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HR/4313

MESSAGE DU HAUT COMMISSAIRE AUX DROITS DE L'HOMME À L'OCCASION DE LA JOURNÉE DES DROITS DE L'HOMME

9 décembre 1996


Communiqué de Presse
HR/4313


MESSAGE DU HAUT COMMISSAIRE AUX DROITS DE L'HOMME À L'OCCASION DE LA JOURNÉE DES DROITS DE L'HOMME

19961209 Genève, 9 décembre -- On trouvera ci-dessous le texte du message du Haut Commissaire aux droits de l'homme, M. José Ayala Lasso, à l'occasion de la Journée des droits de l'homme, le 10 décembre 1996 :

Aujourd’hui, 10 décembre, nous commémorons le quarante_huitième anniversaire de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme. En cette occasion, il est important de regarder les progrès qui ont été faits depuis le 10 décembre 1948. Des normes internationales détaillées, qui, pour certaines, comme la Convention relative aux droits de l’enfant, ont été presque universellement ratifiées, ont ajouté des obligations juridiquement contraignantes à la force morale de cette première proclamation internationale de droits individuels et collectifs acquis à la naissance.

Deux sommets mondiaux sur les droits de l’homme _ le premier à Téhéran en 1968 et le deuxième à Vienne en 1993 _ ont réaffirmé l’universalité des droits de l’homme et le fait que les droits de l’homme appartiennent à tous et que la communauté internationale et les gouvernements eux_mêmes se doivent de les promouvoir, de les protéger et de les faire progresser.

Pendant des années les droits civils et politiques ont eu la primauté, mais aujourd’hui les droits économiques, sociaux et culturels sont sur un pied d’égalité avec les droits civils et politiques dont ils sont indissociables. Il en résulte que l’importance du droit au développement et l’étroite corrélation qui existe entre la démocratie, le développement et le respect des droits de l’homme sont maintenant clairement établies.

Depuis 1948, la communauté internationale a accordé beaucoup d’importance aux mesures visant à garantir la pleine jouissance par les femmes de tous les droits fondamentaux, dans des conditions d’égalité, ainsi que la protection effective des droits des enfants, notamment ceux qui sont dans des situations particulièrement difficiles, et les questions relatives au travail des enfants, à la vente d’enfants et aux petites filles ont reçu une attention toute particulière. Les droits fondamentaux des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, bénéficient aussi d’une reconnaissance accrue.

Les gouvernements et d’autres institutions ont affirmé la dignité et la contribution unique des populations autochtones par leurs efforts visant à protéger et promouvoir leurs droits au maximum.

Des politiques et des programmes axés sur l’élimination du racisme et de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui l’accompagne se sont développés partout, notamment sous la forme de législations appropriées visant à lutter contre toutes les formes de racisme et à mettre en place des institutions nationales de lutte contre ces phénomènes.

La prévention des violations des droits de l’homme par l’éducation et par des programmes de coopération technique ayant pour but de renforcer les institutions démocratiques, la primauté du droit et les infrastructures nationales de défense des droits de l’homme s’est généralisée avec un succès certain.

L’un des résultats les plus importants des 48 dernières années a été la reconnaissance du fait que les organisations régionales, les institutions nationales et en particulier les organisations non gouvernementales ont un rôle unique à jouer dans la promotion et la protection des droits de l’homme. Leur volonté résolue de faire progresser la cause des droits de l’homme donne à espérer que des réalisations concrètes marqueront le XXIe siècle qui, sans aucun doute, sera le siècle des droits de l’homme.

Une fois accomplies les tâches principales liées à l’élaboration de normes internationales relatives aux droits de l’homme, la communauté internationale a donné la priorité aux mécanismes de mise en oeuvre et un nouveau type de dialogue entre les fonctionnaires de l’ONU, experts des questions relatives aux droits de l’homme, et les gouvernements, a commencé à se faire jour. Ces experts sont chargés de surveiller la façon dont les Etats respectent les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et d’enquêter sur des situations données dans tel ou tel pays ou sur des questions thématiques du domaine des droits de l’homme, sans considération de frontières géographiques. Ces mécanismes ont permis aux membres de la communauté internationale d’aborder ensemble les principales situations des droits de l’homme dans le monde entier. Nous voyons ainsi prendre corps l’un des plus importants principes directeurs formulés lors de la Conférence de Vienne, à savoir que les droits de l’homme sont une préoccupation légitime de la communauté internationale.

La création de la charge de haut commissaire aux droits de l’homme à la fin de 1993 est un autre pas en avant que la communauté internationale a accompli pour catalyser les efforts de manière que la jouissance effective de tous les droits de l’homme devienne une réalité plus proche pour ceux qui aujourd’hui encore sont victimes de violations.

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En tant que premier haut commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, j’ai entamé un dialogue au plus haut niveau avec les gouvernements pour la promotion et la protection de tous les droits de l’homme. Le principal objectif de ce dialogue est d’aboutir à des résultats concrets, de parler ouvertement des besoins en matière de droits de l’homme, de déceler les obstacles à la pleine réalisation de tous les droits de l’homme, y compris le droit au développement, et de mettre des avis d’experts de l’ONU, une assistance technique et des activités de coopération à la disposition de ceux qui érigent les infrastructures nécessaires.

Ce dialogue commence à porter ses fruits et à élargir notre capacité d’action. Lorsque j’ai pris mes fonctions en avril 1994, le Centre n’avait pratiquement pas de fonctionnaires sur le terrain : aujourd’hui, le Bureau du Haut Commissaire aux droits de l’homme/Centre pour les droits de l’homme a plus de fonctionnaires sur le terrain qu’au siège. Nos collaborateurs sont des professionnels auxquels la promotion et la protection des droits de l’homme tiennent à coeur. Leur travail au Rwanda, au Burundi et en ex_Yougoslavie ainsi que les importants programmes de coopération technique entrepris au Malawi, à Gaza, en Mongolie et au Cambodge sont des exemples concrets des droits de l’homme à l’oeuvre, une expression de la volonté de la communauté internationale de faire des droits de l’homme une réalité pour l’humanité tout entière.

Pas plus tard qu’il y a deux semaines, j’ai signé avec le Ministre des relations extérieures de la Colombie un accord important concernant l’ouverture d’un bureau de l’ONU pour les droits de l’homme à Bogota. Aujourd’hui, j’ai le plaisir de vous informer qu’un autre bureau de l’ONU pour les droits de l’homme est en train de s’ouvrir en Abkhazie/Géorgie en étroite coopération avec l’OSCE et avec le soutien de cette organisation. C’est aujourd’hui aussi que notre bureau des droits de l’homme au Zaïre est officiellement inauguré.

En développant ainsi notre présence sur le terrain _ toujours avec le consentement et la coopération des gouvernements intéressés _ nous apportons les droits de l’homme directement à la population dans des endroits où des actions concrètes sont nécessaires. De par cette dimension novatrice du travail dans le domaine des droits de l’homme, nous sommes à même de traduire les efforts des organismes intergouvernementaux, des organes conventionnels, des groupes d’experts et du Secrétariat de l’ONU en une expression concrète de la volonté de la communauté internationale en ce qui concerne la promotion et la protection des droits de l’homme.

Il est indispensable que la coopération et la coordination interinstitutions fonctionnent bien si l’on veut parvenir à une approche pleinement intégrée de la question de la promotion et de la protection des droits de l’homme dans l’ensemble du système des Nations Unies. Je suis résolu à travailler en étroite collaboration avec d'autres institutions pour atteindre ce résultat, notamment sur le terrain où nous travaillons

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en partenariat avec le HCR, l'UNICEF, le PNUD et les Volontaires des Nations Unies pour ne citer que quelques exemples, mais aussi au sein du Comité administratif de coordination (CAC) de l'ONU où un accord a été conclu récemment concernant la coordination, en 1997, des préparatifs à l'échelle du système du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et de l'examen à mi_parcours de la Déclaration et du Programme d'action de Vienne.

Je crois en particulier que beaucoup peut être fait pour développer la promotion et la protection des droits de l'homme en coopération avec des institutions financières et des organismes de développement et aboutir dans ce secteur à des résultats concrets.

Conformément au mandat qui m'a été confié, je me suis employé à renforcer tous les mécanismes créés par la Commission des droits de l'homme, pour préserver et développer leur identité spécifique en tant que piliers indispensables des mécanismes de mise en oeuvre établis par la communauté internationale pour surveiller l'application des normes relatives aux droits de l'homme.

J'ai essayé d'amener les gouvernements, les organisations internationales, les organisations non gouvernementales et le grand public à travailler ensemble plus étroitement pour la réalisation des libertés et des droits fondamentaux. L'un de mes objectifs premiers a été d'oeuvrer pour une meilleure application des normes internationales relatives aux droits de l'homme et pour une action du Secrétariat de l'ONU qui soit plus efficace et mieux adaptée à cet objectif.

J'ai aussi déclenché une profonde restructuration du Centre pour les droits de l'homme pour l'aider à être mieux à même de répondre à l'évolution des besoins du programme dans le domaine des droits de l'homme, découlant de la Déclaration et du Programme d'action de Vienne (1993) et de la création du poste de Haut Commissaire aux droits de l'homme. Des résultats positifs commencent à se faire sentir, non seulement du personnel mais aussi des experts de l'ONU qui s'occupent des droits de l'homme, des représentants des gouvernements et des organisations non gouvernementales.

La Journée des droits de l'homme est l'occasion de jeter un regard en arrière avec fierté sur les nombreuses réalisations qui ont été faites dans le domaine des droits de l'homme, mais aussi de se préparer à relever les défis de demain. Nous sommes malheureusement loin du jour où la torture et la faim seront finalement éliminées et où il n'y aura plus de victimes de violations des droits de l'homme. Aujourd'hui, nous devons nous demander si nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir pour éviter la tragédie du Rwanda et mettre un terme à la violence au Burundi et ailleurs. Le potentiel de la communauté internationale dépasse certainement les réalisations qui ont été enregistrées jusqu'à présent. Nous devons donc redoubler d'efforts, en ayant à l'esprit le sort dramatique de milliers d'enfants, de femmes et

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d'hommes qui souffrent de la violence et du manque de nourriture et d'abris, pour faire en sorte que les droits de l'homme occupent une place encore plus importante parmi les thèmes à l'ordre du jour de la communauté internationale et que les mécanismes qui ont été créés pour cela soient véritablement dotés des moyens leur permettant d'agir.

Pour réussir à atteindre les objectifs du programme de l'ONU dans le domaine des droits de l'homme, il faudra faire davantage connaître les droits de l'homme, les rendre plus accessibles et donc plus proches des personnes démunies. A cet égard, tout investissement dans une action préventive vaut la peine, mais c'est aussi une opération rentable : 1 dollar investi aujourd'hui dans le domaine des droits de l'homme, c'est 1 000 dollars d'économisés sur l'assistance humanitaire d'urgence demain, sans parler du nombre incalculable de souffrances humaines et de tragédies personnelles qui pourront être évitées.

J'ai agi au mieux de mes capacités pour tenter d'apporter des réponses appropriées et efficaces aux multiples défis auxquels nous nous trouvons confrontés à la fin du présent millénaire. J'ai toujours été guidé par l'esprit qui a rendu possible la Déclaration et le Programme d'action de Vienne. Pour que nous réussissions dans notre tâche commune, je continuerai de solliciter des Etats Membres, des organisations internationales, des organismes des Nations Unies et des organisations non gouvernementales ainsi que de toutes les personnes de bonne volonté le soutien qu'ils m'ont apporté jusqu'à présent. Ensemble nous pourrons inaugurer un nouveau siècle des droits de l'homme. En cette Journée des droits de l'homme, prenons de nouveau l'engagement de faire tout ce qui est en notre pouvoir pourfaire respecter les buts et les principes de la Charte des Nations Unies ainsi que les normes et les critères consacrés par la Déclaration universelle des droits de l'homme qui est "un idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations".

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