Le Secrétaire général propose aux francophones une nouvelle entrée dans le dictionnaire de la langue française: « ONUphile » (qui aime l’ONU)
Vous trouverez ci-après le texte du discours prononcé aujourd’hui par le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, à l’occasion de la réception pour la Francophonie:
Je suis très touché d’être avec vous ce soir – certes pour la dernière fois en tant que Secrétaire général. Mais nulle raison cependant de faire de cette soirée un moment tristounet ou mélancolique. Bien au contraire! Célébrons ce soir avec joie et fierté, la place privilégiée qu’occupe le français dans notre illustre Organisation.
Comme vous le savez bien, je terminerai mon mandat à la fin du mois de décembre. Mais je compte sur votre indulgence pour me considérer plus tard membre émérite de la Francophonie!
À ce propos, l’un des plus beaux compliments que l’on m’ait fait pendant mon mandat, c’était de me dire que je ne suis pas seulement francophone, mais francophile aussi.
C’est vrai. J’aime le français. Il suffit de demander à mon épouse. C’est en français que je lui murmure tout bas des mots doux … et c’est en français aussi que je lui réponds un peu plus fort quand elle me demande de ranger mes affaires! Dans les deux cas, même si elle ne comprend pas tout, elle me dit qu’elle trouve la musique de cette langue très harmonieuse.
Permettez-moi à ce stade de saluer ici la présence fort appréciée de M. Jean Todt, mon Envoyé spécial pour la sécurité routière, et de Mme Michelle Yeoh, Ambassadrice de bonne volonté du PNUD. Ils font tous deux un travail formidable. Prenez rien que leurs noms: « Jean » et « Michelle », voici deux noms francophones qui vont bien ensemble.
Revenons à présent aux francophiles que nous sommes tous ici présents ce soir.
Francophiles … francophiles … Je me suis demandé en venant à cette soirée comment, par analogie, faire de nous –Onusiens– des « Onuphiles » - et je ne parle pas là d’une nouvelle agence de l’ONU pour la couture [ONU + fil] !
Non, je parle bien de ce qui nous rassemble tous à la base ce soir – notre amour pour l’ONU. Je me vois déjà proposer une nouvelle entrée dans le dictionnaire français Onuphile: qui aime l’ONU ».
Quand je dis que je souhaite ajouter cette nouvelle entrée dans le dictionnaire de la langue française, je suis sérieux. Tellement sérieux que je me suis renseigné sur la procédure pour y arriver. Et c’est là que j’ai fait une grande découverte: la langue française a connu un grand moment cette année, en février, avec la mise en œuvre de la réforme de l’orthographe française.
Cela m’a tellement intéressé que j’ai voulu ce soir –et en exclusivité pour vous, chers amis– m’inspirer de la réforme de l’orthographe française pour réformer l’ONU –si, si, vous avez bien entendu. On peut réformer l’ONU, et dans cette réforme, la francophonie –par la réforme de l’orthographe française– a beaucoup à nous apprendre. Je vais vous le prouver.
Commençons par le fameux accent circonflexe. La réforme de l’orthographe a fait perdre à certains mots de la langue française leur accent circonflexe. Oui, juste comme ça. Comme par exemple les mots « coût » et « paraître » qui s’écriront désormais sans leur petit chapeau pourtant si joli.
Voilà un exemple qui devrait plaire à nos experts onusiens de la finance puisque nous ferons dorénavant l’économie des chapeaux dans nos couts (sans accent) et paraitront (sans accent) ainsi plus légers!
De même –pour se servir d’un autre rescapé: l’accent circonflexe de « même », autre ingéniosité de la réforme de l’orthographe: l’écriture de certains mots a été « simplifiée » comme par exemple, nénuphar qui s’écrit maintenant avec un « f » à la fin au lieu de « ph » (nénufar).
Pourquoi ne pas se référer aux nombreux programmes de l’ONU en finissant le mot « programme » simplement par « pam » et non plus « amme ». Sacrilège! Je me rends compte que je viens d’emprunter un mot anglais! Revenons vite à la réforme de la langue française avant que je ne sois maudit – qui, soit dit en passant, pourrait être simplifié par « mo » + « di » (« modi »)!
Trêve de plaisanterie, voyons enfin ce que deviennent les traits d’union dans la réforme de l’orthographe. Eh bien, dans certains cas, la réforme a décidé de les bannir. Comme dans porte-monnaie qui s’écrit maintenant portemonnaie sans trait d’union.
Imaginez un instant que l’on fasse quelque chose de similaire avec juste le titre de l’un de nos organes à l’ONU qui s’occupe de nos finances, justement notre portemonnaie: enlevez les espaces entre les mots qui composent l’acronyme du fameux « CCQAB » [ACABQ pour nos amis anglophones que je salue quand-même au passage], soit le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires – imaginez tous ces mots attachés sans un espace entre eux, et vous verrez que tout le monde fuira pour de bon cet organe!
Et si les Nations-Unies, qui s’écrivent quelques fois avec un trait d’union en français, le perdaient elles aussi le temps d’un instant, pour que les nations qui forment l’ONU se rapprochent entre elles?
Alors, chers amis, au-delà de notre francophilie, nous aurons atteint notre pleine ONUphilie – marque suprême de notre amour et de notre respect à tous pour l’ONU.
À la Francophonie, à l’ONU et tous les ONUphiles!