En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/6197

LE SECRETAIRE TENERAL INVITE A UN ELARGISSEMENT ET A UNE AMELIORATION DE LA COMMUNICATION ENTRE L'ONU ET LE MOUVEMENT DES PAYS NON ALIGNES

10 avril 1997


Communiqué de Presse
SG/SM/6197


LE SECRETAIRE TENERAL INVITE A UN ELARGISSEMENT ET A UNE AMELIORATION DE LA COMMUNICATION ENTRE L'ONU ET LE MOUVEMENT DES PAYS NON ALIGNES

19970410 On trouvera ci-après le texte du discours prononcé par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, à la XIIe Conférence ministérielle du Mouvement des pays non alignés, le 7 avril à New Delhi :

Il est vrai que le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies n'a pas coutume de s'adresser à la Conférence ministérielle du Mouvement des pays non alignés. Mais je vous sais gré de m'avoir invité à cette réunion, dès le début de mon mandat, en raison précisément de la haute priorité que j'attache au renforcement des contacts avec votre Mouvement. Je considère cette Conférence comme une occasion unique d'approfondir et d'élargir nos relations d'amitié en cette époque de mutation et de réforme du système international.

Mais tout d'abord, je remercie chaleureusement le Gouvernement et le peuple indiens de leur généreuse hospitalité. L'Inde a été pendant longtemps le chef de file du Mouvement des pays non alignés. Pour beaucoup d'entre nous, Nehru incarne l'idée même de lutte pour la liberté.

Pendant ma jeunesse au Ghana, j'ai ressenti toute la force des positions de principe adoptées par le Mouvement des pays non alignés contre l'oppression coloniale et en faveur de la liberté, de la justice, du développement et de la coopération. Le Ghana a été la première nation africaine à accéder à l'indépendance. En se constituant en tant que nation et en plaidant de bonne heure la cause de l'unité panafricaine, le Ghana s'inspirait largement du Mouvement des pays non alignés et s'appuyait sur sa solidarité. Je puis donc dire que mon pays et moi avons grandi avec le Mouvement des pays non alignés.

Et le rôle de chef de file de l'Inde a été une source d'inspiration pour nous tous. Cette importante conférence ministérielle est une nouvelle preuve de son rayonnement sur la scène internationale, et de son attachement aux principes consacrés dans la Charte des Nations Unies.

Deuxièmement, je félicite le Président Ernesto Samper et le Ministre des affaires étrangères, Mme María Emma Mejía Vélez, de la compétence et du discernement dont la Colombie a fait preuve pendant sa présidence du Mouvement. Pendant sa présidence, la Colombie a dû relever de nombreux défis. Les ajustements et les réorientations peuvent être pénibles, cela n'a pas empêché le Mouvement de renforcer son autorité sous la présidence de la Colombie.

Mon message d'aujourd'hui est simple. Mon programme de réformes a pour but de permettre à l'ONU de mieux répondre aux besoins de ses membres et de faire face aux problèmes réels du monde d'aujourd'hui.

Nous nous trouvons aujourd'hui à la jonction de l'ancien système international et d'un nouveau cadre encore en devenir. C'est pourquoi nous devons oeuvrer ensemble et nous devons nous engager ensemble sur la voie des réformes.

Le Mouvement des pays non alignés soutient résolument l'objectif d'une Organisation des Nations Unies plus efficace, plus moderne, plus utile, et, partant, en mesure de répondre aux besoins en évolution de la communauté internationale.

En fait, la communauté internationale a une importante dette de reconnaissance envers les membres du Mouvement des pays non alignés en raison du soutien actif qu'ils apportent aux activités de maintien de la paix des Nations Unies. Des membres du Mouvement ont fourni d'importants contingents et de précieuses ressources aux opérations de maintien de la paix. S'il me fallait tous les citer, je devrais énumérer un grand nombre des pays représentés dans cette salle. Mais je me bornerai à exprimer la satisfaction et la gratitude que j'éprouve en constatant que six des 10 pays qui contribuent le plus aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies sont membres du Mouvement des pays non alignés. Je puis comprendre pourquoi ce phénomène a relancé et intensifié les efforts déployés par le Mouvement pour jouer un rôle plus actif en ce qui concerne les questions touchant la paix et la sécurité internationales. Le processus de réforme est l'occasion de promouvoir cet objectif.

Nous avons un objectif commun : faire de l'ONU une organisation vraiment universelle, représentative de tous ses membres et capable de les servir.

Nous sommes donc unis par une alliance naturelle. J'irai même plus loin : pour atteindre les objectifs de la réforme du système des Nations Unies, j'ai besoin du soutien et de la participation active du Mouvement des non alignés.

Vous représentez la majorité de l'humanité. Vous exprimez les vues des puissants et des faibles, des nations, petites et grandes, de systèmes politiques et sociaux et de traditions religieuses et culturelles nombreux et variés. En raison de votre présence unifiée sur la scène internationale, vous avez beaucoup à offrir au monde de demain.

Le Mouvement des pays non alignés est devenu le porte-parole des nations qui n'ont pas toujours pu faire entendre leur voix. Avec 113 membres et 13 observateurs, le Mouvement des pays non alignés représente environ les deux tiers des membres de l'ONU et il est devenu une force politique majeure au sein du système des Nations Unies.

( suivre)

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Votre campagne en faveur du programme de réformes de l'Organisation contribuera à assurer sa légitimité et son efficacité. Votre participation active au processus de réformes aura pour effet de garantir que l'ONU demeure un organisme mondial authentiquement représentatif et influent.

Au cours de ces dernières années, d'aucuns ont remis en question le sens même du non-alignement dans un monde de plus en plus perçu comme unipolaire.

Le Mouvement a répondu fermement et à l'unisson que l'objectif d'un ordre mondial pacifique et équitable n'avait pas été réalisé. Que les principes fondamentaux du Mouvement conservaient leur actualité. Et que le Mouvement allait désormais s'attaquer aux nouvelles tâches auxquelles il était confronté, c'est-à-dire aux défis posés par la nouvelle société mondiale qui est à la fois riche de promesses et pleine de dangers.

Comme le Mouvement des pays non alignés, l'ONU a dû affronter une sérieuse remise en question de sa raison d'être, de sa mission et des ses capacités.

Nous devons tous nous atteler à la tâche et réformer nos institutions en tenant compte de l'évolution des conditions géopolitiques. Notre organisation reflète encore à certains égards — par exemple, au Conseil de sécurité — les réalités géopolitiques des années 40. Le Mouvement des pays non alignés, comme son nom même l'indique, s'est constitué pour défendre les intérêts de ses membres dans le monde bipolaire des anciennes superpuissances.

Comme vous le savez, je fais procéder à un examen d'ensemble des activités de l'ONU et j'ai lancé au sein du Secrétariat un certain nombre d'initiatives en matière de gestion et d'organisation qui relèvent de ma compétence.

Ces mesures ont déjà amélioré la communication et la coordination entre les départements, les programmes et les fonds des Nations Unies.

Mais il y a aussi des questions fondamentales que seuls les États Membres peuvent régler. L'une d'entre elles est la réforme du Conseil de sécurité. Je comprends le point de vue des membres du Mouvement des pays non alignés qui estiment qu'une réforme de la composition actuelle du Conseil s'impose. Ce n'est pas à moi qu'il appartient de dicter le type de réforme requise pour adapter le Conseil aux réalités d'aujourd'hui. Si un Conseil de sécurité efficace est essentiel à l'Organisation, un Conseil plus représentatif bénéficiera d'une légitimité et d'un appui encore plus étendus. J'espère donc que l'une des conséquences de l'élargissement de la composition du Conseil sera de notamment remédier à la sous-représentation des pays non alignés et des pays en développement.

J'ai espoir que cette question pourra bientôt être résolue. L'initiative qu'a récemment prise le Président de l'Assemblée générale, M. Razali Ismail (Malaisie), en sa capacité de Président du Groupe de travail

( suivre)

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de l'Assemblée chargé de la question de la réforme du Conseil de sécurité, me semble constituer un pas important sur cette voie. Je sais que le chemin à parcourir est long. Mais puisque c'est la seule proposition concrète qui ait été présentée jusqu'à présent, et elle mérite d'être examinée en détail, même si le débat risque d'être orageux et houleux.

Le fondement le plus sûr de la paix, de la stabilité et de la sécurité est le développement économique et social. C'est pourquoi j'ai l'intention de réformer le rôle que joue l'ONU dans la coopération internationale pour le développement, et de faire tout mon possible pour que des ressources plus importantes lui soient allouées.

L'engagement en faveur du développement est l'un des principes directeurs de l'activité de notre Organisation. Les activités de maintien de la paix et de rétablissement de la paix font parfois la une des journaux, mais qu'il s'agisse des ressources ou de la transformation des conditions de vie, l'oeuvre accomplie par l'ONU dans le domaine du développement est beaucoup plus importante. Comme je l'ai souvent dit, nous devons donner au concept de sécurité un sens plus large. Car nous ne pouvons parler de sécurité tant que règne la famine. Nous ne pouvons édifier la paix et la prospérité sans réduire la pauvreté. Nous ne pouvons établir la liberté sur les fondements de l'injustice.

La fin de la guerre froide nous a permis de revoir un grand nombre de nos conceptions traditionnelles en matière de développement. Il est devenu évident que, si l'éradication de la pauvreté et la réalisation du développement relèvent de la responsabilité de chaque État, le système des Nations Unies a un rôle décisif à jouer dans la conception et la promotion des mesures à prendre.

L'objectif ultime, qui est d'assurer le développement des pays en développement, demeure le même. Mais nous devons constamment réexaminer les moyens d'atteindre cet objectif. Nous devons veiller à ce que notre approche du développement tienne pleinement compte des réalités économiques, politiques et technologiques de notre temps, et surtout du rôle du secteur privé et de la société civile.

C'est ainsi que j'aborde la question de la réforme du système des Nations Unies pour le développement. Cette réforme doit viser à sensibiliser le système aux besoins des pays en développement, et à faire en sorte qu'il puisse mobiliser un appui politique, renforcer ses capacités en matière de collecte et d'analyse des données et de normalisation, et surtout, accorder une assistance à la fois rentable et efficace aux pays.

Je souhaiterais que les économies que devrait permettre de dégager le vaste effort de réforme soient réinvesties par l'Organisation dans des activités de développement concrètes.

( suivre)

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Une phrase de la Déclaration de San José sur la coopération Sud-Sud m'a particulièrement frappé. "Personne ne peut faire pour nous ce que nous ne faisons pas pour nous-mêmes." Cette phrase exprime l'essence de la solidarité entre les pays du Sud. Une solidarité permettant d'assurer une plus vaste répartition des avantages de la mondialisation et un élargissement de leurs retombées positives. La coopération Sud-Sud ne devrait pas être un simple slogan. Elle devrait être perçue comme une plate-forme viable, pouvant facilement se traduire en programmes et projets communs concrets.

Je souhaiterais que les progrès soient plus marqués dans ce domaine. J'assure tous ceux qui oeuvrent dans ce sens de la collaboration pleine et entière de l'ONU. L'Organisation peut en effet devenir une puissante force motrice pour le développement :

— En tant que porte-parole démocratique des faibles;

— En tant que tribune d'actions concertées;

— Grâce à son rôle de mobilisation et de sensibilisation;

— En forgeant de nouveaux partenariats et alliances;

— En conciliant les intérêts privés et l'intérêt public;

— En prônant les valeurs communes; et

— En menant des activités de développement efficaces et rentables.

Mais nous ne pouvons pas aller plus loin que vous nous le demanderez. Au fil des ans, les activités de développement ont souffert de l'accumulation des mandats, du chevauchement des responsabilités et de coûteux doubles emplois. La réforme vise à mieux centrer et définir ces activités en assurant une plus grande intégration au Siège et, à plus forte raison, au niveau des pays. Les nouvelles dispositions, notamment le renforcement de la fonction de coordonnateur résident et du système des équipes de pays, devraient permettre de renforcer l'appui au développement durable, en particulier en Afrique et dans les petits États insulaires en développement.

Je suis fermement convaincu que ces mesures sont dans l'intérêt de toutes les nations, et en particulier des nations en développement et du Mouvement des pays non alignés. Je crois qu'ensemble nous pouvons accomplir beaucoup. C'est pourquoi je suis ici. Je veux continuer à améliorer et à élargir la communication entre votre Mouvement et notre Organisation.

C'est dans cet esprit que je me réjouis à la perspective de travailler avec vous dans les années à venir et que je souhaite que votre conférence soit fructueuse et couronnée de succès.

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