Syrie: si nous ratons la chance des négociations de Genève, les conséquences pour le peuple syrien et le monde seront trop effrayantes pour être envisagées, prévient le Secrétaire général
Le Secrétaire général de l'ONU, M. Ban Ki-moon, a fait aujourd'hui la déclaration suivante:
Il y a cinq ans, les milliers de Syriens qui sont descendus dans la rue pour réclamer un changement politique n’ont obtenu que violence et répression. Il est important de rappeler les origines du conflit maintenant que nous marquons ce sinistre anniversaire. Les destructions qui ont englouti la Syrie après ces jours d’espoir de mars 2011 n’étaient pas inévitables.
Les autorités syriennes auraient pu réagir pacifiquement aux revendications légitimes du peuple, en lançant un dialogue et des réformes véritables. Les acteurs régionaux et internationaux auraient pu s’unir pour aider la Syrie à se stabiliser au lieu de l’utiliser comme le champ de bataille des rivalités régionales et le couloir de la course géostratégique.
En conséquence, plus 250 000 Syriens ont perdu la vie. Près de la moitié des Syriens ont été forcés de fuir de chez eux pour chercher refuge ailleurs dans le pays ou à l’étranger. Le monde a été confronté à une catastrophe humanitaire sans précédent. Les groupes terroristes comme Daech et le Front el-Nosra ont capitalisé sur le chaos. Les combattants étrangers et les milices sectaires se sont, dans la nuit, déversés en Syrie pour combattre. Les hommes, les femmes et les enfants syriens se sont sentis abandonnés par la communauté internationale.
Le conflit syrien a été le théâtre des armes chimiques, des sièges et de la famine, utilisés comme armes de guerre. Il a été le théâtre des détentions illégales, de la torture et des bombardements indiscriminés et criminels, y compris aériens, sur les civils. Les responsables de ces crimes devront répondre de leurs actes devant la justice. Je réitère mon appel au Conseil de sécurité pour qu’il renvoie la situation en Syrie à la Cour pénale internationale. En Syrie, comme ailleurs, une paix sans justice n’est pas viable.
Les conséquences mondiales de l’échec à résoudre le conflit syrien sont devenues lamentablement claires. C’est dans ce contexte qu’aux plans régional et international, une diplomatie et un engagement renouvelés pour trouver une solution au conflit syrien sont importants et essentiels. La formation d’un Groupe international de soutien pour la Syrie et l’engagement de ses membres à user de leur influence sur les parties pour élargir l’accès humanitaire aux zones assiégées et isolées en Syrie et mettre en œuvre la cessation des hostilités ont offert une ouverture rare et donné des raisons d’espérer.
Nous avons enfin dépassé le stade des appels aux parties pour qu’elles honorent leurs obligations en vertu du droit international et pris des mesures concertées et concrètes visant à réduire la violence et à aider les civils qui en ont besoin. La diplomatie fait enfin la différence dans la vie quotidienne des Syriens qui souffrent depuis si longtemps, et de manière assez remarquable, maintenant que la violence a diminué ces deux dernières semaines, le peuple syrien est revenu dans la rue pour manifester pacifiquement comme il l’avait fait, il y a cinq ans.
Si cette évolution est à saluer, elle ne peut seule être la solution au conflit syrien. La solution ne peut venir que d’un règlement politique global qui traite des aspirations légitimes du peuple syrien et qui repose sur un cessez-le-feu dans l’ensemble du pays. Tirant parti de l’appel pour une transition politique lancé dans la résolution 2218 (2013) du Conseil de sécurité, les résolutions 2254 (2015) et 2268 (2016) du même Conseil offrent désormais une voie politique et un calendrier pour réaliser cet objectif.
Mon Envoyé spécial pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, a convoqué cette semaine les négociations intrasyriennes pour une pleine mise en œuvre du Communiqué de Genève comme base d’une transition politique dirigée par les Syriens eux-mêmes. J’appelle les parties syriennes, les acteurs régionaux et internationaux et le Conseil de sécurité à assumer leurs responsabilités et à contribuer à faire de ces négociations un succès. Si nous ratons cette chance, les conséquences pour le peuple syrien et le monde seront trop effrayantes pour être envisagées.