Conflits, crise climatique, économies inclusives, fossé numérique, représentation politique: cinq domaines où l’égalité des genres est vouée à transformer le monde, selon M. Guterres
On trouvera ci-après le discours que le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a prononcé aujourd’hui à l’Université « The New School » de New York, sur le thème « Les femmes et le pouvoir »:
C’est un grand plaisir pour moi que d’être ici aujourd’hui. Je vous remercie de l’honneur que vous me faites et à travers moi, à l’Organisation des Nations Unies et à notre personnel dans le monde entier en me nommant docteur honoris causa.
La New School est un lieu spécial.
Je suis ingénieur de formation et la physique est la grande passion intellectuelle de ma vie. Mais les personnes pour lesquelles j’éprouve le plus d’admiration sont les artistes, les philosophes, les spécialistes des sciences sociales et toutes celles et tous ceux qui expliquent le monde et le rendent plus beau. La New School contribue à nous élever et à donner un sens à notre vie, et je lui en suis reconnaissant.
Je suis un homme né en Europe occidentale. À ce titre, j’ai bénéficié de nombreux privilèges. Mais mon enfance passée sous la dictature militaire au Portugal m’a ouvert les yeux sur l’injustice et l’oppression. Déjà quand j’étais étudiant et que je travaillais bénévolement dans les taudis de Lisbonne, puis tout au long de ma carrière politique de Premier Ministre et de Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, je me suis toujours senti tenu de lutter contre l’injustice, l’inégalité et le déni des droits humains.
Aujourd’hui Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, je constate l’omniprésence d’une certaine injustice dans le monde entier, d’un préjudice qui réclame toute notre attention: les inégalités de genre et la discrimination envers les femmes et les filles.
Partout, les femmes sont moins bien loties que les hommes, pour la simple et bonne raison qu’elles sont des femmes.
Les migrantes et les réfugiées, les femmes handicapées et celles qui appartiennent à des minorités se heurtent à des obstacles encore plus importants. Cette discrimination nous fait du tort, à toutes et à tous. De même que l’esclavage et le colonialisme ont entaché les siècles passés, l’inégalité que subissent les femmes au XXIe siècle devrait faire honte à chacune et à chacun d’entre nous. Pas seulement parce qu’elle est inacceptable, mais parce qu’elle est absurde.
Renoncer à l’égale participation des femmes et des hommes, c’est renoncer à l’intelligence, à l’expérience et aux connaissances de la moitié de l’humanité. La rendre possible, c’est la clef de la stabilité. C’est favoriser la prévention des conflits et ouvrir la voie au développement durable et inclusif. L’égalité des genres est la condition sine qua non d’un monde meilleur.
Il ne s’agit pas d’un sujet nouveau. Voilà des siècles que les femmes luttent pour leurs droits. Il y a 500 ans, Nzinga Mbandi, reine des Mbundu, a mené une guerre contre la domination coloniale portugaise dans l’actuel Angola. Mary Wollstonecraft, qui a écrit Défense des droits de la femme en 1792, est souvent considérée comme la mère du féminisme occidental. Soixante ans plus tard, Sojourner Truth a plaidé avec passion pour les droits des femmes tout en œuvrant pour l’abolition de l’esclavage.
Le mouvement pour les droits des femmes est arrivé à maturité au XXe siècle. Les femmes chefs d’État n’ont laissé subsister aucun doute quant à la capacité des femmes à diriger. La Déclaration universelle des droits de l’homme a consacré l’égalité des droits entre les femmes et les hommes, tandis que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a esquissé une manière de concevoir l’égalité des genres. Aujourd’hui, des jeunes femmes comme Malala Yousafzai et Nadia Murad font tomber les barrières et créent des modèles de leadership inédits.
Malgré ces avancées, la situation des droits des femmes reste désastreuse. Partout, l’inégalité et la discrimination sont la norme. Nos progrès sont au point mort. Dans certains cas, nous faisons marche arrière. La réalisation des droits des femmes est entravée par des forces de réaction puissantes et obstinées.
La violence faite aux femmes, en particulier les féminicides, atteint des proportions épidémiques. Plus d’une femme sur trois subira des violences d’une forme ou d’une autre au cours de sa vie. Les protections juridiques contre le viol et la violence domestique sont en train d’être assouplies ou revues à la baisse. Le viol conjugal demeure légal dans 34 pays.
Les droits des femmes en matière de sexualité et de procréation sont menacés de toutes parts. Les dirigeantes et les personnalités publiques qui sont des femmes subissent harcèlement, menaces et agressions, sur Internet aussi bien qu’ailleurs. Pour des millions de femmes et de filles, le contrôle de la liberté individuelle et de la tenue vestimentaire est une réalité quotidienne. Des gouvernements aux conseils d’administration, en passant par les cérémonies de remise de prix, les femmes restent exclues des places de choix. Elles sont pénalisées par de nouvelles politiques, qui vont des mesures d’austérité jusqu’aux politiques répressives en matière de reproduction. Les femmes sont toujours tenues à l’écart des négociations de paix et ce, 20 ans après que tous les pays se sont engagés à les y associer. Et à l’ère du numérique, ces inégalités risquent de s’enraciner encore plus profondément.
L’égalité des genres est, fondamentalement, une question de pouvoir. Notre monde et notre culture sont dominés par les hommes. C’est le cas depuis des millénaires.
L’historienne Mary Beard a mis en évidence les racines historiques profondes du patriarcat dans la culture occidentale. Dans l’Odyssée, composée par Homère il y a trois mille ans, Télémaque demande à sa mère, Pénélope, de se taire et de laisser les hommes parler. Malheureusement, l’attitude de Télémaque ne détonnerait pas dans certaines de mes réunions avec des dirigeants mondiaux.
Le patriarcat, système social fondé sur la succession par voie patrilinéaire, reste présent dans toutes les facettes de notre vie. Nous en subissons toutes et tous les conséquences, les hommes comme les femmes, les filles comme les garçons. Tout comme nos grandes entreprises, nos systèmes économiques et politiques sont bâtis sur des structures de pouvoir dominées par les hommes.
Même lorsqu’elles connaissent la célébrité à Hollywood, les femmes ne sont pas protégées des hommes qui exercent sur elles une domination physique, affective et professionnelle. Je salue celles qui ont courageusement fait entendre leur voix et se sont défendues. Une inégalité d’un autre type se dissimule dans les institutions et les structures qui gouvernent nos existences, mais qui sont conçues pour répondre aux besoins d’une moitié seulement de la population.
L’auteure Caroline Criado Perez décrit cette inégalité à l’aide de la notion de « l’homme par défaut ». Elle entend par là la tendance jamais remise en cause à considérer les hommes comme la norme et les femmes, comme une anomalie. Cela est à l’origine de la plus grande lacune dans les données mondiales. Bien souvent, les femmes ne sont pas prises en compte et leur expérience ne compte pas. On en voit les conséquences partout, des installations sanitaires aux lignes d’autobus. En cas d’accident de voiture, les femmes courent un plus grand risque d’être blessées, car les sièges et les ceintures de sécurité sont conçus pour « l’homme par défaut ». En cas de crise cardiaque, leur taux de létalité est plus élevé parce que les outils de diagnostic ont également été élaborés pour « l’homme par défaut ».
Ce constat s’étend même à l’exploration spatiale, qui est bel et bien la frontière ultime – pour les femmes. Plus de 150 hommes sont allés dans l’espace, contre seulement une poignée de femmes, en partie parce que les combinaisons spatiales sont conçues pour « l’homme par défaut ». Aucune femme n’a marché sur la Lune, bien que des mathématiciennes aient joué un rôle essentiel pour permettre à des hommes d’y parvenir.
Nous rendons enfin hommage aujourd’hui aux accomplissements de ces femmes, notamment à ceux de Katherine Johnson, qui nous a quittés cette semaine. En plus de la violence, de la domination, des structures de pouvoir iniques et de la discrimination cachée, les femmes et les filles pâtissent trop souvent de la négation de leurs réalisations, résultat de plusieurs siècles de misogynie.
On les accuse d’être hystériques ou instables. On les juge constamment sur leur apparence. On ne cesse d’inventer des mythes et des tabous concernant leurs fonctions corporelles naturelles. S’ajoute encore à tout cela la tendance à jeter le blâme sur les victimes et la manie qu’ont les hommes de vouloir tout expliquer aux femmes: la misogynie est omniprésente.
À l’inverse, à travers les siècles et les cultures, des mots comme « génie » ou « brillant » s’emploient beaucoup plus souvent pour qualifier des hommes que des femmes. Cela n’est guère surprenant, quand on sait que ce sont les hommes qui ont établi les règles, en excluant les femmes.
Mais les dégâts causés par le patriarcat et l’inégalité sont loin de se limiter aux femmes et aux filles. Les hommes et les garçons ont eux aussi un genre. Celui-ci est défini de manière si restrictive qu’il peut les enfermer dans des stéréotypes qui se caractérisent par des comportements à risque, des agressions physiques et une réticence à demander des conseils ou de l’aide.
Comme l’a dit l’écrivaine Chimamanda Ngozi Adichie, la masculinité est une cage petite et rigide dans laquelle nous mettons les garçons.
Partout dans le monde, les hommes ont une espérance de vie plus courte que les femmes, ils sont plus susceptibles d’être incarcérés, d’employer et de connaître la violence, et ils sont moins enclins à chercher de l’aide. Le pouvoir des hommes a un prix et ce prix est élevé, même pour les hommes.
L’égalité des genres présente un grand intérêt pour les relations personnelles des hommes. Les hommes qui prennent part aux tâches familiales et qui passent plus de temps avec leur famille sont plus heureux – et leurs enfants aussi.
À plus grande échelle, il est essentiel de transformer les rapports de force, et cela, pas seulement dans la perspective des droits humains, du développement personnel, de la santé et du bien-être. C’est également indispensable pour régler certains des problèmes les plus graves et les plus difficiles à surmonter de notre temps, de l’aggravation des inégalités et des clivages jusqu’à la crise climatique.
Pour moi, il y a cinq domaines où l’égalité des genres est vouée à transformer notre monde.
Premièrement, le conflit et la violence. Conflits, violence contre les femmes et oppression des civils sont directement liés. Chaque année, des milliards de dollars sont consacrés à la promotion de la paix et de la sécurité. Mais la paix de qui? La sécurité de qui?
Pendant que les conflits entre États font les gros titres, certaines régions connaissent des taux de féminicide comparables à la mortalité constatée dans les zones de guerre. À l’échelle mondiale, 137 femmes sont tuées chaque jour par un membre de leur famille. Dans certains pays, plus de 95% des meurtres de femmes restent impunis.
En d’autres termes, il y a des hommes qui font la guerre aux femmes. Mais personne ne réclame un cessez-le-feu ou n’impose de sanctions. La façon dont une société traite la moitié féminine de sa population est révélatrice de la façon dont elle traite les autres sociétés.
Le viol et l’esclavage sexuel servent couramment de tactique de guerre, et la misogynie fait partie de l’idéologie de presque tous les groupes extrémistes violents. Inversement, la participation de dirigeantes et de décideuses aux processus de médiation et de paix conduit à une paix plus durable, plus pérenne.
L’ONU s’emploie à placer les femmes au centre de son action de prévention des conflits, de rétablissement de la paix, de consolidation de la paix et de médiation – et à augmenter le nombre de femmes affectées au maintien de la paix.
Deuxièmement, la crise climatique. La menace pressante qui pèse sur notre existence est la conséquence de décisions qui ont été prises pour l’essentiel par des hommes, mais qui touchent tout particulièrement les femmes et les filles. La sécheresse et la famine font que les femmes travaillent plus dur pour trouver de la nourriture et de l’eau, tandis que les vagues de chaleur, les tempêtes et les inondations tuent plus de femmes et de filles que d’hommes et de garçons.
Voilà longtemps que les femmes jouent un rôle de premier plan dans la lutte pour l’environnement: que l’on pense à Wangari Maathai, à Jane Goodall ou encore au mouvement Fridays for Future. Mais les inégalités de genre ont des répercussions bien plus profondes sur l’action climatique.
Les campagnes en faveur du recyclage et de la réduction des déchets ciblent avant tout les femmes, tandis que les hommes paraissent plus enclins à faire confiance à des solutions technologiques qui n’ont jamais été testées. Tout indique que les femmes sont plus disposées que les hommes à réduire leur propre impact environnemental. Récemment, des études ont fait ressortir que parmi les économistes et les parlementaires, les femmes étaient plus susceptibles de soutenir des politiques durables et inclusives.
La sauvegarde de la planète risque d’être considérée comme un « travail de femme ». Autrement dit, comme une tâche ménagère parmi d’autres. Je suis reconnaissant aux jeunes, celles et ceux de la génération Z, à laquelle appartiennent nombre d’entre vous, qui œuvrent en faveur de l’action climatique et de l’égalité femmes-hommes sans perdre de vue la réalité des identités et des solutions non binaires.
Les postures machistes ne nous permettront pas de sauver notre planète. Sans égalité des genres, il sera impossible de répondre à l’urgence climatique. Cela signifie aussi que les hommes doivent agir et prendre leurs responsabilités.
Le troisième domaine où les droits des femmes et l’égalité des chances pourraient nous permettre de faire un grand pas en avant, c’est l’édification d’économies inclusives.
En moyenne dans le monde, quand un homme gagne 1 dollar, une femme ne touche que 77 cents. Selon les dernières recherches du Forum économique mondial, cet écart de rémunération ne sera pas comblé avant 2255. Comment expliquer à mes petites-filles que les petites-filles de leurs petites-filles seront toujours moins bien payées que les hommes, pour faire le même travail? L’écart de rémunération est l’une des raisons pour lesquelles 70% des pauvres dans le monde sont des femmes et des filles.
Une autre raison est que, à l’échelle mondiale, les femmes et les filles effectuent chaque jour quelque 12 milliards d’heures de tâches familiales non rémunérées, soit trois fois plus que les hommes. Dans certains endroits, les femmes passent jusqu’à 14 heures par jour à cuisiner, à nettoyer, à chercher du bois et de l’eau et à s’occuper des enfants et des personnes âgées. D’après les modèles économiques, ce travail relève du « temps libre ».
À l’aune du produit intérieur brut, rien de ce qui se passe à la maison n’a de valeur. Cette mesure erronée sert pourtant de base aux décisions économiques, ce qui fausse les politiques et prive les femmes de possibilités. Les femmes qui ont des revenus sont plus susceptibles que les hommes d’investir dans leur famille et leur communauté, ce qui renforce l’économie et la rend plus résiliente.
Les femmes ont également tendance à envisager les choses à plus long terme. Les entreprises sont plus stables et plus rentables quand des femmes siègent au conseil d’administration. Récemment, l’une des plus grandes banques d’investissement au monde a décidé de ne pas introduire en bourse les sociétés qui ne comptent pas de femme parmi les membres de leur conseil d’administration. Ses motivations n’étaient pas d’ordre moral, mais financier. C’était tout simplement du bon sens.
Si nous voulons une mondialisation équitable qui profite à tous, l’égalité des droits et des chances économiques doit devenir réalité dans le monde entier.
Quatrièmement, le fossé numérique. Lorsqu’un couple s’est plaint l’année dernière que la limite de crédit de monsieur était 20 fois supérieure à celle de madame bien que la cote de crédit de celle-ci fût meilleure, l’anomalie a été imputée à un algorithme. Sachant que les femmes n’occupent que 26% des emplois dans le secteur de l’intelligence artificielle, il n’est guère surprenant que de nombreux algorithmes soient biaisés en faveur des hommes.
La technologie numérique peut être une grande source de bienfaits. Mais je suis profondément préoccupé par le fait que ce sont les hommes qui occupent la plupart des emplois dans le secteur de la technologie, que ce soit dans les universités, dans les start-ups ou encore dans les Silicon Valleys du monde entier. Ces pôles technologiques façonnent déjà les économies et les sociétés du futur, ce qui a des répercussions considérables sur l’évolution des rapports de force.
Si les femmes ne participent pas au même titre que les hommes à la conception des technologies numériques, les avancées obtenues en matière de droits des femmes pourraient bien être remises en question. Non seulement le manque de diversité accentuera les inégalités de genre, mais il limitera l’innovation et la portée des nouvelles technologies, et les rendra moins utiles.
Cinquièmement et dernièrement, la représentation politique. La part des femmes qui siègent au parlement dans le monde entier a doublé au cours des 25 dernières années et atteint désormais un quart. Moins d’un État sur 10 est dirigé par une femme.
Mais la représentation des femmes dans les instances de l’État n’a rien à voir avec les questions dites féminines, comme l’opposition au harcèlement sexuel ou la promotion des services de garde d’enfants. Les femmes au pouvoir sont les moteurs du progrès social et font véritablement changer la vie des gens.
Les femmes sont plus enclines à faire campagne pour l’investissement dans l’éducation et la santé, et à rechercher le consensus et un terrain d’entente entre les partis. Plus les gouvernements comptent de femmes, plus ils innovent et remettent en question l’ordre établi. Autrement dit, les femmes en politique réinventent et redistribuent le pouvoir.
Ce n’est pas un hasard si les États qui redéfinissent le PIB en prenant en considération le bien-être et la durabilité sont dirigés par des femmes. C’est bien simple: la participation des femmes améliore les institutions. Quand on multiplie par deux les ressources, les capacités et les compétences mises au service de la prise de décisions, tout le monde y gagne.
L’une de mes priorités en tant que Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies a été de faire en sorte que plus de femmes occupent des postes de direction. Le 1er janvier 2020, nous sommes parvenus à la parité femmes-hommes –90 femmes et 90 hommes– aux postes de plus haut rang occupés à temps plein, deux ans avant la date que j’avais fixée au début de mon mandat. Et nous avons un plan d’action pour arriver à la parité à tous les niveaux dans les années à venir.
Ce changement tant attendu est une reconnaissance essentielle de l’égalité des droits et des aptitudes des femmes qui travaillent pour l’Organisation. Il s’agit aussi pour nous d’être plus efficaces et plus utiles pour toutes celles et tous ceux que nous servons. Les problèmes qui ont été créés par l’homme –je dis bien par l’homme– ne pourront être réglés que par l’humanité tout entière.
Les sociétés matriarcales qui ont fleuri à travers l’histoire et prospèrent dans le monde entier montrent que le patriarcat n’est pas inévitable. Nous avons récemment entendu des femmes, dont beaucoup de jeunes, exiger un changement radical.
Du Soudan au Chili en passant par le Liban, elles réclament la fin de la violence, une meilleure représentation et une action immédiate en faveur du climat, et elles remettent en question les systèmes économiques qui n’offrent ni débouchés ni satisfaction pour le plus grand nombre. Nous devons faire entendre notre voix pour ces jeunes dirigeantes, nous leur devons notre soutien.
L’égalité des genres fait partie de l’ADN de l’ONU. L’égalité des droits des femmes et des hommes est inscrite dans la Charte, notre texte fondateur. Alors que nous célébrons cette année le 75e anniversaire de l’Organisation et le 25e anniversaire de la Conférence de Beijing sur les femmes, nous redoublons d’efforts pour soutenir les droits des femmes dans tous les domaines.
Le mois dernier, l’ONU a lancé la Décennie d’action en faveur des objectifs de développement durable, un modèle de partenariat avec les États pour l’édification de sociétés pacifiques, prospères et inclusives sur une planète en bonne santé. L’égalité des genres est un objectif à part entière, et elle est indispensable pour atteindre les 16 autres.
La Décennie d’action vise à transformer les institutions et les structures, à aller plus loin dans l’inclusion et à favoriser la durabilité. Abroger les lois discriminatoires envers les femmes et les filles, améliorer la protection contre la violence, combler les écarts en matière d’éducation, de rémunération et de technologies numériques: voilà quelques-uns des domaines dans lesquels nous œuvrons.
Il est fondamental que les femmes dirigent et participent, à égalité avec les hommes. C’est pourquoi, par le passé, j’ai été favorable aux quotas: c’est le meilleur moyen de parvenir à un changement radical dans l’équilibre des forces. L’heure est à la parité dans les gouvernements, les parlements, les conseils d’administration et les institutions, partout dans le monde.
Au cours des deux prochaines années, j’ai l’intention de m’engager plus encore, personnellement, en faveur de l’égalité des genres dans tous les domaines de notre travail.
Je prendrai contact avec les gouvernements qui ont des lois discriminatoires pour plaider en faveur du changement et offrir notre soutien et j’exhorterai tout nouveau gouvernement à parvenir à la parité femmes-hommes aux postes de direction.
J’étudierai les moyens d’accroître au maximum l’influence de l’ONU pour faire en sorte que les femmes soient représentées, à égalité, dans les processus de paix; je renforcerai notre travail sur les liens entre violence contre les femmes et paix et sécurité internationales.
Je continuerai à rencontrer des femmes dont la vie a été marquée par la violence.
Je plaiderai en faveur de la prise en compte du bien-être et de la durabilité dans le PIB, ainsi que de la reconnaissance de la valeur réelle du travail domestique.
Je m’engage à faire en sorte que l’homme ne soit plus la référence par défaut à l’ONU. Le travail de l’Organisation repose sur les données; il faut absolument cesser de fonder les chiffres sur le principe ridicule selon lequel l’homme serait la norme et la femme, l’exception.
Nous avons besoin que les femmes fassent entendre leur voix et qu’elles jouent un rôle de premier plan dans les pourparlers de paix comme dans les négociations commerciales; aux Oscars comme au G20; dans les conseils d’administration comme dans les salles de classe; et à l’Assemblée générale des Nations Unies.
L’égalité des genres est une question de pouvoir. C’est la question du pouvoir jalousement gardé par les hommes depuis des millénaires. Nous sommes face à un abus de pouvoir qui porte préjudice à nos communautés, à nos économies, à notre environnement, à nos relations et à notre santé.
Nous devons de toute urgence transformer et redistribuer le pouvoir si nous voulons préserver notre avenir et notre planète. C’est pourquoi tous les hommes devraient soutenir les droits des femmes et l’égalité des genres. Et c’est pourquoi je suis fier d’être féministe.
Les femmes ont égalé et surpassé les hommes dans presque tous les domaines. Le moment est venu d’arrêter de vouloir changer les femmes et de commencer à changer les systèmes qui les empêchent de réaliser leur potentiel.
Nos structures de pouvoir évoluent progressivement depuis des millénaires. Une autre évolution se fait attendre depuis trop longtemps. Le XXIe siècle doit être le siècle de l’égalité femmes-hommes.
Chacun a un rôle à jouer pour qu’il en soit ainsi.