ECOSOC/298

CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL : IL EST NECESSAIRE D'INTEGRER DANS LES MESURES D'ERADICATION DE LA PAUVRETE UNE APPROCHE FONDEE SUR L'EQUITE DES SEXES

2 juillet 1996


Communiqué de Presse
ECOSOC/298


CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL : IL EST NECESSAIRE D'INTEGRER DANS LES MESURES D'ERADICATION DE LA PAUVRETE UNE APPROCHE FONDEE SUR L'EQUITE DES SEXES

19960702 MATIN ECOSOC/298 Réuni sous la présidence de M. Gerhard Walter Henze (Allemagne), le Conseil économique et social a poursuivi, ce matin, son débat sur la coordination des politiques et activités des institutions spécialisées et autres organismes des Nations Unies pour éliminer la pauvreté. Dans ce cadre, il a entendu les représentants des pays suivants : Fédération de Russie, Ghana, Canada, Tunisie, Jamaïque et Tanzanie. Les observateurs de la Norvège et de la Suisse ont également pris la parole.

Les représentants des organisations internationales suivantes sont intervenus : Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), le Centre des Nations Unies sur les établissements humains (Habitat), l'Organisation internationale du travail (OIT) et Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

Les délégations ont souligné la nécessité de mieux harmoniser l'action nationale et multilatérale en vue de l'éradication de la pauvreté. Les gouvernements devraient accorder la priorité à la question de la pauvreté dans leurs programmes de développement, en mettant l'accent notamment sur ses liens avec la santé, l'éducation et l'environnement. Les institutions spécialisées et les autres organismes du système des Nations Unies devraient coordonner leurs efforts et établir un partenariat avec les pays en développement en vue d'appuyer techniquement les efforts qu'ils déploient pour élaborer des stratégies d'élimination de la pauvreté mieux adaptées à leurs situations précises. Pour assurer le succès des stratégies et programmes visant l'éradication de la pauvreté, les intervenants ont été nombreux à insister sur la nécessité d'y intégrer une approche fondée sur l'équité des sexes.

Le Conseil économique et social poursuivra son débat sur la question, cet après-midi, à partir de 15 heures.

Coordination des politiques et activités des institutions spécialisées et autres organismes des Nations Unies pour éliminer la pauvreté.

M. THELMA AWORI, Administrateur adjoint et Directeur du Bureau pour l'appui de la politique et des programmes du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) : Reconnaissant la nature complexe et multidimensionnelle de la pauvreté, le PNUD souligne la nécessité de créer un climat politique et institutionnel propice et de promouvoir les stratégies renforçant les compétences et la créativité. En Afrique, le PNUD travaille étroitement avec l'Organisation internationale du travail (OIT) sur une initiative quinquennale visant la création d'emplois en vue de réduire la pauvreté. En Asie, le PNUD assiste l'Association de l'Asie du Sud pour la coopération régionale (SAARC) à mettre en oeuvre une stratégie de mobilisation sociale visant le renforcement des organisations de villages et la formation de responsables locaux dans la mise en place de projets créant des emplois et de développement d'infrastructure.

Dans la région arabe, le PNUD a organisé, en février dernier, une réunion d'experts sur l'allégement de la pauvreté. Au cours de l'année 1996, l'Année internationale pour l'éradication de la pauvreté, le PNUD a également lancé son Initiative en faveur de stratégies contre la pauvreté pour appuyer les efforts nationaux à mettre en oeuvre les accords de Copenhague, en particulier la formulation des stratégies nationales sur l'éradication de la pauvreté. L'appui du PNUD est axé sur cinq domaines prioritaires, à savoir la sensibilisation du public pour mobiliser tous les acteurs sociaux et institutionnels dans la lutte contre la pauvreté au niveau national; l'évaluation de la pauvreté et des inégalités, pour déterminer notamment les causes de la pauvreté, sa féminisation; la définition des objectifs nationaux pour éliminer la pauvreté absolue, en mettant l'accent sur la création de mécanismes de suivi des politiques et programmes dans ce domaine; l'examen des politiques et budgets nationaux pour assurer une action dynamique contre la pauvreté; et la réforme institutionnelle et la coordination, en vue de rationaliser les politiques de développement et les interventions, ainsi que les relations entre les efforts déployés par les secteurs privé et public et les efforts volontaires pour réduire la pauvreté.

Les disparités et l'instabilité croissantes qui caractérisent le système économique international offrent des projets en matière d'éradication de la pauvreté aux pays les moins avancés qu'ils ne peuvent mettre en oeuvre, faute de ressources adéquates. La question qu'on se pose est de savoir comment peut-on envisager de façon créative les moyens d'utiliser l'immense potentiel des nouvelles technologies dans un environnement de plus en plus mondialisé de sorte que ces moyens contribuent à la cohésion sociale, à l'intégration et à une plus grande prospérité pour tous. Il faudrait revoir les politiques actuelles afin d'assurer que des bases solides en faveur de la croissance économique soient établies et que la préoccupation pour les pauvres figure en priorité à l'ordre du jour des stratégies adoptées.

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M. SERGEI ALEKSANDROVICH ORDZHONIKIDZE (Fédération de Russie) : Le fléau de la pauvreté continue d'avoir un impact négatif sur une grande partie de la population mondiale. Son élimination passe par une approche multilatérale afin de satisfaire les besoin de tous, notamment les couches les plus vulnérables. Le problème de la pauvreté a un caractère multidisciplinaire. Le rapport du Secrétaire général, dont la Fédération de Russie se félicite, contient des considérations sur la coordination de l'aide dans le cadre des programmes nationaux de lutte contre ce fléau. La Russie appuie la participation de la Commission du développement durable à l'examen de la dimension sociale du développement. Les ressources consacrées doivent avoir un caractère prévisible et constant. La Russie participe activement à l'Année internationale de lutte contre la pauvreté, lancée par l'Assemblée générale. Avant le 1er novembre 1996, un code de protection sociale minimale sera promulgué en Fédération de Russie. Un plan d'action sociale est également prévu pour l'exercice 1996- 1997. Toutefois, un soutien plus engagé de la communauté internationale en faveur des pays à économie en transition serait à même de contribuer favorablement à l'amélioration de la situation. La Fédération de Russie est favorable à l'orientation sociale de la coopération internationale, sous l'égide des Nations Unies.

M. JACK WILMOT (Ghana) : Tout en appréciant la place consacrée aux activités d'élimination de la pauvreté dans le cadre des mécanismes de coordination de l'ONU, le Ghana lance un appel en faveur du renforcement du système du coordonnateur résident. C'est au niveau du pays qu'il sera possible d'intégrer et de coordonner les différentes formes d'assistance visant à lutter contre la pauvreté. Il est donc important, ainsi que le note le Secrétaire général dans son rapport, d'établir les arrangements adéquats qui garantiront la participation de tous les représentants des organisations du système de l'ONU, au sein du système des coordonnateurs résidents. Il importe de donner suite aux recommandations du Sommet mondial pour le développement social visant à garantir plus d'efficacité au niveau du terrain; à renforcer, par exemple, le rôle de la note de stratégie par pays, les comités du système de l'ONU sur le terrain, et l'approche spécifique par pays. "Le système de l'ONU doit être le défenseur des pauvres et doit leur rendre compte", sur le terrain. Il est regrettable que la chute continue des ressources financières rende la tâche des institutions multilatérales de développement plus difficile. Le Secrétaire général indique ainsi que les niveaux d'aide publique au développement (APD) sont à leur plus bas niveau depuis 1973. Le Ghana lance un appel pour l'application des recommandations du Secrétaire général, en matière d'allocation de ressources pour l'élimination de la pauvreté, l'évaluation commune par pays, la définition d'une stratégie d'élimination de la pauvreté et le renforcement de la collaboration avec les institutions de Bretton Woods. D'autre part, il est important de maintenir une nette division du travail entre la structure à trois niveaux, que constitue l'Assemblée générale, le Conseil économique et social et les commissions techniques. Le Conseil pourrait coordonner le travail des commissions techniques et du système de l'ONU, en leur assignant des mandats et des responsabilités claires. Pour cela, le Conseil pourrait

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envisager d'adopter, à l'instar de ses commissions techniques, un programme de travail pluriannuel.

Mme ELISABETH DOWSDESWELL, Directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) : D'un point de vue écologique et économique, la pauvreté et la détérioration de l'environnement constituent des symptômes d'un système économique qui fonctionne mal. On ne peut ignorer les facteurs extérieurs sociaux et écologiques considérables qui existent et qui offrent des mesures incitatives pour des prix plus faibles, au détriment du capital humain et de l'environnement. Un tel système ne peut que donner lieu à des conditions de travail pauvres, à de faibles salaires et à la détérioration de l'environnement. Les inégalités qui existent de richesse et de pouvoir contribuent à la dégradation de l'environnement car elles permettent à certaines personnes de bénéficier des profits du marché tandis que d'autres sont contraints de payer des coûts élevés.

Il faudrait adopter de nouvelles stratégies novatrices pour s'attaquer au cycle vieux de la pauvreté et de la détérioration de l'environnement. Du point de vue du PNUE, il faudrait permettre aux pauvres de participer aux décisions cruciales sur la protection de leur capital naturel; il faudrait en outre assurer que les prix des matières premières intègrent les coûts humains et écologiques de leur production et reconnaître les droits fonciers traditionnels et l'exercice de ces droits afin de permettre aux pauvres d'élargir leurs options quant à la gestion des ressources.

Dans le cadre du thème principal de la production et de la consommation durables, le PNUE a mis en oeuvre un programme intégré pour promouvoir les schémas de production et de consommation durables sur le plan mondial. Par le biais de partenariats stratégiques avec, notamment, les organisations des Nations Unies, les associations nationales et internationales de consommateurs, les ONG et les banques régionales de développement, le PNUE évalue les forces motrices qui contribuent à des schémas de consommation et de production de courte durée. En sa qualité de président du Groupe de travail sur l'eau, le PNUE a formulé des recommandations concernant l'équité fondée sur la gestion et l'utilisation de l'eau. L'approche novatrice adoptée par le PNUE pour assurer un partage juste de la gestion des ressources en eau a été intégrée au projet de programme de travail de l'Initiative spéciale en faveur de l'Afrique. Par ailleurs, les investissements en ressources humaines constituent un facteur important pour lutter contre l'appauvrissement humain et écologique. Des améliorations en matière d'alimentation, de santé et d'éducation pourraient contribuer à une meilleure vie et à davantage renforcer la capacité de lutter contre la détérioration écologique dont les pauvres sont victimes.

M. WALLY N'DOW, Secrétaire général de la Deuxième Conférence des Nations Unies sur les établissements humains (Habitat II) : La Conférence Habitat aura été le rendez-vous des individus et le système international en sera le plus grand bénéficiaire. Istanbul constitue le début d'un processus et l'occasion

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de lancer un programme d'action sur le défi majeur de la planète : où et comment vivre. L'accord sur le droit au logement pourrait par exemple se révéler le pilier de l'avenir, en même temps que partie intégrante des instruments internationaux sur les droits de l'homme. Istanbul a démontré que le travail ne se ferait pas seul. Certes, les gouvernements nationaux peuvent faciliter beaucoup de choses. Mais le travail réel devra être pris en main par une série d'acteurs, notamment les autorités locales et les diverses composantes de la société civile. Les Comités nationaux doivent continuer leur action ainsi que la mise en oeuvre des plans d'action.

Mme KATHERINE HAGEN, Directeur général adjoint de l'Organisation internationale du travail (OIT) : Il est important de réaliser comment le cadre de suivi de la série des conférences mondiales est propice aux objectifs de coordination, sur le terrain, dans l'intérêt de tous. Les initiatives prises par les équipes spéciales contribueront à une interaction améliorée entre les directives adoptées par le siège pour être appliquées sur le terrain et les contributions du terrain au système. Les recommandations devraient être complétées avec des références appropriées à l'assistance dans le domaine du renforcement des capacités nationales en matière de gestion et de participation de la société civile, notamment les partenaires sociaux qui oeuvrent, au niveau national, avec l'OIT.

Le Secrétaire général note à juste titre qu'un certain nombre de tendances récentes ont incité le système des Nations Unies à coopérer. Ceci est dû notamment à l'accent mis sur le caractère multidimensionnel des questions de développement et de pauvreté et sur la nécessité d'une approche intégrée pour y faire face. Dans ce nouveau contexte, il est apparu nécessaire d'explorer des moyens souples de coopération interinstitutions, qui permettront aux institutions les plus concernées de se regrouper et de faire des progrès sur des aspects particuliers de la question de la pauvreté. Il est vital d'assurer que les mesures en matière d'éradication de la pauvreté prises dans tout le système des Nations Unies tiennent compte du respect des droits de l'homme fondamentaux.

Non seulement la question de l'équité entre les sexes doit être pleinement intégrée dans toutes les initiatives sur l'éradication de la pauvreté, mais il faudrait également disposer des moyens nécessaires au suivi et à l'évaluation de toutes les activités en termes de résultats en faveur des femmes. Pour sa part, l'OIT s'est engagée à intégrer l'approche fondée sur l'égalité et l'équité entre les sexes dans tous ses programmes et activités. Ceci signifie un traitement égal entre les hommes et les femmes sur le plan professionnel. Par ailleurs, les mesures visant à améliorer l'accès des pauvres aux ressources de production figuraient dans les domaines d'action déterminés par le Sommet mondial pour le développement social, et le Comité administratif de coordination a chargé l'OIT de présider une équipe spéciale pour examiner la question de l'emploi et des moyens d'existence durables afin de répondre, de façon coordonnée, à ces recommandations, au niveau des pays et

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au niveau régional. Cette équipe spéciale devrait achever l'examen de cette question, à la fin du premier trimestre de 1997.

M. CLAUDE BAILLARGEON, Chef adjoint de la délégation du Canada : Dans la lutte contre la pauvreté, le grand défi qui se pose pour les pays est d'élaborer des stratégies exhaustives basées sur des approches participatives à grande échelle correspondant aux exigences nationales. Quant à la communauté internationale, le défi consiste à travailler en partenariat avec les pays en développement et de soutenir techniquement les efforts qu'ils font pour élaborer des stratégies d'élimination de la pauvreté correspondant à leurs situations précises. La seconde étape consiste à contribuer à la prestation des services sociaux de base et autres formes de secours aux gens vivant dans la pauvreté. A cet égard, le Canada appuie l'initiative 20/20 et consacre déjà, pour sa part, 25% de son APD aux initiatives bilatérales qui aident à répondre aux besoins humains fondamentaux. Soulignant l'importance de la coordination au niveau national pour une lutte efficace contre la pauvreté, le Canada estime que l'épargne intérieure et les ressources budgétaires devraient être reconnues comme une importance source de financement des stratégies. Le Canada émet des réserves quant à la recommandation d'assurer un financement prévisible, continu et garanti. Se prononçant résolument en faveur de la généralisation du concept de l'égalité des sexes, le Canada appuie, par ailleurs, l'harmonisation des activités intergouvernementales. Il est en outre nécessaire d'assurer que le travail réalisé au niveau intergouvernementales couvre de façon complémentaire les divers aspects et dimensions de la pauvreté.

Le Canada estime que les recommandations du Secrétaire général sur la coordination au niveau national et sur la coordination intergouvernementale sont artificiellement séparées. Puisque la mise en application se fera au niveau de chaque pays, il faut que les deux niveaux suivent des approches similaires. En outre, le Canada souligne que de nouveaux efforts doivent être faits pour améliorer et valoriser la Commission du développement social et que l'ECOSOC doit se voir réserver un rôle de coordination plus marqué en ce qui concerne les questions de lutte contre la pauvreté. Selon le Canada, les questions de financement doivent exclusivement revenir à l'ECOSOC et non plus être examinées par chaque commission. En ce qui concerne l'élaboration d'indicateurs et d'autres outils statistiques pour mesurer la pauvreté, le Canada se prononce en faveur d'un effort de collaboration mené sous les auspices du Comité administratif de coordination (CAC).

M. SLAHEDDINE ABDELLAH (Tunisie) : La réponse tunisienne pour réduire l'exclusion et assurer la paix sociale vise d'abord les zones rurales isolées. C'est au profit de celles ci qu'a été institué le fonds de solidarité nationale. Parmi les principaux critères retenus pour le choix des zones éligibles aux interventions du fonds figurent notamment la pauvreté des zones et de leurs populations, l'isolement dû à l'absence des voies et moyens de communications ou encore l'absence d'équipements de base et de commodités collectives. Devant le succès des projets réalisés, la Tunisie a décidé de

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mettre en oeuvre au cours des années 1995-1999 un programme national plus ambitieux pour le développement de toutes les zones d'ombre à l'horizon 2000.

Pour ce qui concerne l'action au niveau international, la Tunisie se félicite de ce que l'élimination de la pauvreté est désormais perçue comme la priorité mondiale, les organismes du système des Nations Unies y consacrant une proportion croissante de leurs ressources. Toutefois force est de constater que l'aide publique au développement (APD) n'a cessé de reculer, atteignant son niveau le plus bas depuis 1973. Aussi la Tunisie réitère l'appel du Groupe des 77 et de la Chine qui demande que le flux des ressources soit prévisible, additionnel et adéquat afin que l'élimination de la pauvreté ne reste pas un voeu pieux et un vain mot.

Mme PATRICIA DURRANT (Jamaïque) : S'il est admis que les gouvernements nationaux ont la responsabilité première de définir et de mettre en oeuvre les stratégies d'élimination de la pauvreté, il est en même temps reconnu que les Nations Unies ont un rôle d'appui important dans la lutte contre ce fléau. Concernant la question des ressources, la Jamaïque regrette qu'à l'heure où l'élimination de la pauvreté se meut en objectif prioritaire, les ressources allouées aux institutions multilatérales chargées de l'aide au développement, ont subi un déclin significatif au cours des dernières années. Dans ce contexte, la Jamaïque souscrit à l'opinion du Secrétaire général selon laquelle l'impact et l'efficacité des activités des Nations Unies dans ce domaine restent tributaires d'un financement adéquat et substantiel. De même, les pays ayant élaboré des stratégies de lutte contre la pauvreté dans le cadre du suivi du Sommet de Copenhague, voient l'efficacité de leurs initiatives sapée par un environnement international défavorable. La Jamaïque souhaite par conséquent que le groupe de travail du CAC chargé de la promotion d'un environnement favorable tienne également compte des dimensions de la libéralisation du commerce, de l'investissement et des capitaux privés, ainsi que du transfert de technologie.

L'harmonisation et la coordination, notamment au niveau du pays, revêtent un caractère essentiel à la mise en oeuvre satisfaisante des stratégies de lutte contre la pauvreté. Il est important que les coordonnateurs résidents mettent en place un comité de coordination sur le terrain afin de servir de mécanisme de coordination des Nations Unies dans les pays concernés. Au niveau institutionnel, la Jamaïque est favorable à la proposition visant à ce que l'Assemblée générale soit l'organe de la formulation du cadre global et des lignes directrices des politiques, l'ECOSOC se chargeant du suivi de l'action de ses commissions techniques. Dans ce même contexte, le système des Nations Unies serait responsable de l'approche intégrée de l'ensemble.

M. OLE KRISTIAN HOLTHE (Norvège) : Pour réaliser le consensus globalement accepté de placer l'être humain au centre des efforts de développement et de garantir l'accès universel aux services sociaux de base, le Gouvernement norvégien estime que le point de départ de notre action et du

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système de l'ONU est l'élimination de la pauvreté. A cet effet, la Norvège s'appuie sur les engagements convenus à Copenhague et à Beijing. Il est nécessaire d'accroître considérablement les ressources allouées au développement social, tout en mettant l'accent sur leur utilisation plus efficiente et plus ciblée. Il faut appliquer les recommandations présentées par le Secrétaire général dans son rapport, et touchant aux mécanismes de coordination de l'ONU au niveau des pays.

Les instruments de cette coordination - le système de coordonnateur résident, la note de stratégie par pays, l'approche-programme, le système des comités au niveau du terrain, les tables rondes et les accords des groupes consultatifs - doivent être renforcés dans la plus large mesure possible. La Norvège appuie le travail du CAC dans ce cadre. En matière de suivi, sur le terrain, des grandes conférences convoquées par l'ONU, un dilemme persiste quant à la manière dont le Secrétariat et les organes intergouvernementaux doivent mener cette coordination, afin d'assurer une bonne gouvernance à tous les niveaux. La Norvège partage les réflexions formulées par l'Argentine, sur la question. Nous devons résoudre ce dilemme dans le cadre du processus de réforme.

L'Initiative spéciale pour l'Afrique constituera un test important et à venir de cette capacité à réaliser une meilleure gouvernance. Si elle est appliquée, l'Initiative spéciale contribuera déjà à améliorer la qualité de la gestion des ressources globales. Il demeure toutefois des zones d'ombre importantes s'agissant de cette Initiative. Quel sera le degré de coopération avec les autorités africaines? Comment utiliser les mécanismes, les ressources financières? Quelle "propriété" garderont les pays africains sur les projets? L'Initiative exige l'engagement de tous les acteurs. "Nous ne pouvons permettre à la communauté internationale de demeurer un lointain spectateur". En avril, les Gouvernements des Pays-Bas et de la Norvège ont convoqué à Oslo une réunion internationale, pour discuter de l'application de l'initiative 20/20. Avec l'appui des organismes et institutions de l'ONU, la réunion d'Oslo a apporté une contribution concrète à la formulation d'une stratégie mondiale d'élimination de la pauvreté, "qui peut être traduite en pratique". La stratégie et le partenariat lancés à Lyon par le Sommet du G-7 constitue un autre effort "pratique". La Norvège estime que c'est par un investissement dans les femmes et les enfants, que l'on éliminera le plus sûrement et le plus efficacement la pauvreté.

M. WEIBGEN, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) : La cruelle ironie de la pauvreté est que la majorité des personnes qui souffrent de la faim vivent et travaillent dans les zones rurales, où les produits alimentaires devraient produits. La plupart des pauvres en milieu rural n'ont pas accès à la terre et dépendent largement de l'agriculture pour leur subsistance et leur revenu. Pourtant, dans la réalité, ces populations ne disposent pas de ressources en eau ou en terre cultivable qui leur permettraient de produire pour leur famille ou d'acheter la nourriture dont ils auraient besoin. En milieu rural, les technologies

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modernes font souvent défaut. Dans leur lutte pour leur survie, les pauvres en milieu rural ont souvent recours à des pratiques qui dégradent l'environnement; rendant ainsi plus précaire leur sécurité alimentaire et celle des générations futures. Le manque d'accès à la terre force souvent les pauvres à réduire ou à éliminer les périodes de jachère, pourtant essentielles à l'équilibre et à la durabilité des systèmes de fermage. Pour les mêmes raisons, les pâturages et les forêts sont soumis à une importante pression des populations. La production agricole en est réduite et le phénomène de désertification, accéléré, en particulier en Afrique. La pauvreté rurale est inextricablement liée à la pauvreté urbaine, à cause de l'exode rural. "La pauvreté rurale s'exporte ainsi en ville". Il faut par conséquent lutter contre les causes profondes de la pauvreté urbaine là où elle naît souvent, en zone rurale.

Pour réaliser cet objectif, la FAO a recours à des politiques agressives en matière de conseils et de programmes d'assistance technique. La FAO appuie les efforts des Etats Membres visant à accroître la production agricole et alimentaire et à créer des emplois en zone rurale, en particulier dans les pays à faible revenu et importateurs nets de produits alimentaires. Au niveau de l'ONU, la FAO assume de larges fonctions de coordination par le biais de mécanismes interinstitutions, tel le Sous-Comité du Comité administratif de coordination (CAC) sur le développement rural qui est présidé et servi par la FAO. Ce Sous-Comité se compose de 32 institutions et organisations, dont l'objectif principal est de contribuer activement à réduire la pauvreté en milieu rural. Dans le cadre du suivi des grandes conférences, la FAO a revitalisé ses actions en matière de sécurité alimentaire. Le Directeur général de la FAO a lancé ainsi une initiative majeure - le Programme spécial sur la sécurité alimentaire dans les pays à faible revenu et importateurs nets de produits alimentaires. Un Sommet mondial sur la sécurité alimentaire sera convoqué à Rome, en Novembre 1996, pour réaffirmer que la sécurité alimentaire et le développement agricole sont les premières étapes du processus de développement et de lutte contre la pauvreté dans les pays importateurs nets de produits alimentaires.

M. JEAN-JACQUES ELMIGER, Chef du service des affaires internationales de l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail de la Suisse : Le système des Nations Unies n'ayant pas le monopole de la lutte contre la pauvreté, il a tout intérêt à coordonner ses activités avec d'autres bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux, gouvernementaux et non gouvernementaux. Saluant les principales activités de coordination entreprises à l'échelle du système des Nations Unies, la Suisse estime que ces mesures doivent avant tout servir à appuyer les Etats et les gouvernements pour mettre en oeuvre de véritables programmes de lutte contre la pauvreté, tout en assurant une gestion saine des finances publiques. A cet égard, la Suisse appuie les efforts entrepris en vue de réaliser le principe 20/20. De l'avis de la Suisse, il est également indispensable que la communauté internationale dispose d'indicateurs sociaux, techniques et économiques permettant de mieux cibler l'aide multilatérale.

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Dans ce contexte, la Suisse souligne l'importance des notes stratégiques par pays et invite les organismes des Nations Unies à tirer régulièrement des bilans des activités développées. D'autre part, gardant à l'esprit que la féminisation de la pauvreté induit le travail des enfants ou encore des déséquilibres sur le marché du travail, la Suisse soutient toute mesure visant à intégrer l'égalité de traitement entre hommes et femmes la mise en oeuvre de programmes pertinents. Attachant une grande importance à la répartition des tâches entre les divers organes du Conseil économique et social (ECOSOC), la Suisse estime que la revitalisation de la Commission du développement social est primordiale. Il est important que les commissions techniques disposent d'un domaine clair de compétence et d'un calendrier de travail détaillé.

M. DAUDI N. MWAKAWAGO (Tanzanie) : En collaboration avec la Banque mondiale, le Gouvernement tanzanien élabore actuellement un mémorandum économique du pays dans le domaine de la lutte contre la pauvreté. Les mesures adoptées en Tanzanie requièrent la mobilisation de ressources nationales et internationales. La communauté internationale a le devoir d'assister ces efforts par l'apport de ressources financières nouvelles et additionnelles. La Tanzanie est engagée en faveur de la mise en oeuvre de l'initiative 20/20. En conclusion, la Tanzanie est convaincue que les mesures de lutte contre la pauvreté ne sauraient être satisfaisantes sans la pleine participation des femmes. En reconnaissance de l'importance des femmes dans le processus de développement, la Tanzanie s'est dotée d'un Ministère chargé du développement communautaire, des affaires féminines et des enfants, traditionnellement dirigé par une femme.

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