COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL: LE MANQUE D’ACCÈS DES PERSONNES HANDICAPÉES À L’ÉDUCATION, AU TRAVAIL ET AUX SERVICES SOCIAUX À L’ORIGINE DU CERCLE VICIEUX ENTRE HANDICAP ET PAUVRETÉ
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Commission du développement social
Quarante-sixième session
10e et 11e séances – matin & après-midi
COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL: LE MANQUE D’ACCÈS DES PERSONNES HANDICAPÉES À L’ÉDUCATION, AU TRAVAIL ET AUX SERVICES SOCIAUX À L’ORIGINE DU CERCLE VICIEUX ENTRE HANDICAP ET PAUVRETÉ
Environ 10% de la population mondiale, soit 650 millions de personnes, vivent avec un handicap. Ils constituent la plus large minorité au monde. À la Commission du développement social aujourd’hui, la quinzaine d’orateurs qui se sont exprimés sur ce thème ont rappelé que 80% des personnes handicapées vivent dans les pays en développement. La question du handicap a d’ailleurs été perçue comme une facette émergeante des programmes de développement par les membres d’une Commission qui s’est ensuite attaquée à l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes dans le monde du travail.
Mais au cours de la table ronde sur l’intégration de la question des personnes handicapées à l’ordre du jour du développement, les intervenants ont souligné que c’est le manque d’accès des personnes handicapées à l’éducation, à l’emploi et aux services publics qui maintient le cercle vicieux entre handicap et pauvreté. Après avoir identifié les obstacles à la participation des personnes handicapées à la société, il faut ensuite, a préconisé, par exemple, la représentante de la Banque mondiale, élaborer des programmes efficaces fondés sur la Convention des Nations Unies et créer des mécanismes de suivi et d’évaluation. De nombreuses délégations ont réitéré leur adhésion aux dispositions de la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées, adoptée le 13 décembre 2006. Signée, à ce jour, par 125 États et ratifiée par 16 d’entre eux, la Convention entrera en vigueur lorsqu’elle comptera 20 ratifications. Son Protocole facultatif fait, quant à lui, l’objet de 10 ratifications.
Or, a averti la Directrice exécutive de l’Institut interaméricain sur les handicaps et le développement inclusif, le nombre de personnes handicapées, dans les pays en développement, devrait augmenter de 120% au cours des 30 prochaines années et de 40% dans les pays développés. Pour assurer l’efficacité des politiques, il faut se départir de la vision selon laquelle les personnes handicapées ne sont que des consommatrices. Elles peuvent être prestataires de services elles-mêmes, a rappelé la représentante du Conseil mondial international des personnes handicapées. Le Conseiller en développement social du Ministère des affaires étrangères de la Finlande a, lui aussi, considéré les personnes handicapées non pas comme les simples bénéficiaires des politiques mais également comme de véritablement contributeurs à l’élaboration de programmes efficaces.
Dans le cadre du thème prioritaire de cette session à savoir, le plein-emploi et le travail décent, la Commission a aussi dialogué sur les moyens d’intensifier l’action pour éliminer toutes les formes de violence contre les femmes dans le monde du travail, après avoir entendu un exposé de la Directrice de la branche « Conditions de travail » de l’Organisation internationale du Travail (OIT). Elle s’est inquiétée du nombre de femmes qui continuent de travailler sans salaire. En 2006, c’était le cas de 38,6% des femmes dans la région Asie-Pacifique.
Le temps que les femmes passent dans un travail rémunéré dépend aussi beaucoup du temps qu’elles consacrent au travail non rémunéré, a précisé la spécialiste de l’OIT. Les femmes totalisent beaucoup plus d’heures de travail que les hommes. Ainsi en Bolivie, le nombre d’heures travaillées, rémunérées ou pas, est de 61 heures par semaine pour les femmes et seulement de 51 heures pour les hommes. Au Ghana, ce ratio est de 88,7 heures pour 57,6 heures, tandis qu’aux Philippines, la moyenne est de 94,5 heures travaillées pour les femmes et de 79,8 pour les hommes.
Les lois sur la lutte contre la discrimination à l’égard des femmes sont davantage incitatives mais il faut s’assurer de leur application notamment par un bon accès à la justice, a plaidé la spécialiste de l’OIT, qui a aussi dénoncé le harcèlement sexuel. Il doit être combattu à tous les niveaux, par des lois, des codes de conduite, des comités sur les lieux de travail, des campagnes de sensibilisation et une formation aux techniques de prévention.
La Commission du développement social a en outre discuté avec le Directeur de la Division des politiques sociales et du développement social, des moyens de renforcer l’efficacité de ses méthodes de travail. Après une session d’examen l’année dernière, la Commission tient, conformément à ses nouvelles méthodes de travail, sa première session directive au terme de laquelle elle doit aboutir à des recommandations concrètes.
La prochaine séance plénière de la Commission aura lieu jeudi 14 février, à 10 heures.
SUIVI DU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET DE LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Table ronde sur le thème « Intégration de la question des personnes handicapées à l’ordre du jour du développement »
Ouvrant les discussions, Mme ROSANGELA BERMAN BIELER, Directrice exécutive de l’Institut interaméricain sur les handicaps et le développement inclusif, a estimé que l’aspect inclusif devait être présent dans l’élaboration des politiques de développement et à leur mise en œuvre. Elle a déclaré que la seule caractéristique commune des handicapés était en fait leur diversité et que cela devait être pris en compte. Elle a aussi souligné que le vieillissement de la population augmenterait les handicaps qui touchent principalement les personnes de 65 ans et plus. Elle a rappelé que 80% des 650 millions de personnes handicapées dans le monde vivaient dans des pays en développement. Soulignant le cercle vicieux entre handicap et pauvreté, elle a indiqué que le handicap créait des barrières à l’éducation, l’emploi et aux services publics qui sont pourtant des vecteurs de réussite sociale. Elle a prévenu, dans ce contexte, que le nombre de personnes handicapées devrait augmenter de 120% au cours des 30 prochaines années dans les pays en développement et de 40% dans les pays développés.
Le développement inclusif est un outil efficace pour surmonter l’exclusion sociale et lutter contre la pauvreté car il reconnaît la diversité et permet à tous de contribuer au processus de développement. Parmi les interventions possibles, il faut faire en sorte que tous les projets d’éducation, de santé et de protection sociale prennent en compte la question des personnes handicapées et de leur famille. Tous les projets de construction ou de rénovation d’écoles, d’infrastructures sanitaires et des systèmes de protection sociale doivent être planifiés et mis en œuvre en gardant à l’esprit le principe d’inclusion, a insisté l’oratrice. Elle a aussi souhaité que les ressources financières et autres, destinées à la société civile et au public en général, prennent en compte la question du handicap. L’intégration du handicap exige des efforts particuliers pour faire en sorte que les personnes handicapées participent, à tous les niveaux, au processus de prise de décisions.
À son tour, Mme VENUS ILAGAN, Chargée des relations internationales au Conseil mondial des personnes handicapées, a rappelé que son action en faveur des personnes handicapées aux Philippines a commencé en 1994, à une époque où le Gouvernement n’était pas conscient de ces problèmes. Avec le Danemark, a-t-elle dit, nous avons alors commencé à mettre en œuvre un programme de réinsertion des enfants avant que le Gouvernement ne propose ensuite de traiter la question de façon générale, en allouant les ressources nécessaires. Quelque 8 200 enfants philippins frappés d’un handicap léger ont pu ainsi être scolarisés. Le Gouvernement philippin, qui s’est rendu compte des avantages de telles mesures, est maintenant prêt à investir dans ce domaine. Toute personne handicapée, a démontré Mme Ilagan, doit saisir l’occasion de mettre le doigt sur les problèmes et de faire prendre conscience aux fonctionnaires des actions à mener. Il y a des possibilités d’action et il faut les connaître, a-t-elle insisté. Pour que les actions soient plus efficaces, il faut travailler en priorité avec les gouvernements locaux voire avec les collectivités locales, avant de rechercher des financements aux niveaux national et international. « N’oubliez jamais de remercier les gouvernements. Identifiez des interlocuteurs privilégiés et multipliez vos alliés », a conclu l’oratrice.
Dans une autre intervention liminaire, Mme CHARLOTTE McCLAIN NHLAPO, Représentante de la Banque mondiale, a estimé qu’il fallait reconnaître que les personnes handicapées avaient les mêmes aspirations et droits que les autres et que l’élimination des barrières à leur participation améliorerait non seulement leur vie mais aussi celle de la société en général. Pour assurer que les efforts de développement bénéficient à tous, elle a affirmé qu’il fallait identifier les obstacles à cette participation, assurer la fourniture de programmes efficaces et établir des mécanismes de suivi et d’évaluation. Les politiques publiques doivent intégrer les dispositions de la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées, a-t-elle argué. Elle a notamment insisté sur la nécessité de modifier les cadres juridiques et réglementaires pour que l’égalité des chances devienne réalité. Les États doivent mettre en place des politiques et des institutions efficaces qui peuvent appliquer les dispositions de la Convention.
La représentante a toutefois rappelé qu’il n’existait pas un modèle unique et que chaque État devait avoir un espace discrétionnaire pour évaluer les lois et les mesures politiques qui lui conviennent le mieux. Les mesures doivent bénéficier de ressources adéquates, un cadre d’expertise technique doit être mis en place et des partenariats avec la société civile et les donateurs doivent être développés. Ces derniers doivent améliorer leur coordination, impliquer les personnes handicapées dans leur processus de prise de décisions et intégrer la question du handicap aux projets mis en place, a ajouté la représentante. La Convention des Nations Unies offre une occasion d’unir les efforts de tous les acteurs en faveur des personnes handicapées, a-t-elle conclu.
Pour sa part, Mme BARBARA MURRAY, Responsable de l’emploi et de la formation à l’Organisation internationale du Travail (OIT), a considéré que la question des conditions de travail décentes ne relève pas uniquement des gouvernements, mais aussi des employeurs, des syndicats et de la société tout entière. Selon le type de handicap et le lieu de vie, la possibilité d’être employée est différente, a-t-elle relevé. Elle a aussi noté que les personnes handicapées ont plus de chances d’être pauvres, ce qui limite d’autant plus leurs perspectives de trouver un emploi rémunéré. Les personnes handicapées se trouvent aussi parfois limitées par des dispositions juridiques même s’il faut reconnaître qu’il y a de plus en plus de lois antidiscrimination prévoyant, par exemple, des quotas pour les personnes handicapées sur le lieu de travail. La représentante s’est dite encouragée par les efforts de gouvernements qui mettent en place ce type de législation, en citant les exemples de la Tanzanie et de la Zambie. Mais dans de nombreux pays d’Asie où la loi limite à sept heures par jour, le temps de travail des personnes handicapées, certains employeurs hésitent à les embaucher. Elle a aussi dénoncé le cas de l’Éthiopie où les personnes handicapées ne peuvent pas entrer dans la fonction publique.
Même quand elles font de longues études, les personnes handicapées ne sont pas bien placées sur le marché du travail. D’ailleurs dans certains pays, des services spéciaux sont mis en place pour les aider dans leurs démarches. Il est très important que les États mettent en œuvre des mesures de lutte contre les stéréotypes et les clichés, a-t-elle souligné, en rappelant que le travail décent est un facteur clef de l’intégration des personnes handicapées.
Intervenant à son tour, M. RONALD WIMAN, Conseiller en développement social du Ministère des affaires étrangères de la Finlande, s’est félicité que la Convention des Nations Unies s’appuie sur une approche basée sur les droits des personnes handicapées. Rappelant que les droits de l’homme étaient indivisibles, il a souligné la nécessité d’intégrer le handicap à tous les secteurs et d’adopter une approche systémique et non discriminatoire. S’agissant de son propre pays, il a mis en lumière la nouvelle politique de coopération pour le développement. La Finlande, a-t-il expliqué, s’appuie sur le concept de développement durable et défend une approche globale dans sa politique de coopération internationale qui met l’accent sur les partenariats entre secteur public et secteur privé. La Finlande a une triple approche qui consiste à intégrer le handicap, à appuyer les dispositions existantes en faveur des personnes handicapées et à les autonomiser davantage en tant que groupe. Le Conseiller a précisé que 5% de l’aide publique au développement (APD) était destinée aux personnes handicapées. Pour illustrer ses propos, il a indiqué que son pays avait notamment pris des initiatives inclusives dans le domaine de l’éducation en Afrique du Sud et en Éthiopie ou encore qu’il avait créé un partenariat mondial sur le handicap et le développement avec la Banque mondiale, l’Italie et la Norvège, entre autres.
Le Conseiller a estimé que pour réaliser une « société pour tous », il fallait envisager les personnes handicapées non pas comme des bénéficiaires des politiques mais comme des agents contribuant à l’élaboration de ces politiques. Il a aussi estimé que des outils devaient être mis en place pour la planification et la budgétisation des actions visant à intégrer les personnes handicapées à tous les secteurs d’activités. La budgétisation doit être considérée comme une partie normale et nécessaire de l’égalité des chances et du développement humain, a-t-il affirmé, en insistant sur l’importance des partenariats pour parvenir à cet objectif.
Dans les échanges qui ont suivi ces présentations, certains délégués ont exposé les mesures prises par leurs gouvernements pour améliorer la situation des personnes handicapées et adressé des questions aux panelistes portant essentiellement sur l’efficacité de ces efforts pratiques. Rappelant que son pays a éradiqué la poliomyélite, la représentante de l’Égypte a souligné le lien entre pauvreté et handicap pour dire que dans son pays, de nombreuses petites entreprises donnent un travail décent aux handicapés.
De son côté, la représentante d’Haïti, qui a demandé des précisions sur la procédure à suivre pour renforcer les capacités nationales, a expliqué que son pays fait beaucoup d’efforts en faveur des handicapés, notamment par le biais de son Conseil national de réhabilitation des personnes handicapées. Depuis 2004, cette institution a recommencé à fonctionner et le Gouvernement poursuit les objectifs visant à améliorer les conditions de vie des personnes handicapées, à élaborer une politique nationale d’intégration, à sensibiliser les opinions publiques nationale et internationale et à mettre en place un cadre juridique de protection des personnes handicapées. De même, le représentant de l’Indonésie a indiqué que son ministère des affaires sociales a fourni une aide à vie aux personnes ayant des retards mentaux très graves ou souffrant de paralysie. Nous avons aussi intégré les objectifs de la Décennie des personnes handicapées d’Asie du Sud et menons des actions en matière de communication, de formation et d’emploi. Il s’est cependant demandé comment combler l’écart entre les politiques et les mesures pratiques.
Comment obtenir une optique plus pratique, a renchéri la représentante des Philippines, en soulignant les difficultés qu’éprouvent les gouvernements à réaliser les OMD. Comment les organisations qui agissent en faveur des personnes handicapées prennent en compte la question du vieillissement, a demandé, pour sa part, le représentant du Brésil. Au nom de l’Union européenne, son homologue de la Slovénie, a voulu savoir comment on pouvait relier les trois instruments pertinents des Nations Unies afin d’améliorer leur synergie. Quelles sont les possibilités de politique globale pour relever les défis dans le domaine de l’intégration des personnes handicapées, notamment pour relever leur niveau de vie? Il s’est aussi interrogé sur la façon d’encourager un échange permanent de vues entre les personnes handicapées, les gouvernements, la société civile et les partenaires sociaux.
Répondant aux questions posées, la Directrice exécutive de l’Institut interaméricain sur les handicaps et le développement inclusif a considéré qu’il fallait mener des actions au niveau macroéconomique pour réduire les barrières qui empêchent les personnes handicapées de jouir de leurs droits. Si nous estimons qu’une mère qui a un enfant handicapé ne remplit pas les conditions pour recevoir une aide financière, parce que le handicap n’est pas assez lourd par exemple, nous lui imposons alors une pénalité supplémentaire. Il faut donc d’abord supprimer les barrières qui existent dans nos sociétés, ce qui est plus facile que de donner réparation aux personnes.
Débat général
M. RUDIGER URECH (Allemagne) a estimé que la Convention sur les droits des personnes handicapées est non seulement un instrument des droits de l’homme mais un véritable outil pour le développement parce qu’elle prévoit les domaines dans lesquels s’appliquent les droits en question à savoir, l’éducation, l’emploi, la protection sociale, la santé ou encore la réhabilitation. Il a relevé que l’article 32 de la Convention, relatif à la coopération internationale, se concentre sur quatre piliers et appelle à la coopération entre toutes les parties prenantes. En décembre 2006, l’Allemagne a publié un document qui engage à la coopération entre les ministères et la société civile, a-t-il indiqué. L’Allemagne, le Chili et l’ex-République yougoslave de Macédoine ont déjà conclu un accord dans le domaine de l’éducation et de la mise en œuvre de la Convention. Aujourd’hui, a-t-il dit, la situation se caractérise par le fait que la majorité des enfants handicapés est toujours exclue de l’éducation. Les adultes handicapés ont trop peu accès au travail décent et la plupart des familles qui prennent en charge des personnes handicapées n’ont pas les moyens de s’offrir les soins de santé nécessaires, a ajouté le représentant.
M. URSÍĆ (Slovénie), au nom de l’Union européenne, a rappelé les règles européennes relatives à l’accessibilité des personnes handicapées, qui sont entrées en vigueur en 2000. L’intégration et la protection sociales forment aussi un domaine d’action de l’Union européenne. Le représentant a cité le Plan d’action européen sur le handicap pour la période 2004-2010 qui représente à son avis une démarche viable. Jugeant essentielle la question de l’emploi des personnes handicapées, il a attiré l’attention sur la Stratégie de Lisbonne. Il a aussi parlé d’un projet de forum sur le handicap mené dans 10 États membres de l’Union européenne. L’analyse des rapports nationaux montre que l’intégration du handicap connait des succès et que les lois européennes ont conduit à des progrès. Mais il est aussi important d’intégrer la question du handicap dans les politiques de développement et renforcer la cohérence des mécanismes en faveur des personnes handicapées.
M. JORGE ARGÜELLO (Argentine), qui prenait la parole au nom des États membres du MERCOSUR, a insisté sur le lien entre pauvreté et handicap, alors que 80% des handicapés vivent dans les pays en développement. Il a affirmé qu’il fallait donc adopter une approche basée sur les droits, tel qu’établi dans la Convention des Nations Unies qui est, selon lui, à la fois un instrument de droits de l’homme et un outil de développement. Il a rappelé que l’intégration des personnes handicapées aux activités de développement était essentielle pour réaliser les objectifs internationaux dans ce domaine. Il est de plus en plus reconnu que les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) ne seront pas atteints si la question du handicap n’y est pas intégrée, a-t-il poursuivi. Il a affirmé que la Convention fournissait des directives pour intégrer la question des handicapés aux programmes et stratégies de développement et reconnaissait l’importance d’une coopération internationale inclusive pour améliorer les conditions de vie des personnes handicapées dans tous les pays.
Le représentant a fait valoir que les gouvernements de sa région étaient engagés en faveur de la création de sociétés inclusives, tout en reconnaissant le rôle essentiel de l’État pour répondre aux situations d’exclusion. Il a particulièrement insisté sur la nécessité de faire du plein-emploi et du travail décent une réalité pour tous, y compris pour les personnes handicapées et a souligné que cette session offrait une occasion unique à cet égard. Saluant les efforts effectués dans ce domaine par le système des Nations Unies mais aussi par les États et les associations, il a toutefois estimé que ceux-ci devaient être renforcés pour intégrer la question des handicapés. Il a déclaré qu’il fallait prendre des mesures urgentes dans ce domaine, à la fois aux niveaux national et international. Nos sociétés ne se développeront que si nous ne laissons personne à la traîne, a-t-il conclu, en notant la riche contribution que peut apporter chaque citoyen, qu’il soit handicapé ou pas.
Mme LUCIA GAVRILITA (République de Moldova) a indiqué que le Ministère de la protection sociale, de la famille et de l’enfant avait été établi en février 2007 afin de mettre en place les réformes nécessaires et renforcer l’efficacité des programmes d’assistance sociale. Elle a expliqué que depuis sa création, le Ministère avait déjà mis en œuvre plusieurs réformes et signé la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées. Elle a constaté que dans son pays les handicapés représentaient 4,9% de la population, un chiffre similaire à la moyenne européenne, et que plus de la moitié des handicapés avaient plus de 50 ans. Elle a fait valoir que son gouvernement avait mis en place des subventions pour les personnes handicapées mais a admis que l’accès aux structures d’enseignement était encore limité, diminuant les chances de ce groupe.
De même, elle a estimé que la politique d’intégration des personnes handicapées au marché du travail manquait de cohérence. Outre une amélioration dans ces deux domaines, elle a indiqué que son pays s’attachait désormais à améliorer les services sociaux et l’intervention précoce en faveur des handicapés. Le développement des services sociaux visera à compléter les subventions financières et rendre les personnes handicapées plus actives dans la société, a-t-elle annoncé. De plus, elle a dit qu’il fallait adapter les édifices et transports publics afin de les rendre accessibles à tous. Enfin, elle a insisté sur la nécessité d’impliquer tous les acteurs sociaux dans cette réforme, les autorités nationales et locales, les organisations internationales et non gouvernementales, le secteur privé et les associations des personnes handicapées.
M. QUINTANILLA ROMÁN (Cuba) a souligné que l’intégration du handicap dans l’Agenda pour le développement avait été prise en compte depuis 1959. En dépit de l’embargo imposé par les États-Unis, Cuba privilégie un accès universel et gratuit aux services sociaux de base pour tous. Cuba considère les personnes handicapées non pas comme des récipiendaires de programmes mais des protagonistes dans l’élaboration de ces programmes. Cuba a été l’un des premiers pays à ratifier la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées, a encore indiqué le représentant. Il a insisté sur la cohérence établie entre les efforts de tous les acteurs grâce à un Plan national qui vise à donner des chances égales à tous. Le plan porte aussi sur la coordination des activités notamment dans le domaine de l’emploi, de la santé et l’éducation mais aussi des technologies de l’information. Il a souligné qu’un Conseil national surveillait l’évolution de ce plan qui avait entre autres permis de faire entrer plus de 26 000 personnes handicapées dans le marché du travail. Il a aussi noté que son pays s’employait à améliorer les conditions de vie des handicapés notamment par des efforts dans les secteurs de la culture et des sports. Cuba est un exemple de ce que l’on peut faire avec peu de ressources mais une grande volonté politique, a-t-il déclaré, en promettant que son gouvernement continuera à mettre en œuvre des mécanismes en faveur des personnes handicapées.
M. CARLOS SUÁREZ (Colombie) a jugé essentiel d’intégrer la perspective du handicap dans le programme de développement social. En 2004, le Conseil national de développement a adopté une politique du handicap, qui prévoit des mesures de prévention et de réhabilitation. Une loi adoptée en 2007 a organisé le système national du handicap et a établi un service public en faveur des personnes handicapées. Le Ministère de la protection sociale gère ce système et met en œuvre les politiques de façon transversale, a expliqué le représentant. L’objectif est de donner aux personnes handicapées un environnement propice à leur développement. Il est notamment prévu d’améliorer les services de réinsertion sociale et on s’attache aussi à faire tomber les barrières que les personnes handicapées trouvent encore sur leur chemin, a-t-il indiqué. Il a aussi jugé nécessaire d’intégrer le handicap dans les politiques de lutte contre la pauvreté, a ajouté le représentant, avant d’appeler à la coopération internationale pour renforcer les capacités nationales dans les actions en faveur des personnes handicapées.
M. DONGHO KIM (République de Corée) a estimé que l’intégration de la question des personnes handicapées passe par leur participation au processus de prise de décisions. Une perspective inclusive doit être adoptée dans l’élaboration des politiques et l’allocation des ressources à l’Agenda pour le développement, a-t-il ajouté. Il a aussi affirmé que l’intégration de la question du handicap nécessitait une modification de la culture et des structures sociales afin qu’elles soient plus inclusives et accessibles aux personnes handicapées. Soulignant le lien entre pauvreté et handicap, il a affirmé que chaque OMD devrait porter une attention particulière à la question des personnes handicapées, si l’on souhaite atteindre ces Objectifs. Le représentant a par ailleurs fait part des efforts de son gouvernement pour intégrer la question des personnes handicapées à l’Agenda pour le développement. Il a fait valoir que les cadres juridique et institutionnel avaient été améliorés pour assurer la participation des personnes handicapées. Il a aussi noté que des personnes handicapées et des représentants d’organisations gouvernementales et non gouvernementales effectuaient une évaluation de l’accessibilité dans plusieurs domaines dont ceux de la santé, de l’information ou de l’hôtellerie. Il a enfin insisté sur l’importance d’accroître la sensibilisation du public, affirmant qu’il s’agissait là d’un des facteurs les plus importants pour lever les obstacles à l’égalité des chances. Selon lui, le but ultime de toutes politiques et stratégies en faveur des personnes handicapées est que ce groupe participe à la vie de la société en tant que membre à part entière.
Mme AMALIA GAMIOS RIOS (Mexique) a énuméré un certain nombre de points fondamentaux dans l’intégration des personnes handicapées. Elle a ainsi appelé à la promotion du travail digne pour ces personnes, en gardant à l’esprit qu’il leur faut des postes spécifiques. Elle a reconnu que très souvent, ce sont les gouvernements eux-mêmes qui n’embauchent pas les personnes handicapées aux postes de fonctionnaires. Elle a donc appelé à l’allocation de ressources supplémentaires dans les ministères pour les programmes en faveur des personnes handicapées. Il faut que l’on impose une perspective des droits de la personne et qu’on interdise la discrimination. Mme Gamios Rios a aussi voulu, dans le cadre de l’OMD relatif à la lutte contre le sida, que l’on prenne en compte la question des personnes handicapées. Il faut que les gouvernements mettent en place des réseaux dans la société civile, a-t-elle poursuivi. Elle a aussi souligné l’importance qu’il y a à collecter les données et à recourir aux statistiques. Il faut non seulement mener des initiatives au niveau national mais aussi établir des plans de financement locaux. Elle a conclu en encourageant les États qui ne l’ont pas encore fait à signer et à ratifier la Convention sur les droits des personnes handicapées.
Mme BARBARA MURRAY, Organisation internationale du Travail (OIT), a indiqué que l’OIT faisait depuis longtemps la promotion de l’employabilité des personnes handicapées. Elle a précisé qu’une des Convention de l’OIT contenait les éléments clefs d’une approche basée sur les droits, dont l’égalité des chances, l’égalité dans le traitement et la non-discrimination. Par ailleurs, elle a noté que le Code de conduite sur la gestion du handicap sur le lieu de travail de 2001 fournissait une série de directives pertinentes. Elle a également fait valoir que l’OIT encourageait la prise en compte de la perspective du handicap dans toutes ces activités liées à l’emploi, notamment dans ces programmes pour le travail décent au niveau des pays.
Exposé sur le thème « Plein emploi et travail décent: intensification de l’action menée pour éliminer toutes les formes de violence contre les femmes »
Mme MANUELA TOMEI, Directrice de la branche « Conditions de travail » de l’OIT, a rappelé qu’un travail décent est celui qui s’accomplit dans des conditions de liberté, sans discrimination, avec la liberté d’adhérer à des organisations de son choix, dans la sécurité et la dignité. L’article 1er de la Convention 111 de l’OIT définit la discrimination comme une distinction faite sur la base de certains critères avec pour effet d’entraver l’égalité de traitement dans l’emploi. Il doit donc y avoir un acte d’inégalité qui repose sur les caractéristiques d’une personne, telles que le sexe, la religion, la couleur de la peau, et qui n’a aucun rapport avec les compétences de la personne.
Cette discrimination a eu pour conséquence de limiter le nombre de femmes dans le travail, a expliqué Mme Tomei, en poussant ainsi certaines d’entre elles à occuper plutôt un emploi qu’un autre et à se contenter d’un salaire inférieur et d’une plus grande précarité. Les femmes sont aussi placées dans des situations défavorisées de subordination tout comme elles subissent souvent la violence sur leur lieu de travail. Le coût de cette discrimination se traduit d’abord par des souffrances émotionnelles et psychologiques. Elle entraine aussi un gaspillage des compétences des femmes et une perte de productivité dans le travail. La discrimination limite donc la croissance économique et sape les efforts de réduction de la pauvreté, a démontré Mme Tomei.
Les progrès, a-t-elle poursuivi, ont commencé dans le domaine de l’éducation. On note moins d’écart entre les hommes et les femmes et on constate même que, dans la plupart des régions, ces dernières sont plus nombreuses à l’université. Le nombre de femmes qui entrent sur le marché du travail augmente également dans la plupart des pays, a-t-elle aussi relevé, en reconnaissant que davantage de femmes occupent des postes élevés même si elles constituent toujours une minorité. En 10 ans, la proportion de ces femmes a doublé.
Alors parmi les défis qui restent à relever, la représentante de l’OIT a cité le fait que trop de femmes travaillent encore sans salaire. En 2006, c’était le cas de 38,6% des femmes dans la région Asie-Pacifique et le temps que les femmes passent dans un travail rémunéré dépend aussi beaucoup du temps qu’elles consacrent au travail non rémunéré. La spécialiste de l’OIT a cité le cas de la Bolivie où le total d’heures travaillées, rémunérées ou non, est de 61 heures par semaine pour les femmes et seulement de 51 heures pour les hommes. Au Ghana, ce ratio est de 88,7 heures pour 57,6 heures, tandis qu’aux Philippines, ce sont 94,5 heures travaillées pour les femmes et 79,8 pour les hommes. Mme Tomei a aussi précisé que les femmes sont surreprésentées dans le secteur informel et qu’elles continuent à gagner en moyenne moins que les hommes pour des emplois équivalents.
La discrimination basée sur le sexe persiste donc dans le monde contemporain, a constaté Mme Tomei, en soulignant qu’elle s’applique au niveau de l’embauche, notamment dans les cas de maternités et de grossesse, et au niveau de la rémunération. L’inégalité se révèle aussi dans la division du travail, avec ou sans salaire, entre les hommes et les femmes, celles-ci étant souvent les seules à élever les enfants. Mme Tomei a aussi parlé du harcèlement sexuel sur le lieu de travail, conséquence également de la discrimination. Les comportements fondés sur le sexe peuvent être physiques ou verbaux, mais aussi non verbaux comme les non-dits. C’est un phénomène universel mais son incidence varie selon les métiers et les lieux de travail. Mme Tomei a cité le cas des employées de maison étrangères qui sont très exposées. Ce phénomène touche davantage les femmes jeunes et les immigrées donc les plus vulnérables.
Tous ces phénomènes sont liés les uns aux autres, a conclu Mme Tomei, en soulignant l’importance des statistiques pour surveiller les tendances et déterminer les politiques à mener. Récemment, on a constaté une amélioration de la nature des lois de lutte contre la discrimination qui sont plus proactives et assorties d’incitations autant que de sanctions. Mais il faut aussi que les lois soient appliquées et que l’accès à la justice s’améliore. Il faut lutter contre la discrimination dans les métiers et dans la rémunération. Il faut lutter contre la répartition inégale entre le travail avec salaire et le travail sans, grâce à des systèmes de garde d’enfants et à des congés maternité et paternité. Enfin, a conclu la spécialiste de l’OIT, il faut que le harcèlement sexuel soit combattu à tous les niveaux par des lois, des codes de conduite, des comités sur les lieux de travail, des campagnes de sensibilisation et une formation aux techniques de prévention.
Dialogue interactif
Lors de l’échange qui a suivi cette présentation, la représentante de la Slovénie, au nom de l’Union européenne, a estimé qu’il fallait encore améliorer la participation des femmes aux emplois productifs afin de les autonomiser. Elle s’est ainsi interrogée sur les nouvelles mesures à prendre pour que les hommes participent à la lutte contre la discrimination. En réponse, la spécialiste de l’OIT a cité le cas du Japon, rappelant que le vieillissement de la population y avait changé la tradition selon laquelle les femmes s’occupent de soigner leurs parents âgés. En raison des changements démographiques, les hommes et les femmes ont dû réfléchir aux moyens de concilier travail rémunéré et responsabilité face aux parents vieillissants, a-t-elle indiqué. Elle a estimé que cette transformation sera propice à la promotion de la femme.
Sur la question des salaires, également soulevée par la Slovénie, elle a affirmé que les réponses à donner au problème des écarts de salaire variaient d’un pays à l’autre et qu’il n’était pas possible de promouvoir un seul modèle. Dans les pays où cet écart est dû au fait que les femmes sont concentrées dans des emplois faiblement rémunérés, le salaire minimum est un outil puissant, a-t-elle par exemple expliqué. En ce qui concerne l’absence de données statistiques, elle a aussi indiqué que les Nations Unies essayaient d’assurer une certaine harmonisation entre les pays dans ce domaine mais que beaucoup restait à faire, notamment pour les données sur les salaires qui ne sont pas toujours rendues publiques.
La représentante de la Jamaïque a voulu savoir si des études avaient été faites sur une tendance visible dans les Caraïbes, celle qui indique que la violence surtout domestique augmente quand s’améliorent les conditions de vie de la femme. La violence contre les femmes concerne toutes les couches et classes de la société, a admis la représentante de l’OIT. Elle a toutefois argué que l’autonomisation des femmes améliorait souvent leur pouvoir au sein de la famille même s’il pouvait y avoir une réaction négative à ce nouveau statut.
Interrogée sur le manque de correspondance entre le succès des femmes à l’université et leur taux de chômage, phénomène également visible en Jamaïque, la spécialiste de l’OIT a qualifié cette situation d’alarmante. C’est un échec clair des politiques dans ce secteur, a-t-elle déclaré, en notant que les investissements dans les ressources humaines ne portaient pas leurs fruits. Parmi les raisons, elle a cité la discrimination, notamment devant la maternité ou la grossesse.
Sur la question de l’absentéisme des femmes dû à la violence, laquelle question a été soulevée par le représentant des Pays-Bas, la spécialiste de l’OIT a reconnu que les femmes qui ont un enfant de moins de deux ans étaient plus souvent absentes que les hommes qui ont un enfant du même âge. Elle a tout de même dit savoir que le harcèlement sexuel semblait être un facteur très important d’absentéisme. Sur la question de la protection des employés domestiques migrants, sujet abordé par le représentant de l’Indonésie, elle a invoqué les différentes initiatives de l’OIT dans ce domaine, dont les programmes d’information et les projets visant à diversifier leurs possibilités d’emploi.
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