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AG/SHC/342

TROISIEME COMMISSION : CERTAINES DELEGATIONS DENONCENT LE DEBAT STERILE SUR LA HIERARCHISATION DES DROITS

19 novembre 1997


Communiqué de Presse
AG/SHC/342


TROISIEME COMMISSION : CERTAINES DELEGATIONS DENONCENT LE DEBAT STERILE SUR LA HIERARCHISATION DES DROITS

19971119 La célébration du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme doit être l'occasion d'actions concrètes

La Commission des questions sociales, humanitaires et culturelles (Troisième Commission) a poursuivi ce matin son débat sur les questions relatives aux droits de l'homme. Dans ce cadre, plusieurs délégations ont appelé à des actions concrètes à l'occasion de la célébration du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, en dénonçant notamment le débat stérile sur la hiérarchisation des droits de l'homme. Ainsi, pour la représentante du Liechtenstein, l'Année des droits de l'homme doit être l'occasion de réfléchir aux défis et aux besoins futurs. Elle a déploré le fait que les débats sur les questions relatives aux droits de l'homme se limitent souvent à des répétitions stériles des points de vue nationaux et des discussions sur la hiérarchisation des droits. Le représentant d'Andorre a estimé pour sa part que l'argument selon lequel les droits économiques et sociaux viennent avant les libertés individuelles était fallacieux et s'est demandé pourquoi les uns devraient exclure les autres.

Les représentants des pays suivants ont également fait une déclaration: Arabie saoudite, République populaire démocratique de Corée, Libéria, Inde, Cuba, Pakistan, Israël, Afrique du Sud et Togo. L'Observateur de la Palestine est également intervenu.

La Commission poursuivra ses travaux cet après-midi à 15 heures et clôturera son débat sur les questions relatives aux droits de l'homme, en présence du Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme. Elle se prononcera, par ailleurs, sur plusieurs projets de résolution.

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M. NAIF BEN BANDAR ALSUDAIRY (Arabie saoudite) a estimé que les principes internationaux concernant les droits de l'homme ne peuvent être appliqués au niveau national sans prendre en considération les caractéristiques culturelles et religieuses des sociétés. Le droit fondamental pour tous les peuples est le droit à la vie. Le droit à sa propre langue, culture, religion ne peut être séparé des autres droits de l'homme. C'est pourquoi, il faut accepter les particularités culturelles de tous les peuples. Toute action allant à l'encontre de ceci est un défi au droit à la vie et à la tolérance. Pour l'Arabie saoudite, l'utilisation du concept des droits de l'homme à toute occasion peut lui faire perdre sa signification, le réduisant à une simple référence verbale. Le représentant a toutefois ajouté qu'on ne pouvait pas invoquer les caractéristiques nationales comme prétexte pour violer les droits de l'homme. Les Nations Unies ne peuvent être utilisées comme forum de déclarations ou un centre de distribution de littérature insultante pour l'une ou l'autre religion. A cet égard, il a lancé un appel pour que la liberté d'expression ne conduise pas à la remise en cause d'une religion ou à l'intolérance religieuse.

Le représentant a affirmé que la conception des droits de l'homme en Arabie saoudite revêtait une dimension religieuse et éthique qui est protégée par les lois. Cette conception des droits de l'homme est fondée sur le Coran, lequel dit qu'il faut appliquer la justice. L'Islam règle tous les aspects de la vie, ainsi que les relations entre les individus dans tous les domaines. Il affirme l'importance de la liberté individuelle dans divers domaines. L'Etat protège, en outre, les droits de l'homme sur la base des législations islamistes et garantit la sécurité de tous les citoyens. Le représentant a indiqué que l'Arabie saoudite avait rejoint récemment la Convention internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la Convention internationale contre la torture. L'Arabie est l'un des pays les plus sûrs et les plus stables caractérisé par un niveau élevé de développement, a-t-il souligné.

Le représentant a renvoyé l'Union européenne, qui dans sa déclaration devant la Commission avait estimé que l'Arabie saoudite ne garantit pas la liberté de religion, au rapport du Rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse, qui a remercié les autorités saoudiennes pour leurs réponses détaillées et argumentées et leur volonté de coopérer.

M. JONG MYONG HAK (République populaire démocratique de Corée) a regretté que malgré la fin de la guerre froide, les attitudes et les politiques qui prévalaient alors continuent d'avoir cours dans le domaine des droits de l'homme. Les actes posés délibérément dans le seul but d'empiéter sur la souveraineté de pays se multiplient couverts du voile de la "protection des droits de l'homme". Les problèmes sociaux comme la pauvreté, le chômage, l'abus de drogues qui existent dans le monde en développement comme dans le monde développé sont à l'origine de nombreuses violations graves des droits de l'homme. La communauté internationale doit observer le principe du respect de

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la souveraineté des Etats, rejeter les doubles standards, et approcher l'interprétation et l'application des instruments des droits de l'homme avec objectivité et impartialité. En outre, il faut cesser d'invoquer la question des droits de l'homme pour imposer des conditions à la coopération économique et aux relations commerciales. A cet égard, la République démocratique populaire de Corée appuie la position des pays en développement qui demandent un renforcement de la coopération internationale pour réaliser le droit au développement.

De l'avis du pays, seul un système politique fondé sur le collectivisme peut promouvoir pleinement les droits de l'homme. En République démocratique populaire de Corée, toutes les politiques sont mises en oeuvre en mettant l'accent sur la protection et la promotion des droits politiques, économiques, sociaux et culturels et l'Etat est pleinement responsable du bien-être de la population. Le peuple apprécie le système politique et économique qu'il a choisi et ne tolérera jamais que l'on y porte atteinte.

M. WILLIAM BULL (Libéria) a indiqué que sa délégation se réjouit de l'approche proactive et centrée sur la personne humaine adoptée par Mme Mary Robinson, Haut Commissaire aux droits de l'homme. Il s'est également félicité que le Haut Commissaire ait invité les institutions financières à montrer un plus grand intérêt pour la promotion des droits de l'homme des populations des pays pauvres. La délégation du Libéria supporte le plaidoyer de Mme Robinson et, comme le Haut Commissaire, estime que les institutions financières doivent contribuer à la réalisation et à la protection des droits de l'homme fondamentaux. Toutes les personnes humaines doivent jouir du droit à la sécurité et à la dignité, et du droit à un avenir meilleur pour eux et leurs enfants. Il est urgent que la communauté internationale renforce sa lutte contre la pauvreté qui porte atteinte aux droits fondamentaux d'un cinquième de la population mondiale.

Le représentant a affirmé que le Président Charles Taylor a fait du respect de la règle de droit et des droits de l'homme la pierre angulaire de sa politique domestique. Afin de fortifier la réconciliation dans cette période qui fait suite à la guerre civile, le Président a inclus des membres de l'opposition dans son gouvernement. Une loi promulguée par le Président Taylor le 27 octobre 1997 a établi la Commission nationale des droits de l'homme, en tant qu'organe indépendant en dépit de sa création d'origine gouvernementale. La Commission aura notamment pour tâche de donner suite aux allégations de violations des droits garantis par la Constitution et la législation; d'élaborer un programme d'éducation qui sera diffusé dans tout le pays afin que tous les Libériens connaissant leurs droits et les mécanismes de recours.

M. M. A. BABY (Inde) a déclaré que l'approche qu'ont les pays en voie de développement envers les droits de l'homme a été largement conditionnée par l'expérience négative qu'ils ont tirée du colonialisme, du racisme et de la

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destruction de leurs modes de vie et de leurs économies traditionnels. Les pays en développement considèrent le droit au développement comme le concept le plus élargi et le plus compréhensible des droits de l'homme, qui inclut à la fois des notions relatives à leur passé, à leur histoire, et des promesses quant à leur avenir. L'Inde estime que la célébration du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme devrait être l'occasion appropriée pour commencer un processus de réflexion qui pourrait mener au droit au développement, ce droit étant compris comme celui qui traduit le plus et le mieux les aspirations des peuples en développement vis-à-vis de la Charte internationale des droits et des libertés.

L'Inde a eu plusieurs fois à critiquer les distorsions et les faiblesses de la politique actuelle de surveillance et d'implantation des droits de l'homme sur le plan international. La politisation des droits de l'homme et la morgue de la plupart des pays qui se sont arrogés le rôle de gardiens de ces droits, la sélectivité, les approches partielles et discriminatoires en ce domaine sont inacceptables.

M. Baby a dit que son pays reconnaît que des mesures de contrôle et de surveillance sont nécessaires à la promotion et à la protection des droits de l'homme. Cependant, la surveillance au niveau national dans des pays où l'environnement politique est instable et où la capacité même des équipes de surveillance est sujette à question n'a pas jusqu'ici aidé à faire avancer la cause des droits de l'homme. Bien au contraire, elle a accentué les lignes de fractures. Les approches actuelles qui tendent à considérer les violations de ces droits essentiellement comme des problèmes de comportement et de discipline pouvant être corrigés par la mise en place de nouveaux standards comportementaux et par des sanctions contre les coupables ne prennent pas suffisamment en considération les aspects historiques, sociologiques, idéologiques et économiques qui sous-tendent ces comportements.

Mme SOMAIA BARGHOUTI, Observateur de la Palestine, a indiqué que la situation dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem, demeurait critique du point de vue des violations des droits de l'homme. Des violations graves et systématiques des droits du peuple palestinien sont commises par Israël, la puissance d'occupation, a-t-elle déclaré, en ajoutant que les violations collectives de ces droits étaient les plus graves qu'ait connues l'histoire récente. Elle a cité en premier lieu l'occupation, le déni du droit à l'autodétermination, les différentes formes de punition collective, la confiscation des terres, la main-mise sur les ressources naturelles et l'implantation des colonies de peuplement. A cela s'ajoutent différents types de violations individuelles des droits de l'homme contre des Palestiniens, comme la détention, l'emprisonnement, les exécutions sommaires, les entraves à la liberté de mouvement et aux moyens de subsistance. Ces politiques et pratiques ont des conséquences dangereuses qui affectent le processus de paix et menacent son existence, a-t-elle déclaré, renvoyant aux travaux de la Quatrième Commission sur la question palestinienne et de la Commission des droits de l'homme.

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Dans ce cadre, l'Observateur de la Palestine a déploré, par ailleurs, le refus persistant d'Israël de coopérer avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires occupés et a souligné la volonté de sa délégation de coopérer avec celui-ci à tout moment. Il est impératif, a-t-elle toutefois poursuivi, que le Rapporteur spécial se tienne au mandat qui lui a été confié par la Commission. Israël demeure la puissance d'occupation et la quatrième Convention de Genève reste applicable à tous les territoires occupés par Israël depuis 1967, y compris Jérusalem. Les Palestiniens avaient espéré que le processus de paix permettrait de faire certains progrès en ce qui concerne les droits du peuple palestinien. Mais la réalité est différente. Les Palestiniens demeurent attachés au processus de paix et attendent qu'il soit mis fin à l'impasse actuelle. Ce processus devrait permettre de réaliser des changements importants et positifs sur le terrain, en particulier en ce qui concerne les droits de l'homme des Palestiniens et leurs conditions de vie. Voilà le chemin qui conduira le peuple palestinien à la réalisation de son droit inaliénable à l'autodétermination et à l'établissement d'une paix juste, durable et globale au Moyen-Orient, a-t-elle conclu.

M. JUAN ANTONIO FERNANDEZ PALACIOS (Cuba) a souligné qu'avec la célébration du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et l'examen quinquennal du Programme d'action de Vienne, l'année 1998 sera l'occasion d'analyser et examiner d'un point de vue critique les obstacles qui continuent de s'opposer à la mise en oeuvre effective de ces deux documents importants. Lorsque la Déclaration universelle des droits de l'homme a été adoptée, près du tiers de l'humanité vivait encore sous le joug de l'occupation étrangère et de la colonisation. Heureusement, la reconnaissance de tous les droits de l'homme ne s'est pas arrêtée avec l'adoption de la Déclaration, elle a continué avec la lutte des peuples pour l'indépendance, le développement et la paix. La célébration de l'anniversaire de la Déclaration doit être l'occasion de faire le point de tous les progrès réalisés et servir de point de départ d'une nouvelle vision du nouveau millénaire. Le Programme d'action de Vienne a reconnu le droit au développement, ce qui, aux yeux des pays en développement, est peut-être la principale réalisation de la Conférence de Vienne bien que peu ait été fait pour la mise en pratique de ce droit.

La reconnaissance du caractère universel et indivisible de tous les droits et la reconnaissance des spécificités des pays a été un autre fait marquant. Cette universalité repose donc sur la reconnaissance de la diversité qui enrichit chacun de nous comme membre de la famille humaine. L'examen quinquennal doit relancer les efforts collectifs pour assurer le renforcement de la coopération internationale en matière des droits de l'homme et l'adaptation des mécanismes des Nations Unies.

Mme CLAUDIA FRITSCHE (Liechtenstein) a souligné qu'à l'occasion de l'Année internationale des droits de l'homme en 1998, la communauté internationale doit reconnaître que la Déclaration universelle des droits de

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l'homme représente les normes communes de la réalisation de ces droits et réaffirmer son statut de Déclaration. Un survol superficiel du monde actuel souligne la nécessité de travailler de concert, à l'échelle nationale et au moyen de la coopération internationale, pour assurer le plein respect des droits entérinés par la Déclaration. Dans le même temps, l'Année des droits de l'homme doit être l'occasion de réfléchir aux défis et aux besoins futurs. Il faut évaluer ce qui a été fait et décider du cours de l'action future. Le fait que la Conférence diplomatique sur la création d'une cour criminelle internationale et l'Année des droits de l'homme intervienne en même temps est, pour le Liechtenstein, une coïncidence symbolique. Le Liechtenstein espère donc qu'il sera possible, cinquante ans après l'adoption de la Déclaration des droits de l'homme, de créer une telle cour pour casser le cercle vicieux des graves violations des droits de l'homme et de l'impunité. Une cour indépendante et efficace représentera une contribution remarquable à l'Année des droits de l'homme et il faut espérer que la volonté politique sera à la hauteur de cet objectif.

Les débats tenus sur les questions relatives aux droits de l'homme ne témoignent pas toujours de la volonté de la communauté internationale de travailler de concert sur la base des normes communes. Trop souvent, elle se trouve confinée dans des répétitions stériles de seuls points de vue nationaux et dans des débats sur la hiérarchisation des droits de l'homme. Dans le même temps, a souligné la représentante, nous ne pouvons garder le silence quand des droits et des libertés de caractère fondamental sont violés de manière systématique et flagrante. Nous devons à nos peuples et aux victimes de ces violations d'indiquer clairement que de telles situations sont inacceptables et qu'il incombe aux gouvernements d'y apporter des changements et des améliorations.

M. AFTAB FARRUKH (Pakistan) a accusé l'Inde de sérieuses violations des droits de l'homme dans l'état du Jammu-et-Cachemire. A la fin de l'année 1989, a déclaré le représentant pakistanais, le peuple du Jammu-et-Cachemire s'est soulevé, inspiré par la vague de liberté et de démocratisation ayant pris naissance dans les pays d'Europe de l'Est. Le droit à l'autodétermination, a dit le représentant, lui avait été reconnu par la communauté internationale notamment à travers un certain nombre de résolutions du Conseil de Sécurité. L'Inde a répondu aux marches pacifiques du peuple cachemir par un déploiement massif de forces de sécurité et par l'imposition de lois draconiennes sur l'ordre et la sécurité publics. Le seul but de ce déploiement intimidateur est de terroriser le peuple du Cachemire et de perpétuer l'occupation par l'Inde de ce territoire, a-t-il ajouté.

Le représentant pakistanais a accusé les troupes indiennes d'avoir usé du viol contre les femmes et les jeunes filles comme instrument de guerre pour humilier les habitants du Cachemire. En vue de détourner l'attention de la communauté internationale de ces violations des droits de l'homme, l'Inde clame que les troubles au Jammu-et-Cahemire sont le fait de manoeuvres

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dirigées de l'extérieur. Le Pakistan a proposé en conséquence au cours des dernières années que des observateurs neutres soient déployés dans la région ou que le nombre d'observateurs des Nations Unies actuellement en place soit accru pour pouvoir vérifier ces allégations, une proposition malheureusement rejetée par l'Inde.

Mme ERELLA HADAR (Israël) a déploré le fait que de nombreux pays qui ont signé et ratifié les traités internationaux relatifs aux droits de l'homme ne les aient pas encore rendus applicables dans leur système juridique. Elle a déploré que certains Etats ne se sentent pas obligés d'adhérer aux normes proclamées, étant incapables de prendre les mesures nécessaires ou ne voulant pas les prendre affirmant que les normes internationales ne sont pas compatibles avec les pratiques ou croyances de leurs sociétés. La représentante s'est demandée, en outre, quel était le niveau d'acceptation de l'universalité des droits de l'homme et combien d'Etats acceptaient pleinement d'en faire une question dans la juridiction interne des Etats. La souveraineté nationale ne peut être interprétée, ou utilisée, comme prétexte en vue d'empêcher la surveillance internationale des actions d'un gouvernement vis-à-vis de sa population. Les droits de l'homme, la règle de droit et la démocratie demeurent l'expression fondamentale des droits et des besoins de tout peuple, a-t-elle affirmé.

La représentante a estimé qu'il fallait rejeter toutes les tentatives de certains régimes répressifs de se cacher derrière leurs particularités. A la veille du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, des manquements sérieux dans l'application pratique des normes internationales en matière de droits de l'homme persistent. Des violations systématiques et à grande échelle des droits de l'homme ont encore lieu que ce soit en Bosnie, au Rwanda, dans l'est de la République démocratique du Congo, au Cambodge ou ailleurs. Tandis que les médias se concentrent essentiellement sur les cas de violations flagrantes et systématiques, aucun Etat ne peut cependant se proclamer à l'abri d'abus en matière de droits de l'homme. Le concept de certaines libertés en tant que droits inaliénables des individus s'est répandu. Même s'il y a des interprétations diverses en ce qui concerne la manière de protéger ces droits, il est aujourd'hui impossible d'ignorer ce concept qui est au coeur de la Déclaration universelle. Les activistes, individus ou membres d'ONG, et les législateurs sont devenus les avocats des droits de l'homme à l'égard et au sein même de leurs gouvernements et ont jeté la base des fondations idéologiques et pratiques de leur promotion. Nous avons inventé un nouveau langage des droits de l'homme et le défi aujourd'hui est de l'enseigner au monde entier, a-t-elle déclaré.

M. MATHE DISEKO (Afrique du Sud) a déclaré qu'après avoir adopté une constitution démocratique, son pays a oeuvré à assumer son histoire sur une base moralement acceptable et à faire avancer la cause de la réconciliation. A cette fin, le Parlement a adopté une loi sur la promotion de l'unité nationale et de la réconciliation portant création d'une Commission de la

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vérité et de la réconciliation. La Commission a donc été en mesure de dévoiler les violations des droits de l'homme qui auraient été difficiles sinon impossibles à découvrir. Le public a pu, à plusieurs reprises, exprimer son appui aux auditions qui ont certes été douloureuses mais qui se sont révélées être un exercice nécessaire. A la suite de la transformation de l'administration et du système judiciaire et législatif conformément aux normes internationales des droits, le Cabinet examine les instruments internationaux qui n'ont pas encore été ratifiés. La nouvelle constitution de l'Afrique du Sud intègre les droits de l'homme fondamentaux qui ont une part centrale dans la loi. Le gouvernement attend avec impatience la visite que doit effectuer dans le pays Mme Robinson pour lancer, le 10 décembre 1998, l'Année des droits de l'homme en présence du Président Nelson Mandela.

Donnant le détail des initiatives prises pour consolider la promotion et la protection des droits de l'homme par le biais d'institutions nationales, le représentant s'est dit convaincu que la bonne gouvernance constitue un élément essentiel du processus de promotion et de protection des droits de l'homme. Les principes de la bonne gouvernance se réalisent au moyen d'institutions socio-économiques et d'instruments tels que le Conseil national du travail et du développement économique qui est un forum consultatif tripartite impliquant le gouvernement, les groupes de travailleurs et le secteur privé. Le dynamisme de ce processus consultatif et démocratique trouve également son expression dans divers organes de la société civile qui vont des groupes de femmes aux organisations religieuses et culturelles en passant par les organisations de la jeunesse.

Le droit au développement est également un élément important des droits de l'homme. Ce droit est concrétisé dans la stratégie de développement et de reconstruction socio-économique ainsi que dans la stratégie de promotion de la croissance économique qui est l'étape suivante. Ces deux stratégies sont sous-tendues par une éthique solide qui place l'homme au centre du développement. Par le biais de ces mesures, le gouvernement, en coopération avec d'autres partenaires du développement, oeuvre pour permettre à la population de jouir du droit tant attendu au développement en lui fournissant l'eau potable, les services d'assainissement, des logements, des soins de santé et en assurant le développement durable des ressources humaines.

La dernière réunion des chefs de mission a mis en exergue les principes directeurs de la politique étrangère de l'Afrique du Sud. Ces principes exprime le dévouement du pays à la promotion des droits de l'homme, à la démocratie et au droit international dans la conduite des relations entre Etats. L'Afrique du Sud souligne également son engagement en faveur des intérêts de l'Afrique dans les affaires mondiales par le biais de la coopération régionale et internationale dans un univers interdépendant.

M. JULI MINOVES-TRIQUELL (Andorre) a déclaré que son pays avait eu la chance d'être un petit territoire administré par ses propres citoyens, très isolé dans ses montagnes du reste du monde. Tout le monde connaît tout le

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monde, infliger des traitements cruels à des voisins est donc beaucoup plus difficile. Dans le même temps, les conditions de vie étaient si difficiles en Andorre que chacun devait participer : le bien-être collectif a été réalisé grâce à la coopération de tous et s'est traduit en avantages individuels de toutes sortes qui n'auraient pu être obtenus par une seule personne ou une seule famille. Ainsi, depuis 1419, Andorre a un Parlement et n'a jamais connu la règle d'un seul homme ou d'un seul parti. Au cours du XXème siècle, Andorre a servi de havre de liberté pour ceux qui fuyaient l'intolérance, la torture et la mort lors de la guerre civile espagnole et pour ceux qui fuyaient les actes barbares de la seconde guerre mondiale. Le représentant a souligné qu'en prenant Andorre pour modèle, il voulait montrer que les droits de l'homme et la démocratie sont possibles à réaliser dans les pays pauvres, dans des communautés isolées, loin de la sophistication urbaine et des débats de société new-yorkais. A Andorre, nous l'avons fait par nécessité. Nous nous sommes attachés à ces valeurs dont dépendaient notre survie, mais au bout du compte ce fut un choix de la société par des moyens démocratiques.

A la veille du 50ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, il serait bon de mettre de l'ordre dans certains pays afin de célébrer cet événement dignement dans le monde entier, a estimé le représentant. L'argument que les droits sociaux et économiques doivent venir avant les libertés individuelles est fallacieux. Pourquoi devraient-ils s'exclurent mutuellement? Après tout, les pays, y compris dans le monde en développement, qui ont choisi la démocratie et les droits de l'homme, ne font pas pire en termes de développement que ceux qui ont opté pour des régimes autoritaires. Par ailleurs, les pays qui se targuent d'être des défenseurs des droits de l'homme, comme le mien, doivent eux aussi aller au-delà du status quo accepté. Il faut promouvoir la tolérance à tous les niveaux, donner la parole à ceux qui ne l'ont pas encore et promouvoir le respect de tous les membres de la société, a-t-il souligné.

M. ROLAND KPOTSRA (Togo) s'est réjoui de constater qu'en dépit des controverses qu'elles soulèvent constamment, les questions relatives aux droits de l'homme connaissent aujourd'hui un regain d'intérêt dans le monde entier. Pour s'en convaincre, il suffit de se rendre compte de la place sans cesse grandissante qu'elles occupent dans les systèmes juridiques nationaux. Aujourd'hui, face au tableau si peu reluisant de la situation des droits dans le monde, des actions énergiques doivent être prises dans le domaine de l'éducation et de l'information. Il faut renforcer la politique d'éducation afin d'aider l'émergence d'une culture démocratique et l'adhésion aux droits de la personne et à la tolérance. Le Togo, pour sa part, a introduit l'enseignement des droits de l'homme dans le système éducatif au niveau des 2è et 3è degrés de l'enseignement général. La Commission nationale des droits de l'homme, quant à elle, organise des sessions périodiques de formation en direction du grand public. Une Commission interministérielle de rédaction des rapports a été créée qui regroupe les représentants des ministères impliqués dans le domaine des droits de l'homme afin d'assurer un meilleur suivi de la question de l'élaboration des rapports gouvernementaux.

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La Commission nationale des droits de l'homme peut recommander aux pouvoirs publics des propositions de lois relatives aux droits de l'homme ou leur donner des avis en la matière. Une Commission nationale d'harmonisation législative chargée d'étudier les modalités d'intégration des normes contenues dans les instruments internationaux aux droits de l'homme au système juridique national a été également été créée. Les efforts de démocratisation continuelles menées par le Togo ont mené à la mise en place d'un ensemble d'institutions démocratiques et de sauvegarde de l'état de droit dont la Cour constitutionnelle, le Conseil supérieur de la Magistrature, la Haute Autorité de l'audio-visuel et de la communication et la Cour suprême dans sa structure réformée.

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