ECOSOC/297

CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL: L'ELIMINATION DE LA PAUVRETE DEMEURE UNE CONDITION ESSENTIELLE A LA REALISATION DES OBJECTIFS DU DEVELOPPEMENT

1er juillet 1996


Communiqué de Presse
ECOSOC/297


CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL: L'ELIMINATION DE LA PAUVRETE DEMEURE UNE CONDITION ESSENTIELLE A LA REALISATION DES OBJECTIFS DU DEVELOPPEMENT

19960701 APRES-MIDI ECOSOC/297

Sous la présidence de M. Gerhard Walter Henze (Allemagne), le Conseil économique et social a poursuivi, cet après-midi, son débat relatif à la coordination des organismes des Nations Unies pour éliminer la pauvreté. Il a entendu dans ce cadre la déclaration des représentants des pays suivants: Colombie, Pakistan, Chine, Ouganda, Argentine et Indonésie. L'Observateur du Saint-Siège est également intervenu.

Les représentants suivants de Fonds et organes des Nations Unies sont intervenus au titre de ce débat: Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP). Le Directeur de la Division de la coordination des politiques et des affaires du Conseil économique et social, a commenté les interventions des délégations.

Le Conseil économique et social poursuivra son débat sur la question, demain, 2 juillet, à partir de 10 heures.

- - ECOSOC/297 1er juillet 1996 (à suivre) M. JAIRO MONTOYA (Colombie) : La Colombie, qui attache une importance particulière à l'élimination de la pauvreté, estime que les institutions de Bretton Woods, le système des Nations Unies ainsi que d'autres entités, devraient renforcer leurs liens ainsi que leurs coopération et coordination à cette fin. La question de la collaboration inter-institutions dans ce domaine ne devrait donc pas se limiter au domaine des activités opérationnelles pour le développement. Il s'agit bien au contraire d'un point de départ vers des objectifs d'une portée plus ambitieuse. La Colombie est d'avis que la question des ressources constitue le point faible de l'analyse et des propositions formulées à ce jour. Celles-ci s'attachent par trop au diagnostic sans apporter de recommandations.

L'accent devrait être mis sur le caractère volontaire de la note de stratégie par pays. Ce document ne devrait en aucun cas être considéré

comme une condition au soutien du système des Nations Unies et aux programmes et stratégies de lutte contre la pauvreté. La Colombie estime qu'une approche harmonisée et intégrée d'un examen intergouvernemental de la problématique de l'élimination de la pauvreté devrait partir du point de vue que l'Assemblée générale demeure l'organe compétent pour adopter des politiques directrices à l'échelle de la communauté internationale et du système des Nations Unies. Le Conseil économique et social devrait justement avoir un rôle d'appui de l'Assemblée générale. Concernant les questions multisectorielles liées à la pauvreté, la Colombie est d'avis qu'elles relèvent du mandat de l'Assemblée générale.

M. MUHAMMAD NAJIM AKBAR (Pakistan) : Les Nations Unies ont un rôle important à jouer pour faire face au problème multidimensionnel et complexe de la pauvreté. Il est regrettable que le montant total de l'aide publique au développement des membres du Comité d'assistance pour le développement de l'OCDE est passé à 0,30% de leur PNB combiné, atteignant ainsi le niveau le plus faible depuis 1973. Le PNUD a également été incapable de réaliser les objectifs de son programme quinquennal de 1992-1996 en raison des faibles contributions. Le Programme mondial alimentaire fait aussi face à une réduction de ses ressources. Comme les ressources disponibles constituent la clé aux efforts des Etats Membres et du système des Nations Unies visant à réaliser l'objectif de l'éradication de la pauvreté, il faudrait mettre l'accent, à l'avenir, sur la collecte des données disponibles sur la création d'un climat propice à l'éradication de la pauvreté, l'existence des ressources et des différentes études sur les questions liées à l'éradication de la pauvreté entreprises dans le cadre du système des Nations Unies.

Ceci donnerait lieu à une vue holistique du problème tant pour son examen par les gouvernements que pour les travaux du système des Nations Unies. Les efforts de renforcement des capacités des Etats Membres, en coopération avec le système des Nations Unies, sont affectés à cause des carences dans la mise en oeuvre de l'Engagement IX de la Déclaration de Copenhague sur le développement social, relatif aux efforts internationaux en vue de la réalisation de l'objectif de 0,7% du PNB en faveur de l'assistance au développement et des mesures d'allégement de la dette. Pour le Pakistan, les investissements directs étrangers ne constituent pas un substitut à l'affectation des ressources pour les pays en développement et, en particulier, pour les domaines liés à la pauvreté.

M. WANG XUEXIAN (Chine) : Sans l'élimination de la pauvreté, les pays en développement ne pourront guère réaliser leurs objectifs de développement socio-économique, améliorer les conditions de vie de leurs populations, promouvoir la condition de la femme et protéger l'environnement. Dans ce contexte, la Chine est d'avis que cette problématique devrait occuper une place de choix dans le cadre du suivi des récentes grandes conférences internationales. De même, il devient nécessaire de renforcer la coordination entre les diverses organisations engagées dans ce processus. Toutefois, la coordination ne saurait se limiter à l'échelle du système des Nations Unies, pour inclure les pays récipiendaires. Lutter contre la pauvreté doit absolument inclure l'élimination de ses causes profondes. Ainsi, la Chine plaide en faveur de la promotion d'un environnement économique international favorable susceptible de permettre la réalisation des objectifs de développement par tous les pays, notamment en développement. La Chine saisit cette occasion pour rappeler aux pays développés leur responsabilité dans l'assistance en faveur de l'élimination de la pauvreté dans les pays en développement en général et les moins avancés en particulier.

M. SADIG RASHEED, Directeur de la Division des programmes du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) : L'UNICEF estime que la fourniture de services sociaux de base est l'un des moyens les plus efficaces et efficients en termes de coût pour réduire la pauvreté. Nul ne peut nier qu'un accès universel à ces services de base est une condition préalable à

l'élimination de la pauvreté. Bien que le Sommet mondial pour le développement social ne donne pas de définition des concepts utilisés dans ce domaine, il est important de différencier entre services sociaux de base et besoins humains essentiels. L'UNICEF et les autres institutions définissent les services sociaux de base comme incluant l'éducation de base, les soins de santé primaire y compris la santé reproductive et la planification familiale, la nutrition, l'approvisionnement en eau et les services d'assainissement.

Les besoins humains essentiels englobent un domaine plus vaste, comprenant par exemple l'emploi, le logement, l'accès au crédit. Afin de promouvoir un accès universel aux services sociaux de base, l'UNICEF agit dans trois domaines - appui direct à la fourniture de services; renforcement des capacités et mobilisation sociale; et plaidoyer. La mobilisation des ressources nécessaires à cet accès universel aux services sociaux de base préoccupe l'UNICEF depuis le Sommet mondial pour les enfants. Le concept "20/20" est l'un des mécanismes pratiques par le biais desquels les objectifs mondiaux du développement social peuvent être réalisés. Le Sommet mondial a approuvé le concept 20/20, en tenant compte des réserves de certains gouvernements. Récemment, lors d'une réunion convoquée par les gouvernements de la Norvège et des Pays-Bas, cette initiative a reçu un plus large appui. L'UNICEF se félicite de cette évolution. L'UNICEF reconnaît cependant qu'il n'existe pas de meilleure stratégie pour éliminer la pauvreté.

M. OSCAR AVALLE (Argentine) : Quand on aborde la question de la coordination, il faut distinguer entre la coordination dans le domaine intergouvernemental et celle qui relève des institutions. Actuellement, la phase est à l'approfondissement du travail conceptuel sur le fonctionnement des institutions de Bretton Woods relativement à la lutte contre la pauvreté. L'Argentine estime que ce qui fait cruellement défaut, est bien une interaction entre ces deux secteurs, à savoir le secteur intergouvernemental et celui des interinstitutions. Sans cette interaction, l'on risque de tourner en rond. L'Argentine apprécie à sa juste valeur le rôle primordial du CAC dans le domaine de la coordination interinstitutions. Toutefois, le niveau intergouvernemental devrait pouvoir connaître des débats au sein du CAC et des groupes de travail interinstitutions. Dans ce dernier cas, le Conseil économique et social serait alors à même de prendre une décision sur la coordination optimale.

M. SEMAKULA KIWANUKA (Ouganda) : Les stratégies durables de lutte contre la pauvreté exigent l'adoption d'approches participatoires qui impliquent les populations pauvres à tous les échelons de la mise en oeuvre et accordent un rôle clé aux gouvernements. Elles doivent être clairement définies et revêtir un caractère multisectoriel tendant à une application rationnelle des politiques macro-économiques. Il est vrai, en effet, que telle politique appliquée dans tel secteur de l'économie a forcément une incidence positive ou négative sur les autres secteurs. De l'avis de l'Ouganda, une lutte efficace contre la pauvreté doit avoir pour objectifs principaux; le développement et la modernisation de l'agriculture, la protection de l'environnement et la gestion des écosystèmes et le développement des infrastructures rurales.

Les politiques d'élimination de la pauvreté mettent également en exergue la nécessité de renforcer les pouvoirs politiques et économiques des femmes, épines dorsales des sociétés africaines. Par ailleurs, l'amélioration de la formation dans toutes les disciplines et une gestion démocratique des affaires publiques constituent, en Afrique, des éléments importants d'une lutte efficace contre la pauvreté. Il est également important que les initiatives des institutions spécialisées des Nations Unies et des institutions de Bretton Woods correspondent autant que possible aux priorités et initiatives nationales. Il convient d'instaurer un dialogue constant entre les représentants des institutions mentionnées et le gouvernement du pays hôte.

Mme KERSTIN TRONE, Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) : L'autonomisation des femmes et la réalisation de l'égalité et de l'équité entre les sexes constituent le pivot de l'éradication de la pauvreté et du développement durable. Il est nécessaire d'assurer la pleine participation des femmes à tous les processus d'élaboration des politiques et de prise de décision aux niveaux international, national et local. Par le biais de l'éducation, de l'emploi et des services de santé, il est possible d'autonomiser les femmes, de renforcer leur autonomie et d'améliorer leur vie socio-économique et leur condition en matière de santé et de les faire participer aux organes de décision.

En élaborant des programmes visant l'éradication de la pauvreté, il faudrait veiller à ce que les femmes participent activement et soient les architectes des processus d'élaboration, de mise en oeuvre et de suivi des projets. Par ailleurs, la santé génésique donne aux femmes la liberté en matière d'éducation, d'emploi et pour une vie meilleure. Les enfants nés par choix ont probablement plus de chance d'être en meilleure santé et d'avoir un avenir plus heureux avec de meilleurs chances pour l'éducation et l'emploi. La santé génésique en faveur des adolescents devrait également être renforcée, car les enfants qui engendrent des enfants perpétueront le cycle de la pauvreté et compromettront l'avenir socio-économique de la mère et de l'enfant. Il faudrait en outre mettre l'accent sur le rôle des hommes en matière de santé génésique et s'assurer qu'ils assument leurs responsabilités familiales en matière de santé.

La pauvreté est liée étroitement aux problèmes démographiques. C'est pourquoi, le FNUAP contribue au développement durable et à l'éradication de la pauvreté par la promotion et la mise en oeuvre des programmes en matière de population et de santé génésique. Tous les programmes appuyés par le FNUAP s'adressent aux pauvres et visent à encourager le développement économique et social en faveur de l'éradication de la pauvreté. Ayant une longue expérience en matière de coopération avec les organisations non gouvernementales, le FNUAP estime que les ONG sont souvent plus novatrices et souples pour traiter des questions les plus sensibles comme la santé génésique et les droits des jeunes et des adolescents.

M. HERIYANTO SOEPRAPTO (Indonésie) : D'après un récent rapport de la Banque mondiale, le nombre de pauvres disposant d'un revenu de moins de 1 dollar par jour s'accroît dans les pays en développement, en dépit d'une décennie d'ajustement structurel. Il est ironique que la pauvreté absolue - à cause de laquelle, directement ou indirectement, 40 000 enfants meurent chaque jour - coexiste avec une économie mondiale d'affluence et de richesse. Ces tristes faits sont la preuve de l'échec grossier des programmes d'élimination de la pauvreté de ces dernières années, qui ont été menés tant par les gouvernements, la communauté internationale et l'ONU. Non seulement l'accélération des phénomènes de mondialisation et de libéralisation ou les ajustements structurels ne bénéficient que de façon mineure aux pays affectés par une pauvreté chronique; ils ont souvent un impact négatif sur leurs efforts de développement et sont la raison d'une marginalisation croissante. La crise de la pauvreté n'a pu être contenue, malgré la prolifération de projets et programmes des Nations Unies et de ses institutions. L'Indonésie estime que la question de la pauvreté chronique doit être abordée sous un angle multisectoriel et holistique. Il est donc nécessaire d'accroître la coordination des activités des Nations Unies en matière d'élimination de la pauvreté, de mieux harmoniser les mandats. A propos des recommandations formulées dans le rapport du Secrétaire général à cet effet, l'Indonésie regrette qu'elles mettent davantage l'accent sur les arrangements institutionnels au sein du système, que sur les causes profondes de la pauvreté. Les pays attendent de l'ONU qu'elle mobilise en priorité ses capacités, dans le cadre d'une assistance technique aux efforts nationaux. Les recommandations 5, 14 et 11 du Secrétaire général - sur le bilan de pays commun, la coopération avec les

institutions de Bretton Woods et le système de coordinateurs résidents, les comités de coordination au niveau local. Plutôt que de se charger de la question de la création d'un environnement propice dans le cadre de ses débats futurs, ainsi que le recommande le Secrétaire général, le Conseil devrait consacrer ses prochains travaux au problème des ressources financières. Compte tenu du déclin persistent des ressources et des engagements, ce problème est de loin plus pertinent et plus urgent.

Mgr DIARMUID MARTIN (Saint-Siège) : L'environnement économique propice au développement social pour l'éradication de la pauvreté est essentiel car dans ce domaine des changements considérables sont survenus, notamment à la suite des conférences internationales. Les forces du marché du secteur privé sont maintenant des acteurs déterminants dans la nouvelle composition de la communauté internationale. Le nouveau cadre de l'environnement économique mondial ne peut plus être décidé uniquement par les gouvernements. Dans une économie mondialisée, le secteur privé représente une composante majeure qui ne touche malheureusement qu'une minorité des pays en développement. Le Sommet social de Copenhague contient un engagement en en vue d'harmoniser le développement économique et social. Quelles mesures peut-on prendre pour permettre aux pays les plus défavorisés de participer à ce processus. Le rôle croissant du secteur privé ne devrait pas freiner l'aide publique au développement. Ce processus national ne devrait pas être utilisé au détriment des pays en développement, en particulier des plus pauvres.

M. MILES STOBY, Directeur de la coordination des politiques et des affaires du Conseil économique et social : Un malentendu semble se répéter. Il est inexact que le Secrétaire général, dans son rapport, ne traite pas du problème du déclin des ressources. Le rapport traite clairement du problème des ressources. Le Secrétaire général formule d'ailleurs une recommandation sans équivoque sur une mobilisation plus large des ressources (recommandation 2). Il est d'autre part erroné de dire que le Comité administratif de coordination (CAC) ne se charge pas des questions opérationnelles du développement. Le CAC a ainsi décidé de s'impliquer dans le suivi des grandes conférences, par le biais des divers mécanismes existants, et notamment des équipes spéciales sur le terrain. Le CAC s'efforce de maintenir un équilibre entre la recherche conceptuelle du développement et l'"opérationnalisation" des activités de développement, sur le terrain.

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