Table ronde: le renforcement de la coopération et des partenariats pour le commerce et le développement passe par l’étape régionale, selon des experts
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TABLE RONDE: LE RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION ET DES PARTENARIATS POUR LE COMMERCE
ET LE DÉVELOPPEMENT PASSE PAR L’ÉTAPE RÉGIONALE, SELON DES EXPERTS
Il faut veiller à ce que la conclusion d’accords de partenariat ou de libre échange
ne mette pas en compétition un éléphant et un moustique, soulignent des délégations
(Publié tel que reçu)
DOHA, QATAR, 24 avril -- Dix experts, dont quatre ministres et le Directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), ont examiné ce matin les moyens par lesquels il serait possible de « renforcer toutes les formes de coopération et de partenariats pour le commerce et le développement, notamment la coopération Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire », thème de la troisième table ronde organisée dans le cadre des travaux de la treizième Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED XIII), qui se tient actuellement à Doha, au Qatar.
Cette discussion, qui a permis d’identifier les mécanismes de coopération commerciale à tous les niveaux favorisant une croissance équitable et durable pour tous, a mis en évidence le caractère essentiel de la coopération régionale, notamment au niveau du continent africain.
Pour lancer le débat, M. Supachai Panitchpakdi, Secrétaire général de la CNUCED, a appelé à mettre en place un programme mondial cohérent pour renforcer les trois formes essentielles de coopération pour le développement, soulignant que cette question, qui était une priorité de la CNUCED dans les années 1960 et 1970, est redevenue d’actualité. Nous devons notamment nous mettre d’accord pour réduire le niveau des émissions de gaz à effet de serre, a dit M. Supachai Panitchpakdi, évoquant à cet égard les débats qui auront lieu lors de la prochaine Conférence des Nations Unies sur le développement durable, prévue à Rio de Janeiro, au Brésil, au mois de juin prochain.
Le Secrétaire général de la CNUCED a proposé une série de mesures visant notamment à promouvoir les actions au niveau régional, afin de favoriser, par exemple, la gestion conjointe par plusieurs pays des ressources en eau. Il a aussi conseillé de mieux évaluer les accords Nord-Sud qui constituent une nouvelle génération des accords de libre échange, comme ceux existant ou encore en négociation dans le domaine de la propriété intellectuelle. Il faut en outre accroître la coopération technique entre les pays en développement, a-t-il dit, faisant valoir qu’ils peuvent tirer parti de leurs expériences mutuelles dans le domaine agricole. Il a cité, à cet égard, l’exemple du Brésil qui a une bonne expérience dans le domaine de l’usage des pesticides dans la promotion de l’agriculture.
Pour le Secrétaire général de la CNUCED, il est également nécessaire d’apporter une aide au commerce aux pays arabes sortant des bouleversements générés par le « printemps arabe ». Enfin, il a suggéré d’aider aussi le secteur privé en y favorisant les investissements responsables.
Au cours de la discussion, animée par le Ministre des entreprises publiques, de la politique scientifique et de la coopération au développement, et chargé de la politique des grandes villes de la Belgique, les intervenants ont analysé les trois niveaux de coopération et de partenariats contribuant au développement, avant de faire des suggestions et de procéder à des échanges d’expériences qui ont fait leurs preuves sur le terrain.
Le débat a aussi été l’occasion de soulever des questions sensibles comme l’absence d’accords de libre échange entre l’Union européenne et le groupe des pays du Golfe, les impasses dans lesquelles se trouvent les pourparlers du Cycle de négociations commerciales de Doha et les négociations d’un nouveau cadre de partenariat commercial entre l’Union européenne et le Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Certains intervenants, comme le Ministre du commerce et de l’industrie de l’Afrique du Sud, ont vivement dénoncé les subventions, les barrières tarifaires et non tarifaires et les contingentements qui faussent le fonctionnement des échanges agricoles et bloquent l’exportation des produits agricoles des pays en développement vers les marchés des pays du Nord. Quand on parle de négocier ou de conclure des « accords de libre échange » ou « des accords de partenariat économique », il faudrait veiller à « ne pas créer un cadre mettant en compétition un éléphant et un moustique », ont fait remarquer des intervenants.
Table ronde 3: Renforcement de toutes les formes de coopération et de partenariats pour le commerce et le développement, y compris les coopérations Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire
La table ronde était animée par M. PAUL MAGNETTE, Ministre des entreprises publiques, de la politique scientifique et de la coopération au développement, chargé des grandes villes, de la Belgique, qui, après l’introduction du Secrétaire général de la CNUCED, M. SupachaiPanitchpakdi, a lancé le débat en posant la question des liens existant entre les accords commerciaux et le développement.
Mme ANABEL GONZALEZ, Ministre du commerce extérieur du Costa Rica, a résumé le dialogue politique tenu en mars dernier à la CNUCED afin d’examiner les défis du nouveau paysage commercial mondial. Les notions valables il y a 10 ans ne le sont plus aujourd’hui, a-t-elle expliqué, notamment dans les entreprises manufacturières. Les échanges sont de plus en plus complexes à cause des politiques commerciales. Pour parvenir à une croissance inclusive, il faut une meilleure cohérence entre les objectifs commerciaux et les politiques, a-t-elle plaidé. Toutes les parties prenantes doivent être informées des politiques commerciales des pays, a-t-elle préconisé. Le nouvel environnement exige que tous les acteurs soient plus actifs, a-t-elle ajouté. La Ministre costaricienne a aussi souligné la complexité des chaines d’approvisionnement qui requièrent des politiques plus efficaces. En outre, les économies de nombreux pays en développement dépendent encore trop souvent de l’exportation d’un seul produit, et il faut donc trouver des solutions qui leur permettraient de parvenir à un équilibre en diversifiant leur base économique, a-t-elle estimé.
Les panélistes ont ensuite cherché à savoir comment, dans l’environnement actuel, les partenariats et la coopération au développement pouvaient être renforcés pour un processus de développement durable et plus inclusif.
Pour Mme HANNA TETTEH, Ministre du commerce et de l’industrie du Ghana, il faut adopter tout d’abord une perspective régionale, puis continentale, pour parvenir à renforcer la coopération Sud-Sud. Il faut créer des partenariats commerciaux efficaces et vérifier que les systèmes créés antérieurement fonctionnent toujours, a préconisé la Ministre. Elle a donné l’exemple de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui a connu de succès autant sur le plan politique que sur le plan économique. Il faudrait travailler à créer une zone de libre échange au niveau du continent, a recommandé Mme Tetteh.
« Renforcer le lien qui existe entre le commerce et le développement est la clef du problème », a estimé M. ROB DAVIES, Ministre du commerce et de l’industrie de l’Afrique du Sud. Il faut trouver une nouvelle définition du commerce qui se concentre davantage sur la chaine de valeurs, a-t-il suggéré, avant de s’interroger sur la place que doivent occuper les pays en développement sur cette chaine. Au niveau de l’Afrique, il a proposé de renforcer les partenariats qui existent, non pas seulement dans le domaine du commerce, mais aussi dans celui des infrastructures et de la chaîne d’approvisionnement.
« Aucun pays n’a à lui tout seul les ressources ou les compétences pour relever un défi aussi complexe », a estimé M. SAM TAN CHIN SIONG, Secrétaire parlementaire au Ministère des affaires étrangères de Singapour, tout en invitant la communauté internationale à mettre en commun les synergies existantes et celles qui sont potentielles et à se concentrer sur la coopération technique, ceci au bénéfice des pays les plus vulnérables. Le commerce mondial doit s’ouvrir, et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) doit poursuivre son travail de régulation, malgré l’impasse dans laquelle se trouve le Cycle de négociations commerciales de Doha, a déclaré M. Siong. Il a aussi souhaité que l’OMC puisse répondre aux nouveaux défis.
Le Directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), M. PASCAL LAMY, a estimé que les partenariats et la coopération seront de moins en moins bilatéraux et de plus en plus multilatéraux. Il a souligné que l’échange commercial est en lui-même un « partenariat naturel », selon la théorie de Ricardo. Dès lors que vous faites quelque chose mieux que moi et inversement, nous avons un intérêt naturel à procéder à des échanges, a-t-il expliqué. Nous avons beaucoup appris notamment sur la meilleure utilisation qui peut être faite de cet échange, notamment lorsqu’un des partenaires en présence s’avère être un pays moins développé que l’autre.
De l’avis de M. Lamy, la dimension multilatérale doit prendre le pas sur la dimension bilatérale. « C’est la réalité qui caractérise l’échange commercial actuellement », a-t-il indiqué. M. Lamy a rappelé qu’un pays en développement devait autrefois se constituer une industrie sidérurgique intégrée, une industrie automobile intégrée, avant de pouvoir avoir accès aux échanges internationaux. La nouvelle géographie mondiale des échanges internationaux ne change pas les règles qui visent à rendre les échanges moins injustes, ceci afin de favoriser le développement.
M. Lamy a poursuivi son explication en précisant qu’il fallait réfléchir différemment. « On butte sur la question des barrières non tarifaires », a-t-il reconnu, suggérant d’aborder la question de l’harmonisation et de la convergence de ces barrières au plan multilatéral plutôt qu’au plan bilatéral. Sur la question de l’investissement, il a estimé qu’on avait atteint les limites d’un régime bilatéral et qu’il faudrait songer à passer à un régime multilatéral. Le bilatéral a eu ses vertus pendant une période, mais il va nous falloir passer là aussi au multilatéral. Pour conclure, M. Lamy a observé qu’il y avait un sas entre les deux domaines, qui est le niveau « régional ». C’est un passage naturel pour aller du bilatéral vers le multilatéral, a-t-il assuré.
M. CLÉMENT DUHAIME, Administrateur à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a rappelé que cette Organisation s’est fédérée autour de pays du Sud, sur la base de la solidarité et dans le respect de la diversité. Nous l’avons enrichie, et elle compte 75 pays membres aujourd’hui, et nous l’avons élargie, afin de pouvoir aussi nous impliquer dans le traitement des questions relevant du développement économique. Il ne s’agit pas d’imposer des recettes, mais de prendre en compte la diversité et les dynamiques endogènes, notamment celle de la société civile, a dit M. Duhaime. L’OIF vit au quotidien les partenariats Sud-Sud, Nord-Sud et triangulaires, conformément à sa philosophie fondée sur l’interdépendance des pays, a-t-il expliqué. Nous avons aussi la conviction que la crise inédite que nous traversons nous oblige à trouver des solutions tout aussi inédites et à revoir l’architecture économique mondiale. Aucun engagement ne sera possible sans engagement politique fort, a estimé M. Duhaime.
M. JEAN-LOUIS EKRA, Président de la Banque africaine d’import-export et Président honoraire de G-NEXID, a déclaré que « si vous négociez avec quelqu’un qui est beaucoup plus faible que vous, il n’y a pas de négociation possible ». Il a souligné l’importance pour l’Afrique de diversifier ses exportations, afin d’exporter des produits un peu plus finis ayant plus de valeur ajoutée. L’Afrique doit aussi diversifier ses partenariats, en favorisant notamment les pays émergents, et en allant au-delà des liens historiques qui la lient à certains États, a-t-il conseillé. Cela permettra un meilleur équilibre des échanges. L’Afrique doit aussi « converser avec elle-même », a ajouté M. Ekra.
M. TALAL ABU-GHAZALEH, Sénateur de la Jordanie et Président de « Talal Abu-Ghazaleh Organization », a invité la CNUCED à trouver un nouveau paradigme du commerce, du développement et de la coopération Sud-Sud, Nord-Sud ou triangulaire. Nous ne pourrons pas résoudre les problèmes avec l’esprit que nous avions lorsque ces problèmes ont été engendrés, a-t-il dit. Les termes « développés » et « en développement » doivent être revus, a-t-il estimé. L’aide technique doit être principalement allouée au plan local et non pas à des experts qui vont absorber l’intégralité de cette aide, a-t-il noté. Il s’est désolé que le monde aille à l’encontre des principes prônés par l’OMC. Il a aussi appelé à revoir les accords non tarifaires. Enfin, il a invité les États à faire participer le secteur privé, en tant que partenaire agissant à égalité avec les autres acteurs impliqués dans la promotion du commerce et du développement.
M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Secrétaire général du Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), a expliqué que ce groupe de pays avait pour but de veiller à l’intégration commerciale internationale de ses 73 États membres. Il a insisté sur la nécessité de conserver la dimension du développement dans les négociations entre les ACP et l’Union européenne concernant les accords de partenariat économique (APE) afin de tenir compte des contraintes relatives à la question des marchés publics, notamment la fourniture d’équipements aux administrations publiques. La dimension régionale doit également être prise en compte, a-t-il ajouté. Il a également estimé que les pays ACP et l’Union européenne devaient faire preuve de créativité pour sortir de l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations sur les APE. Une zone de libre échange pour tous les pays ACP doit être créée, a-t-il par ailleurs prôné.
Le Ministre adjoint du commerce de l’Iraq a indiqué que son pays était lui aussi victime de la pratique du « dumping ». Il a ensuite estimé nécessaire de mettre à profit l’expérience accumulée par différents pays afin de résoudre au mieux les problèmes qui se posent en matière commerciale et de développement.
Le représentant du Bahreïn a soulevé la question que posent les excédents en ressources financières dont jouissent certains États, des pays arabes notamment. Il a également relevé un paradoxe entre le marché d’Unité arabe et le marché commun des pays du Golfe. Les pays arabes négocient à titre individuel à la CNUCED et à l’OMC, a-t-il relevé. Pourquoi des accords de libre échange ne sont-ils pas signés entre l’Union européenne et le groupe des pays du Golf? s’est-il notamment interrogé.
À son tour, le représentant de la Commission européenne a relevé que l’aspect régional était souvent considéré comme un passage obligé du bilatéralisme au multilatéralisme dans le but de développer la coopération Sud-Sud. L’Europe, a-t-il indiqué, a toujours considéré que les négociations sur les APE devaient développer l’intégration régionale entre les pays africains de chacune des sous-régions. Voila pourquoi les accords comportent une dimension de « préférence régionale », a-t-il signalé. Il a fait savoir qu’il avait été difficile de réconcilier les calendriers de négociations, car tous les pays n’étaient pas près à procéder à l’intégration régionale à la même allure que leurs voisins. L’autre difficulté, a-t-il ajouté, ce sont les obligations que doivent avoir les pays vis-à-vis de l’OMC. De son point de vue, le respect des règles de l’OMC ne serait pas une contrainte, mais permettrait au contraire « de procéder à l’intégration des économies africaines dans le marché mondial ».
La représentante de l’Union africaine a souligné « l’importance des partenariats avec l’Union européenne » notamment, mais a réclamé la création d’un nouveau paradigme pour faire avancer les négociations ACP-Union européenne. Elle s’est par ailleurs interrogée sur le meilleur moyen d’ériger les partenariats en priorité et de veiller à ce qu’ils produisent des résultats concrets.
Le Président de l’Organisation Talal Abu-Ghazaleh de la Jordanie a estimé qu’outre les partenariats Sud-Sud, il fallait également privilégier les partenariats Est-Est et Est-Sud. Soixante-quinze pour cent des investissements américains ont été réalisés en Europe et vice-versa, a-t-il fait observer. Il a souligné l’importance de veiller à la complémentarité des accords régionaux. En effet, comment peut-on envisager un partenariat entre un éléphant et un moustique? Le temps est venu d’envisager des relations entre l’Orient et le Sud. Nous devons développer nos propres économies pour arriver au même niveau que les pays occidentaux. Il faut changer notre culture et notre philosophie et parler davantage du Sud et de l’Est plutôt que du Sud et du Nord, a-t-il ajouté.
Le modérateur de la table ronde a ensuite posé la question de la contribution que pourraient apporter les accords commerciaux au règlement des problèmes actuels. Comment améliorer les perspectives de conclusion des accords de Doha? Comment procéder pour renforcer les structures commerciales, lutter contre le protectionnisme ou encore combattre les subventions agricoles qui faussent le commerce mondial en y créant des distorsions? a-t-il encore demandé.
Le Directeur général de l’OMC a constaté qu’on ne savait pas encore comment traiter la question des subventions inéquitables de manière multilatérale. S’il faut améliorer les règles du commerce mondial pour les rendre plus justes envers les pays du Groupe ACP, il y a davantage à faire dans le cadre de l’OMC qu’à travers un canal multilatéral, a souligné M. Lamy. Il a fait savoir que depuis 2002-2005, base de référence de l’initiative de l’aide pour le commerce, la partie de l’aide publique au développement consacrée au renforcement des capacités commerciales avait augmenté de 80%, pour atteindre 45 milliards de dollars en 2010. La part consacrée aux PMA a doublé pour passer de 7 milliards à 14 milliards en 2010, a-t-il précisé. On est en train de poursuivre une formule qui marche, et elle marche parce qu’elle a été « multilatéralisée », a-t-il soutenu. Parlant du Cycle de négociations commerciales de Doha, il a estimé que ce n’était pas la règle du consensus qui en bloquait le processus. C’est plutôt un problème politique qui doit être résolu sur le plan politique, et la règle du consensus ne parviendra pas à y mettre un terme, a-t-il averti.
La Ministre du Costa Rica a indiqué que 40% des exportations de son pays provenaient non pas du secteur de la banane, par exemple, mais d’une chaine de produits à haute valeur ajoutée que le Costa Rica a réussie à mettre en place, et plus particulièrement du secteur technologique. Quatre-vingt pour cent des puces électroniques utilisées dans le monde sont assemblées au Costa Rica, a-t-elle notamment fait savoir. Qui plus est, certaines sociétés indiennes ont établie une base au Costa Rica afin de servir le marché américain, a ajouté la Ministre. De son point de vue, la promotion de l’intégration des chaines de production ayant une valeur ajoutée au niveau nationale devrait être une priorité pour tous les pays. La dimension régionale, a-t-elle souligné, est particulièrement importante, et les négociations menées au sein de l’OMC à ce sujet sont fondamentales. Elle a également insisté sur la participation des populations au commerce, y voyant là le seul moyen d’assurer la croissance d’un pays. Il faut établir un agenda cohérent au niveau national pour promouvoir la compétitivité, d’où l’importance de l’éducation, de la maitrise des connaissances, et de l’innovation.
Le Ministre du commerce et de l’industrie de l’Afrique du Sud a déclaré que « les conditions injustes imposées à l’exportation des produits agricoles des pays du Sud sur les marchés mondiaux étaient la principale barrière qui se posent à de nombreux pays en développement ». L’objectif n’est pas de supprimer toutes les subventions, a-t-il dit. Il a indiqué qu’au cours des négociations de l’OMC, le G-20 avait opté pour l’atteinte d’un résultat modeste, mais que même celui-ci n’était pas réalisable. La question du multilatéralisme est donc essentielle, car ce n’est qu’à ce niveau que l’on parviendra à résoudre le problème. Au vu du fait que le monde développé connait une période de faible croissance économique, le Ministre a souligné l’importance pour les pays en développement de se tourner vers le Sud ou l’Est, et de développer des partenariats avec des économies émergentes. À ce titre, le continent africain est particulièrement important, a-t-il affirmé en évoquant l’importance de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). Cependant, supprimer les barrières tarifaires ne suffira pas à résoudre les problèmes que connait l’Afrique, car le continent ne dispose pas encore des infrastructures nécessaires pour améliorer son commerce intérieur et assurer la circulation de ses marchandises, et l’Afrique n’a pas encore une capacité productive suffisante. Le Ministre a par ailleurs fait observer que la concurrence apportée aux partenaires traditionnels par l’arrivée d’économies émergentes en Afrique était la bienvenue car elle permettait une certaine souplesse dans les négociations sur les accords commerciaux du type APE et autres.
« La facilitation du commerce doit être effective entre les États Membres des Nations Unies, de l’OMC et autres groupes multilatéraux », a affirmé de son côté la Ministre du commerce et de l’industrie du Ghana, avant de souligner la nécessité de veiller au fonctionnement des accords commerciaux qui sont déjà en place. Elle a également soulevé la question de l’intégration financière. En Afrique, a-t-elle notamment fait observer, on constate que sur le plan monétaire on a des pays et des régions utilisant le franc CFA et d’autres devises, alors que sur le plan pratique, les pays du continent font leurs échanges en dollars. Comment donc procéder pour faciliter les activités commerciales et monétaires africaines entre les pays du continent et entre ces pays et le reste du monde? La Ministre a également signalé que d’importants accords commerciaux, notamment les Accords de Lomé, sont déjà opérationnels en Afrique depuis des années. D’évidence, quelque chose n’a pas fonctionné, a-t-elle déploré. L’intégration ne peut fonctionner que si toutes les parties sont convaincues qu’elles en bénéficieront, a-t-elle rappelé. Outre les obstacles tarifaires, a-t-elle par ailleurs signalé, il existe également au niveau mondial des normes sanitaires ou phytosanitaires qui peuvent devenir des obstacles au libre échange et porter atteinte au commerce.
À son tour, le Secrétaire parlementaire du Ministère des affaires étrangères de Singapour a vu dans la libéralisation du commerce le meilleur moyen de parvenir à instaurer une économie forte par le biais notamment d’une approche multilatérale fondée sur des accords de libre échange. Ce sont là les composantes d’un système multilatéral qui fonctionne, a-t-il soutenu. Il a fait savoir que Singapour avait conclu 18 accords de libre échange avec d’autres pays ou groupes de pays et avait toujours veillé à ce qu’ils soient cohérents avec les règles de l’OMC. L’Accord TPP (TransPacific Partnership), récemment proposé par les États-Unis, a-t-il précisé, pourrait notamment déboucher sur un accord de libre échange dans l’ensemble de la région Asie-Pacifique. En outre, au niveau de l’ANASE, un système douanier préférentiel a été mis en place par Singapour à l’échelle nationale et a permis d’accroître le volume des échanges qui, a-t-il précisé, avoisinent aujourd’hui les deux trillions de dollars. Il a également indiqué qu’afin de veiller à la durabilité du système et pour contribuer à la création d’emplois, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) accordait une attention particulière au développement des infrastructures et à la formation des ressources humaines. L’ANASE ne peut cependant pas y parvenir seule et cherche donc à établir des partenariats pour mener ces projets à bien, a dit l’officiel singapourien. Il a aussi insisté sur la nécessité de réduire les écarts de développement entre les pays membres de l’ANASE, par le biais notamment de l’Initiative pour l’intégration.
La représentante du Viet Nam a fait valoir que de nombreux pays essayaient de promouvoir le libre échange et les investissements en soutenant les pourparlers du Cycle de négociations commerciales de Doha. Elle a indiqué que le Viet Nam approuvait l’appel lancé ce matin en vue de renforcer les partenariats régionaux. La coopération Sud-Sud, ainsi que la coopération triangulaire, renforce la coopération Nord-Sud, même si celle-ci continue à jouer un rôle central, a-t-elle estimé. Elle a donc lancé un appel aux pays du Nord pour qu’ils continuent leur coopération avec les pays du Sud, notamment en ce qui concerne la coopération technique et celle ayant trait à la promotion d’une économie verte. Le Viet Nam a participé à différents programmes de coopération triangulaire ces dernières années, notamment avec l’Afrique, pour promouvoir les investissements agricoles.
Interrogée par une représentante de Singapour sur les raisons du mauvais fonctionnement des Accords de Lomé, la Ministre du commerce et de l’industrie du Ghana a expliqué qu’il était très difficile d’avoir accès au marché de l’Union européenne. Il faut aussi que les petites entreprises, pas seulement les multinationales, puissent s’intégrer dans les échanges du marché mondial.
Une représentante du Botswana a appelé à discuter davantage du secteur privé, dans l’objectif de le faire beaucoup plus participer aux discussions. Elle a plaidé elle aussi en faveur de l’intégration régionale, tout en invitant à garder à l’esprit les différents stades de développement auxquels se trouvent les pays.
Quels sont les mécanismes spécifiques à adopter en priorité? a demandé le modérateur. Le Sénateur de la Jordanie et Président du Groupe Talal Abu-Ghazaleh a estimé qu’il faut avant tout ériger en véritables partenaires les acteurs du secteur privé.
Répondant aussi à la question posée par le modérateur, le Président de la Banque africaine d’import-export a parlé de la contribution du réseau mondial d’institutions financières du Sud, lancé en 2006 et présidé par la Banque qu’il dirige. Le Réseau a servi de catalyseur à certains changements et partagé les expériences acquises, a-t-il indiqué. Il a aussi organisé un séminaire sur la création de PME.
De son côté, le Secrétaire général du Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique a mentionné l’existence d’un programme d’échanges entre les pays du Groupe ACP visant le renforcement de leurs capacités commerciales. L’Administrateur de l’Organisation internationale de la francophonie a, quant à lui, parlé du programme « Africalia » qui vise à faire participer les petites et moyennes entreprises de la zone de la Francophonie à des rendez-vous d’affaires.
À propos des petites entreprises, le Directeur général de l’OMC a estimé qu’elles devaient s’intégrer dans le commerce international, et que ceci pouvait leur être facilité en leur donnant un meilleur accès au crédit. Il y a encore beaucoup d’opérations commerciales qui se règlent en argent liquide, a-t-il relevé. Il a aussi répondu à une question sur le « dumping » en assurant qu’il existe des outils pour combattre cette pratique. En outre, il a reconnu l’importance d’impliquer le monde des affaires dans les partenariats. Si on donne la parole aux grandes entreprises, il faut se demander si celles-ci représentent bien le monde en développement, a observé pour sa part le Ministre du commerce et de l’industrie de l’Afrique du Sud.
Résumant la discussion dynamique de la matinée, le modérateur de la table ronde a identifié trois niveaux d’action: la place que veulent prendre les pays en développement dans le commerce international; leur intégration régionale, qui est fondamentale; et la promotion des actions au niveau multilatéral, porteur d’un grand nombre de solutions.
M. Magnette a aussi remarqué qu’il avait été peu question du rôle de la CNUCED au cours de la discussion. C’est le « signe qu’elle se porte bien », en a-t-il déduit, se réjouissant qu’elle constitue un forum de discussion libre et ouvert.
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