En cours au Siège de l'ONU

DH/5184

Instance permanente: M. James Anaya, Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, quitte son poste « rempli d’optimisme »

20/05/2014
Conseil économique et socialDH/5184
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Instance permanente sur les questions autochtones

Treizième session

11e et 12e séances – matin et après-midi


INSTANCE PERMANENTE: M. JAMES ANAYA, RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES, QUITTE SON POSTE « REMPLI D’OPTIMISME »


M. James Anaya, Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, qui achève son deuxième mandat de trois ans, a déclaré à l’Instance permanente qu’il quitte son poste « rempli d’optimisme ».


L’Instance permanente a examiné aujourd’hui l’état de mise en œuvre de la Déclaration de 2007 sur les droits des peuples autochtones avant de dialoguer avec le Rapporteur spécial.  M. James Anaya a salué la Déclaration comme « une force qui a fait mieux connaître les peuples autochtones, loin du mythe romantique du bon sauvage ».


S’il a appelé à des efforts renouvelés pour combler le fossé entre la Déclaration et la situation réelle des autochtones dans le monde, le Rapporteur spécial s’est montré optimiste quant à la faculté de trouver des solutions à des questions « très difficiles ».  Il a relevé une tendance au pragmatisme après, les années 70 où les peuples autochtones avaient du mal à faire accepter leur présence aux Nations Unies.


Or, aujourd’hui, je vois des fonctionnaires sincèrement déterminés à résoudre des problèmes complexes, a affirmé celui qui vient d’effectuer des visites au Canada, au Panama et au Pérou.  La meilleure façon d’aller de l’avant est de maintenir le dialogue entre les États, les peuples autochtones et les autres parties prenantes, a-t-il estimé, voyant une occasion en or dans la Conférence mondiale sur les peuples autochtones que l’Assemblée générale a convoquée en septembre 2014.


Celui qu’un député norvégien vient de proposer comme candidat au prix Nobel de la paix, sera remplacé par Mme Victoria Tauli-Corpuz, des Philippines.  Professeur à l’Université de l’Arizona et spécialiste des droits de l’homme, M. Anaya a donné un dernier conseil au Secrétariat de l’ONU: au lieu de créer un poste permanent de haut niveau sur les droits des peuples autochtones, il faut plutôt pourvoir les trois mécanismes existants en effectifs et en ressources supplémentaires; les trois mécanismes étant l’Instance permanente, le Rapporteur spécial et le Mécanisme d’experts.  


L’Instance permanente poursuivra ses travaux demain mercredi 21 mai, à partir de 15 heures, avec un débat sur la deuxième Décennie internationale des peuples autochtones et sur le programme de développement pour l’après-2015.



APPLICATION DE LA DÉCLARATION DES NATIONS UNIES SUR LES DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES


L’Instance permanente a examiné, ce matin, le degré d’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Adoptée le 17 septembre 2007 par l’Assemblée générale de l’ONU, la Déclaration compte 46 articles disposant, entre autres, que les peuples autochtones ont le droit à l’autodétermination et qu’en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.  Ils ont le droit de s’administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales, ainsi que de disposer des moyens de financer leurs activités autonomes.


La Déclaration dit encore que les peuples autochtones privés de leurs moyens de subsistance et de développement ont droit à une indemnisation juste et équitable.  Elle assigne aux États l’obligation de reconnaître les droits des peuples autochtones en ce qui concerne leurs terres, territoires et ressources et de statuer sur ces droits.  Les peuples autochtones, précise la Déclaration, ont droit à réparation pour les terres, territoires et ressources qu’ils possédaient traditionnellement ou occupaient ou utilisaient et qui ont été confisqués, pris, occupés, exploités ou dégradés sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.


C’est une somme de 500 milliards de dollars qu’a réclamé aujourd’hui, au nom de 567 tribus, une descendante des Lakota et des Cheyenne s, peuples qui ont pris part les 25 et 26 juin 1876 à la Bataille de « Little Bighorne » qui s’est soldée par une défaite cuisante de l’armée américaine.  L’oratrice a parlé des 18 traités signés que les États-Unis n’ont jamais respectés.  Avec sa sœur, elle a demandé des enquêtes sur les abus et la corruption généralisés dans les territoires autochtones.  Elle a achevé son intervention par une prière à la mémoire de tous ceux qui sont morts de ces injustices.  Justement, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU vient de plaider pour un accès plus large des peuples autochtones à la justice, a indiqué le Président du Mécanisme des experts sur les droits des peuples autochtones, le Chef WILTON LITLLECHILD.  Il a dit son intention de poursuivre le travail sur la justice réparatrice et l’intégration des droits des peuples autochtones dans le programme de développement pour l’après-2015.  Le Chef Wilton Litllechild a prévenu qu’une faible participation des peuples autochtones à la Conférence mondiale de septembre 2014 ne peut que nuire à la crédibilité de ce rendez-vous international.


Des efforts tous azimuts s’imposent pour que la Conférence mondiale et le programme de développement pour l’après-2015 ne laissent personne sur le côté, a estimé le Caucus des personnes handicapées.  Concernant les préparatifs de la Conférence mondiale, la Ministre de la condition féminine du Paraguay a appuyé les recommandations de la Conférence de Lima d’octobre 2013 et plaidé pour l’intégration des droits de la femme autochtone dans le programme de développement pour l’après-2015.  Elle n’a pas oublié de passer en revue les efforts de son pays pour élargir les espaces de participation des peuples autochtones à la formulation et l’exécution des politiques publiques.  Les projets du Partenariat des Nations Unies pour les peuples autochtones ont été décrits par l’Organisation internationale du Travail (OIT), Coprésidente dudit Partenariat, qui s’est enorgueillie que plusieurs programmes nationaux de développement tiennent compte, pour la première fois, des besoins des peuples autochtones.  Le prochain plan de développement du Détroit de Torres contiendra d’ailleurs les 46 articles de la Déclaration contre 36 auparavant, a annoncé l’Autorité régionale du Détroit de Torres.


À ce propos, la Commission des droits de l’homme de l’Australie a encouragé tous les États à mettre à jour leur jurisprudence nationale pour l’aligner avec les normes internationales relatives aux droits des peuples autochtones.  Le Bureau de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme- HCDH a annoncé la parution prochaine d’un manuel sur les droits des peuples autochtones à l’intention des commissions nationales des droits de l’homme.  Le Caucus africain a appelé ces dernières à renforcer les mesures de protection des droits de ces peuples, en particulier des personnes âgées, handicapées, des enfants et des jeunes filles.  Il faut, a renchéri le Danemark, renouveler l’engagement et l’attachement à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones qui revêt, en tout point de vue, un caractère juridique. 


Le Brésil a vanté les mérites de la réforme constitutionnelle de 1988 qui promeut la participation des peuples autochtones à la vie publique.  Le représentant du Caucus asiatique a en revanche fait part d’une situation « précaire » dans son continent où la force a été utilisée pour étouffer les revendications légitimes des peuples autochtones.  Il a dénoncé les enlèvements, les arrestations, les exécutions extrajudiciaires, la tactique des boucliers humains, les tortures, les harcèlements sexuels, les viols, la confiscation des terres ou les disparitions forcées.  Les peuples autochtones sont tout simplement privés de leur droit de participer à la vie sociale et politique.  Les antiterroristes, a encore accusé le Caucus, sont des menaces pour la liberté des autochtones au Bangladesh, en Malaisie, aux Philippines ou encore en Inde.  


M. DEVASHISH ROY, membre de l’Instance permanente, a d’ailleurs réagi à la déclaration qu’a faite le Bangladesh, le 15 mai dernier, sur la région des montagnes de Chittagong à la frontière avec le Myanmar.  Il a prié le Gouvernement bengalais d’utiliser la terminologie de l’Instance permanente car avec la Déclaration, il n’y a plus de confusion possible.  Le terme « minorité ethnique » n’a plus lieu d’être.  Pour relever le malentendu autour du concept de « peuples autochtones », le Groupe de travail sur les populations et communautés autochtones en Afrique, a dit sa Présidente, s’est rendu dans 13 pays et a organisé quatre séminaires de sensibilisation et vulgarisation de la Déclaration des Nations Unies, dont le dernier à Tunis en 2014 pour les peuples amazighs d’Afrique du Nord.  Le Groupe de travail a d’ailleurs désigné des points focaux régionaux.  En El Salvador, le « Gouvernement du changement » a reconnu, dès 2010, le caractère pluriethnique et multiculturel du pays, et entrepris ces cinq dernières années, une campagne de revalorisation morale des autochtones. 


M. KENNETH DEER, Membre du Conseil d’administration du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones, a exhorté les gouvernements et les bailleurs de fonds à accroître leurs contributions.  Très applaudi, M. JOSÉ FRANCISCO CALI TZAY, Président du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, premier autochtone à avoir été nommé à la présidence d’un organe de traité, a souligné la complémentarité entre son Comité et l’Instance permanente, qui doivent collaborer davantage. 


Dialogue avec le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones


« Nous devons redoubler d’efforts pour combler le fossé entre la Déclaration et la situation réelle des autochtones dans le monde », a dit le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones.  M. James Anaya a reçu du Conseil des droits de l’homme le mandat spécifique de faire la promotion de la Déclaration des Nations Unies, cadre normatif guidant tous les volets de son action.  C’est là, a-t-il estimé, que la Conférence mondiale peut être déterminante.


La Déclaration, a-t-il souligné, est une force qui a fait mieux connaître les peuples autochtones en les débarrassant des « images de sauvagerie ou de romantisme ».  L’adoption du document a été un moment historique pour des peuples qui continuent de souffrir de bien des façons du déni de leurs droits fondamentaux.


Mon rapport, s’est-il défendu, ne vise pas à mettre l’huile sur le feu mais à favoriser le dialogue, dans un esprit d’amitié.  Il met l’accent sur la nécessité de persévérer dans la création de structures institutionnelles pour réaliser les droits des peuples autochtones.


Le Rapporteur spécial a dit tenir au partage des pratiques exemplaires, aux rapports de pays, à l’examen des allégations de violations des droits de l’homme et aux études thématiques.  Les préoccupations des peuples autochtones doivent devenir la priorité de tous les gouvernements, a affirmé celui qui sera remplacé par Mme Victoria Tauli-Corpuz, des Philippines. 


Cette dernière a d’ailleurs salué les succès et la visibilité qu’a su donné M. Anaya à cette procédure spéciale.  Face à l’ignorance vis-à-vis des peuples autochtones et qui fait naître des attitudes hostiles, celui qui est toujours Rapporteur spécial a néanmoins relevé une tendance pragmatique dans la recherche de solutions.  Il a rappelé les difficultés des autochtones lorsque, dans les années 70, ils cherchaient à assoir une présence permanente aux Nations Unies.  Des efforts qui aboutiront à la création de l’Instance permanente.  Les autochtones ont fait montre de créativité et d’ouverture pour promouvoir une coexistence pacifique, a rappelé le Rapporteur spécial.    


Au cours de son échange avec les représentants des peuples autochtones, il s’est montré optimiste quant à la recherche de solutions à des questions « très difficiles ».  J’ai vu des fonctionnaires sincèrement déterminés à résoudre des problèmes complexes, a-t-il affirmé.  Il a en effet donné un aperçu de ses visites au Canada, au Panama et au Pérou.  Aujourd’hui, l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador et la Confédération des six nations (Ermine Skin Cree du Canada) ont insisté sur la mise en œuvre des recommandations du Rapporteur spécial, inquiètes de la vague d’assassinats et de disparitions des femmes autochtones.


Le Sommet des Premières Nations a dénoncé la pollution due à l’industrie du pétrole en Colombie britannique.  « La circulation des pétroliers sur nos territoires est une violation de nos droits », a lancé son représentant, en rappelant que la Cour suprême du Canada a dûment reconnu le droit des Premières Nations d’être consultées sur l’exploitation de leurs ressources.  Le Canada a insisté sur « des relations bâties sur la confiance et le dialogue ». 


Le Panama a précisé qu’il dispose désormais d’un cadre juridique tout à fait complet pour la protection des terres et des territoires, mais que les projets d’investissements à grande échelle, l’éducation et la santé, sont autant de questions qui nécessitent plus d’efforts.


Au Pérou, la question des activités de l’industrie extractive se pose avec acuité, ce qui a entraîné de nombreuses manifestations émaillées et de violence dans certains cas.  Le Pérou a affirmé avoir été le premier pays au monde à adopter une loi en 2011 sur le consentement préalable pour que les 52 peuples autochtones puissent décider d’une manière libre et autonome.


Le Rapporteur spécial a rappelé que dans le cadre de ses études thématiques, il avait fait des rapports sur les répercussions de l’industrie minière.  Il ne faut pas partir du principe que les intérêts des sociétés d’extraction et des peuples autochtones étaient irrémédiablement inconciliables car certains peuples sont disposés à négocier, a-t-il tempéré.  Son rapport sur l’industrie minière énumère les conditions minimales pour que l’exploitation soit acceptable. 


M. Anaya, qui achève son deuxième mandat de 3 ans, a indiqué que depuis le début, il avait accordé une attention toute particulière au dialogue et à la coordination avec les deux autres mécanismes de l’ONU chargés des questions autochtones que sont le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones et l’Instance permanente.


Au lieu de créer un poste permanent de haut niveau au sein du Secrétariat de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, il faut plutôt, a-t-il suggéré, pourvoir les trois mécanismes existants en effectifs et en ressources supplémentaires. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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