En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/13823-AG/11148

Ban Ki-moon exhorte à construire un monde à la hauteur des espérances des jeunes générations, « présent et avenir de l’humanité »

21/9/2011
Secrétaire généralSG/SM/13823
AG/11148
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BAN KI-MOON EXHORTE À CONSTRUIRE UN MONDE À LA HAUTEUR DES ESPÉRANCES DES JEUNES GÉNÉRATIONS, « PRÉSENT ET AVENIR DE L’HUMANITÉ »


Il identifie cinq grands impératifs: le développement durable,

la prévention, la sécurité, l’appui aux nations en transition et la participation accrue des femmes et des jeunes


Vous trouverez ci-après le texte de l’allocution prononcée par le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, à l’occasion de la présentation de son rapport « Nous, les peuples » à l’Assemblée générale, le 21 septembre:


Vers la fin du mois prochain, un enfant naîtra: le sept-milliardième habitant de la planète Terre. 


Supposons que c’est une fille.  Elle sera très probablement pauvre. Peut-être deviendra-t-elle grande et forte, ou peut-être pas.  Si elle a beaucoup de chance, elle ira à l’école et partira découvrir le monde, pleine d’espoir et de rêves.  Au-delà de ça, nous ne savons qu’une chose avec certitude: le monde qui sera le sien sera marqué par des changements immenses et imprévisibles, sur les plans écologique, économique, géopolitique, technologique et démographique.


La population mondiale a triplé depuis la création de l’ONU.  Et le nombre d’êtres humains continue de croître.  Tout comme les pressions qui s’exercent sur les terres, les sources d’énergie, les denrées alimentaires et les réserves d’eau.  La crise économique mondiale continue de faire trembler les fondements des banques, des entreprises, des administrations et des familles du monde entier.  Le chômage prend de l’ampleur.  Les inégalités sociales sont de plus en plus marquées.  Trop de gens vivent dans la peur.


L’ONU a pour mission de servir ceux au nom de qui elle a été créée: les peuples.  Depuis cinq ans que j’occupe le poste de Secrétaire général, j’ai voyagé de par le monde pour aller à la rencontre des gens là où ils vivent, pour savoir quels sont leurs espoirs et leurs craintes.


Il y a deux semaines, je me suis rendu à Kiribati et dans les Îles Salomon.  Des villageois m’ont dit combien ils craignent les changements climatiques.  La mer, dont le niveau monte, inonde leurs maisons.  Un jour, ils seront peut-être purement et simplement emportés par les eaux.  Une petite fille, prenant son courage à deux mains, m’a demandé: « Qu’allons-nous devenir?  Qu’est-ce que l’ONU peut faire pour nous? »  Aujourd’hui, je vous pose sa question, à vous qui dirigez le monde.  Que pouvons-nous faire?  Comment pouvons-nous aider les gens à trouver la paix, la prospérité et la justice dans un monde en crise?


Quand je fais le bilan des années que j’ai déjà passées à mon poste, je suis empli d’une conviction passionnée, d’une foi inébranlable dans l’importance que continue de revêtir cette noble organisation qu’est l’ONU.  Aujourd’hui, je voudrais vous dire comment je vois la suite.  À mon sens, il y a devant nous cinq impératifs, cinq grandes choses que nous pouvons décider de faire aujourd’hui pour façonner le monde de demain.


La première et la plus importante, le grand impératif du XXIe siècle, c’est le développement durable.   Sauver notre planète… sortir les gens de la pauvreté, favoriser la croissance économique: une seule et même entreprise.  Nous devons faire le lien entre les changements climatiques, le manque d’eau, les pénuries d’énergie, la santé dans le monde, la sécurité alimentaire et l’autonomisation de la femme.  Quand nous réglons un problème, nous devons le régler pour tous.


Rio+20 doit aboutir.  Nous devons progresser sur la question des changements climatiques.  Nous ne pouvons aller vers l’avenir en pratiquant la politique de la terre brûlée.  Nous ne pouvons faire semblant qu’il n’y a pas de danger, ni faire fi des risques parce que ce sont les autres qui sont menacés.  Aujourd’hui, je vous demande de parvenir à un accord contraignant sur les changements climatiques.  Un accord prévoyant des réductions plus ambitieuses des émissions, pour chaque pays et pour le monde.  C’est maintenant qu’il faut agir concrètement, sur les plans de la réduction des émissions et de l’adaptation.


L’énergie est la clef.  La clef de notre planète, de notre mode de vie.  C’est pourquoi nous avons lancé une nouvelle initiative pionnière « Énergie durable pour tous ».  Nous devons investir dans les gens, en particulier dans l’éducation et dans la santé des femmes et des enfants.  Le développement ne peut s’appeler durable que s’il est équitable et profite à tous.


Nous devons redoubler d’efforts pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement, et aller plus loin.  Aujourd’hui, je vous demande de voir plus grand, plus loin que l’horizon de 2015.  Arrêtons une nouvelle génération d’objectifs de développement durable qui succéderont aux OMD.  Mettons-nous d’accord sur des moyens de les atteindre.


La deuxième grande occasion à saisir a pour nom prévention.  Cette année, le budget de maintien de la paix de l’ONU se montera à 8 milliards de dollars.  Imaginez les économies qui pourraient être faites si nous intervenions avant que les conflits n’éclatent, en déployant des missions de médiation politique, par exemple, plutôt que des soldats.  Nous savons comment faire.  Les résultats le prouvent: en Guinée, au Kenya, au Kirghizistan.  Pour prévenir les violations des droits de l’homme, nous devons promouvoir l’état de droit et refuser l’impunité.  Nous avons fait une place à la responsabilité de protéger.  Nous continuerons sur cette voie. 


Pour éviter que les catastrophes naturelles ne fassent des dégâts incalculables, nous devons avancer sur les fronts de la réduction des risques et de la préparation.  Et surtout, n’oublions pas qu’en fin de compte, la meilleure prévention, c’est le développement.  Aujourd’hui, je vous demande votre appui.  Mobilisons les ressources nécessaires.  Faisons de la prévention non plus une notion abstraite, mais un principe fondamental de fonctionnement, dans tous les domaines où nous travaillons. 


Troisième impératif: créer un monde plus sûr. C’est la responsabilité principale de l’Organisation des Nations Unies.  Cette année, nous avons été rudement mis à l’épreuve.  En Côte d’Ivoire, nous avons fermement défendu la démocratie et les droits de l’homme.  Travaillant de près avec des partenaires régionaux, nous avons changé la vie de millions de personnes.  En Afghanistan et en Iraq, nous poursuivrons notre mission avec détermination et fidélité aux peuples de ces fières nations.


Au Darfour, nous continuons de sauver des vies et d’aider à maintenir la paix dans des conditions difficiles.  Pour accomplir notre tâche avec succès, nous devons disposer de la coopération et de l’appui plein et entier de la communauté internationale, des parties et du Gouvernement soudanais.  Au Soudan, les parties à l’Accord de paix global doivent coopérer pour éviter le conflit et régler les questions en suspens.


Au Moyen-Orient, nous devons sortir de l’impasse.  Nous sommes d’accord depuis longtemps pour dire que les Palestiniens méritent un État.  Israël doit pouvoir vivre en sécurité.  Les deux parties veulent la paix.  Nous promettons d’œuvrer sans relâche pour que cette paix s’instaure grâce à un règlement négocié.  Nous devons innover pour tirer tout le parti possible de cette force salutaire qu’est le maintien de la paix des Nations Unies.  Nous mettons en place des méthodes totalement nouvelles. Nous avons renforcé l’appui aux missions, qui ont aussi été réaménagées.


Dans des pays comme la République démocratique du Congo et la Sierra Leone, nous aidons la paix à gagner du terrain en renforçant la société civile, en favorisant la prééminence du droit et en créant les institutions nécessaires à une gouvernance honnête et efficace.


Aujourd’hui, nous sommes capables de réagir plus vite et plus efficacement que jamais auparavant, et nous poursuivrons nos efforts.  Nous demeurons sommes les premiers à intervenir en cas d’urgence: au Pakistan, à Haïti et ailleurs.  Il est essentiel que nous continuions à faire fond sur l’instrument le plus novateur et le plus efficace dont nous disposions pour apporter des secours humanitaires, le Fonds central pour les interventions d’urgence.


La famine continue à se répandre en Somalie.  Je vous en supplie: sauvez les enfants de la corne de l’Afrique.  Comme nous l’avons appris à Fukushima et ailleurs, les accidents nucléaires ne respectent pas les frontières.  C’est d’une action mondiale que nous avons besoin.  De solides normes de sécurité internationales qui permettront d’éviter de nouvelles catastrophes.  Nous devons aussi poursuivre le travail de désarmement et de non-prolifération.  Et réaliser le rêve d’un monde exempt d’armes nucléaires.


Quatrième chose à faire: appuyer les nations en transition.  Les événements extraordinaires qui se sont produits cette année en Afrique du Nord et au Moyen-Orient ont été une source d’inspiration.  Faisons en sorte que le printemps arabe soit vraiment la saison de l’espoir pour tous.


En Libye, nous déployons une nouvelle mission d’appui des Nations Unies pour aider les autorités libyennes à instituer un nouveau gouvernement et un nouvel ordre juridique, comme le souhaite le peuple libyen.


La Syrie est particulièrement préoccupante.  Depuis six mois, c’est l’escalade de la violence et de la répression.  Le Gouvernement a mainte fois promis d’adopter des réformes et d’écouter le peuple.  Il n’en a rien fait.  C’est maintenant qu’il faut agir.  La violence doit cesser.  D’autres comptent également sur nous.


Tel pays sort de la guerre, met derrière lui l’autocratie et se démocratise, sort de la pauvreté et connaît une nouvelle prospérité.  L’ONU doit l’aider à s’engager sur la bonne voie.  Il faudra peut-être aider à remettre sur pied l’appareil judiciaire ou les services publics.  À organiser des élections.  Ou à écrire une nouvelle constitution. 


Notre tâche, aujourd’hui, est de consolider les progrès et de mettre en pratique ce que l’expérience nous a appris.  La difficulté ressort on ne peut plus clairement de ce que nous faisons pour aider le Soudan du Sud à mettre en place, après des décennies de conflit, des structures étatiques qui fonctionnent.


Cinquièmement, enfin: nous devons en faire beaucoup, beaucoup plus pour et avec les femmes et les jeunes.  


Les femmes portent plus de la moitié du ciel et comptent pour une grande partie du potentiel irréalisé de l’humanité.  Ce sont elles qui enseignent.  Elles qui élèvent les enfants.  Elles qui cimentent les familles et, de plus en plus, font tourner l’économie.  Elles qui, naturellement, font preuve de leadership.  Il faut qu’elles participent à part entière à l’administration des affaires publiques, à la gestion des entreprises, à l’action de la société civile.  Cette année, enfin, nous avons ONU-Femmes, notre propre instrument de changement, puissant et dynamique.


Je suis heureux de voir tant de femmes à cette session de l’Assemblée générale.  Je tiens en particulier à souhaiter la bienvenue à la prochaine oratrice, la Présidente du Brésil, Mme Dilma Roussef, qui sera, dans l’histoire de l’Organisation, la première femme à ouvrir le débat général.   Nous pouvons être fiers de compter tant de femmes parmi ceux qui dirigent l’ONU.  Nous continuerons de promouvoir les femmes à tous les niveaux de l’Organisation. 


Et nous accorderons une attention particulière à la nouvelle génération.  Les jeunes sont plus que notre avenir.  Ils sont aussi notre présent, tant par leur nombre que par l’impulsion qu’ils donnent aux changements politiques et sociaux.  Nous devons trouver les moyens de créer des emplois décents et des perspectives d’avenir pour eux, partout dans le monde.


Ce sont là des défis extraordinaires.  Nous ne pouvons les relever avec des moyens ordinaires.  Une chose compte plus que toute autre: la solidarité.  Pour commencer, c’est évident: sans ressources, nous ne pouvons rien faire.  Aujourd’hui, je demande aux gouvernements qui supportent depuis longtemps la plus grande part des coûts de ne pas fléchir dans leur générosité.  Les temps sont durs.  Mais nous savons qu’investir par l’intermédiaire de l’ONU, c’est investir intelligemment.  Partagé, le fardeau est moins lourd.  Faire des coupes sombres n’arrangera rien.


Aux puissances montantes, dont le dynamisme est, de plus en plus, le moteur de l’économie mondiale, je demande de se souvenir que le pouvoir s’accompagne de responsabilités.


À tous, je vous demande de donner ce que vous pouvez: des experts, des soldats, des hélicoptères.  Ne sous-estimez jamais ce que votre leadership peut accomplir.  Encore et encore, j’ai vu des nations parmi les plus petites apporter des contributions parmi les plus importantes.


Les États ne peuvent tout faire à eux seuls.  Pour aider ceux qui sont dans le besoin, nous devons élargir notre base et viser plus loin.  Nous devons exploiter toute la puissance des partenariats, dans toute l’Organisation.  Les succès de notre lutte contre le paludisme montrent la voie.  Le pouvoir de transformation d’une action menée en partenariat ressort aussi de l’initiative  « Toutes les femmes, tous les enfants », pour laquelle nous avons obtenu des annonces de contribution s’élevant à plus de 40 milliards de dollars, soit quatre fois le budget annuel de l’ONU.


En conjuguant le pouvoir de rassemblement et les ressources techniques incomparables de l’ONU aux divers atouts des pouvoirs publics, du secteur privé et de la société civile, on obtient un incroyable moteur de changement positif. 


Enfin, nous devons évoluer avec notre temps.  En ces temps d’austérité budgétaire, nous devons en faire plus avec moins de moyens.  Nous devons mieux investir l’argent du contribuable, faire la chasse au gaspillage et éviter les doubles emplois en étant unis dans l’action.  La responsabilité et la transparence demeurent nos maîtres mots. Nous sommes responsables devant les États Membres.  Mais nous ne pouvons gagner en efficacité s’ils ne nous appuient pas de façon ferme et cohérente.


Nous devons rationaliser la procédure budgétaire et aider l’ONU à faire les choses à un prix que nul pays ne pourra battre à lui seul.  Nous devons continuer à nous efforcer de créer un corps de fonctionnaires plus moderne et plus mobile, une ONU plus rapide et plus souple, une ONU qui innove et tire parti des réseaux sociaux et des nouvelles technologies, une ONU qui aide à régler des problèmes réels en temps réel.


Enfin, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger le personnel des Nations Unies.  Nous avons perdu trop de vies; l’ONU est devenue une cible trop facile.  Aujourd’hui, ayons une pensée reconnaissante pour ceux qui servent l’Organisation avec tant de dévouement dans tant de lieux dangereux.


Depuis cette vaste salle, elles peuvent sembler bien lointaines, ces îles qui rétrécissent dans l’immensité du Pacifique.  Pourtant, j’entends les questions de cette petite fille comme si elle était à côté de moi.  C’est peut-être parce qu’il y a soixante ans, cet enfant, c’était moi.


La réponse, c’est l’ONU, comme ce l’était alors.  Ici, aujourd’hui, j’entends des millions d’autres garçons et filles appeler à l’aide, chercher une lueur d’espoir.  « Nous, les peuples ».


Ils sont sept milliards à se tourner vers nous, les gouvernants.  Ils ont besoin que nous trouvions des solutions.  Ils veulent que nous prenions les choses en main.  Ils exigent que nous agissions.  Que nous agissions avec compassion, courage et conviction.  Que nous agissions de concert, en nations unies au sein de l’Organisation des Nations Unies.


Poursuivons le voyage ensemble.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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