COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT : L'ALGÉRIE PRÉSENTE SON RAPPORT
Communiqué de Presse
DH/G/584
COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT : L'ALGÉRIE PRÉSENTE SON RAPPORT
19970529 Genève, 29 mai -- Le Comité des droits de l'enfant a commencé, cet après-midi, l'examen du rapport initial sur les mesures prises par l'Algérie depuis sa ratification de la Convention relative aux droits de l'enfant, le 19 décembre 1992.Présentant le rapport de son pays, M. Mohamed-Salah Dembri, Représentant permanent de l'Algérie, a déclaré que, pour l'Algérie, la Convention relative aux droits de l'enfant est l'un des instruments des droits de l'homme qui doit bénéficier d'une attention encore plus soutenue parce qu'il concerne une catégorie vulnérable de la population. L'Algérie défend des positions conformes à la morale universelle lorsqu'il s'agit de l'âge pour l'implication des enfants dans les conflits armés et de la lutte contre la prostitution des enfants et contre leur implication dans la pornographie, a ajouté le représentant.
Répondant aux questions des membres du Comité, la délégation algérienne a notamment précisé que la loi sur le terrorisme et la subversion, promulguée en 1992 en raison de la multiplication d'atteintes graves à l'ordre public, n'a pas modifié le principe de la non-responsabilité du mineur.
La délégation était également composée de Mme Khédija Hemici, Conseiller au cabinet du Ministre de la justice, de Mme Fatma-Zohra Chaieb, Conseiller au cabinet du Ministre de la santé et de la population et de Mme Hamida Djidel, Sous-Directeur de la réinsertion sociale au Ministère du travail, de la protection sociale et de la formation professionnelle.
Le Comité reprendra demain, vendredi 30 mai à 15 heures, l'examen du rapport initial de l'Algérie.
Rapport de l'Algérie
Le rapport de l'Algérie indique que les dispositions de la Convention sont entrées en vigueur pour l'Algérie en mai 1993. Depuis son indépendance, en 1962, l'Algérie a adopté une série de mesures législatives, réglementaires, administratives et sociales en vue de défendre les intérêts de l'enfant. L'effort énorme de scolarisation en est l'un des reflets. La protection juridique de l'enfance, de manière générale, et la prise en charge directe par
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les institutions de l'État des catégories les plus nécessiteuses en est un autre. Le rapport fait la synthèse de différentes actions entreprises en vue de défendre les droits de l'enfant. Plusieurs départements ministériels concourant à la mise en oeuvre de ces actions ont participé à son élaboration. Selon le rapport, les textes législatifs de l'Algérie sont conformes aux dispositions de la Convention.
Présentation et examen du rapport
Présentant le rapport de l'Algérie, M. Mohamed-Salah Dembri, Représentant permanent à Genève, a déclaré que, pour son pays, la Convention relative aux droits de l'enfant, insérée dans l'ordre juridique interne et placée avant la loi nationale, est l'un des instruments des droits de l'homme qui doit bénéficier d'une attention encore plus soutenue parce qu'il concerne une catégorie vulnérable de la population. La mise en oeuvre des dispositions de cette convention s'inscrit dans la politique globale du pays de promouvoir et de protéger les droits de l'homme. La ratification, en avril 1993, de la Convention relative aux droits de l'enfant a été l'occasion pour l'État algérien de confirmer des engagements déjà consacrés par son arsenal juridique et par sa politique à l'égard de l'enfant. Ainsi, la Constitution en vigueur garantit-elle le droit à l'enseignement et à sa gratuité, droit à l'enseignement de surcroît obligatoire pour le cycle fondamental. Par ailleurs, l'État algérien garantit l'égal accès à la formation professionnelle à ceux qui, à l'issue du cycle fondamental, ne sont pas à même de suivre le cycle secondaire. La Constitution prévoit le droit de tous les citoyens à la protection de leur santé. Elle consacre l'obligation pour l'État de garantir une protection particulière pour les handicapés.
Les institutions gouvernementales agissent dans le cadre du plan national pour la survie, le développement et la protection de l'enfant, élaboré en collaboration avec l'Unicef. Par ailleurs, l'Observatoire national pour les droits de l'homme, institution indépendante, ainsi que de nombreuses associations et fondations, soutiennent l'action des pouvoirs publics. Un observatoire des droits de la mère et de l'enfant est venu récemment parachever l'architecture des instances de prise en charge.
M. Dembri a fait observer que la population algérienne est particulièrement jeune, avec un taux d'accroissement de 2,7 %. Sur 28 millions d'habitants, l'Algérie compte un tiers d'enfants de moins de 16 ans. Les indicateurs du développement social témoignent des efforts fournis par l'Algérie. En trente ans, le taux de mortalité des enfants âgés de moins de 5 ans a été ramené de 243 à 65 pour mille, le pourcentage d'enfants complètement vaccinés varie entre 92 % et 65 % en fonction des maladies. Les taux d'inscription dans l'enseignement primaire ont atteint 95 % pour les garçons et 86 % pour les filles. L'Algérie défend des positions conformes à la morale universelle lorsqu'il s'agit de l'âge pour l'implication des enfants dans les conflits armés et de la lutte contre la prostitution des enfants et contre leur implication dans la pornographie.
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Répondant aux questions et aux préoccupations des membres du Comité, M. Dembri a indiqué que la ratification de la Convention a induit une organisation et une mise en place d'institutions spécifiques. Le Ministère délégué chargé de la solidarité nationale et de la famille est l'organe chargé de la coordination des actions entreprises par les diverses institutions. Un Code de l'enfant, qui viendra conforter les dispositions du Code civil et le Code de la famille, est en cours d'élaboration. Dans cette attente, l'Algérie a essayé de trouver des solutions aux problèmes de l'enfance dans un contexte économique difficile.
S'agissant des déclarations interprétatives que l'Algérie a faites lors de la ratification de la Convention, M. Dembri a expliqué que ces déclarations concernent trois points fondamentaux et se fondent sur le système juridique algérien. En effet, la Constitution fait de «l'Islam la religion de l'État» et le Code de la famille dispose que «l'éducation de l'enfant se fait dans la religion du père». L'interprétation des articles 13, 16 et 17 est proposée sur la base du Code pénal et du Code de l'information selon lequel la liberté de l'information ne saurait s'étendre à des écrits qui contreviendraient à la morale islamique et pervertiraient l'image de l'Islam.
S'agissant de la traduction de la Convention en langue berbère, M. Dembri a indiqué que rien ne s'opposait à ce que la Convention soit traduite en langue amazighe, qui est une composante de l'identité nationale constitutionnellement reconnue. Il a indiqué, par contre que la Déclaration universelle des droits de l'homme a déjà été traduite en langue amazighe.
M. Dembri a rappelé que, dès l'indépendance, l'Algérie a mis l'enfant au centre des préoccupations nationales. Sa survie et son développement sont totalement pris en charge par les pouvoirs publics. Le représentant a convenu que le corpus législatif nécessitait encore des mises à conformité, notamment concernant les âges légaux de l'enfant. Bien que n'ayant que trois décennies d'indépendance, l'Algérie consacre 40 % de son budget national à l'éducation. La législation algérienne interdit l'exploitation des enfants par le travail, et pour éviter que cela ne se produise dans le secteur informel, des stages de formation professionnelle assistés par des bourses sont prévus essentiellement pour des jeunes qui ont abandonné leur scolarité. La discrimination entre les filles et les garçons a été éliminée par l'accès à l'égalité des chances. Le seul domaine dans lequel il y aurait une forme de discrimination serait celui de la succession du patrimoine, domaine régi par l'Islam, religion d'État.
En ce qui concerne la loi sur le terrorisme et la subversion, promulguée en 1992 en raison de la multiplication d'atteintes graves à l'ordre public, la délégation algérienne a précisé que cette loi, qui a été abrogée, n'a pas modifié le principe de la non-responsabilité du mineur. Dans ce contexte, l'article 249 du Code de procédure pénale a été modifié pour ramener de 18 à 16 ans l'âge minimal de la responsabilité pénale pour les crimes terroristes. Néanmoins les dispositions de l'article 50 du Code pénal portant excuse de minorité n'ont pas subi de modification et, à ce jour, aucun mineur n'a été condamné à la peine capitale en Algérie depuis l'indépendance.
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Au sujet des organisations non gouvernementales nationales, M. Dembri a indiqué qu'il existait un très fort mouvement associatif qui se charge des intérêts des enfants algériens. Sur la base d'une loi de 1990 sur le droit d'association, 11 associations nationales se sont constituées pour la défense des droits de l'enfant.
À propos de la santé de l'enfant, la délégation a expliqué que le secteur public se préoccupe de la santé de l'enfant avant et après la naissance. L'Algérie a lancé divers programmes de lutte contre les maladies diarrhéiques. Il y aussi des programmes de santé scolaire, réalisés avec le Ministère de l'éducation et concrétisés par des visites de contrôle de santé et de dépistage dans les écoles. Parallèlement, a été mis en oeuvre un programme de nutrition et de lutte contre les maladies transmissibles. En outre, le secteur de la santé travaille en étroite collaboration avec des associations très actives, comme l'Association des diabétiques ou celle des hémophiles, qui agissent directement sur le terrain. L'avortement est interdit par la législation algérienne. Toutefois, l'avortement thérapeutique, qui est soumis à des conditions très strictes, peut être pratiqué en milieu hospitalier.
L'adoption n'est pas une réalité du droit algérien, a fait remarquer le représentant, expliquant que le législateur algérien a prévu une autre forme d'assistance et de prise en charge de l'enfant privé de milieu familial. Il s'agit de la kafala ou recueil légal par une famille qui s'engage à entretenir l'enfant mineur au même titre que les autres enfants de la famille. La kafala est l'objectif essentiel de la politique menée par le Ministère du travail et de la protection sociale en faveur des enfants abandonnés. L'enfant recueilli en kafala a également droit à une part de l'héritage de la famille d'accueil.
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