En cours au Siège de l'ONU

CS/913

LE CONSEIL PREVIENT LES PARTIES AU CONFLIT AFGHAN QU'UNE REPRISE DES COMBATS COMPROMETTRAIT LES EFFORTS INTERNATIONAUX VISANT UNE SOLUTION POLITIQUE AU CONFLIT

6 avril 1998


Communiqué de Presse
CS/913


LE CONSEIL PREVIENT LES PARTIES AU CONFLIT AFGHAN QU'UNE REPRISE DES COMBATS COMPROMETTRAIT LES EFFORTS INTERNATIONAUX VISANT UNE SOLUTION POLITIQUE AU CONFLIT

19980406 Il déplore le soutien politique et militaire apporté aux factions depuis l'étranger et conjure les Etats de mettre immédiatement fin à cette ingérence

A l'issue de consultations sur la situation en Afghanistan, le Président du Conseil de sécurité, M. Hisahi Owada (Japon) a fait, au nom des membres du Conseil, la déclaration suivante :

Le Conseil de sécurité a examiné le rapport du Secrétaire général daté du 17 mars 1998 sur la situation en Afghanistan (A/52/826-S/1998/222).

Il se déclare gravement préoccupé par la poursuite de la guerre en Afghanistan, qui menace sérieusement la sécurité régionale et internationale et fait subir de dures épreuves à la population, entraîne de nouvelles destructions et provoque des flux de réfugiés et le déplacement forcé d'un grand nombre d'autres personnes.

Le Conseil note avec inquiétude le caractère de plus en plus ethnique que prend le conflit, les informations qui font état de persécutions fondées sur l'appartenance ethnique, et la menace qui en résulte pour l'unité de l'Etat afghan.

Le Conseil exhorte toutes les parties afghanes à cesser les combats, à conclure immédiatement un cessez-le-feu et à entamer, sans conditions préalables, un dialogue politique visant à la réconciliation nationale, à un règlement politique durable de ce conflit qui n'a pas de solution militaire et à la formation d'un gouvernement pleinement représentatif ayant une large assise.

Le Conseil se déclare de nouveau fermement attaché à la souveraineté, à l'indépendance, à l'intégrité territoriale et à l'unité nationale de l'Afghanistan, ainsi qu'au respect de son patrimoine culturel et historique.

Le Conseil déplore que l'ingérence étrangère en Afghanistan, sous la forme de fourniture de matériels de guerre aux factions, se poursuive avec la même intensité. Il déplore également le soutien politique et militaire actif apporté aux factions depuis l'étranger, soutien qui conforte les dirigeants des factions dans leur peu d'empressement à participer à un véritable dialogue politique. Il conjure à nouveau tous les Etats de mettre immédiatement fin à cette ingérence.

Le Conseil note avec inquiétude que toutes les parties afghanes se réarment activement depuis quelques mois, prévient les parties au conflit qu'une vaste reprise des combats ferait sérieusement obstacle aux efforts entrepris par la communauté internationale pour les aider à trouver une solution politique au conflit, et les engage à concrétiser leur volonté déclarée de parvenir à une telle solution.

Le Conseil réaffirme sa position selon laquelle l'Organisation des Nations Unies, en tant qu'intermédiaire universellement reconnu, doit continuer à jouer un rôle central et impartial dans les efforts que déploie la communauté internationale en vue d'un règlement pacifique du conflit afghan, et soutient sans réserve les activités de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan ainsi que celles de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour l'Afghanistan, notamment dans le cadre de la mission qu'il effectue actuellement dans la région.

Le Conseil se félicite de la consolidation du processus engagé par l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour l'Afghanistan, qui a constitué le groupe des "six plus deux", et engage tous les pays concernés à continuer de participer de bonne foi à ses travaux, notamment en examinant les moyens d'endiguer de façon efficace et impartiale l'afflux d'armes et d'autres matériels de guerre en Afghanistan. Le Conseil se félicite de l'appui apporté par d'autres Etats Membres à ce processus.

Le Conseil est vivement préoccupé par la détérioration des conditions de sécurité dans lesquelles travaille le personnel de l'ONU et des organismes humanitaires internationaux, et exhorte toutes les factions afghanes, en particulier les Taliban, à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de ce personnel.

Le Conseil demeure extrêmement inquiet de la persistance de la discrimination à l'égard des filles et des femmes et des autres violations des droits de l'homme en Afghanistan, ainsi que des violations du droit international humanitaire en Afghanistan.

Le Conseil appuie les mesures prises par le Secrétaire général pour ouvrir des enquêtes sur les allégations de massacres de prisonniers de guerre et de civils en Afghanistan. Les conclusions de ces enquêtes seront communiquées à l'Assemblée générale et au Conseil de sécurité dès qu'elles seront disponibles.

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Le Conseil est également préoccupé par la forte détérioration de la situation humanitaire dans plusieurs secteurs du Centre et du Nord de l'Afghanistan, liée au fait que les Taliban maintiennent le blocus qu'ils ont imposé dans la région de Bamyan alors que l'ONU et plusieurs Etats Membres leur ont instamment demandé de le lever, ainsi qu'à l'arrêt des approvisionnements par la route du nord dû à l'insécurité et aux pillages. Le Conseil engage vivement les Taliban à laisser les organismes humanitaires répondre aux besoins de la population.

Le Conseil rappelle que la poursuite du conflit en Afghanistan est propice au terrorisme ainsi qu'à la production illicite et au trafic de drogues, qui déstabilisent la région et d'autres pays, et demande aux dirigeants des parties afghanes de faire cesser ces activités.

Le Conseil demeurera saisi de la question et prie le Secrétaire général de continuer à le tenir régulièrement informé de la situation en Afghanistan.

Le Conseil de sécurité était saisi, aux fins de l'examen de cette question, du rapport du Secrétaire général.

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Rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (S/1998/222)

Le rapport porte sur les progrès de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan, notamment sur l'évolution de la situation depuis novembre 1997. La Mission a tenu une série de réunions en janvier et février 1998 avec les chefs Taliban et de l'Alliance du Nord, afin de déterminer si les parties étaient prêtes à négocier, dans le cadre soit du conseil des oulémas (théologiens), proposé par les Taliban, soit d'une autre initiative. Les deux parties se sont déclarées disposées à coopérer à la création d'un conseil de oulémas, mais deux dirigeants de l'Alliance du nord ont engagé les Nations Unies à convoquer une réunion intra-afghane neutre. La Mission s'est attachée à élargir ses consultations de façon à s'entretenir avec de nombreuses personnalités et de groupements, en Afghanistan et au Pakistan. Elle a également suivi de prés la situation militaire et politique en Afghanistan et dans les Etats voisins.

La situation militaire est restée bloquée, des affrontements se produisant sur les lignes de front entre les Taliban et les factions appartenant à l'Alliance du Nord. L'aide militaire étrangère, qui a continué à affluer dans le pays, a rendu vains tous les efforts de rétablissement de la paix. Bien que les parties affirment leur attachement à l'ONU et au principe d'un règlement négocié, ni l'une ni l'autre d'entre elles ne semble prête à renoncer à l'option militaire.

Sur le front régional, un nouvel esprit de coopération entre le Pakistan et la République islamique d'Iran au sujet de l'Afghanistan offre des perspectives prometteuses. Les deux gouvernements ont coparrainé la résolution sur l'Afghanistan, dans laquelle l'Organisation de la Conférence islamique (OCI) demandait qu'il soit mis fin aux livraisons d'armes étrangères aux factions en guerre, qu'un cessez-le-feu soit appliqué et qu'un dialogue intra-afghan soit instauré. Cette entente a suscité l'espoir que le Pakistan et la République islamique d'Iran pourraient véritablement coopérer pour faire enfin cesser la guerre civile en Afghanistan.

Le Bureau des Nations Unies pour la coordination de l'assistance humanitaire à l'Afghanistan continue à suivre la situation humanitaire qui s'est fortement détériorée, en particulier dans la province de Bamyan où plusieurs centaines de milliers de personnes ont souffert de graves pénuries alimentaires en raison des mauvaises récoltes, du blocage de la route commerciale Ghazni-Kaboul et de l'insécurité et des pillages sur la route du nord. En dépit des nombreux appels des Nations Unies, rien n'avait changé au moment de la rédaction du présent rapport. La présence de vastes zones infestées de mines et de munitions non explosées a continué à constituer

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un obstacle majeur aux activités de relèvement et de développement de l'Afghanistan, ainsi qu'au rapatriement des réfugiés. De plus, un tremblement de terre a frappé le district de Rustaq, le 4 février 1998, et a détruit 28 villages et fait environ 4000 victimes, 20 000 personnes étant sans abri.

Les Nations Unies ont organisé une mission interinstitutions des Nations Unies en Afghanistan sur les problèmes de parité entre les sexes. La mission a étudié les conditions de vie des femmes afghanes et examiné les modalités de la planification et de la fourniture d'assistance, ainsi que les moyens permettant à la communauté internationale de faire en sorte que l'aide profite équitablement aux hommes et aux femmes. D'autre part, le Groupe d'appui à l'Afghanistan a tenu sa deuxième réunion le 3 décembre 1997 à New York. Le Groupe a approuvé la nouvelle stratégie pour l'Afghanistan tout en jugeant prématuré la proposition de créer un mécanisme commun de financement. Un appel global interinstitutions en faveur de l'Afghanistan a été lancé le 4 février, l'objectif étant de réunir environ 157 millions de dollars pour répondre aux besoins en matière d'assistance entre le 1er janvier et le 31 décembre 1998.

Le Secrétaire général exprime dans ce rapport sa profonde inquiétude relative à la dégradation des conditions de sécurité du personnel de l'ONU, en particulier suite au bombardement de l'aéroport de Bamyan le 31 décembre 1997 par des avions des Taliban alors que des personnel et des avions de l'ONU s'y trouvaient.

En ce qui concerne les allégations de massacres, le rapport note que des massacres auraient été perpétrés, chaque partie accusant l'autre d'avoir commis des atrocités contre la population civile et les prisonniers de guerre. Le Rapporteur spécial chargé d'étudier la situation des droits de l'homme en Afghanistan, s'est rendu, en compagnie d'un expert légiste, sur les lieux présumés des massacres du 30 novembre au 13 décembre 1997.

Observations et recommandations

Le rapport note que la tragédie se poursuit en Afghanistan, où les factions, aidées par un approvisionnement ininterrompu d'armes venant de l'étranger, continuent de se battre sans tenir compte des aspirations de la vaste majorité des Afghans eux-mêmes. L'ingérence des pays de la région et de pays extérieurs à la région- sous forme d'appui politique et militaire actif fourni à une faction ou à une autre- conforte les dirigeants des factions dans leur refus de participer à un véritable dialogue politique et reste la cause majeure de la prolongation de la guerre en Afghanistan. Le Secrétaire général demeure convaincu que les Nations Unies et ses Etats Membres doivent impérativement examiner les aspects extérieurs à la question afghane et chercher sincèrement à les régler. A cette fin, il est nécessaire que

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les pays concernés arrêtent une approche commune et conviennent de mesures permettant d'endiguer les apports d'armes et autres matériels de guerre en Afghanistan. Simultanément, l'Organisation doit continuer à s'occuper des aspects internes du problème. La Mission spéciale continuera de se tenir en contact étroit avec les parties et personnalités afghanes, de façon à obtenir l'adoption d'un cessez-le-feu immédiat, suivi de négociations de bonne foi entre les factions en vue de la réconciliation nationale.

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