En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/15317-AG/11424

M. Ban Ki-moon appelle les dirigeants du monde à servir leur peuple et à faire entrer l’humanité dans une ère de développement et de paix durables

24/9/2013
Secrétaire généralSG/SM/15317
AG/11424
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M. BAN KI-MOON APPELLE LES DIRIGEANTS DU MONDE À SERVIR LEUR PEUPLE ET À FAIRE

ENTRER L’HUMANITÉ DANS UNE ÈRE DE DÉVELOPPEMENT ET DE PAIX DURABLES


On trouvera, ci-après, le discours du Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, à l’ouverture du débat général de l’Assemblée générale des Nations Unies, le 24 septembre à New York:


Chaque année, à cette époque, nous nous retrouvons.  Non pas pour préserver le statu quo, mais pour pousser le monde vers l’avant.


Nous vivons une époque riche de possibilités. Nous sommes la première génération qui a les moyens de faire disparaître la pauvreté de la surface de la terre.


Pourtant, des pressions de plus en plus fortes s’exercent sur la planète et ses habitants.  Le climat se réchauffe. Les jeunes ne trouvent pas d’emploi. Les conflits perdurent.


Les choses évoluent à la vitesse du siècle nouveau, souvent si vite que les mécanismes et les institutions créés pour un autre âge ne suivent pas.


Partout dans le monde, des gens descendent dans la rue ou occupent des places pour se faire entendre de ceux qui sont au pouvoir.  Ils veulent que vous, leurs dirigeants, vous écoutiez.  Ils veulent savoir que nous faisons tout pour garantir à chacun une vie de dignité.


Depuis plus de 10 ans, la fin de 2015 est pour nous un horizon distant. Ce moment qui semblait lointain approche maintenant à grand pas.


L’année 2015 est l’échéance que nous nous sommes fixée pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement.


C’est l’année au cours de laquelle nous adopterons un nouveau programme de développement.


Et c’est l’année durant laquelle nous sommes convenus d’achever d’élaborer un instrument juridique de portée mondiale sur les changements climatiques.


L’année 2015 est l’occasion d’écrire l’histoire.


Les OMD ont marqué les esprits, suscité des progrès remarquables et fait taire les doutes qui s’exprimaient quant au développement lui-même.


Pourtant, nous sommes loin du compte à certains égards. L’inégalité s’accentue. Trop de gens sont exploités, dans les champs ou à l’usine.


Le nouveau programme de développement doit être aussi mobilisateur que les OMD, tout en allant plus loin.


Il doit  être universel; l’éradication de la pauvreté doit en être la priorité absolue, le développement durable, l’élément central, et la gouvernance, le ciment. Il doit s’exprimer en une seule et unique série d’objectifs.


Et il ne doit pas établir de hiérarchie entre les trois dimensions du développement: la protection de l’environnement et la justice sociale ne doivent pas être reportées à plus tard, une fois que la croissance économique sera assurée.


L’autonomisation des femmes et leurs droits doivent être au cœur de tout ce que nous faisons.


L’équation est simple: lorsque les filles sont en bonne santé et scolarisées, lorsque les femmes sont protégées par la loi et ont accès aux ressources financières, lorsque les femmes vivent à l’abri de la violence et de la discrimination, les nations prospèrent.


Je joins ma voix à celle des dirigeants qui se réuniront cet après-midi pour adopter une déclaration énergique sur la violence sexuelle en temps de conflit.


Le XXIe siècle doit être le siècle des femmes.


Le succès passe par des efforts accrus du secteur privé.


Les entreprises doivent avoir les coudées franches pour faire ce qu’elles font le mieux: créer des emplois et innover.  Mais elles doivent mener leurs activités selon les règles de l’éthique et de façon responsable, en faisant tout pour protéger l’environnement.


Au sommet sur le Pacte mondial qui s’est tenu la semaine dernière, des milliers de chefs d’entreprise ont promis de prendre des mesures supplémentaires pour que leurs activités soient mieux alignées sur les objectifs de l’ONU.


L’ONU doit se doter de plus de moyens encore pour travailler non seulement avec le monde des affaires et de la finance, mais aussi avec la société civile et les organisations philanthropiques.


Les effets des changements climatiques menacent tous les acquis du développement.


Les retombées humaines et économiques, de plus en plus importantes, touchent tout le monde.  Les plus pauvres et les plus vulnérables, qui sont les premiers à souffrir et paient le prix le plus fort, réclament davantage de justice climatique.


Le message de la planète et des scientifiques est clair, comme nous le constaterons une nouvelle fois cette semaine quand le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat publiera sa dernière évaluation en date.


Ces périls s’accompagnent d’occasions à saisir: celle de changer nos modes de fonctionnement et nos plans d’urbanisme, nos moyens de transport et la façon dont nos maisons et nos usines sont alimentées en énergie.  La voie d’une économie à faible émission de carbone s’ouvre devant nous – une voie qui peut mener à la création d’emplois et à une amélioration de la santé publique, tout en nous permettant de protéger l’environnement.


J’invite chacun d’entre vous à un sommet sur les changements climatiques qui se tiendra dans un an ici-même, à New York, et nous aidera à nous engager sur cette voie.


Je compte que vous viendrez y faire des annonces audacieuses.  Innovez, reproduisez à grande échelle les projets qui font leurs preuves, coopérez et prenez des mesures concrètes pour réduire les émissions autant que nécessaire et ouvrir la voie à l’adoption d’un instrument juridique ambitieux dans le cadre du processus relatif à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.


Nous devons relever le « défi 2015 »: faire encore un effort pour atteindre les OMD, arrêter de nouvelles orientations concernant l’énergie et le climat, et adopter un nouveau cadre de développement mobilisateur.


Personne ne doit rester à la traîne.


J’en viens au plus grand problème que le monde connaisse actuellement en ce qui concerne la paix et la sécurité: la crise syrienne.


Le nombre de morts dépasse de loin les 100 000. Le nombre de personnes qui ont dû fuir dépasse de loin les 7 millions – un tiers de la population.


Des familles sont assiégées. Des villes et des villages sont en ruines.  L’économie s’est effondrée.


Des groupes humains forts de la diversité de leurs traditions et de leurs convictions sont maintenant déchirés.


La région est dangereusement déstabilisée. Des civils ont été victimes d’attaques à l’arme chimique comme il ne s’en était pas vu depuis un quart de siècle.


Toute une génération perdue de jeunes gens vit dans des camps de réfugiés.  Qui de nous pourra dire que ces jeunes ont tort, que leurs mères et leurs pères ont tort, de se sentir abandonnés par la communauté internationale?


Des comptes vont nous être demandés.


Le Gouvernement syrien doit s’acquitter intégralement et rapidement des obligations qu’il a acceptées en adhérant à la Convention sur les armes chimiques.


La communauté internationale doit tenir responsables ceux qui ont employé des armes chimiques en Syrie – emploi indéniablement confirmé par la Mission d’enquête des Nations Unies.


La communauté internationale doit aussi, avec la même détermination, veiller à ce que les stocks et les installations de production d’armes chimiques de la Syrie soient placés sous bonne garde et détruits.


Mais nous ne saurions nous contenter de détruire les armes chimiques pendant que la guerre continue de détruire la Syrie.


Ce sont, pour l’essentiel, des armes classiques qui sont utilisées pour tuer ou commettre des atrocités.


Je demande à tous les États d’arrêter d’alimenter le conflit sanglant qui déchire la Syrie et de mettre un terme aux livraisons d’armes à toutes les parties.


Je compte sur l’adoption imminente d’une résolution contraignante du Conseil de sécurité sur les armes chimiques.


Une intervention humanitaire devrait venir juste après.


Des observateurs des droits de l’homme des Nations Unies pourraient jouer un rôle utile en communiquant des informations sur les violations commises et en dissuadant les parties d’en commettre de nouvelles.


Je demande au Gouvernement syrien et à l’opposition de se conformer aux obligations que leur font le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme.


Ils doivent lever tous les obstacles à l’accès humanitaire et mettre fin aux attaques inadmissibles dirigées contre les installations médicales et leur personnel.  Ils doivent libérer les milliers de détenus, dont des femmes et des enfants, dont la détention n’est pas fondée en droit international.


Les auteurs des crimes graves de portée internationale doivent être amenés à rendre des comptes, soit devant la Cour pénale internationale, soit par d’autres moyens conformes au droit international. 


L’emploi d’armes chimiques, acte odieux, a suscité un mouvement diplomatique, premier signe d’unité depuis bien trop longtemps. 


Nous devons en tirer parti pour amener les parties à la table des négociations.


Toute victoire militaire est une illusion.  La seule solution est un règlement politique.


Je demande instamment au Gouvernement syrien et à l’opposition –et, Mesdames et Messieurs, je demande instamment à tous ceux, ici présents, qui ont de l’influence et de l’autorité sur eux– de faire en sorte que la deuxième conférence de Genève se tienne.


Il est temps de mettre fin au massacre et de parvenir à la paix dont le peuple syrien a besoin et qu’il mérite. 


Au-delà de la Syrie, toute la région connaît des tensions et des troubles.


Des transitions d’importance historique ont achoppé ou ralenti.  Les printemps d’espoir qui avaient ému le monde entier cèdent la place à des hivers de déception. 


Les difficultés sont immenses: il faut construire la démocratie et mettre en place un dialogue pluraliste, étouffer les flammes du fanatisme et combler le vide sécuritaire une fois desserré l’étau de la dictature. 


Mais ce chapitre est encore en train d’être écrit.  Nous devons tout faire pour contribuer au succès des réformes.  Nous devons saisir les occasions et répondre aux déclarations de bonne volonté.


Chaque nation tracera sa propre route.  Nous ne pouvons fermer les yeux lorsqu’une d’entre elles retourne en arrière, et devons insister sur le respect des valeurs universelles: les droits de l’homme, la tolérance et l’ouverture politique.  Ce sont là les fondements de la paix et de la prospérité. 


Je me félicite que les Israéliens et les Palestiniens aient repris des négociations directes et salue les interventions diplomatiques audacieuses grâce auxquelles cette reprise a été possible.  Si nous voulons vraiment parvenir à la solution des deux États, nous devons admettre que la fenêtre se referme rapidement. 


J’exhorte les parties à faire preuve de leadership et à montrer qu’elles comprennent les intérêts à long terme de leurs peuples et de la région.  Le Quatuor se réunira cette semaine, ici à New York, pour apporter son concours.


Au-delà du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, je vois des pays d’Afrique écrire un nouveau chapitre dans lequel le dynamisme va de pair avec la démocratie et une croissance économique aussi soutenue qu’impressionnante. 


En Somalie, des progrès politiques; au Mali, des élections crédibles; en République démocratique du Congo, un maintien de la paix plus robuste; et, pour la région des Grands Lacs, un nouvel accord-cadre porteur d’espoir:  autant d’acquis sur lesquels nous pouvons construire.


Cela étant, au Sahel, la misère et l’instabilité persistent.  En République centrafricaine, l’ordre public s’est effondré.  Des millions de personnes sont coupées de toute assistance et risquent d’être victimes d’exactions.  Pourtant, de même que l’appel humanitaire pour la Syrie, notre appel à l’aide en faveur de ce pays ne suscite que des contributions désespérément insuffisantes.   


Et rien qu’au cours de cette dernière semaine, des attaques consternantes commises au Kenya, en Iraq et au Pakistan nous ont une nouvelle fois rappelé combien les terroristes peuvent faire de mal et causer de dégâts. 


Partout dans le monde, nous constatons une fois de plus que les droits de l’homme et la primauté du droit sont les fondements de la stabilité et de la coexistence.


Il est temps de nous engager plus fermement en faveur de la justice internationale et de la Cour pénale internationale. 


Je lance un appel tout particulier au nom des Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens.  Elles ont obtenu des résultats non négligeables, mais se heurtent constamment à de sérieux problèmes de financement, au point que leur existence est à présent compromise.


La faillite des Chambres serait une tragédie pour les Cambodgiens, qui ont si longtemps attendu la justice.  Je demande à la communauté internationale de dégager les ressources nécessaires pour que toutes les affaires puissent être menées à terme. 


Le fait que les États Membres et l’ONU aient été incapables d’empêcher et de faire cesser des violations des droits de l’homme à grande échelle a eu des conséquences désastreuses.


Un examen interne de l’action menée par les Nations Unies à la fin de la guerre à Sri Lanka a mis en lumière des défaillances systémiques.  Les États Membres n’ont pas fourni l’appui dont les organismes des Nations Unies avaient besoin pour s’acquitter des tâches qui leur avaient été confiées; le système des Nations Unies ne s’est pas adapté comme il aurait dû et n’a pas fait tout ce qu’il aurait dû. 


Les violations des droits de l’homme sont les meilleurs signaux annonciateurs de crises.  En ce vingtième anniversaire de la Conférence mondiale de Vienne sur les droits de l’homme, nous devons réaffirmer notre attachement aux principes fondateurs de l’Organisation.  J’entends faire plus pour aider les États Membres à parvenir rapidement à un consensus propre à prévenir les violations à grande échelle, et je mets en œuvre des recommandations devant permettre à l’ONU de s’acquitter des responsabilités que lui confie la Charte. 


La paix et l’exercice des droits de l’homme resteront des mirages tant que nous ne nous attaquerons pas au problème des armes.  L’année dernière a été marquée par l’adoption d’un instrument prometteur, le Traité sur le commerce des armes, qui vient enfin réglementer les transferts internationaux d’armes classiques.


Mais le désarmement nucléaire n’avance pas.  Des armes à l’immense pouvoir destructeur prolifèrent.  Le Traité sur l’interdiction complète des essais d’armes nucléaires n’est toujours pas en vigueur.  Et les armes légères continuent de blesser et de tuer. 


Alors que les besoins de l’humanité sont immenses, les dépenses d’armement demeurent absurdement élevées.  Nous devons reconnaître les vraies priorités et investir dans les gens au lieu de gaspiller des milliards en armes de guerre.


Vous, dirigeants, êtes là pour servir les peuples. 


Vous pouvez être ceux qui présideront à l’éradication de la pauvreté, concrétiseront la volonté des peuples et feront entrer l’humanité dans une ère de développement et de paix durables.


Vous pouvez vous attaquer aujourd’hui aux problèmes les plus épineux, sachant que votre prévoyance est un don aux générations futures. 


J’exhorte chacun d’entre vous à faire sienne la logique mondiale de notre époque.  Les destins des uns et des autres étant de plus en plus étroitement liés, notre avenir doit être placé sous le signe d’une coopération de plus en plus étroite elle aussi.


Dans ce paysage mondial transformé, nous devons trouver de nouvelles manières de gouverner, de nous associer et de régler les problèmes. 


Nous devons donner à l’Organisation des Nations Unies les moyens d’être plus que l’équipe des premiers secours ou l’intervenant de dernier ressort. 


Les changements sont inévitables, mais les progrès ne le sont pas.  C’est le leadership qui fait la différence.


Réglons notre conduite sur celle de Nelson Mandela – frêle aujourd’hui mais pour toujours dans nos esprits un modèle d’intégrité hors pair et un homme de principe déterminé à faire triompher la dignité humaine.


Vous, dans vos pays, et nous, qui sommes réunis ici, occupons une position extrêmement privilégiée. 


Nous devons nous en montrer dignes.  Nous devons entendre les exigences légitimes des peuples du monde et répondre à l’appel de l’histoire.


Nous parlons souvent d’espoir.  Notre responsabilité est de traduire l’espoir en action, grâce à notre travail, notre détermination, notre talent et notre intégrité.


En y mettant toute notre passion, mais aussi et surtout toute notre compassion, nous pouvons construire l’avenir auquel vos peuples aspirent et dont le monde a besoin.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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