LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL EXAMINE AU COURS D’UNE TABLE RONDE LES INCIDENCES DES CRISES MONDIALES SUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL
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Commission du développement social
Quarante-septième session
8e et 9e séances – matin & après-midi
LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL EXAMINE AU COURS D’UNE TABLE RONDE LES INCIDENCES DES CRISES MONDIALES SUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL
La Commission du développement social, qui entamait aujourd’hui la deuxième et dernière semaine de travaux de sa quarante-septième session, s’est intéressée, lors d’une table ronde, aux crises mondiales et à leurs incidences sur le développement social.
La Commission a également achevé son débat général avec des représentants d’États Membres, d’organismes des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales (ONG) sur l’intégration sociale.
Lors de ce débat, le Paraguay, El Salvador, l’Égypte et le Ghana ont présenté les différentes mesures qu’ils ont mises en œuvre en vue d’améliorer la situation de groupes sociaux vulnérables tels que les handicapés, les jeunes, les personnes âgées ou les familles.
Au cours de la table ronde, intitulée « Les crises mondiales et leurs incidences sur le développement social », le Directeur de la Division du développement durable du Département des affaires économiques et sociales (DESA), M. Tariq Banuri, a mis en particulier l’accent sur la crise des effets des changements climatiques, qui se révèle pire, a-t-il dit, que ne l’envisageaient les prévisions.
Cette crise, a-t-il ajouté, a un impact important sur la sécurité alimentaire et la protection des acquis dans le domaine social. Protéger l’agenda social de l’évolution des changements climatiques est donc primordial, a-t-il expliqué.
De son côté, la Secrétaire permanente au Ministère jamaïcain de l’information, de la culture et de la jeunesse et des sports, Mme Faith Innerarity, a estimé que si la mondialisation créait des opportunités, elle engendrait aussi beaucoup de défis qui menacent le tissu social, les groupes les plus vulnérables étant les plus touchés.
La différence entre pays du Sud et du Nord est manifeste dans le cadre de la crise actuelle, a poursuivi Mme Innerarity, qui, comme l’intervenant qui l’a précédé, a souligné la dimension sociale des changements climatiques, soulignant notamment les effets dévastateurs des ouragans sur les conditions de vie, l’agriculture et le tourisme. Elle a appelé à plus de coopération internationale dans le domaine du développement social, et a invité les Nations Unies à mettre en œuvre les engagements pris lors du Sommet de Copenhague.
Professeur à l’Université finlandaise de Kuopio, M. Juho Saari a lui aussi recommandé l’adoption d’une politique de protection sociale sur le long terme, afin notamment d’éviter les incertitudes chez les personnes concernées. Il a également mis l’accent sur l’importance de la régulation des marchés et de la protection du droit de propriété.
En écho aux interventions des experts, le représentant de la République tchèque, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne (UE), a rappelé que les conséquences de la crise économique actuelle portaient non seulement sur les marchés financiers, mais aussi sur les autres aspects du quotidien des individus, comme la consommation et les investissements. Parmi les mesures à prendre pour y faire face, il a préconisé l’accès à l’alimentation pour tous, ainsi que des initiatives visant à accroitre les investissements afin d’améliorer les possibilités d’emploi.
De son côté, la Ministre des affaires sociales du Cameroun a indiqué que son gouvernement avait engagé un train de mesures pour pallier les effets sociaux du ralentissement de l’économie sur les catégories sociales les plus exposées. « Nous cherchons à sortir d’un système d’assistanat systématique pour promouvoir un secteur social rentable », a-t-elle expliqué, notant que l’objectif était de stimuler une économie solidaire, dont les investissements visent à renforcer les capacités des exclus sociaux. La Ministre a ainsi lancé un appel à la réflexion sur un nouveau modèle qui ne repose pas seulement sur la solidarité, mais qui se révèle aussi créateur de richesses.
Plusieurs délégués ont en outre plaidé en faveur de la coopération internationale dans le domaine social. Le représentant du Soudan, parlant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a quant à lui souligné l’importance du transfert de technologie pour aider les pays en développement à lutter contre les changements climatiques.
La prochaine séance plénière de la Commission aura lieu mercredi, le 10 février, à partir de 10 heures.
SUIVI DU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET DE LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Examen des plans et programmes d’action pertinents des organismes des Nations Unies concernant la situation des groupes sociaux
Suite et fin du débat général
Mme ELIDA DUARTE (Paraguay) a affirmé que pour relever le défi d’un développement durable et solidaire dans son pays, il convenait de ne pas laisser se poursuivre le processus de dérégulation des années 90 dans la région. Un des objectifs, a-t-elle dit, est de créer un sens de responsabilité et de solidarité comme composante essentielle pour reconstruire un sens moral. Le premier défi à relever est d’encourager la démocratisation des politiques publiques grâce, notamment, à la participation sociale, a dit Mme Arevalos. Il s’agit, a-t-elle en particulier précisé, de permettre aux communautés de participer activement au processus de développement social. La représentante a également fait état de la mise en place de tables rondes sectorielles, thématiques et d’ateliers afin d’aboutir à des accords en vue d’établir un contrat social. Des progrès ont de même été réalisés dans la mise en place de la gratuité en matière de santé, a-t-elle relevé. Des centres de santé pour la famille ont été créés, a-t-elle notamment indiqué. Le nouveau Gouvernement du Paraguay a réussi à orienter chacune des initiatives en vue de renforcer les capacités collectives des communautés, ainsi que l’inclusion de leurs demandes dans les politiques gouvernementales pour un développement intégral équitable, a-t-elle assuré. La représentante a, à cet égard, fait appel à la coopération des pays développés et à la coopération Sud-Sud.
Mme MARÍA GALLARDO HERNÁNDEZ (El Salvador) a indiqué que sa délégation attachait une grande importance à la Déclaration sur le développement social, dans l’objectif de créer « une société pour tous ». Nous sommes d’accord avec le Secrétaire général lorsqu’il affirme, dans son rapport, que la pauvreté peut être aussi bien la cause que la conséquence de l’exclusion sociale, a dit la représentante. Elle a invité la Commission à pourvoir aux besoins de base des personnes exclues, avant d’expliquer que les autorités avaient mis en place dans son pays un programme bénéficiant aux familles vivant dans la pauvreté extrême. La discrimination basée sur le sexe est une des formes les plus profondes de l’inégalité, a-t-elle aussi noté. Sur la question de la migration internationale, elle a souligné la nécessité d’intégrer les personnes migrantes dans les sociétés des pays d’accueil, tout en facilitant le maintien de leurs liens avec leur pays d’origine. Récemment, les dirigeants de l’Amérique centrale ont adopté l’« Ordre du jour stratégique social de l’Amérique centrale », qui doit servir de feuille de route dans la région, a aussi indiqué la représentante. Enfin, elle a précisé qu’El Salvador attache une grande importance à la question du financement du développement. Elle a aussi appuyé la tenue d’une nouvelle journée mondiale sur la justice sociale.
M. MICHAEL SCHULZ, de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FISCR), s’agissant de la question de la jeunesse, a en particulier indiqué que la Fédération avait appelé les différentes sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, ainsi que les gouvernements, les agences des Nations Unies, les organisations de jeunes et le secteur privé à renforcer les capacités des jeunes dans plusieurs domaines. Par exemple, il a plaidé en faveur de la formation de jeunes volontaires pour relever certains défis, comme la lutte contre le VIH/sida, la prévention de l’alcoolisme, de l’usage de la drogue, de la violence, et la promotion de l’éducation à l’environnement, des droits de l’enfance, du respect de la diversité, ou du dialogue interreligieux. En ce qui concerne les crises mondiales, le représentant a jugé notamment impératif que les budgets affectés à l’aide, par exemple l’assistance humanitaire, ou au développement économique, ne soient pas réduits. Il serait inconcevable que l’argent soit disponible pour sauver des géants de la finance au détriment des populations qui sont les plus vulnérables au sein des communautés, a-t-il déclaré.
M. AHMED ABU-ELKAIR (Égypte) a fait part des efforts déployés par son pays pour mettre en œuvre le Plan d’action de Copenhague sur le développement social et celui de Madrid, qui porte sur le vieillissement. De façon générale, la société égyptienne n’ignore pas les personnes âgées, a expliqué le représentant, en précisant que l’État et les associations s’en occupent, en particulier quand ces personnes n’ont plus de lien avec leurs familles. Un soutien psychologique et culturel leur est fourni, a-t-il précisé, ainsi que des subventions en cas de maladie, et des pensions. Il a ajouté qu’un des ministères du Gouvernement égyptien est chargé de procurer une carte de rationnement à chaque personne âgée pour qu’elle ait accès aux biens de première nécessité. Il a ensuite décrit les soins médicaux auxquels ont accès les personnes du troisième âge, notamment dans les hôpitaux. Passant à la question de la protection de la famille, le représentant a considéré que les personnes âgées en constituent le noyau. Si la famille se porte bien, la société le sera aussi, a-t-il affirmé. Tout est fait en Égypte pour que les familles se développent dans une atmosphère saine et salubre, a-t-il dit.
M. ANDREW DALE, de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a rappelé, notamment, que la Conférence internationale du travail, qui s’est tenue en juin 2008, avait adopté, à l’unanimité, une nouvelle Déclaration définissant les objectifs actuels de l’OIT. La Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation juste réitère les principes fondamentaux qui définissent et soulignent le concept et l’idée du travail décent, et elle les explique dans le contexte de la mondialisation, a indiqué M. Dale. Cette Déclaration intervient à un moment crucial, a-t-il dit, évoquant la crise financière mondiale. Le représentant a en particulier estimé que le travail décent garantissait la durabilité du développement, tant au niveau national qu’au niveau international.
Mme LILA PROUNIS, représentante du Conseil de l’Archidiocèse grec orthodoxe de l’Amérique du Nord et du Sud, a souligné le rôle important de la famille dans la promotion de l’intégration sociale. Quand la tolérance et le respect de la diversité sont appris au sein de la famille, l’enfant puis le jeune adulte intègrent ces concepts, ce qui œuvre en faveur de l’intégration sociale, a-t-elle fait remarquer. Elle a aussi fait valoir que beaucoup de familles ont des croyances religieuses, ce qui les conduit souvent à pratiquer la tolérance. Les membres de ces familles cherchent en outre, personnellement et par le biais d’institutions religieuses, à se rapprocher des autres membres de la société, et en particulier de ceux qui vivent dans la pauvreté, a-t-elle noté. La représentante a salué l’initiative de pays d’Amérique latine qui ont adopté des programmes de transfert d’argent aux familles pauvres. Les familles bénéficiaires de cette mesure sont soumises à une condition: donner la preuve qu’elles s’occupent bien de leurs enfants en matière de santé et d’éducation. Nous considérons que les gouvernements doivent promouvoir la tolérance et le respect de la diversité, ainsi que les politiques d’aide aux familles, a ajouté la représentante. Les gouvernements doivent aussi inciter les parents à envoyer les enfants à l’école, a-t-elle ajouté.
Mme CLAUDIA MAFFETTONE, de la Fédération mondiale des associations de l’ONU, a mis l’accent sur la contribution que peut apporter la jeune génération dans les domaines des changements climatiques, du désarmement ou de l’aide au niveau mondial. Elle a indiqué que la Fédération se réunirait en République de Corée en août prochain, rassemblant ainsi 50 associations des Nations Unies à travers le monde. Les jeunes sont des agents de changement, a-t-elle dit, soulignant que les technologies de l’information pouvaient créer des ponts pour surmonter les différences et établir une interconnectivité mondiale.
Mme SHANNON JOSEPH, représentante de World Youth Alliance (WYA) a expliqué que l’objectif de cette institution était la promotion de la dignité de la personne humaine, notamment dans les domaines de la politique et de la culture, et le renforcement de la solidarité entre les peuples. Les familles, en tant qu’élément fondamental de la société, sont le lieu où se produit la première expérience intergénérationnelle, a-t-elle fait remarquer. Les jeunes apprennent à aimer des personnes, leurs parents, grands-parents et autres, qu’elles n’ont pas choisies et qui ne sont pas de leur génération, a-t-elle expliqué. Malheureusement, les jeunes issus de familles pauvres n’ont pas beaucoup d’occasions et d’opportunités pour s’éduquer, travailler et s’impliquer politiquement, a-t-elle regretté. Nous avons beaucoup d’activités de bénévolat au Kenya, a ensuite indiqué la représentante, en citant notamment un programme dans le cadre duquel les jeunes kényens consacrent du temps à s’occuper des personnes touchées par la pauvreté. Cela permet de créer de véritables relations entre les populations, relations qui sont essentielles à l’intégration sociale. Nous invitons les États Membres à faire preuve d’un grand engagement à l’égard des familles et à renforcer la solidarité dans leurs politiques d’intégration sociale, a-t-elle dit.
Mme GERMAINE PRICE, de la Compagnie des Filles de Saint-Vincent de Paul et des Missions salésiennes, a encouragé les États Membres à considérer l’urgence qu’il y a à traduire dans la réalité la Déclaration de Copenhague, qui reconnaît que les sociétés doivent répondre plus efficacement aux besoins matériels et spirituels des individus, de leurs familles et des communautés dans lesquelles ils vivent. Face aux effets délétères de la pauvreté, des conflits, de la dégradation de l’environnement et de la crise économique mondiale, les familles ne doivent pas être oubliées, a-t-elle dit. Les familles jouent un rôle essentiel dans l’établissement de sociétés plus justes et plus équitables, a-t-elle ajouté. Elle a ainsi mis l’accent sur la nécessité de promouvoir et de protéger la famille, ainsi que d’intégrer professionnellement les jeunes sur le marché du travail après une éducation qui leur permet d’être hautement qualifiés, et de protéger les jeunes qui vivent dans la pauvreté ou qui sont contraints, à cause du dénuement, de se déplacer.
M. HELEN HAMLIN, représentante de la Fédération internationale sur le vieillissement, a noté que, d’ici à 2050, le nombre de personnes âgées dépassera celui des jeunes dans un grand nombre de sociétés, surtout dans le monde développé. Les jeunes doivent s’associer aux personnes plus âgées pour trouver les moyens d’édifier une société pour tous, a-t-elle ensuite préconisé. L’exclusion des personnes âgées a pour conséquence d’isoler celles-ci du reste de la société et de faire perdre à la jeunesse la sagesse de cette tranche générationnelle, a-t-elle regretté. Elle a appelé à renforcer la volonté politique et les mouvements sociaux pour mettre en œuvre les objectifs d’intégration sociale formulés dans les documents des Nations Unies. Le moment est venu d’œuvrer ensemble pour passer à l’action, non seulement pour la mise en œuvre des Plans d’action de Madrid et de Copenhague par les gouvernements, mais aussi par les individus, a-t-elle déclaré. À cet égard, elle a salué le cadre de politique sociale adopté par l’Union africaine en octobre 2008, et a espéré en tirer des leçons pour ce continent.
M. MAWUTOR KWAKU ABLO, Ministre de la main-d’œuvre, de la jeunesse et de l’emploi du Ghana, a souligné que son pays avait pris un certain nombre d’initiatives au cours des 10 dernières années, plaçant la question du développement social en tête de son agenda de développement. En 2006, le Ghana a adopté la Loi sur les personnes handicapées, laquelle, a-t-il dit, cherche à fournir un cadre et un environnement adéquats à une intégration totale et au développement de capacités pour les personnes handicapées. Afin de promouvoir le plein développement des jeunes, le Gouvernement du Ghana a mis au point en 2008 une nouvelle politique nationale de la jeunesse qui traite de la santé, de l’éducation, de la science, de la technologie, de la culture, du VIH/sida, de la formation et de l’emploi, a ajouté M. Kwaku Ablo. S’agissant des personnes âgées, le Gouvernement ghanéen travaille actuellement sur une révision de sa politique actuelle, a-t-il indiqué. Le Ministre a ainsi affirmé que la nouvelle politique répondrait mieux aux besoins en matière de soins de santé, de sécurité sociale, de revenus, de logement, de transports ou d’alimentation. Il a enfin rappelé que le Ghana avait participé à la Conférence ministérielle de l’Union africaine sur le développement social en Namibie, en 2008. Le Ghana, a-t-il précisé, a lancé une action visant à développer une politique sociale nationale utilisant le cadre adopté par l’Union africaine, lors de cette Conférence.
Question nouvelles: « Les crises mondiales et leurs incidences sur le développement social » (E/CN.5/2009/CRP.2)
Présentation
Présentant le point examiné cet après-midi, « les crises mondiales et leurs incidences sur le développement social », Mme ELSA STAMATOPOULOU, Directrice de la Division pour la politique sociale et le développement, a fait référence à une note (E/CN.5/2009/CRP.2), qui décrit les crises actuelles et les évènements majeurs qui se sont produits dans le domaine socioéconomique. L’actuelle récession économique et financière coûte de nombreux emplois dans les pays en développement et les pays développés, a-t-elle fait remarquer. La note précitée recommande la mise en œuvre de trains de mesures de stimulation financière pour bâtir sur la dynamique que crée la crise, a-t-elle indiqué. Le document a été rédigé dans l’urgence et uniquement pour nourrir le débat sur des points importants, a-t-elle précisé.
Table ronde: « Les crises mondiales et leurs incidences sur le développement social »
Ouvrant la table ronde, M. TARIQ BANURI, Directeur de la Division du développement durable du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a rappelé la conjonction de plusieurs crises, qui sévit depuis le début de l’année dernière, établissant un parallèle avec les crises des années 80. Le Directeur a mis en particulier l’accent sur la crise née des effets conjugués des changements climatiques. La situation est pire que ce qui était prévu, a-t-il dit, soulignant la nécessité d’adopter un agenda large pour lui faire face. Les coûts et l’impact des changements climatiques sont bien connus, et sont livrés en détails par le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Cette crise, a-t-il ajouté, a un impact important sur la sécurité alimentaire et la protection des acquis engrangés dans le domaine social.
Il a jugé également nécessaire de créer des estimations sur les risques auxquels sont confrontées les communautés agricoles, en particulier dans les pays en développement. Il a par ailleurs estimé que le système de santé publique sera fortement touché par l’émergence de nouvelles grandes maladies. Il convient d’y réagir, a-t-il dit, grâce à des moyens privés ou gouvernementaux. Protéger l’agenda social de l’évolution des changements climatiques est primordial et indispensable, a-t-il expliqué. Par ailleurs, M. Banuri a observé que les pays en développement, pour réaliser leurs objectifs de développement humain, auraient besoin, dans l’avenir, de cinq à six fois plus d’énergie par habitant par rapport à aujourd’hui. S’il faut utiliser des ressources alternatives, qui sont beaucoup plus chères, le fardeau sur les pays en développement se fera plus lourd, a-t-il dit, mettant l’accent sur la nécessité de réfléchir aux moyens de réduire les coûts de ces nouvelles ressources et de faciliter le transfert de technologie vers ces pays.
Mme FAITH INNERARITY, Secrétaire permanente au Ministère jamaïcain de l’information, de la culture et de la jeunesse et des sports, a rappelé que les politiques socioéconomiques se renforcent mutuellement. Bien que la mondialisation apporte des possibilités, elle engendre aussi beaucoup de défis qui menacent le tissu social, a-t-elle noté, rappelant que les groupes les plus vulnérables sont les plus touchés. Le prix des matières premières et de l’alimentation ont beaucoup augmenté depuis 2000, et cette volatilité va encore durer longtemps, a-t-elle prédit. Pour ce qui est des changements climatiques, elle a souligné le rôle important qu’ils jouent dans la production alimentaire et leur incidence sur la sécurité alimentaire. Le statut nutritionnel des enfants est aussi préoccupant, s’est-elle encore inquiétée, rappelant notamment l’augmentation prévue du nombre d’enfants malnutris. Du fait de la crise, des enfants sont retirés des écoles, ou fréquentent celles-ci de façon irrégulière, a-t-elle d’autre part regretté.
La différence entre pays du Sud et pays du Nord est manifeste dans la crise actuelle, a poursuivi Mme Innerarity. Elle a relevé que la perte d’emplois dans le secteur formel, dans plusieurs pays, entraîne un passage des travailleurs dans le secteur informel avec les inconvénients qui en découlent. Les pertes d’emplois qui se produisent dans les pays industrialisés vont engendrer la baisse du tourisme dans les Caraïbes, et notamment en Jamaïque, a-t-elle aussi relevé. La crise entraîne en outre une diminution des transferts de fonds privés provenant des expatriés. Mme Innerarity a ensuite noté que, si le prix du pétrole a diminué de manière significative, ce qui est bon pour un pays ne l’est pas forcément pour un autre. Trinité-et-Tobago souffre par exemple de la baisse du prix du pétrole.
Mme Innerarity a aussi souligné la dimension sociale des changements climatiques, soulignant les effets dévastateurs des ouragans sur les conditions de vie, l’agriculture et le tourisme. La Jamaïque est placée sur la route qu’empruntent les ouragans, et les catastrophes ne nous épargnent pas, a-t-elle expliqué. Il nous faut donc chaque année consacrer des fonds publics pour gérer les problèmes créés par ces ouragans. La représentante a enfin énuméré les initiatives prises par son gouvernement pour, notamment, augmenter la production alimentaire, améliorer l’accès à l’emploi, l’aide sociale et l’utilisation de sources alternatives d’énergie. Elle a encore appelé à la coopération internationale dans le domaine du développement social, et a invité les Nations Unies à mettre en œuvre les engagements pris lors du Sommet de Copenhague.
M. XAVIER PRATS-MONNÉ (Espagne), Directeur de la politique de l’emploi et des relations internationales de la Commission européenne, s’est intéressé à l’évolution de la crise en Europe. La situation de l’emploi s’est aggravée de manière générale, a-t-il affirmé. Si cette tendance se maintient, le taux de chômage sera bientôt de 10%, a-t-il expliqué. Les industries de l’automobile et du tourisme sont les plus affectées, ce qui signifie, a-t-il précisé, que les hommes sont plus touchés par le chômage. Il a également estimé que l’Union européenne (UE) représentait un bon exemple des mérites et des avantages de la coopération et de l’action concertée. Il a souligné l’importance du maintien de réformes structurelles à long terme. De même, est-il essentiel, a-t-il ajouté, de maintenir les niveaux actuels de protection sociale. Il a également mis l’accent sur la nécessité d’exploiter le potentiel d’emplois que représente une transition vers une production moins consommatrice de carbone.
Venant du Zimbabwe, M. TAVENGWA NHONGO, Directeur chargé de la politique africaine à HelpAge International, a parlé de la population mondiale vieillissante, qui devrait atteindre les 2 milliards de personnes d’ici à 2050, s’inquiétant particulièrement du sort des agriculteurs. La majorité des personnes âgées vivent dans la pauvreté, a-t-il rappelé. L’augmentation du prix des denrées alimentaires n’est pas une question nouvelle pour cette catégorie de la population, mais simplement une accentuation de leur situation déjà difficile. Dans certaines familles très pauvres, les personnes mangent à tour de rôle, ne faisant qu’un seul repas par jour, a relevé M. Nhongo, qui a aussi signalé le problème des carences alimentaires. Il a aussi remarqué que la plupart des personnes âgées des pays en développement n’ont pas accès aux carburants, et donc pas accès au chauffage. Nous craignons une diminution de l’aide consacrée aux personnes âgées, a poursuivi M. Nhongo, qui a aussi craint que le ralentissement de la croissance économique ne touche de près les personnes âgées. Il faut donc que les gouvernements dispensent une aide plus ciblée, a-t-il dit, tout en ne réduisant pas leurs dépenses sociales.
La protection sociale peut en effet avoir une incidence majeure pour lutter contre la pauvreté, a-t-il poursuivi. En Afrique du Sud, elle a eu un effet important dans la réduction de la pauvreté, a-t-il ainsi précisé. En Namibie, une pension sociale vise à améliorer le sort des plus vulnérables, c’est-à-dire les enfants. On peut aussi tirer des enseignements de l’expérience du Ghana, qui voit en ce moment les effets bénéfiques des mesures sociales contre la réduction de la pauvreté. Pour répondre à l’argument selon lequel la protection sociale coûte très cher, M. Nhongo a indiqué que les économies les plus pauvres peuvent quand même se le permettre, citant le cas du Lesotho, qui a mis en place un système social sans aide du Fonds monétaire international (FMI) ou d’aucune autre institution internationale.
M. HENK-JAN BRINKMAN, Chef du Bureau de liaison de New York du Programme alimentaire mondial (PAM), a souligné la nécessité, dans le contexte de crises mondiales actuelles, de renforcer les systèmes de protection sociale. Il a expliqué notamment que l’augmentation du prix du riz se traduisait dans les familles par des problèmes d’insuffisance pondérale, non que ces familles limitent leur consommation de riz, mais plutôt celle d’autres denrées à forte valeur nutritive. Il a également précisé que le PAM avait fourni, en 2008, une assistance d’un milliard de dollars aux populations dans le besoin pour faire face à la crise alimentaire mondiale.
Le Finlandais M. JUHO SAARI, Professeur à l’Université de Kuopio, s’est interrogé sur les raisons de la situation socioéconomique actuelle, pour en tirer les leçons du passé. Dans les pays scandinaves et dans l’Union européenne il y aura une dette publique excessive pendant au moins une quinzaine d’années, a-t-il prédit, en précisant que ces pays auraient en outre une population qui vieillit. Il s’est aussi inquiété de la situation de surpopulation conjuguée avec la diminution des dépenses sociales. Les États sont ouverts aux nouvelles idées, a-t-il constaté, expliquant par exemple qu’il n’est pas nécessaire de recourir à l’augmentation des dépenses sociales sur une longue durée. Il a cité le cas de la Finlande qui, dans les années 80, connaissait un fort taux de chômage et une diminution de son produit intérieur brut (PIB). Le Gouvernement a augmenté les dépenses sociales et cela a sauvé notre société, a-t-il expliqué, tout en considérant qu’il n’est pas forcément nécessaire de continuer à les augmenter après la récession. Il faut tenir compte du contexte national, a-t-il ajouté. M. Saari a ensuite recommandé d’adopter une politique de protection sociale sur le long terme, afin notamment d’éviter les incertitudes chez les personnes concernées. Il a aussi mis l’accent sur l’importance de la régulation des marchés et de la protection du droit de propriété.
Débat général
Amorçant le débat qui a suivi les interventions des experts, le représentant de la République tchèque, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE), a rappelé que les conséquences de la crise économique actuelle portent non seulement sur les marchés financiers, mais aussi sur les autres aspects du quotidien des individus, comme la consommation et les investissements. Parmi les mesures à prendre pour y faire face, il a souhaité renforcer l’accès à l’alimentation pour tous et appuyer des initiatives pour accroitre les investissements afin d’améliorer les possibilités d’emploi. Il a aussi demandé que des actions prioritaires soient menées pour atténuer les incidences négatives de la crise actuelle sur les éléments les plus vulnérables de la société, comme les enfants, les personnes handicapées, les vieillards, les migrants, tout en tenant compte des aspects sexospécifiques.
Chaque pays est responsable en premier chef de son développement économique et social, a estimé le représentant tchèque, et se doit d’adopter des mesures stratégiques. Nombreux sont d’ailleurs les participants à ce débat qui ont fait part de leurs stratégies nationales pour faire face, au plan social, aux crises nouvelles. L’Union européenne, par exemple, a adopté un plan de redressement économique européen, dans lequel elle affirme rester engagée activement dans la recherche des meilleures politiques possibles pour surmonter les conséquences de la crise financière actuelle, a dit son représentant.
De son côté, la Ministre des affaires sociales du Cameroun a indiqué que le Gouvernement camerounais a engagé un train de mesures visant notamment à pallier les effets sociaux du ralentissement de l’économie sur les catégories sociales les plus exposées et à améliorer leurs conditions de vie, afin de favoriser leur intégration sociale. « Nous cherchons à sortir d’un système d’assistanat systématique pour promouvoir un secteur social rentable », a-t-elle expliqué. Cela apparait comme un paradoxe, mais l’objectif est de stimuler une économie solidaire, dont les investissements visent à renforcer les capacités d’exclus sociaux. Elle a lancé un appel à la réflexion sur un nouveau modèle qui ne repose pas seulement sur la solidarité, mais qui se révèle aussi créateur de richesses.
À son tour, la représentante de la Chine a parlé des mesures mises en place dans son pays, notamment pour renforcer la motivation et améliorer le logement et la protection de l’environnement. Nous avons aussi mis en place des mesures attractives afin d’aider les petites et moyennes entreprises (PME) à surmonter les difficultés commerciales, et obliger les entreprises à réduire les licenciements. Nous investissons aussi dans le système de santé, a-t-elle ajouté.
Outre les mesures prises sur le plan national, les intervenants ont aussi souligné l’importance de la coopération internationale dans le domaine social. Le représentant du Soudan, parlant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a souligné la nécessité du transfert de technologie pour aider les pays en développement à lutter contre les effets sociaux des changements climatiques. Le représentant de la République tchèque a relevé le rôle des institutions multilatérales comme les Nations Unies pour renforcer la coopération internationale. Il s’est demandé dans quel domaine cette coopération pourrait s’avérer la mesure la plus utile à promouvoir dans le contexte actuel. De son côté, le représentant de Cuba a demandé si la coopération internationale pouvait atténuer de façon importante les effets de la crise dans les pays en développement. Pour M. Nhongo, la coopération sur une base Nord-Sud doit se faire dans le respect des coopérants et dans la mesure où elle bénéficie à tous les intéressés. Mme Innenarity a insisté sur le respect mutuel qui conduit à partager les meilleures pratiques.
Parmi les autres questions posées au cours de ce débat, la représentante de l’Égypte a demandé combien de temps allait durer la récession et on allait ressentir les effets de cette crise. Le représentant tchèque s’est demandé s’il fallait se concentrer sur les efforts à court terme pour préserver les emplois actuels, ou plutôt sur des objectifs à plus long terme, même s’ils ne stabilisent pas le marché du travail à court terme. Ou peut-être, faut-il adopter une approche équilibrée entre les deux possibilités, a-t-il demandé. Répondant à cette question, M. Prats-Monné a suggéré d’étudier les questions au cas par cas pour savoir si les réponses s’appliquent à chaque situation particulière. Pour Mme Innenarity, il faut adopter une approche équilibrée entre le court et le long termes, car « pendant que l’herbe pousse, la vache a faim », a-t-elle dit, en citant un vieux proverbe. M. Nhongo a rappelé que la protection sociale va au cœur de la pauvreté même.
M. Brinckman, comme le représentant du Soudan, a relevé que la nutrition est souvent sous-évaluée dans les systèmes de protection sociale. Il a considéré que la Commission du développement social a un rôle important à jouer pour souligner le coût et l’impact sur le plan social de la crise actuelle. Répondant au représentant du Ghana, il a considéré lui aussi qu’il est important que des ressources soient données aux personnes âgées, qui peuvent s’occuper à leur tour des enfants.
Enfin, plusieurs délégations comme celles de l’Égypte et de Cuba, ont remis en question la machine et les institutions financières mondiales. Celle de Cuba a estimé qu’il faudrait refondre les systèmes financiers internationaux, afin qu’ils soient plus transparents. Elle a d’ailleurs demandé la convocation d’une conférence sur la crise financière, comme cela a été proposé par le Président de l’Assemblée générale, pour l’été prochain.
Mme Innenarity a aussi suggéré que tout le système financier soit réexaminé, en mettant en évidence les causes inhérentes de la crise.
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