CONDITION DE LA FEMME : DES LOIS DISCRIMINATOIRES ET LE POIDS DES TRADITIONS FONT OBSTACLE A L'EXERCICE PAR LES FEMMES DE LEURS DROITS FONDAMENTAUX
Communiqué de Presse
FEM/993
CONDITION DE LA FEMME : DES LOIS DISCRIMINATOIRES ET LE POIDS DES TRADITIONS FONT OBSTACLE A L'EXERCICE PAR LES FEMMES DE LEURS DROITS FONDAMENTAUX
19980303 La Commission de la condition de la femme tient une table ronde sur les droits fondamentaux des femmesPoursuivant cet après-midi ses travaux sur le suivi de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, la Commission de la condition de la femme a organisé une table ronde sur la réalisation des objectifs stratégiques et des mesures à prendre en ce qui concerne les droits fondamentaux des femmes. Ce faisant, elle a entendu les exposés de Mme Rose Mtengeti Migiro (République-Unie de Tanzanie), Professeur de droit à l'Université de Dar es-Salaam, Cecilia Medina (Chili), membre du Comité des droits de l'homme des Nations Unies, Shanti Dairiam (Malaisie), Directrice de "Women's Rights Action Watch" en Asie et dans le Pacifique, et Shelagh Day (Canada), consultante et rapporteur sur les droits de l'homme au Canada.
Au cours du dialogue qui a suivi, les intervenants ont mis en exergue le fait que les obstacles à l'exercice par les femmes de leurs droits fondamentaux sont souvent liés aux législations discriminatoires concernant l'accès à la terre, à l'héritage, au crédit, à l'information ou à l'éducation, mais également aux traditions et à la culture, et à la réticence des femmes elles-mêmes face au changement. Partant, les délégations ont préconisé d'impliquer davantage les femmes dans l'élaboration des politiques visant à promouvoir leurs droits et ont plaidé en faveur d'une démarche à long terme pour les amener à sentir elles-mêmes le besoin de changement.
Auparavant, la Commission avait nommé Mme Zuzana Vranova (Slovaquie), l'une des Vice-Présidentes de la Commission, au poste de rapporteur.
La Commission poursuivra ses travaux demain mercredi à 10 heures.
Suivi de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes : réalisation des objectifs stratégiques et mesures à prendre dans les domaines critiques : droits fondamentaux des femmes
Exposés des experts
Mme CECILIA MEDINA QUIROGA (Chili), membre du Comité des droits de l'homme, a déclaré que l'inégalité entre les hommes et les femmes était un problème culturel qui doit être combattu comme tel. Il faut veiller à ce que toutes les femmes puissent jouir de leurs droits fondamentaux sans discrimination. Mme Médina a identifié deux séries de problèmes en ce qui concerne la jouissance de ces droits par les femmes : la pauvreté et la violence, et les problèmes qui découlent de l'interprétation et de l'application des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Ainsi, a-t-elle expliqué, l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule le droit à la sécurité personnelle et l'article 12 la liberté de mouvement. Or, certains Etats n'autorisent pas les femmes à sortir sans permission maritale, ce qui constitue une violation claire du Pacte. Il faut savoir comment on interprète le principe de l'égalité devant la loi, a-t-elle poursuivi. Les droits civils et politiques sont mieux protégés dans l'ensemble que les droits économiques et sociaux.
Pour l'expert, c'est à l'Etat qu'il incombe de créer toutes les conditions nécessaires à l'exercice des droits fondamentaux, et notamment de créer des mécanismes qui permettront aux femmes de se plaindre et de se défendre. L'Etat doit aussi prendre des mesures pour supprimer tous les obstacles sociaux à la jouissance par les femmes de leurs droits. Il faut éduquer la société, ce qui ne se limite pas à la diffusion d'informations sur les droits des femmes. Il faut, en effet, veiller aussi à ce qu'elles soient traitées comme des êtres égaux, à part entière, et créer un élan susceptible de produire un vrai changement des mentalités. L'une des tâches les plus importantes des Etats, à cet égard, est l'éducation des femmes à leurs droits fondamentaux. Elles pourront avoir droit au chapitre dans l'édification des sociétés, lorsqu'elles pourront se faire entendre. On aura alors une situation différente de celle d'aujourd'hui où les femmes doivent s'intégrer dans une société modelée par d'autres. Les organisations internationales doivent définir l'étendue et le champ d'application des droits fondamentaux de façon à ce que les femmes puissent faire appel à la jurisprudence internationale pour défendre leurs droits dans leur propre pays. S'agissant des rapports, il faudrait demander aux Etats de fournir des données ventilées par sexe, par exemple, sur l'éducation des femmes et des hommes. Les droits fondamentaux des hommes et des femmes constituent une question d'ordre public que tous les Etats ont intérêt à faire respecter.
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Mme ROSE M. MIGIRO, Professeur de droit à l'Université de Dar es-Salaam en République-Unie de Tanzanie, a d'abord souligné que les droits fondamentaux de la femme constituent un ensemble qu'il ne faut pas fragmenter. Dans la plupart des pays en développement et en particulier en Afrique, la protection des droits de la femme est étroitement liée au développement économique et social. Seules des conditions de prospérité économique permettront aux femmes de jouir pleinement de leurs droits. En Afrique, la protection des droits de la femme relève de la théorie de la "poule et de l'oeuf". En effet, d'autres besoins existent qui relèguent les droits de la femme au rang de caprice ou de luxe. De fait, à quel domaine un gouvernement doit-il accorder la priorité; à l'éducation primaire ou à l'aide juridique aux femmes ? Bien souvent le choix est clair. Dans ce contexte, il faut souligner que la façon dont la femme ou la fille a accès à l'éducation a un lien étroit avec la jouissance de ses droits. Il faut donc voir comment une fille peut tirer profit de son éducation.
Comment donc parler des droits de la femme en l'absence d'un développement économique, social et culturel ? Les Ministères responsables des affaires des femmes devraient, dans ce contexte, être conçus comme un point de départ à partir duquel certains éléments du Plan d'action général peuvent être mis en oeuvre. Les questions de l'égalité entre les sexes sont intersectorielles et il faut passer en revue certaines lois qui influent sur les droits des femmes. Par ailleurs, l'on peut utiliser des catalyseurs pour suivre de près certaines lois apparemment neutres mais qui, dans leur application, ont une incidence sur les droits de la femme. Le droit seul ne suffira pas à résoudre les inégalités entre les sexes mais il demeure un premier pas indispensable dans la protection des droits de la femmes. Il faut établir un ordre de priorité dans le cadre du Programme d'action de Beijing et la Commission de la condition de la femme a un rôle à jouer dans ce domaine.
Mme SHELAGH DAY, consultante et rapporteur sur les droits de l'homme au Canada et membre de l'Association nationale des femmes et du droit, a déclaré que l'inégalité économique constituait un fait central dans la vie des femmes dans tous les pays du monde. Partant, elle a invité les gouvernements à adopter des mesures économiques compatibles avec les droits des femmes. Les droits économiques comprennent tous les droits des femmes dans ce domaine, comme, notamment, le droit à la propriété, à l'héritage, l'accès à un logement, ou encore le droit à ne pas avoir à émigrer pour travailler. Les femmes ne sont pas égales sur le plan économique. La tradition veut, en effet, qu'elles assument une partie disproportionnée du fardeau dans l'éducation des enfants et soient considérées comme un support des hommes, et non des êtres indépendants avec des droits. Bien que l'on parle de l'indivisibilité des droits de l'homme, ces droits continuent d'être fragmentés et ne s'inscrivent pas dans une approche globale et intégrées.
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Or, ces droits ne deviendront une réalité que lorsqu'ils seront traités globalement. L'experte a dénoncé la manière dont sont utilisés les budgets sans tenir compte des droits des femmes. Lorsqu'un gouvernement adopte des politiques qui perpétuent des attitudes discriminatoires à l'égard des femmes, il viole les instruments internationaux. Malgré l'inégalité économique des femmes, les gouvernements poursuivent des politiques économiques de plus en plus standardisées qui portent préjudice aux femmes. Ainsi, la réduction des services sociaux a pour conséquence que les femmes doivent assumer plus de responsabilités dans ce domaine, ce qui diminue leurs chances d'emploi. Ces programmes économiques reposent sur l'idée préconçue selon laquelle les femmes constituent une main d'oeuvre bon marché et partout disponible. Les gouvernements doivent promouvoir, protéger et faire respecter les droits des femmes. Ils ne peuvent renoncer à leur responsabilité. L'experte a estimé qu'on ne pouvait continuer à suivre une démarche fragmentaire dans l'approche aux droits de l'homme. Les gouvernements doivent faire des droits économiques des femmes une priorité et créer des mécanismes auxquels les femmes pourront participer pleinement et qui garantiront la jouissance de leurs droits.
L'experte a recommandé la création, au plan national, de commissions indépendantes sur l'égalité économique des femmes, chargées de réformer les politiques économiques et commerciales à la lumière des instruments relatifs aux droits de l'homme et du Programme d'action de Beijing. Au plan international, les gouvernements devraient refuser d'adhérer à des accords commerciaux qui empêchent ou privent les femmes de leurs droits. Il faudrait, en outre, conclure le Protocole facultatif se rapportant à la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et en faire un véritable instrument. Les femmes doivent elles-mêmes prendre les choses en main dans ce domaine. D'ailleurs des commissions comme celle-ci doivent jouer un rôle à cet égard, a-t-elle conclu.
Mme SHANTI DAIRAM, Directrice d'International Women's Rights Action Watch en Asie et dans le Pacifique, a déclaré qu'en matière de respect et de protection des droits de la femme, il convient d'abord de souligner la nécessité d'une clarté conceptuelle et d'une compréhension commune du problème que vise une stratégie. Pour lutter contre la violence contre les femmes, par exemple, il faut au préalable savoir qu'elle n'est qu'une conséquence de son statut dévalorisé et surbordonné dans la société. Il convient aussi de mettre en plan des garanties constitutionnelles et des mesures politiques et juridiques qui responsabilisent les personnes chargées de la mise en oeuvre des politiques. Il faut également fournir un mandat précis pour la mise en oeuvre des politiques en faveur des femmes. -Il faut enfin reconnaître que la femme est un acteur clé des politiques en sa faveur et que sa participation est un élément essentiel du succès de ces politiques.
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Dialogue
Le représentant du Royaume-Uni, parlant au nom de l'Union européenne, a invité les gouvernements à mettre en oeuvre de manière sérieuse les engagements qu'ils ont pris. Soulignant le lien entre les droits de la femme et le développement, il a toutefois estimé que si le développement facilite la réalisation des droits de l'homme, son absence ne peut être une excuse pour ne pas appliquer les engagements pris. Il est important que des mécanismes de défense des droits de la femme existent et soient efficaces. Il faut effectivement éviter de compartementaliser les droits de l'homme qui sont indivisibles et doivent être considérés dans leur ensemble. Soulignant l'importance de l'intégration de la parité entre les sexes au sein du système des Nations Unies, il a demandé aux expertes si elles avaient connaissance de cas concrets d'intégration de la perspective sexospécifique dans des programmes et si cela avait apporté des changements concrets.
La représentante de la Zambie a dit que sans prospérité économique et sociale, les droits des femmes étaient souvent foulés au pied et mis entre parenthèses. A cet égard, elle a souligné le problème, dans les pays africain en particulier, de l'accès des femmes à la terre. Elle a demandé à entendre l'expérience d'autres pays en ce qui concerne cette question ainsi que l'égalité en matière d'héritage.
Pour sa part, la représentante d'Israël a rappelé l'accès à l'éducation est un droit de l'homme et un moyen de parvenir à l'égalité, au développement et à la paix. Elle a fait part de la politique de son pays en faveur des femmes et a demandé qu'une attention particulière soit accordée aux femmes âgées et aux femmes chefs de famille.
A l'instar des experts, une ONG a souligné l'importance des mécanismes nationaux pour la promotion des droits de la femme tout en mettant aussi l'accent sur les mécanismes internationaux comme les instruments des droits de l'homme ou la future cour criminelle internationale. Cette remarque a été appuyée par la représentante de l'Italie qui a en outre soulevé la question de la protection des droits de la femme en Afghanistan et en Algérie.
Répondant à la série de questions, et en particulier à celle sur le droit à l'héritage, Mme Migiro a expliqué qu'en Tanzanie, les terres échappant au régime coutumier ne représentent qu'un pourcentage très faible des terres alors même que la constitution interdit la promulgation de lois discriminatoires. Partant toute loi coutumière est anticonstitutionnelle. La situation actuelle persiste en raison du fait que la constitution n'annule pas automatiquement les dispositions juridiques du droit coutumier. Les individus doivent donc saisir eux-mêmes la justice; ce qui implique un accès à la justice et une bonne connaissance des droits. Mme MEDINA a souligné que le droit coutumier en la matière constitue une violation de l'article 26 du
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Pacte relatif aux droits économiques et sociaux et permet donc de saisir les instances internationales. Si les organes de suivi des Pactes avaient été en mesure de faire effectivement leur travail, de telles situations ne perdureraient pas. Répondant au Royaume-Uni sur les exemples d'intégration réussie de la perspective sexospécifique, Mme DAY a estimé que les Gouvernements doivent créer des mécanismes permettant aux individus de remettre en cause des dispositions juridiques qui vont à l'encontre de leurs droits. Les femmes ont ainsi pu faire valoir leur interprétation des lois et ce programme a eu un effet favorable sur la façon dont les femmes perçoivent et comprennent leurs droits. Il faut réfléchir aux moyens de renforcer les dispositifs de protection des droits de façon à ce que toutes les personnes aient voix au chapitre et qu'il y ait une véritable interaction entre le gouvernement et les citoyens.
Pour sa part Mme DAIRIAM a fait part d'un mécanisme mis en place au Bangladesh pour examiner dans quelle mesure le gouvernement parvient à intégrer une perspective sexospécifique. Le Gouvernement a passé en revue tous ses mécanismes et à l'issue de l'évaluation, des orientations ont pu être données à certains ministères. Le Gouvernement a ainsi été en mesure de prendre de nouvelles mesures pour intégrer plus avant cette perspective.
Reprenant la série de questions, le représentant du Swaziland a souhaité connaître le rôle des églises dans la promotion des droits de l'homme et notamment des droits de la femme, persuadé que si un rôle central leur était accordé, les problèmes du non respect des droits disparaîtraient. Le livre sacré ne prêche-t-il pas l'amour et le respect entre les hommes et les femmes ? Poursuivant, le représentant a également souhaité savoir dans quelle mesure la Tanzanie avait réformé les lois relatives au mariage, lois héritées de l'ère coloniale. En matière d'éducation, comment la République-Unie de Tanzanie a-t-elle éduqué l'opinion publique d'autant que l'éducation implique l'acquisition d'un savoir, qui pour être pertinent, doit rester conforme aux valeurs sociales. Dans ce contexte, le représentant a plaidé pour une meilleure répartition géographique au sein du bureau du Haut Commissaire au droits de l'homme.
Pour la représentante de la Jordanie, les droits de l'homme sont indivisibles mais il existe des priorités. Ainsi, a-t-elle préconisé des mesures en vue de protéger les droits économiques et sociaux de la femme. Elle a souligné les conséquences néfastes de la mondialisation sur les femmes et a interrogé les expertes sur les mesures qui, selon elles, seraient susceptibles de limiter les effets de la mondialisation et des sociétés multinationales qui ne s'intéressent qu'au profit. La représentante a ensuite plaidé en faveur des femmes qui souffrent des blocus économiques en Iraq et en Libye. Elle a demandé la levée des sanctions économiques et la possibilité pour ces femmes de faire entendre leur voix. Il faut aussi mettre fin au
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terrorisme en Algérie et à l'assassinat de femmes par des terroristes qui se cachent derrière la religion. Pour sa part, la représentante des Pays-Bas, tout en reconnaissant les efforts louables en vue de supprimer les pratiques traditionnelles néfastes pour les femmes, a insisté sur le droit à l'intégrité physique de la personne et a invité la communauté internationale à redoubler ses efforts pour éliminer les mutilations génitales féminines. Prenant ensuite la parole, la représentante de la Norvège a demandé comment, lorsque l'égalité juridique entre les hommes et les femmes est garantie, parvenir à l'égalité réelle. Les défenseurs des droits de l'homme devraient être aussi des défenseurs des droits de la femme. L'intégration n'est pas une formule, mais le fait d'être présente en tant que femme politique ou tant que femme d'affaires peut faire avancer les choses, a-t-elle estimé. La représentante de l'organisation non gouvernementale "les femmes juristes et le développement de l'Afrique" a souligné l'importance de mécanismes nationaux de protection des droits des femmes qui aient des ressources. Elle a plaidé en faveur d'un Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes qui soit suffisamment ouvert pour permettre à la majorité des femmes, notamment en Afrique, d'utiliser ce mécanisme. Il faut donner aux groupes la possibilité d'exploiter le Protocole et, en particulier la possibilité de porter plainte. Elle a invité les gouvernements "à ne pas nous couler" en limitant le recours au Protocole aux seuls individus. La représentante de l'Afrique du Sud s'est réjouie que l'on ait reconnu que les pratiques juridiques ne suffisent pas. Elle a, elle aussi, souligné le problème de l'accès à la terre en Afrique qui constitue l'une des raisons de la pauvreté des femmes. Il est important qu'après les réformes juridiques, on se concentre sur l'éducation et la sensibilisation, a-t-elle dit. La représentante de la Namibie a souligné le fait que la faiblesse économique des femmes les rend vulnérables et a préconisé un mécanisme permettant d'assurer le pouvoir économique des femmes, leur accès au crédit, aux ressources naturelles, à la terre. Pour que les femmes progressent, il faut non seulement réformer les lois, mais surtout éduquer les femmes elles-mêmes. A cet égard, elle a souligné l'importance de tenir compte dans les budgets des questions affectant les femmes. Ainsi, en Namibie, le Ministre des Finances a donné instruction d'assurer l'intégration de la problématique hommes/femmes dans les budgets de tous les départements.
Répondant au représentant du Swaziland, Mme MEDINA a rejeté l'idée de faire porter toute la responsabilité aux lois héritées du colonialisme. Rien n'empêche de supprimer ces lois, a-t-elle dit, appuyée en cela par Mme DAY. Celle-ci a souligné le fait que le Canada avait également connu les effets des lois coloniales sur les indiens autochtones, et en particulier sur les femmes. S'agissant de la possibilité de porter plainte dans le cadre du Protocole facultatif, Mme Day a estimé qu'il était fondamental que les ONG et les femmes qui ne sont pas les victimes directes mais qui ont des informations sur les violations de la Convention puissent venir porter plainte, sinon ce mécanisme sera inefficace.
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Mme MEDINA a tenu à souligner que les traités internationaux sur les droits de l'homme sont élaborés et signés par les pays développés et les pays en développement. L'assertion selon laquelle il s'agit de droits imposés de l'extérieur est donc fausse. Les victimes des violations des droits de l'homme des pays en développement le savent bien eux qui vivent ces situations. Réagissant aux remarques des Pays-Bas, elle a estimé qu'en ce qui concerne les mutilations génitales, il faut souligner les obligations des Etats en la matière qui ne sont pas seulement de modifier les textes législatifs mais de s'assurer de la mise en oeuvre des textes modifiés. Pour sa part, Mme MIGIRO a répondu au représentant du Swaziland sur les dispositions juridiques concernant le mariage. La loi tanzanienne, édictée en 1971, a été considérée comme progressiste puisqu'elle prévoit une procédure de divorce et reconnaît le droit des femmes au divorce. La loi s'écarte donc des pratiques coutumières et établit même que le mariage n'est valable que si les deux parties sont consentantes. Toutefois dans son application, la loi a présenté certaines lacunes; l'âge minimum du mariage est toujours fixé à 15 ans, la valeur des tâches ménagères n'est pas reconnue; la procédure de divorce est longue et difficile. L'on dispose donc d'une loi satisfaisante dans sa lettre mais son application présente des difficultés certaines. En ce qui concerne la sensibilisation de l'opinion publique aux droits de la femme, Mme Migiro a estimé que la difficulté est de parvenir à montrer aux femmes comment elles peuvent faire valoir leurs droits qu'elles connaissent déjà; l'Etat ne fournissant pas d'aide juridique pour les affaires civiles préférant la réserver aux affaires pénales.
La représentante du Botswana est elle revenue sur la situation des femmes en matière de propriété foncière. Elle a appelé la société civile à se mobiliser et à faire pression sur les gouvernements pour susciter une réforme du droit foncier. L'Observatrice de la Palestine a attiré l'attention sur la détérioration de la situation des femmes palestiniennes tant dans les territoires autonomes que dans les territoires occupés. Quand condamnera-t-on Israël pour les violations des droits des Palestiniens et des Palestiniennes. Quand le forcera-t-on à respecter les accords signés et à appliquer les résolutions pertinentes des Nations Unies, a insisté l'intervenante.
La représentante de la France a d'abord tenu à regretter la diffusion tardive des documents officiels en français. Elle a insisté sur le fait que la diffusion dans toutes les langues des documents officiels est une condition de l'égalité devant l'information, particulièrement importante dans le domaine des droits de l'homme. Elle a en outre déploré que très peu de sphères francophones aient été invitées à prendre part aux tables-rondes. Cela est d'autant plus regrettable que le progrès en matière de promotion des droits de la femme suppose un débat entre des problématiques diverses qui s'enrichissent mutuellement. Si la Commission a accompli des progrès remarquables en matière des droits de la femme, a poursuivi la représentante, il faut constater
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qu'en matière de droits civils, l'égalité entre les hommes et les femmes est loin d'être reconnue dans de nombreux pays. Sans l'égalité dans ce domaine, l'accès à l'égalité sociale, économique et culturelle s'avérera difficile. Le droit de la femme à l'information, à l'éducation, à la propriété ou au crédit n'a de chance de devenir effectif que si les femmes sont présentes dans les instances de décision politiques, économiques ou culturelles. Au sein de l'Union européenne d'ailleurs, la France est à l'origine d'une résolution concernant les femmes dans la prise de décisions. En conclusion, la représentante s'est demandée s'il ne fallait pas aussi éduquer les hommes aux droits fondamentaux des femmes en encourageant la Commission à associer davantage les hommes à ses travaux.
La représentante de l'Allemagne a expliqué que les efforts nationaux de son pays s'inscrivent dans une stratégie plus large d'intégration d'une démarche soucieuse d'équité entre les sexes dans toutes les activités à tous les niveaux. Les principaux domaines de préoccupation sont la traite des femmes et des enfants, la situation des femmes migrantes, et les mutilations génitales. La représentante du "Women's caucus" auprès de la Cour internationale" a rappelé que la future Cour internationale criminelle aurait à traiter de cas dont les victimes sont principalement des femmes. Or, dans le premier projet de statut de la cour, on n'a pas suffisamment tenu compte de ce fait, ni de la nécessité d'intégrer une démarche soucieuse d'équité dans toutes les instances de ce nouvel organe. Elle a plaidé en faveur de la présence d'experts sur les questions concernant les femmes auprès de la Cour. Pour la représentante du Canada, il faut avoir une compréhension globale des droits des femmes et la femme de la rue doit connaître ses droits et les outils dont elle dispose pour les défendre. Elle a demandé aux expertes comment, selon elles, éduquer les femmes à ces droits de manière novatrice, comment édifier des partenariats, réunir les expériences individuelles et collectives de femmes afin de faire avancer l'ordre du jour des femmes de manière concrète. La représentante de la Chine a rendu compte des mesures prises dans son pays pour protéger les droits des femmes et a mis l'accent sur la nécessité pour les femmes de connaître leurs droits.
La représentante du Kirghizistan a estimé qu'il faut davantage se concentrer sur les droits économiques, sociaux et culturels de la femme. Pour sa part, la représentante de la Côte d'Ivoire a reconnu l'indivisibilité des droits en soulignant toutefois que pour assurer la promotion des droits fondamentaux des femmes il faut tenir compte de l'environnement social et économique et analyser les obstacles à la jouissance par les femmes de leurs droits. Ces obstacles sont liés à des législations discriminatoires sur l'accès à la terre, au crédit, à l'information ou à l'éducation. Il faut également faire en sorte que les femmes connaissent et réclament le respect de leur droits et qu'elles soient disposées à les défendre. Il ne faut pas non plus laisser de côté l'aspect des traditions et de la culture qui expliquent des pratiques telles que le mariage précoce ou la mutilation génitale.
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Ces pratiques n'auront de chance d'être abolies que par une campagne de sensibilisation et d'information. A cet égard, il faut impliquer les femmes dans l'élaboration des mesures les concernant et leur apprendre à accepter le changement. Des réactions de rejet ont trop suivi certaines mesures prises. Il faut donc privilégier une démarche prudente et à long terme pour amener les populations à sentir elles-mêmes le besoin du changement et à reconnaître que les mesures vont dans le sens de leur épanouissement.
Mme MIGIRO a, à l'instar de la France, insisté sur la nécessaire participation des hommes dans la lutte pour la promotion des droits de la femme. Mme MEDINA s'est, elle, déclarée frappée par les propos du Canada. Le principal problème des femmes, a-t-elle dit, vient de l'invisibilité des violations de leurs droits. Il faut intensifier la recherche et la collecte de données statistiques. Le problème de cette invisibilité serait atténuée si les Etats s'assuraient que les membres des organes de droits de l'homme sont des individus convaincus de la pertinence des droits de la femme. Mme Medina a également appuyé les propos de la France, en appelant à une éducation de toute la société, seule condition d'un véritable changement culturel. Il faut, a-t-elle ajouté en appuyant les propos de la Côte d'Ivoire, faire comprendre aux personnes la nécessité du changement.
Intervenant à son tour, Mme DAY a jugé important de réfléchir à la manière dont la création d'une cour criminelle internationale peut servir les intérêts des femmes. L'avancement de la cause des femmes peut se faire par une législation renforcée mais aussi par une recherche non pas menée dans l'isolement des organisations des femmes mais dans le cadre de mécanismes favorisant une interaction entre les gouvernements et les femmes. Enfin Mme DAIRAM a convenu que de nombreuses difficultés des femmes trouvent leurs racines dans une culture privilégiant les hommes. Si les femmes souffrent de la pauvreté en tant que membre d'un groupe elles souffrent également en tant que femmes en raison de la culture d'exclusion dont elles sont victimes. Il faut donc traiter de la féminisation de la pauvreté en ayant recours à des solutions qui dépassent la simple allocation de ressources.
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