SG/SM/21463

Pour le Secrétaire général, « l’heure est venue de transformer les systèmes éducatifs », afin de créer un monde plus durable, inclusif, juste et pacifique

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée lors du Sommet sur la Transformation de l’Éducation, à New York, aujourd’hui:

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée lors du Sommet sur la Transformation de l’Éducation, à New York, aujourd’hui:

L’éducation a toujours été un guide pour moi et joué un rôle essentiel dans ma vie.  Je me considère comme un étudiant à vie.  Mon activité d’enseignant a été une grande source d’inspiration, il y a plusieurs décennies.  Si je n’avais pas reçu d’éducation, qui sait ce que je serais devenu.  Où serions-nous, toutes et tous ?  

Chaque personne ici présente sait que l’éducation transforme les vies, les économies et les sociétés.  Mais nous savons aussi qu’il nous faut transformer l’éducation.  Car l’éducation traverse une crise profonde.  Au lieu de nous rapprocher, l’éducation est en train de devenir une source de grande division.  Dans les pays pauvres, 70 % des enfants de 10 ans sont incapables de lire un texte élémentaire.  Soit ils sont déscolarisés, soit ils vont à l’école mais apprennent à peine. 

Même dans les pays développés, les systèmes éducatifs creusent souvent les inégalités au lieu de les réduire, et ce de génération en génération.  Les riches ont accès aux meilleures ressources, écoles et universités, ce qui leur permet d’obtenir les meilleurs emplois, tandis que les pauvres –en particulier les filles– rencontrent d’énormes obstacles pour obtenir les qualifications qui pourraient changer leur vie.  Les personnes déplacées et les étudiants handicapés se heurtent aux obstacles les plus importants.  La pandémie de COVID-19 a eu des effets dévastateurs sur l’apprentissage dans le monde entier, et a porté un coup aux progrès réalisés concernant l’Objectif de développement durable no 4. 

Mais la crise de l’éducation a commencé bien avant cela – et elle est bien plus profonde.  Le carnet de notes de la Commission internationale sur Les futurs de l’éducation est clair: les systèmes éducatifs ne sont pas à la hauteur.  Ils laissent tomber les élèves et les sociétés, en favorisant l’apprentissage par cœur et la course à la meilleure note. 

Trop souvent, les programmes d’étude sont dépassés et limités.  Les systèmes éducatifs ne laissent pratiquement aucune place à l’apprentissage tout au long de la vie.  Les enseignants ne sont pas assez formés, ne sont pas appréciés à leur juste valeur et sont sous-payés.  La fracture numérique pénalise les étudiants pauvres.  Et le fossé du financement de l’éducation est plus large que jamais.  

Ce n’est pas en nous contentant de faire plus, plus vite ou mieux que nous mettrons fin à cette crise.  L’heure est venue de transformer les systèmes éducatifs.  Vos concitoyens, les jeunes du monde entier et les générations futures vous demandent de faire preuve d’ambition et de détermination.  Une nouvelle conception de l’éducation au XXIe siècle est en train de prendre forme.  

Avant toute chose, un enseignement de qualité est essentiel au développement de l’apprenant individuel tout au long de sa vie.  Il doit l’aider à apprendre à apprendre, en privilégiant le règlement des problèmes et la collaboration.  Il doit lui offrir les bases de l’apprentissage, que ce soit la lecture, l’écriture et les mathématiques mais aussi des compétences scientifiques, numériques, sociales et émotionnelles.  Il doit aussi donner aux étudiants les moyens de s’adapter à l’évolution rapide du monde du travail.  Il doit être accessible à chacun et à chacune dès son plus jeune âge et tout au long de la vie.  Enfin, il doit nous aider à apprendre à vivre et à travailler ensemble, à nous comprendre et à comprendre nos responsabilités les uns envers les autres et envers notre planète.  

À l’heure de la mésinformation galopante, du déni climatique et des attaques portées aux droits humains, nous avons besoin de systèmes éducatifs qui distinguent les faits des théories du complot, inculquent le respect de la science et célèbrent l’humanité dans toute sa diversité.  

Pour faire de cet idéal une réalité, permettez-moi d’attirer votre attention sur cinq grandes questions.  Tout d’abord, nous devons protéger le droit à une éducation de qualité pour toutes et tous, en particulier les jeunes filles. Partout.  Les écoles doivent être ouvertes à tous les enfants, sans discrimination aucune.  Partout sur la planète, il nous faut rattraper les années d’apprentissage perdues à cause de la pandémie.  

Préserver une éducation de qualité pour toutes et tous, cela veut dire remédier à la crise qui frappe l’apprentissage des savoirs fondamentaux, et cela tout au long de la vie.  Dans les endroits en proie à de graves difficultés, cela veut dire aussi privilégier l’éducation.  Je voudrais profiter de cette tribune pour lancer un appel aux autorités afghanes: levez immédiatement toutes les restrictions qui entravent l’accès des filles à l’enseignement secondaire.  L’éducation des filles est l’un des meilleurs moyens d’assurer la paix, la sécurité et le développement durable et ce, partout dans le monde.  

En deuxième lieu, les enseignants sont la force vive des systèmes éducatifs.  Nous devons nous intéresser de nouveau à leurs rôles et à leurs compétences.  Aujourd’hui, les enseignants doivent être en classe des facilitateurs: ils doivent apprendre à apprendre et ne pas se contenter de transmettre des connaissances toutes faites.  Il nous faut remédier à la pénurie mondiale d’enseignants et chercher à améliorer leur niveau, en revalorisant le métier qu’ils exercent et garantissant de bonnes conditions de travail et puissent se former et se perfectionner tout au long de leur carrière et recevoir un salaire adéquat.   

En troisième lieu, les écoles doivent être des espaces sûrs et propices à l’épanouissement, où la violence, la stigmatisation et le harcèlement scolaire n’ont pas leur place.  Les systèmes éducatifs doivent promouvoir la santé physique et mentale de tous les élèves, y compris leur santé sexuelle et reproductive. 

En quatrième lieu, la révolution numérique doit profiter à tous les élèves.  Je demande aux États de faire en sorte que les étudiants et les établissements d’enseignement soient mieux connectés. À cet égard, notre initiative Giga vise à mettre toutes les écoles en ligne.  Mais la connectivité –en elle-même– ne suffit pas pour offrir une éducation.  J’encourage les gouvernements et les enseignants à collaborer avec les partenaires du secteur privé pour développer des contenus éducatifs numériques de haute qualité pour toutes et tous.  

Cinquièmement, la question du financement.  Rien de tout cela ne sera possible sans une augmentation du financement de l’éducation et sans un élan de solidarité mondiale contre les inégalités.  En ces temps difficiles, j’exhorte tous les pays à protéger les budgets consacrés à l’éducation et à veiller à ce que leurs dépenses dans ce domaine se traduisent par une augmentation progressive des ressources par élève et par de meilleurs résultats scolaires.  Le financement de l’éducation doit être la priorité numéro un des gouvernements.  C’est le meilleur investissement qu’un pays puisse faire dans sa population et son avenir. 

La communauté internationale a un rôle crucial à jouer.  Je demande aux partenaires de développement d’annuler les réductions d’aide et de consacrer au moins 15% de l’aide publique au développement à l’éducation.  Les institutions financières internationales doivent apporter des ressources aux pays en développement et leur laisser des marges de manœuvre budgétaire pour qu’ils puissent investir.  Leurs dépenses et leurs conseils doivent correspondre à l’objectif d’assurer une éducation de qualité pour toutes et tous.  

J’invite également les institutions financières internationales à tirer parti de la Facilité internationale de financement pour l’éducation.  Cet outil vise à mobiliser 10 milliards de dollars pour aider quelque 700 millions d’enfants vivant dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure à recevoir une éducation de qualité.  

Le Sommet sur la Transformation de l’Éducation ne pourra atteindre ses objectifs globaux qu’en suscitant un mouvement mondial.  Les gouvernements, les jeunes, la société civile, les enseignants, les chefs d’entreprise et les donateurs se mobilisent.  

L’ONU rassemble toutes ses forces, grâce à l’action de l’UNESCO, de l’UNICEF et des équipes des Nations Unies présentes sur le terrain.  Avançons ensemble, afin que chacun puisse apprendre, s’épanouir et rêver tout au long de son existence.  Faisons en sorte que les élèves d’aujourd’hui et les générations futures puissent accéder à l’éducation dont ils ont besoin, afin de créer un monde plus durable, plus inclusif, plus juste et plus pacifique – pour toutes et pour tous. 

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