CD/G/339

LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LES CONSULTATIONS SUR L'ORDRE DU JOUR SE POURSUIVENT

6 février 1997


Communiqué de Presse
CD/G/339


LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LES CONSULTATIONS SUR L'ORDRE DU JOUR SE POURSUIVENT

19970206 Le Président propose la tenue de séances informelles sur le désarmement nucléaire, l'interdiction des matières fissiles et les mines antipersonnel

Genève, 6 février -- La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, les déclarations des représentants de l'Espagne, de la République arabe syrienne et du Canada. S'agissant de l'ordre du jour de la présente session de la Conférence, qui n'a pas encore été adopté, le Président a proposé la tenue de trois séances plénières informelles consacrées à l'examen de trois questions : le désarmement nucléaire; l'interdiction de la production de matières fissiles à des fins militaires; et l'interdiction des mines terrestres antipersonnel. Plusieurs délégations sont intervenues sur cette proposition.

Le Canada a déclaré qu'il ne s'opposerait pas à la volonté de la Conférence d'examiner la question des mines terrestres antipersonnel, mais il s'opposera fermement à toute initiative qui ne renforcerait pas le processus d'Ottawa ou qui pourrait retarder inutilement l'adoption d'un instrument international contre les mines terrestres antipersonnel.

L'Espagne, pour sa part, estime que la Conférence du désarmement est l'instance appropriée pour mener les négociations sur l'interdiction des mines terrestres antipersonnel. En ce qui concerne le désarmement nucléaire, elle considère que l'élimination des armes nucléaires ne peut s'obtenir par des «propositions maximalistes» et la fixation d'échéances, mais bien par des étapes et des mesures concrètes dont la prochaine doit être l'interdiction des matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou d'autres dispositifs explosifs nucléaires.

La République arabe syrienne s'est prononcée en faveur de l'examen, par la Conférence du désarmement, du programme de désarmement nucléaire par étapes visant notamment à fournir aux États non dotés d'armes nucléaires des garanties contre l'utilisation ou la menace d'utilisation d'armes nucléaires et comportant des mesures de coopération internationale dans le domaine des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire. En ce qui concerne les mines terrestres antipersonnel, la Syrie souligne que leur utilisation peut constituer un moyen légitime de défense. La Syrie appuie les efforts visant à libérer le Moyen-Orient de toute arme de destruction massive, qu'il s'agisse des armes nucléaires, biologiques ou chimiques.

- 2 - CD/G/339 6 février 1997

En ce qui concerne la question de l'ordre du jour de la Conférence du désarmement, sur lequel le consensus n'a pu encore être obtenu, le Président a proposé, en fin de séance, que la Conférence tienne trois séances informelles à composition non limitée consacrées à l'examen de trois questions : le désarmement nucléaire; l'interdiction de la production de matières fissiles à des fins militaires; et les mines terrestres antipersonnel. L'examen de ces questions n'exclut pas la discussion d'autres questions.

Le Pakistan, l'Égypte et l'Inde ont estimé que la Conférence devrait s'entendre sur les questions de fond à examiner avant de procéder aux discussions sur les questions proposées par le Président. Il faut permettre aux Groupes d'examiner cette proposition. Pour sa part, le Groupe des 21 a fait des propositions et elles doivent être prises en compte, en particulier en ce qui concerne la priorité accordée par ce Groupe au désarmement nucléaire, ont-ils souligné. Le Pakistan a rappelé qu'il accordait la priorité aux questions du désarmement nucléaire, des garanties de sécurité contre la menace d'utilisation d'armes nucléaires et de réduction des armes classiques au plan régional. L'Égypte a émis des réserves sur la séparation des points sur les matières fissiles et celui sur le désarmement nucléaire. La question de l'interdiction des matières fissiles à des fins militaires devrait être un sous-point du désarmement nucléaire, tout comme les garanties de sécurité et la prévention de la course aux armes nucléaires dans l'espace, estime l'Égypte.

Le Mexique a souligné qu'il n'y avait pas d'accord pour examiner la question des mines terrestres antipersonnel au sein de la Conférence du désarmement. Il a souligné que cette question n'a jamais figuré à l'ordre du jour de la Conférence.

La Chine a réitéré qu'elle ne pourrait accepter la discussion de seulement trois «sujets». Il ne suffit pas de discuter de ces questions pour régler le problème que constitue un accord sur l'ordre du jour. Le Gouvernement de la Chine examine la question des mines terrestres antipersonnel et la délégation ne peut s'engager à l'heure actuelle.

La France a reconnu qu'il valait mieux s'entendre sur un ordre du jour avant d'échanger des vues sur des sujets spécifiques. Elle salue toutefois l'initiative du Président qui pourrait aider la Conférence du désarmement à sortir de la paralysie. Les trois sujets proposés sont les principales questions qui émergent des interventions qui ont été faites jusqu'à présent par les délégations. De telles discussions permettraient «d'éviter la langue de bois». Les représentants des Pays-Bas et du Royaume-Uni ont également appuyé la proposition du Président et l'ont encouragé a poursuivre ses consultations dans le sens proposé, soulignant que ces réunions ne prendront pas de décisions. Les États-Unis s'opposent à ce que la Conférence du désarmement s'occupe de «désarmement nucléaire» mais ne s'opposent pas à ce que la question soit examinée dans le cadre de consultations informelles.

- 3 - CD/G/339 6 février 1997

La Conférence du désarmement a décidé d'accéder à la demande de la République-unie de Tanzanie de participer aux travaux de la Conférence en qualité d'observateur.

La prochaine séance publique de la Conférence du désarmement aura lieu jeudi prochain, le 13 février 1997, à 10 heures.

Déclarations

M. AMADOR MARTÍNEZ MORCILLO (Espagne) a attiré l'attention sur les priorités accordées dans le domaine du désarmement par son pays, qui vient d'être admis en tant que membre de la Conférence du désarmement. Selon l'Espagne, la Conférence doit accorder son attention aussi bien aux armes classiques qu'aux armes de destruction massive. À cet égard, comme l'a démontré le processus de réduction des armes nucléaires, leur élimination ne peut s'obtenir par des «propositions maximalistes» et la fixation d'échéances, mais bien par des étapes et des mesures concrètes dont la somme entraîne d'importants changements qualitatifs en vue de l'élimination progressive des armes nucléaires. Toute autre stratégie est vouée à l'échec, a estimé M. Martínez.

Le représentant espagnol a déclaré que la prochaine étape, complémentaire, après celle de l'interdiction des essais nucléaires, doit être l'interdiction des matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou d'autres dispositifs explosifs nucléaires. La Conférence s'étant déjà entendu sur le mandat du comité spécial chargé des négociations, il faut dès à présent le créer. La Conférence doit accorder le rang de priorité le plus élevé à cette question.

En ce qui concerne les armes classiques, l'Espagne accorde la priorité aux mines terrestres antipersonnel. Elle a, pour sa part, déclaré un moratoire sur les exportations et contribue de façon importante à plusieurs opérations de déminage et de formation au déminage. L'Espagne s'associe aux délégations qui estiment que la Conférence du désarmement est l'instance appropriée pour mener les négociations. En effet, une action internationale efficace dans ce domaine exige des mesures en matière de vérification, d'application progressive et d'universalité. Cette exigence d'universalité plaide tout particulièrement en faveur de l'examen de la question des mines par la Conférence du désarmement. C'est pour la même raison que l'Espagne, s'agissant de la question de l'élargissement de la composition de la Conférence, est favorable à ce que les pays observateurs qui ont exprimé le souhait de s'intégrer à ses travaux puissent le faire d'une façon ou d'une autre.

- 4 - CD/G/339 6 février 1997

M. IYAD ORFI (République arabe syrienne) a souligné que la menace nucléaire à l'échelle internationale et régionale ne disparaîtra pas tant qu'elle ne sera pas appréhendée de façon globale et équitable. Toutes les étapes franchies par la Conférence du désarmement ne permettront pas de faire de progrès si elles ne s'inscrivent pas dans un programme d'élimination complète des armes nucléaires. La Syrie s'associe au programme de désarmement nucléaire proposé par le Groupe des 21, qui s'appuie en particulier sur des mesures visant à fournir aux États non dotés d'armes nucléaires des garanties contre l'utilisation ou la menace d'utilisation d'armes nucléaires. Le représentant a rappelé que cette menace serait en violation des normes internationales, comme l'a déclaré sans ambiguïté la Cour internationale de justice. Il a également rappelé que l'Assemblée générale a demandé la création d'un comité spécial chargé de discuter d'un programme par étapes pour l'élimination des armes nucléaires. Le programme doit aussi comporter des mesures de coopération dans le domaine des utilisations à des fins pacifiques de l'énergie nucléaire, a déclaré M. Orfi, ajoutant que les contraintes imposées à l'heure actuelle aux pays en développement entravent leur développement économique.

En ce qui concerne les mines terrestres antipersonnel, la Syrie, tout en étant consciente des dégâts matériels et humains qu'elles occasionnent, tient néanmoins à souligner qu'elles peuvent constituer pour certains États une défense contre des armes encore plus dévastatrices utilisées entre eux. Faut-il, au sein de la Conférence du désarmement, traiter plutôt des mines terrestres antipersonnel ou des armes de destruction massive qui peuvent détruire l'humanité tout entière, a demandé le représentant syrien ?

M. Orfi a déclaré que la région du Moyen-Orient est peut-être le théâtre des plus grandes tensions dans le monde. Les espoirs suscités par Madrid s'estompent, a dit le délégué déplorant le fait qu'Israël occupe encore les territoires arabes et renie les engagements pris par le gouvernement précédent. En outre, Israël poursuit son programme d'armement nucléaire et refuse d'adhérer au Traité sur la non-prolifération nucléaire. Cette attitude constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales, en particulier pour la région du Moyen-Orient. La République arabe syrienne n'a épargné aucun effort pour appuyer les résolutions des Nations Unies dans le domaine du désarmement et du renforcement de la paix et la sécurité dans le monde. Elle appuie les efforts visant à libérer le Moyen-Orient de toute arme de destruction massive, qu'il s'agisse des armes nucléaires, biologiques ou chimiques.

M. MARK MOHER (Canada) intervenant sur la question des mines antipersonnel a déclaré que c'est la question de leur utilisation qui doit être abordée prioritairement. L'étude du Comité international de la Croix- Rouge sur les mines terrestres antipersonnel montre qu'elle ont rarement été utilisées correctement du point de vue de leur utilité militaire. C'est pourquoi le Canada s'est fixé pour objectif de parvenir, en 1997, à un accord sur l'interdiction de la production, du stockage, du transfert et en particulier de l'utilisation des mines terrestres antipersonnel.

- 5 - CD/G/339 6 février 1997

De plus en plus de pays, de toutes les régions du monde, appuient le «processus d'Ottawa», qui est «la voie rapide» pour l'examen de la question. Les travaux menés dans ce cadre commenceront dans une semaine à Vienne et se poursuivront jusqu'à leur conclusion au cours de cette année. Le Canada reconnaît la volonté de certains pays d'examiner la question des mines terrestres antipersonnel au sein de la Conférence du désarmement mais rejette toute suggestion qu'elle constitue le seul mécanisme acceptable pour l'examen de la question. Le Canada réitère sa position selon laquelle tout examen de la question au sein de la Conférence doit reposer sur la complémentarité et le renforcement mutuel avec le processus d'Ottawa. En outre, le Canada «ne croit pas qu'une approche laborieuse par étapes, qui commencerait par l'interdiction des exportations, répondrait à l'urgence humanitaire qui a conduit 156 pays à voter en faveur d'une résolution demandant leur interdiction totale».

Le Canada ne s'opposera pas à la volonté de la Conférence d'examiner la question des mines terrestres antipersonnel, mais il s'opposera fermement à toute initiative qui ne renforcerait pas ou ne serait pas complémentaire du processus d'Ottawa ou qui pourrait retarder inutilement l'adoption tant attendue d'un instrument international contre les mines terrestres antipersonnel.

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