DH/G/495

DROITS DE L'HOMME : LE RAPPORTEUR SPÉCIAL PRÉSENTE SON RAPPORT SUR LES EFFETS DES DÉVERSEMENTS ILLICITES DE PRODUITS TOXIQUES

20 mars 1997


Communiqué de Presse
DH/G/495


DROITS DE L'HOMME : LE RAPPORTEUR SPÉCIAL PRÉSENTE SON RAPPORT SUR LES EFFETS DES DÉVERSEMENTS ILLICITES DE PRODUITS TOXIQUES

19970320 La Commission entend le Ministre des affaires étrangères de la Norvège et le Secrétaire d'État canadien chargé de l'Afrique et de l'Amérique latine

Genève, 19 mars -- La Commission des droits de l'homme a entendu ce matin, dans le cadre de son débat sur la réalisation du droit au développement et la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, les allocutions de M. Jan Egeland, Secrétaire d'État, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, et de Mme Christina Stewart, Secrétaire d'État du Canada chargée de l'Afrique et de l'Amérique latine.

Le Rapporteur spécial chargé de l'étude sur les effets néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs et le Président-Rapporteur du Groupe intergouvernemental d'experts sur le droit au développement ont par ailleurs présenté leurs rapports.

M. Jan Egeland, Secrétaire d'État, Ministre des affaires étrangères de Norvège, a souhaité que la Commission se penche sur la question de la protection qu'il faut apporter aux défenseurs des droits de l'homme. Le projet de déclaration présenté sur ce point ne vise pas à définir de nouveaux droits et de nouvelles libertés mais à affirmer l'importance des activités que mènent les défenseurs des droits de la personne. Il a par ailleurs jugé inacceptable la fatwa décrétée en Iran contre l'écrivain Salman Rushdie. Aucune organisation ne devrait échapper au contrôle du gouvernement. C'est donc le Gouvernement iranien qui est responsable, a-t-il dit.

Mme Christine Stewart, Secrétaire d'État du Canada chargée de l'Amérique latine et de l'Afrique, a rappelé qu'il incombe à la communauté internationale de régler immédiatement et efficacement les problèmes des droits de la personne. Le Canada souhaite en particulier que la Commission contribue à une réaction internationale concertée au Burundi et au Zaïre, en évitant que les vies de civils soient considérées comme une monnaie d'échange militaire. Le Gouvernement canadien a fait de la protection des droits de l'enfant une priorité de sa politique nationale et étrangère et soutient activement le travail de la Commission sur l'élaboration de deux protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant. Le Canada considère en outre que les droits de tous les êtres humains ne pourront être

réalisés tant que les droits et la pleine égalité des femmes ne seront pas reconnus et respectés. Le Canada est favorable à la création en 1998 d'une Cour pénale internationale chargée de juger des violations des droits de l'homme.

Poursuivant son débat sur la jouissance, dans tous les pays, des droits économiques, sociaux et culturels, la Commission a entendu Mme Fatma Ksentini, Rapporteur spécial sur les effets néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme, qui a présenté son rapport. Elle a fait valoir que les pays en développement et, plus récemment touchés, les pays en transition ne disposent pas des moyens financiers et de l'arsenal juridique nécessaires pour contrer les pratiques de mouvements et de déversements illicites de produits et déchets toxiques.

Dans le cadre de son débat sur la question de la réalisation du droit au développement, la Commission est saisie du rapport sur la première session du Groupe intergouvernemental d'experts sur le droit au développement qui lui a été présenté par son Président-Rapporteur, M. Krzysztof Drzewicki. M. Drzewicki a indiqué que le Groupe a longuement débattu de la question de savoir si le droit au développement doit être avant tout considéré en tant que droit de l'homme ou purement dans une perspective de développement. Une autre question sur laquelle les points de vues exprimés ont été divergents concerne la priorité à accorder aux dimensions nationales ou internationales du droit au développement. Le Président-Rapporteur a espéré que le Groupe optera, en ce qui concerne les questions controversées, pour une approche qui ne favorisera aucune position extrême.

Les représentants des pays suivants ont participé au débat sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels et la réalisation du droit au développement : Pays-Bas, Japon, Afrique du Sud, Chine, Cuba et Yémen. Les organisations non gouvernementales suivantes ont également pris la parole : Fédération internationale des travailleurs sociaux, Agence pour la coopération Nord-Sud, Terre des Hommes, Mouvement international d'adultes ruraux catholiques, Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes, International Institute for Non-aligned Studies et le Centre Europe-tiers monde.

La Commission poursuivra son débat sur ces questions cet après-midi, à 15 heures.

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Déclaration de la Secrétaire d'État du Canada chargée de l'Afrique et de l'Amérique latine

Mme CHRISTINE STEWART, Secrétaire d'État du Canada chargée de l'Afrique et de l'Amérique latine, rappelant qu'il incombe à la communauté internationale de promouvoir les droits de l'homme et les libertés fondamentales pour tous, a estimé que le dialogue et l'engagement constituent l'approche privilégiée de cette responsabilité. Des organismes nationaux indépendants chargés des droits de la personne sont parmi les instruments les plus efficaces pour sauvegarder les droits constitutionnels et légaux des citoyens. S'agissant des situations du Burundi et du Zaïre, le Canada souhaite que la Commission contribue à une réaction internationale concertée.

La recherche du dialogue et de l'engagement pour la défense des droits de la personne doit être soutenue par la Commission dans toutes les circonstances, même face au refus de certains gouvernements de répondre favorablement, a déclaré le Ministre. À cet égard, elle a déploré l'échec de la tentative de dialogue au Nigéria. L'examen des situations particulières est une obligation envers les victimes de toutes les violations des droits de la personne. Le Canada attache en outre beaucoup d'importance à l'élaboration d'une déclaration sur les défenseurs des droits de la personne, ainsi qu'à l'adoption d'une déclaration sur les droits des peuples autochtones.

S'agissant de la protection des droits de l'enfant, le Gouvernement canadien en a fait une priorité de sa politique nationale et étrangère et soutient activement les travaux de la Commission sur l'élaboration de deux protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant. Par ailleurs, le Canada considère que les droits de tous les êtres humains ne pourront être réalisés tant que les droits et la pleine égalité des femmes ne seront pas reconnus et respectés.

Mme Stewart a estimé que la création d'une «Cour pénale internationale» est un jalon déterminant à la portée de la Commission dès 1998. Les nouvelles technologies, comme Internet et la promotion des activités des différentes institutions de défense des droits de l'homme sont des domaines dans lesquels le Canada entrevoit la possibilité de progrès importants, a affirmé le Ministre. Le Canada préconise l'organisation d'une rencontre de haut niveau sur cette question dans le cadre de la cinquante-quatrième session de la Commission.

Déclaration du Ministre des affaires étrangères de la Norvège

M. JAN EGELAND, Secrétaire d'État, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a indiqué que son pays a accru le montant de son aide bilatérale et multilatérale aux projets des droits de l'homme. Il a estimé que, dans la lutte pour le respect des droits de l'homme, nul ne prend autant de risques que ceux qui défendent, sur le terrain, le respect de ces droits. Le projet de déclaration présenté sur ce point ne vise pas à définir de nouveaux droits

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et de nouvelles libertés mais à affirmer l'importance de ces droits pour les activités que mènent d'ardents défenseurs des droits de la personne. La communauté internationale devrait par ailleurs s'efforcer d'établir des principes humanitaires applicables à toutes les situations de conflit et de lutte armée afin que soient respectés les droits les plus élémentaires.

Le Secrétaire d'État a par ailleurs estimé que la fatwa décrétée en Iran contre l'écrivain Salman Rushdie est absolument inacceptable. Rappelant que la récompense promise a été récemment élevée à 2,5 millions de dollars, M. Egeland a réfuté la thèse selon laquelle la fatwa aurait été décidée par une organisation privée échappant au contrôle gouvernemental. C'est aux gouvernements de faire en sorte que de telles activités criminelles soient poursuivies en justice et c'est donc le Gouvernement iranien qui est responsable dans cette affaire, a-t-il dit.

Présentation de rapports

Présentant le rapport d'activité du Groupe intergouvernemental d'experts sur le droit au développement sur les travaux de sa première session, M. KRZYSZTOF DRZEWICKI, Président-Rapporteur, a rappelé que le mandat du Groupe d'experts vise à l'élaboration d'une stratégie pour la réalisation et la promotion du droit au développement. Observant que le Groupe a été confronté à la critique de certains gouvernements qui lui reprochaient d'avoir tenu un nombre excessif de séances privées, M. Drzewicki a indiqué que le Groupe avait décidé de réexaminer cette question à sa prochaine session. Cependant, une majorité d'experts ont estimé qu'il convenait de maintenir les méthodes de travail actuelles du Groupe. En effet, les séances privées contribuent à accélérer les travaux du Groupe. D'un autre côté, il est vrai que l'exigence de transparence et la nécessité d'établir un dialogue avec les gouvernements et les organisations internationales exigent la tenue de séances publiques.

Pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés, le Groupe a décidé de demander aux gouvernements, aux agences des Nations Unies, aux organes de traités, et aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales de lui soumettre, durant la période intersessions, des propositions concernant des mesures pratiques qui pourraient être intégrées dans la stratégie pour l'application et la promotion du droit au développement. Parmi les sujets qui ont prêté à controverse au sein du Groupe figure la question de savoir si le droit au développement doit être avant tout considéré en tant que droit de l'homme ou uniquement dans une perspective de développement. Une autre question sur laquelle les points de vues exprimés ont été divergents concerne la priorité à accorder aux dimensions nationales ou internationales du droit au développement et de son application. Le Président-Rapporteur a espéré que le Groupe optera, en ce qui concerne les questions qui ont fait l'objet de divergences de vues, pour une approche qui ne favorise aucune position extrême.

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M. Drzewicki a demandé à la Commission d'examiner la recommandation des experts tendant à ce que le Groupe se réunisse pour une session supplémentaire de deux semaines afin de s'acquitter pleinement de son mandat. Le rapport souligne que les propositions consignées dans le document n'ont pas encore été entérinées de manière formelle par le groupe de travail. Il propose qu'un dialogue international s'engage dans le cadre du Conseil économique et social ou d'une réunion peu coûteuse en vue de coordonner les mesures se rapportant au droit au développement et à sa mise en oeuvre. La menace que le problème du développement ou du manque de développement fait peser sur la paix et la sécurité internationales appelle une réaction appropriée. Le Groupe propose que le Haut Commissaire aux droits de l'homme poursuive ses contacts et ses initiatives de coordination avec la Banque mondiale, le FMI et d'autres agences de développement et institutions financières afin que ceux-ci prennent en compte les droits de l'homme dans leurs activités. Il conviendrait également d'encourager les organes des Nations Unies à mieux coordonner leurs décisions tendant à promouvoir et à mettre en oeuvre le droit au développement. Il faudrait aussi créer un mécanisme de suivi et de surveillance chargé d'examiner les violations du droit au développement aux niveaux national et international. Des mesures devraient également être instaurées pour que le système commercial ne débouche pas sur une répartition inéquitable ou plus inéquitable entre les pays des avantages tirés du développement. De nouveaux efforts doivent être consentis pour surmonter le problème de la faiblesse et de l'instabilité des prix des produits de base originaires des pays en développement. Il faudrait par ailleurs mettre en place des mesures et des mécanismes pour que le courant net des ressources financières à destination des pays en développement soit suffisant.

Il faudrait, d'autre part, qu'une initiative soit prise en vue de trouver une solution globale, plutôt que fragmentaire, au problème de l'endettement extérieur, qui engloberait la dette commerciale, bilatérale et multilatérale ainsi que l'encours de la dette. Des mesures devraient également être prises pour remédier à l'influence croissante exercée par les sociétés transnationales. Un groupe de travail devrait notamment être créé pour s'occuper de cette question. De la même manière, des groupes de travail, ou autres mécanismes, devraient être créés pour étudier les thèmes suivants: inégalités et déséquilibres dans les relations et les structures économiques internationales; déséquilibre existant entre pays en développement et pays développés, ainsi qu'entre grands et petits pays, en ce qui concerne leur pouvoir de décision touchant les problèmes mondiaux; effets négatifs de la mondialisation et de la libéralisation sur les perspectives de développement ou le respect des droits de l'homme. En outre, une coopération internationale devrait s'instaurer pour combattre le trafic de drogue, la traite des femmes et des enfants, l'exploitation sexuelle et la prostitution, ainsi que le travail des enfants.

Présentant son rapport sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme, Mme FATMA ZOHRA KSENTINI, Rapporteur

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spécial, a fait valoir que les pays en développement et, plus récemment touchés, les pays en transition ne disposent pas des moyens financiers et de l'arsenal juridique nécessaires pour contrer les pratiques de mouvements et de déversements illicites de produits et déchets toxiques.

Mme Ksentini a regretté que des raisons financières aient été invoquées pour ne pas débloquer les missions sur le terrain qu'elle avait projetées. Elle a également déploré de ne pas avoir pu bénéficier de la continuité des services de fonctionnaires qui lui avaient précédemment été attachés. Le Rapporteur spécial a, par ailleurs, regretté que ne figure pas dans son rapport, comme cela lui avait été assuré, la totalité des réponses qu'elle a reçues de gouvernements. Mme Ksentini a averti que la liste des sociétés transnationales qui participent à la pratique illicite du transfert de produits toxiques ne pourra être dressée si les conditions dans lesquelles elle exerce son mandat ne sont pas améliorées, notamment en matière de ressources humaines et financières.

Parmi les renseignements communiqués au Rapporteur spécial dans l'exercice de son mandat et parmi lesquels figurent nombre de cas de transferts de déchets toxiques de pays développés - tels que l'Allemagne, l'Australie, les États-Unis, le Japon, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni - vers les pays en développement, les Philippines constituent à cet égard une destination privilégiée si l'on se réfère aux informations contenues dans le rapport. Le Rapporteur spécial consigne également dans son étude diverses activités polluantes menées par des sociétés occidentales implantées sur le territoire même des pays en développement, notamment les grandes compagnies pétrolières des États-Unis, de la France, des Pays-Bas et du Royaume-Uni.

Dans les conclusions de son rapport, Mme Ksentini souligne que le trafic illicite des produits et déchets toxiques ou dangereux peut revêtir diverses formes, la caractéristique principale de ce trafic étant la capacité d'adaptation de ceux qui s'y livrent à l'évolution de la situation mondiale. Ainsi, de 1986 à 1988, plus de 3,6 millions de tonnes de déchets auraient été expédiés des pays de l'OCDE vers d'autres pays, sous forme de déversements purs et simples en vue de leur élimination ou de leur stockage définitif. Ces dernières années, on a enregistré une augmentation du mouvement des déchets des pays développés vers les pays en développement, sous forme d'opérations de recyclage ou de récupération. Face à la pression internationale, les trafiquants de déchets recourent à des manoeuvres frauduleuses, voire à la corruption. Les entreprises utilisent des sociétés écran. L'assistance humanitaire aurait servi de couverture dans au moins un cas révélé de tentative d'exportation de produits dangereux d'un pays riche vers un pays pauvre. En 1994, 450 tonnes de pesticides périmés -envoyés à l'origine à l'Albanie au titre de l'«aide humanitaire»- ont été rapatriés en Allemagne après avoir séjourné plus de trois ans en Albanie car les produits, mal conditionnés, présentaient un risque pour les sols, les eaux et les populations des provinces de Bajza et Miloti.

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C'est dire tout l'intérêt de la décision prise par les États parties à la Convention de Bâle d'apporter une modification à la Convention portant sur l'interdiction des exportations de déchets dangereux, y compris aux fins de recyclage, des pays membres de l'OCDE vers les pays non membres. Le Rapporteur spécial estime que la promulgation de lois rigoureuses pour le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux devrait être poursuivie et particulièrement encouragée dans les pays en développement, afin d'atténuer les divergences entre les normes légales nationales appliquées dans les pays développés et les pays en développement. Les États devraient développer la législation pénale dans ce domaine et introduire des sanctions administratives, civiles et pénales afin de poursuivre et de réprimer le trafic illicite. Dans le cas de mouvements transfrontières de déchets toxiques ayant causé des préjudices aux résidents d'un autre État que le pays exportateur, les victimes devraient pouvoir accéder aux procédures administratives et judiciaires de l'État exportateur. Le rapport note que le mécanisme de surveillance, essentiellement volontaire, prévu par la Convention de Bâle, n'est que partiellement exécuté, les États parties paraissant réticents à rapporter les incidents et à informer le Secrétariat de la Convention des mouvements illicites de déchets toxiques.

Débat sur la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels et du développement

M. PETER VAN WULFFTEN PALTHE (Pays-Bas, au nom des pays de l'Union européenne ainsi que des pays d'Europe centrale et de l'Est associés à l'Union) a fait valoir que la promotion des droits de l'homme et des principes démocratiques est l'un des objectifs des politiques étrangères communes des Quinze et de leur politique de coopération en matière économique. Les Quinze ont, pour leur part, inclus des clauses relatives aux droits de l'homme dans leurs accords commerciaux et de coopération. L'Union européenne accorde la priorité à une approche constructive et positive avec les États dans lesquels des violations des droits de l'homme sont commises et se réserve le droit, en fonction de la gravité de ces violations, de prendre des mesures commerciales suspensives. L'Union participe également activement aux efforts de démocratisation des pays qui le demandent car de nombreux conflits ont pour origine des violations flagrantes et massives des droits de l'homme. C'est pourquoi l'Union a aidé plus de soixante pays dans ce domaine entre 1992 et 1995.

Pour ce qui est de la coopération avec la Commission des droits de l'homme et les mécanismes de l'ONU chargés d'assurer la promotion de ces droits, M. Van Wulfften Palthe a indiqué que l'assistance fournie par le Haut Commissaire dans le domaine des droits de l'homme ne saurait en aucun cas se substituer à la nécessité de créer et de développer des institutions nationales chargées des droits de l'homme. L'assistance de la communauté internationale ne peut constituer une excuse que pourraient invoquer les gouvernements pour ne pas assumer leurs responsabilités dans ce domaine, a ajouté le représentant.

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L'Union européenne souligne l'importance du droit au développement qui incarne le lien organique entre le développement et les droits de l'homme, car la violation des droits de l'homme constitue un obstacle au développement. Il faudra donc faire des efforts concrets en ce sens, a-t-il ajouté. Dans ce cadre, les Quinze se félicitent que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, notamment, se soient dit prêts à étudier comment ils pourraient contribuer à l'émergence de gouvernements efficaces et responsables. La jouissance des droits de l'homme est souvent entravée par les guerres et l'extrême pauvreté. La dette grève les efforts de développement de nombreux pays mais personne ne peut s'attendre à ce que des conditions internationales favorables puissent remédier, seules, aux insuffisances des gouvernements nationaux. Il faut donc que tous les pays éliminent la corruption et l'abus de pouvoir, a-t-il conclu.

M. TAKASHI KOEZUKA (Japon) a rappelé que son pays est partie au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. le Japon est persuadé de l'égale importance de ces deux catégories de droits. À deux reprises, en 1995 et 1996, le Japon a réuni un colloque sur les droits de l'homme dans la région Asie-Pacifique afin d'établir un partenariat pour la promotion et la protection des droits de l'homme dans l'ensemble des pays de la région. Il entend poursuivre cette initiative et examiner les questions connexes. Désireux de renforcer son aide publique au développement, comme l'a annoncé le Premier Ministre lors de la dernière session de l'Assemblée générale, le Japon a appelé à une nouvelle stratégie de développement. L'idée maîtresse de cette stratégie réside dans la prise de conscience, par les pays en développement, que le processus de développement leur appartient. Elle s'appuie sur la création d'un nouveau partenariat global entre pays en développement et pays développés. Le représentant japonais a rappelé que, lors du Sommet de Lyon, le Gouvernement de son pays avait annoncé son initiative baptisée «Partenariat pour le développement démocratique», aux termes de laquelle le Japon fournirait une aide globale aux pays qui feraient l'effort de renforcer la démocratie et de promouvoir les droits de l'homme.

M. JACK CHRISTOFIDES (Afrique du Sud) a noté que Mme Ksentini a évoqué un cas qui concerne son pays dans le rapport qu'elle vient de présenter à la Commission. Il a rappelé qu'il a envoyé une lettre, le 28 février dernier, au Rapporteur spécial lui indiquant que ce cas ne relevait pas de son mandat puisqu'il concerne une usine opérant exclusivement sur le sol sud-africain. Il est possible que cette usine ait «des pratiques douteuses» mais elle ne s'est aucunement livrée au déversement illicite de déchets toxiques. Ceux qui ont été reconnus coupables de telles pratiques en Afrique du Sud ont été sanctionnés, a assuré le représentant. Il a fait part de son étonnement qu'un Rapporteur spécial puisse publier des informations non corroborées et ne donne pas la possibilité à un État incriminé de lui répondre. L'Afrique du Sud regrette que le Rapporteur spécial n'ait pas publié dans son rapport la réponse du Gouvernement sud-africain sur cette question et juge que cela permet de mettre en doute son objectivité.

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M. WANG MIN (Chine) a souligné que son pays a connu récemment un développement rapide et continu de son économie, contribuant ainsi largement à l'amélioration des conditions de vie de sa population. Il a déploré que la Commission n'ait pu pleinement jouer son rôle dans la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Les conditions économiques des pays en développement s'aggravent et la pauvreté augmente à travers le monde, a souligné le représentant. Ce sont là les conséquences du pillage colonial que subissent les pays en développement et l'imposition par certains pays occidentaux de leurs modèles politiques. La Chine recommande à la Commission de porter une attention égale aux droits économiques, sociaux et culturels et aux droits civils et politiques. Le droit au développement représente un «grand bond en avant» dans l'évolution du concept des droits de l'homme, a estimé M. Wang Min. Par ailleurs, la coopération internationale doit être renforcée et les obstacles à la réalisation du droit au développement supprimés. La Chine lance un appel à la communauté internationale afin d'instaurer un nouvel ordre économique international et exhorte les pays développés à respecter leurs engagements en matière de dette, de commerce et de technologie. Seul le respect de la souveraineté et du système économique et social choisi par chaque pays en fonction du contexte national peut garantir la stabilité et le développement, ainsi que la réalisation de tous les droits de l'homme, y compris le droit au développement.

M. CARLOS AMAT FORÉS (Cuba) a dénoncé la Loi Helms-Burton adoptée par les États-Unis dont le caractère extraterritorial, unilatéral et coercitif est une violation flagrante du droit international et de la Charte des Nations Unies. Cette loi est conçue pour gouverner le monde. Son objectif essentiel est d'asphyxier le peuple cubain pour lui imposer les changements économiques, politiques et sociaux que le Gouvernement des États-Unis juge favorables à ses intérêts. Le blocus est une condamnation à mort, une politique génocidaire qui vise à affamer un peuple, à le priver de l'accès aux technologies et aux marchés mondiaux et ferme toute possibilité de renégociation de la dette extérieure du pays. Cette agression criminelle a provoqué des dommages économiques dont le montant dépasse les 60 milliards de dollars. La Loi Helms-Burton est un acte barbare qui impose des sanctions aux pays qui maintiennent des relations commerciales normales à Cuba ou investissent dans l'île. «Cette loi est l'expression juridique d'un delirium tremens», a lancé le délégué. Son extra-territorialité est une tentative d'imposer une législation supranationale et constitue une violation de la liberté de commerce, créant des précédents juridiques internationaux entraînant des conséquences auxquelles aucune nation, quelle qu'elle soit, ne pourrait échapper. Cette année encore, la Commission devra se prononcer sur un texte qui fournira l'occasion de condamner à nouveau énergiquement une telle loi.

M. FARAG BIN GHANEM (Yémen) a déclaré que le droit au développement doit reposer sur des bases économiques et sociales solides. Rappelant à cet égard les résultats médiocres enregistrés dans les pays en développement, il a mis en cause la faiblesse des infrastructures économiques et sociales et le

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contexte international défavorable. Le Yémen préconise un renforcement de la coopération et de la solidarité internationales, sous forme notamment d'assistance économique et financière fournie par des institutions financières internationales. L'état actuel des relations internationales incite le Yémen à demander la création de conditions durables favorables au développement et à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Les relations économiques actuelles ignorent l'importance du défi lancé aux pays en développement. Le Yémen accorde une importance particulière à la question du droit au développement, notamment en augmentant les activités productrices et en prenant des mesures afin de réactiver l'économie de marché au niveau national et d'encourager les investissements. La participation de la population à cette politique est essentielle dans ce contexte, a ajouté le représentant du Yémen. Il a fait appel à l'aide des organismes internationaux dans le domaine de développement et appelé la communauté internationale à créer les conditions appropriées à l'établissement d'un nouvel ordre économique international.

Mme ELLEN MOURAVIEFF-APOSTOL (Fédération internationale des assistants sociaux et des assistantes sociales) a espéré que les conclusions et recommandations du rapport de M. Leandro Despouy, Rapporteur spécial de la Sous-Commission chargé de la question de l'extrême pauvreté, feront l'objet d'un réel suivi et qu'une procédure visant à faciliter l'application de ses recommandations les plus pressantes sera mise en place. Elle a observé que, dans certains des pays parmi les plus pauvres, la majorité de la population, composée de gens pauvres et extrêmement pauvres, est exclue de la vie économique, sociale et culturelle. Une situation similaire peut être constatée dans certains pays du miracle économique, dits «tigres» ou «dragons», ainsi que dans certains pays en transition vers l'économie de marché. Même dans des pays industriels, les disparités de revenus s'accroissent. Or, des disparités économiques excessives exacerbent d'autres facteurs de division liés notamment à la race, à l'ethnicité ou à l'affiliation religieuse. Il conviendrait donc de surveiller étroitement l'impact potentiel et prévisible de toute politique sur la pauvreté et l'exclusion. Actuellement, la Fédération internationale des travailleurs sociaux est en train d'achever, avec la Commission européenne, un projet intitulé «Exclusion sociale et travail social en Europe - Construction d'une société active pour tous».

Mme WILDA SPALDING (Agence des cités unies pour la coopération Nord-Sud) a déclaré que les résultats positifs obtenus en matière de politiques d'effacement de la dette liées aux questions d'environnement devraient être appliqués à d'autres domaines des droits de l'homme, notamment la santé et l'éducation. S'agissant des investissements financiers dans les pays en développement, Mme Spalding a souligné la nécessité de mieux connaître les conséquences humaines et fiscales de telles entreprises et de respecter une certaine éthique dans ce domaine. À cet égard, l'enseignement des droits de l'homme doit être renforcé. Par ailleurs, Mme Spalding a appelé la Commission à continuer à se pencher sur l'examen de la question de l'extrême pauvreté.

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Elle a fait état de sa préoccupation concernant les effets néfastes du transport illicite de déchets toxiques et la question de la recrudescence du racisme et de la discrimination que soulève ce problème. Elle a souhaité que la question de l'environnement occupe une place centrale dans les questions relatives aux droits de l'homme.

Mme DAGMAR ROSENKRANZ (Fédération internationale Terre des hommes) a fait valoir que la pauvreté concerne 1,5 milliard de personnes et qu'elle s'est de plus en plus féminisée. Terre des hommes a mené en Afrique et en Amérique latine des projets pour la sécurité alimentaire et a récemment mis en place des programmes de crédits tant au niveau du secteur paysan que des petites entreprises urbaines. Elle a expliqué que cette expérience a permis de mettre en évidence le fait que même les plus pauvres, qui ne remplissent pas les conditions requises par les banques pour bénéficier de prêts, peuvent rembourser leurs emprunts si l'accompagnement et la formation sont pris en compte. Cela est important si l'on veut que les garanties solidaires fonctionnent mieux que les tracasseries administratives des banques. Pour autant, la lutte contre la pauvreté reste une affaire de pouvoirs publics et il ne faut en aucun cas utiliser les organisations non gouvernementales comme un alibi permettant aux États d'échapper aux responsabilités qui sont les leurs dans ce domaine.

M. PIERRE MIOT (Fédération internationale des mouvements d'adultes ruraux catholiques) a déclaré que son organisation portait une attention particulière au processus qui se dessine en vue d'élaborer une stratégie d'application et de promotion du droit au développement qui évaluerait les répercussions sociales de la politique des institutions financières internationales et apporterait ainsi une solution durable à la crise de la dette des pays en développement. Il a affirmé que les mouvements ruraux et les organisations de paysans subissent de plein fouet les effets destructeurs de la mondialisation de l'économie. Il s'est fait l'écho des diverses initiatives développées face à la politique économique néo-libérale par les ruraux des cinq continents. Ces initiatives, notamment en Indonésie, à Madagascar et au Pérou, tendent à promouvoir une économie sociale qui garantisse un développement durable. «Les ruraux, et particulièrement les petits paysans, n'ont aucune chance face au marché international et la seule issue pour eux est de s'organiser, de mettre en oeuvre un modèle de développement solidaire», a déclaré l'orateur.

M. ASHOK BAN (Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes) a rappelé qu'il est de la responsabilité de la communauté internationale de promouvoir et protéger un environnement social et politique qui contribue à la jouissance effective des droits économiques, sociaux et culturels et à la réalisation du droit au développement. Le droit au développement ne peut en aucun cas être séparé du droit à la vie, à la liberté et au bonheur, a estimé le représentant. Par ailleurs, il incombe à la communauté internationale de préserver l'héritage matériel et spirituel des peuples à travers le monde. S'agissant du Jammu-et-Cachemire, M. Ban a

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déclaré que, dans un contexte de terreur, le peuple aspire à la restauration des valeurs traditionnelles de paix et d'amitié et au rétablissement du processus démocratique. Il s'est dit optimiste quant au rétablissement prochain de la paix suite aux récentes élections. Le représentant a appelé la Commission à condamner les pays ou les groupes qui, sous couvert de religion, d'idéologie ou d'ambitions territoriales ont recours à la violence, déniant ainsi aux citoyens leurs droits au développement et à la prospérité.

Mme REENA MARWAH (International Institute for Non-Aligned Studies) a fait valoir que l'insistance sur les seuls aspects matériels du développement ne permettra pas d'améliorer le bien-être des peuples qui ont également besoin d'être valorisés du point de vue de leur religion, de leur couleur, de leur croyances ou de leur idéologie politique. Il est impératif que la communauté internationale oeuvre pour préserver l'héritage physique et spirituel des peuples et limiter les dégâts infligés par l'application des techniques modernes de développement au concept même de famille. Nous nous devons de créer une société qui a abandonné toute idée de conflit basée sur la religion, la race ou la couleur et de faire triompher un monde dans lequel nous serions tous une grande famille, dont tous les membres vivent en harmonie.

Mme CYNTHIA NEURY (Centre Europe-tiers monde) a regretté que la Commission accorde peu d'importance au droit au développement dans ses travaux. Elle a par ailleurs exprimé sa désapprobation quant à la succession de séances privées qui a caractérisé le déroulement des travaux du Groupe intergouvernemental d'experts sur le droit au développement. Elle a déploré que les droits économiques, sociaux et culturels restent marginalisés au sein des Nations Unies, puisque seulement 5% des projets leur sont consacrés. Elle a rappelé que la Sous-Commission, lors de sa dernière session, a recommandé à la Commission de se prononcer en faveur de la création d'un groupe de travail, composé selon une répartition géographique équitable, chargé d'enquêter et d'étudier les méthodes de travail et les activités des sociétés transnationales.

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