douce. Un concept fondamental de la réforme est l'établissement du rôle du gouvernement en tant que dépositaire public des ressources en eau du pays. Pour une utilisation durable de l'eau, la ressource naturelle doit être protégée de manière appropriée. La loi prévoit, en outre, une approche globale de la protection de la qualité des ressources en eau. Les dispositions visant à assurer une eau potable et des infrastructures sanitaires adéquates constituent un facteur clé pour briser le cercle de la pauvreté et du sous- développement en Afrique du Sud.

Le Ministre a indiqué que le défi actuel était de parvenir à fixer un mécanisme de tarification de l'eau qui ne pénalise pas les sections de la société qui n'ont pas les moyens de payer le prix économique de l'eau. Le Gouvernement entend donc mettre en place des prix réalistes et fournir gratuitement l'eau pour les besoins fondamentaux afin que tous les

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Sud-Africains puissent y avoir accès. Le Ministre a annoncé, par ailleurs, que son pays signerait prochainement la Convention sur le droit relatif aux utilisations des cours d'eau internationaux à des fins autres que la navigation, qui a été adoptée en mai 1997. Il a indiqué que son pays souhaitait encourager un sens de la propriété dans le processus de la gestion durable des ressources en eau douce, en particulier pour les femmes, et a lancé un appel pour que soit reconnue la dimension humaine de la gestion et de l'utilisation de l'eau. Le monde développé et le monde en développement font face à des problèmes différents par leur intensité mais non par leur nature, a-t-il conclu.

M. JAAP RAMAKER (Pays-Bas) a estimé que la résolution sur les approches stratégiques concernant la question de l'eau potable offre un programme d'action visant à rationaliser les nombreux efforts en cours dans ce domaine et à augmenter leur efficacité. Les Pays-Bas, engagés depuis des siècles dans la gestion de l'eau, attendent de contribuer à l'élaboration et à la mise en oeuvre de la gestion intégrée de l'eau à travers le monde. Ils entendent, à cette fin, accueillir une conférence internationale sur la gestion de l'eau potable aux alentours de la Journée mondiale de l'eau au mois de mars de l'an 2000. Cette conférence servira d'abord de plan de lancement de la "Nouvelle vision de la gestion de l'eau potable" qui est actuellement développée par le Conseil mondial de l'eau et qui peut fournir l'occasion de tirer profit des progrès réalisés dans la mise en oeuvre du programme d'action de la Commission du développement durable.

S'agissant des modes de consommation et de production durables, le représentant a plaidé en faveur de la révision des Directives des Nations Unies pour la protection du consommateur de 1985. Il s'est félicité des progrès effectués lors de la réunion de Sao Paolo tout en estimant qu'un examen plus approfondi doit précéder l'adoption des nouvelles Directives par la Commission du développement durable.

Mme RUTH DECEREGA SMITH (Panama) a évoqué la question de la restitution du Canal de Panama à son pays et les implications que le Canal a sur l'environnement. Elle a évoqué l'activité importante du Canal par lequel passent 36 bateaux en moyenne par jour. Elle a précisé que le Canal fonctionne grâce à l'eau douce et a souligné la nécessité de promouvoir une coopération entre les différents acteurs concernés en matière de gestion des ressources en eau douce. La construction du Canal a changé l'écosystème. Le Canal dépend des rivières. Des lacs ont du être créés. La représentante a souligné l'importance d'une bonne gestion du bassin hydrographique. Il est nécessaire de prendre en compte les implications économiques, sociales, écologiques et politiques liées au fonctionnement du Canal. Sur le plan social, la récupération de la zone du Canal constituera un avantage pour la population locale. Il est important d'examiner la question du Canal de Panama à la lumière d'Action 21.

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M. NIZAR TAWFIQ (Arabie Saoudite) a déclaré que son pays, qui est un pays désertique, accorde une très grande importance à l'eau. L'essentiel de l'eau est utilisé pour l'agriculture. Il n'est pas toujours évident de fournir de l'eau potable à l'ensemble de la population. Le Gouvernement a eu recours à l'eau de mer pour assurer des ressources suffisantes en eau. De ce fait, la désalinisation est une question essentielle pour l'Arabie Saoudite. Il est important de mettre sur pied une stratégie de consommation pour assurer une bonne gestion de l'eau et satisfaire aux besoins de la population à des prix raisonnables. M. Tawfiq s'est félicité de la politique qui tend à encourager la participation de l'industrie aux efforts en matière de développement durable. Il a souligné l'importance du transfert des technologies écologiquement rationnelles vers les pays en développement.

Mme CAROL KALAFATIC, représentante du Caucus des populations autochtones, s'est réjouie du fait que plusieurs interventions aient souligné les aspects spirituels et sociaux de l'eau. Elle s'est inquiétée du fait que les préoccupations des principaux groupes ne soient pas pleinement prises en compte. La représentante a souhaité que les terres des populations autochtones soient protégées contre les activités non écologiques ou que ces populations considèrent contraires à leurs valeurs. De nombreux programmes de développement détruisent les territoires, apportent des maladies auxquelles les populations autochtones sont vulnérables, ou les chassent de leurs terres. La pratique de nos cultures et notre religion fait partie de notre droit à l'autodétermination. Elle a affirmé qu'en Colombie, un groupe de population autochtone avait promis de se suicider collectivement si l'on décidait d'exploiter le pétrole qui se trouve sur leur territoire. La représentante a estimé urgent d'harmoniser les programmes internationaux et de renforcer la mise en oeuvre des programmes actuels. L'autodétermination devrait être à la base de la participation des populations autochtones au processus visant à un développement durable.

Mme DOW WEDO, représentante du Caucus des femmes, a souligné les besoins et droits essentiels liés à l'eau douce. Des femmes et des fillettes dans le monde entier sont obligées d'aller chercher de l'eau quotidiennement pour les besoins de leur famille. Il faut donc veiller à ce que leur avis soit pris en compte dans l'élaboration des politiques de gestion des eaux. Un milliard de personnes n'ont pas accès à l'eau potable. Même lorsque l'eau est disponible, elle n'est pas distribuée équitablement. Elle a mis en garde contre l'illusion défendue par le marché qui cherche à imposer un prix à l'eau. Dans ce cas, il faudrait aussi comptabiliser le coût du travail des femmes qui vont chercher de l'eau chaque jour, ainsi que l'impact des eaux polluées sur la santé de milliers d'enfants. Si les initiatives volontaires sont une bonne chose, il faut veiller à ce que toutes les industries soient obligées de respecter des objectifs acceptables, assortis de délais, avec des mécanismes de contrôle performants.

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M. ALFRED MUTIWAZUKA (Zimbabwe) a rappelé que l'eau n'a pas de substitut. Cela devrait influencer la façon dont on considère l'eau dans les politiques gouvernementales, notamment dans les pays en développement. L'eau doit-elle être considérée comme un bien social ou comme un bien économique ? En fait, tout dépend du contexte dans lequel on considère cette question.

M. MOHAMED HAGOS (Ethiopie) a déclaré que le concept du pollueur payeur peut être appliqué aux niveaux local et national. Il peut y avoir des difficultés techniques lorsqu'il s'agit de problèmes transfrontaliers. En plus de la rareté de l'eau il y a un problème d'insuffisance des ressources financières et techniques.

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