LES EXPERTS DU CEDAW S’INQUIÈTENT DES FREINS OPPOSÉS PAR LA COUTUME AUX PROGRÈS NOTABLES DE LA TANZANIE EN MATIÈRE DE PROMOTION DE LA FEMME
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Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
Quarante et unième session
845e & 846e séances – matin & après-midi
LES EXPERTS DU CEDAW S’INQUIÈTENT DES FREINS OPPOSÉS PAR LA COUTUME AUX PROGRÈS NOTABLES DE LA TANZANIE EN MATIÈRE DE PROMOTION DE LA FEMME
La délégation souligne que la pauvreté et l’analphabétisme constituent des obstacles à la promotion des femmes
Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (Comité CEDAW) a poursuivi, aujourd’hui, ses travaux en examinant les quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques de la République-Unie de Tanzanie rassemblés dans un document unique daté du 16 avril 2007. Avec 38 millions d’habitants et 26 régions administratives, dont cinq pour l’Île de Zanzibar, la République-Unie de Tanzanie fait partie des trois pays à avoir atteint les objectifs de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) visant 30% de femmes parlementaires, puisque 98 des 321 parlementaires sont des femmes.
Conduisant une délégation composée d’une dizaine de personnes dont la Ministre du travail, de la jeunesse, de l’emploi, du développement des femmes et des enfants de Zanzibar, Mme Margaret Simwanza, Ministre pour le développement communautaire, les affaires humanitaires et l’enfance de la République-Unie de Tanzanie a décrit des progrès notables dans la mise en œuvre de la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes avec le quatorzième amendement de la Constitution de 2005, et la promulgation, depuis 2000, de nouveaux textes de loi et programmes de promotion de la parité. Parmi ces mesures novatrices, elle a cité la loi de 2001 de lutte contre les violences à l’égard des femmes, celle de 2004 sur la propriété foncière, ou encore le Plan stratégique 2006-2010 pour la réduction de la mortalité infantile et de nouveau-nés. Elle a aussi indiqué que le nombre des filles scolarisées est passé de 48 106 à 212 909 entre 2003 et 2007.
Par ailleurs, la Ministre a salué la définition, en 2000, de la Vision du développement national à l’horizon 2025, qui prévoit, entre autres, que la Tanzanie doit garantir la réalisation de l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes dans les domaines social, économique et politique ainsi que sur le plan culturel d’ici à 2025.
Tout en prenant note des progrès notables réalisés par la Tanzanie, plusieurs expertes se sont inquiétées du poids de la coutume, en notant la présence de 120 groupes ethniques dont les cultures et traditions ont un impact considérable sur les relations entre les hommes et les femmes dans le pays. Elles se sont inquiétées de la persistance de pratiques traditionnelles qui sapent les progrès vers la parité entre les sexes, en faisant observer que 300 à 400 femmes sont tuées chaque année au cours de violences conjugales et que 7 300 viols ne font l’objet que de « règlements extrajudiciaires ».
Répondant à une question de l’experte du Portugal sur les efforts permettant de modifier les comportements marqués par des pratiques traditionnelles, une représentante de la délégation a rappelé que la moitié de la population de la Tanzanie était musulmane et que, conformément à l’islam, les hommes pouvaient épouser jusqu’à quatre femmes. De son côté, l’experte de l’Algérie a dénoncé l’atteinte grave que constituait l’interdiction faite aux femmes de transmettre la nationalité tanzanienne à leurs enfants si elles étaient mariées à des étrangers.
Une autre représentante de la délégation a souhaité que l’on n’oublie pas l’impact de l’analphabétisme et de la pauvreté sur les efforts de promotion de la femme. « Comment une femme analphabète peut accuser ou faire emprisonner son mari, si elle n’a aucun moyen de subvenir à ses besoins », a-t-elle demandé, en rappelant que 35% de la population vivait au-dessous du seuil national de pauvreté. Plusieurs expertes ont rappelé l’importance des lois pour changer les comportements les plus discriminatoires ».
Dans ses remarques de clôture, la Chef de la délégation tanzanienne a remercié les experts du Comité CEDAW pour les conseils précieux qu’ils ont prodigués en assurant que le prochain examen sera l’occasion de saluer des progrès significatifs de son pays. De son côté, la Présidente du Comité et experte de la Croatie, Mme Dubravka Šimonović, a particulièrement insisté sur l’importance d’incorporer la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dans la législation tanzanienne, en rappelant que seule l’application contraignante de cette Convention dans son ensemble pourra mettre un terme aux dernières discriminations qui subsistent.
Le Comité poursuivra ses travaux en séance publique, lundi 14 juillet par l’examen des deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques de la Slovaquie*.
* Les rapports peuvent être consultés sur le site Internet suivant: http://www2.ohchr.org/english/bodies/cedaw.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES: RAPPORT DU GROUPE DE TRAVAIL DE PRÉSESSION
Examen des quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques combinés de la République-Unie de Tanzanie (CEDAW/C/TZA/6)
Présentation par la représentante de l’État partie
Présentant le rapport de la République-Unie de Tanzanie, Mme MARGARET SIMWANZA, Ministre pour le développement communautaire, les affaires féminines et l’enfance, a précisé que ce rapport était le fruit d’une consultation entre toutes les institutions concernées mais aussi entre les organismes étatiques et non étatiques. Elle a signalé des progrès notables depuis l’amendement de la Constitution de 2005, la promulgation de nouveaux textes de loi et l’élaboration de programmes dans une perspective de parité. Malgré une situation qui voit toujours une prédominance des hommes, la situation s’est nettement améliorée, a-t-elle insisté.
Elle a précisé que les 14 amendements constitutionnels de la Tanzanie, notamment le paragraphe 12 de l’article 5, ont permis de garantir l’égalité entre les hommes et les femmes tout en augmentant le nombre de sièges réservés pour les femmes au Parlement qui est passé de 47 à 75 sièges pour représenter au moins 30% des sièges. Suite aux élections de 2005, il y a 98 femmes parmi 321 députés, dont 17 élues dans des circonscriptions, 4 désignées par le Président de la République, 2 pour Zanzibar et 75 au titre des sièges spéciaux.
Comme en attestent des données de l’Union interparlementaire de juillet 2006, la Tanzanie fait partie des trois premiers pays à avoir atteint les objectifs de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) visant à atteindre 30% de femmes parmi les parlementaires. Elle a cité la loi noº10 de 2005 sur les municipalités de Zanzibar qui a permis d’accroître la proportion de femmes siégeant au Conseil municipal de 10% à 30%
En 2008, il y a 6 femmes sur 27 ministres et 8 femmes parmi 30 vice-ministres, a-t-elle précisé. Le Gouvernement, a-t-elle ajouté, s’est fixé pour objectif de réaliser en 2025 l’égalité et l’autonomie totale des femmes. Elle a expliqué que le Gouvernement avait mis en place des lois interdisant les discriminations des femmes dans le domaine de l’emploi et d’autres secteurs. Elle a souligné l’importance de la Commission pour les droits de l’homme et de la bonne gouvernance ainsi que de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) qui ont mené une campagne de sensibilisation sur les droits des femmes.
Par ailleurs, la Ministre a noté la faible proportion de femmes parmi les juges, notamment dans les zones rurales. Elle a cité un projet de réforme gouvernemental qui comprend des projets de loi devant autoriser les femmes à hériter de terres ou autre forme de propriété.
Elle a mis l’accent sur les efforts du Gouvernement pour lutter contre la traite en renforçant les capacités nationales et l’appui aux ONG qui assistent les victimes.
En 2001, a indiqué Mme Simwanza, le Gouvernement a déclaré que le VIH était une catastrophe nationale qui nécessitait des efforts concertés. Elle a cité une loi de 2008 visant à lutter contre la stigmatisation des victimes et qui a fait de la transmission délibérée du VIH/sida un délit. Elle a indiqué que le 14 juillet 2007, le Président de la République-Unie de Tanzanie, M. Jakaya Mrisho Kikwete, a pris l’initiative de faire un test public de VIH/sida pour encourager le grand public à en faire autant.
La Ministre a également souligné les efforts pour freiner la mortalité maternelle par la mise en place d’une formation pour les sages-femmes traditionnelles et l’augmentation de la disponibilité des services obstétriques d’urgence. Elle a également cité l’adoption d’un Plan stratégique (2006-2010) pour la réduction de la mortalité infantile et de nouveau-nés. Mme Simwanza a cité des résultats impressionnants de l’éducation primaire et secondaire en précisant que le nombre de filles scolarisées était passé de 48 106 en 2003 à 212 909 en 2007. Elle a précisé que l’égalité des sexes a pu être atteinte dans les écoles primaires grâce à un programme qui vise à ce que les enfants de familles défavorisées aient accès à l’école secondaire.
Elle a souligné les progrès accomplis à Zanzibar en précisant que dans le cadre de la loi sur le célibat de 2005, les filles peuvent poursuivre leurs études après un accouchement. Malgré une loi de 1979 précisée par une circulaire ministérielle de 2002, il est difficile d’en finir avec les châtiments corporels en raison de pratiques culturelles et croyances traditionnelles ou religieuses, a-t-elle fait remarquer. Elle a reconnu que les violences physiques et sexuelles, la pratique de menaces et intimidations, ainsi que les privations économiques continuaient d’être un problème. C’est dans ce contexte que le Gouvernement a élaboré en 2001 un Plan national d’action pour lutter contre la violence à l’égard des femmes en se concentrant sur la prise de conscience aux niveaux juridique, social et économique.
La Ministre a indiqué aussi que la Commission des droits de l’homme et de la bonne gouvernance, dans le cadre de ses fonctions d’enquête, est venue compléter les efforts du Gouvernement contre les violences à l’encontre des femmes. Elle a précisé qu’en date du 24 mai 2008, le Président de la République a lancé une Campagne nationale intitulée « Dites non à la violence contre les femmes » en réponse à l’appel lancé par le Secrétaire général des Nations Unies pour une action mondiale afin de mettre fin aux violences à l’encontre des femmes.
Questions portant sur les articles 1 à 6
Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a demandé si l’amendement à la Constitution tanzanienne qui inclut la dimension sexospécifique et une définition de la discrimination porte à la fois sur la discrimination directe et indirecte, intentionnelle et non intentionnelle. Elle s’est félicitée de ce que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a été traduite en swahili et a demandé s’il en a été de même pour le Protocole facultatif. Rappelant les recommandations précédentes du Comité concernant des changements dans les lois sur le mariage, l’héritage ou les enfants, elle a demandé des précisions sur l’échéancier prévu pour deux lois qui doivent être adoptées sur la base de ces recommandations. Elle a observé que la polygamie ne sera pas incriminée.
Mme YOKO HAYASHI, experte du Japon, a demandé d’indiquer les voies de recours dont disposent les femmes victimes de discrimination. Peuvent-elles contester la validité des lois qui sont en contradiction avec la Convention? Existe-t-il des mesures pénales ou administratives applicables par les tribunaux ou institutions chargées des droits de l’homme?
Rappelant qu’en 1998, le Comité avait félicité la Tanzanie pour son intention de créer une cour constitutionnelle chargée de veiller à la défense des droits de l’homme, M. CORNERLIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, a demandé si une telle cour a été créée. Si oui, que fait-elle pour les droits des femmes?
Tout en reconnaissant que de nombreux progrès ont été réalisés, Mme VIOLETA NEUBAUER, experte de la Slovénie, s’est inquiétée de la réalité de la volonté politique nécessaire pour traduire les obligations politiques issues de la Convention dans la vie pratique. Quels sont les mécanismes de surveillance qui ont été mis en place pour agir à tous les niveaux et dans tous les secteurs pour appliquer la Convention? Y a-t-il des bureaux régionaux, des centres pour les femmes en zones rurales?
Tout en notant qu’il n’est effectivement pas obligatoire pour un pays de présenter à son Parlement des rapports au Comité CEDAW, la Présidente du Comité et experte de la Croatie, Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIĆ, a estimé qu’il était bon d’associer le plus grand nombre de personnes à la préparation de ces rapports. Notant que le Parlement de la Tanzanie comporte 30% des femmes, elle a suggéré que le Parlement, ou au moins une commission parlementaire, soit associé à la préparation des futurs rapports au Comité.
La délégation a répondu qu’il y a actuellement très peu de cas de femmes qui ont fait valoir leurs droits devant les tribunaux. Il y a un cas de discrimination en matière d’emploi et c’est la Haute Cour de justice qui a tranché. Il y a encore peu de juges au courant des instruments juridiques internationaux, a ajouté la délégation, qui a noté qu’une fondation tanzanienne donne des cours de sensibilisation sur cette question.
Concernant les lois en suspens sur les questions relatives au mariage ou à l’héritage, d’importants efforts ont été faits, a affirmé la délégation. Tout en rappelant que le Président de la République s’est engagé à régler ces questions, la délégation n’a pas pu fournir d’échéancier précis, mais a évoqué la promulgation de nouvelles lois en 2010, avant les prochaines élections législatives. Elle a regretté que, jusqu’à présent, la priorité en matière législative ait été donnée à des textes de nature économique.
La délégation a expliqué qu’il n’y a pas de cour constitutionnelle spécifique. Lorsque des questions de droit constitutionnel se posent, la Haute Cour de justice se transforme en cour constitutionnelle.
La polygamie n’est pas une infraction pénale, a confirmé la délégation, estimant qu’elle fait partie de la culture et des traditions du continent et qu’elle est acceptée par certaines religions. En même temps, un projet de loi concernant la protection des enfants est en préparation avec l’aide du Fonds des nations Unies pour l’enfance (UNICEF).
Concernant les plans d’assistance juridique du Gouvernement, la délégation a expliqué qu’il existe un service juridique d’assistance gratuite aux femmes et, au niveau du ministère, des bureaux dans tous les districts. En outre, des associations d’avocates aident les femmes. Le système pénal prévoit qu’on n’incarcère pas les femmes enceintes, qui bénéficient d’un délai de grâce allant jusqu’à six mois après l’accouchement.
Il existe des points focaux concernant l’égalité entre les hommes et femmes dans tous les ministères et à tous les niveaux régionaux et locaux. Au niveau local, l’objectif est aussi de faire participer les responsables des communautés. L’intégration des notions d’égalité est bien ancrée désormais dans les ministères et avance bien, a affirmé la délégation. Le plus grand défi se pose au niveau des villages sur le continent, du fait de l’éloignement. La question ne se pose pas à Zanzibar, où les distances à parcourir sont faibles.
Mme GLENDA P. SIMMS, experte de la Jamaïque, a demandé si les femmes parlementaires se sont organisées en dépassant leur appartenance partisane afin d’atteindre la masse critique nécessaire pour faire adopter des textes en faveur des femmes. Le rapport admet que la société tanzanienne est toujours fortement marquée par la coutume, a observé Mme DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, qui a remarqué que la loi soutenait certaines mesures traditionnelles discriminatoires, comme en matière de dot ou d’héritage. Le Gouvernement tanzanien doit abroger de telles lois discriminatoires: la protection d’attitudes culturelles de la société tanzanienne ne doit pas se faire aux dépens des femmes, a-t-elle rappelé, avant de demander quand le Gouvernement comptait abroger les lois, si possible avant 2010.
Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a noté que les violences faites aux femmes représentaient une sorte d’urgence nationale pour la Tanzanie. Elle a noté avec satisfaction que le Président avait lancé en mai 2008 une campagne contre ces violences et a demandé combien de temps elle doit durer. Quels crédits envisage-t-on de consacrer à ces questions? Constatant que près de 60% des femmes de Tanzanie considèrent comme normal les violences domestiques, contre 42% des hommes seulement, elle a demandé si les autorités avaient fait des études sur les types de violences pratiquées ou encore les modes de réaction dans les familles face au phénomène.
Mme FERDOUS ARA BEGUM, experte du Bangladesh, a demandé si la Tanzanie avait prévu un mécanisme d’évaluation des mesures de lutte contre les violences à l’égard des femmes et notamment de l’application de la loi de 2001 contre les violences. Elle a demandé comment la Tanzanie avait prévu de renforcer le système juridique pour lui permettre de veiller à la bonne application de la loi sur les violences à l’encontre des femmes. Elle a demandé des précisions sur les 7 300 viols signalés à la police mais qui n’ont fait l’objet que de règlements extrajudiciaires, en souhaitant savoir ce que l’on entendait par « règlement extrajudiciaire ».
Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, notant que les textes de loi à eux seuls ne suffisaient pas pour changer les comportements, a déclaré que l’article 5 de la Constitution devrait être assorti de directives pour sa mise en œuvre sur le terrain. Elle a également demandé comment le Gouvernement tanzanien envisageait de poursuivre des efforts permettant de modifier les comportements marqués par des coutumes et pratiques traditionnelles.
Mme YOKO HAYASHI, experte du Japon,a demandé si le nombre des pratiques de mutilations était proportionnel à celui de l’analphabétisme.
La délégation a souhaité que l’on n’oublie pas l’impact de l’analphabétisme et de la pauvreté sur les efforts de promotion de la femme. Comment une femme analphabète peut accuser et faire emprisonner son mari, si elle n’a aucun moyen de subvenir à ses besoins? s’est-elle interrogée. Comment une femme qui ne possède rien peut refuser la pratique de la mutilation génitale, alors que c’est pour elle le seul moyen d’être autorisée à parler à sa mère?
La délégation a souligné la nécessité d’accroître le nombre de jeunes au Parlement. Elle a reconnu qu’il existait encore des freins liés au passé. La Tanzanie a abrogé certaines lois afin de poursuivre les pères qui ont abandonné leur foyer. Elle a précisé que la Campagne intitulée « Dites non à la violence contre les femmes » se poursuivait avec la collaboration des ONG dans le but de récolter 1 million de signatures. Il s’agit aussi, a-t-elle précisé, de mettre un accent sur les mutilations génitales.
Le Programme d’action national de 2001 pour la lutte contre la violence à l’égard des femmes a été adapté au cours de ces dernières années. Pour susciter une réflexion sur la violence, le Gouvernement a nommé des personnes qui connaissent le fonctionnement des communautés au niveau local.
S’agissant de la polygamie, la délégation a indiqué que la Tanzanie était constituée de 50% de chrétiens et 50% de musulmans en rappelant que ces derniers avaient droit à quatre épouses conformément aux préceptes de leur religion. Elle a précisé qu’il s’agissait d’une réalité qui avait un impact certain sur les efforts d’amendement des lois relatives au mariage et à l’héritage.
Questions portant sur l’article 6
Mme SAISUREE CHUTIKUL, experte de la Thaïlande,a suggéré que la Tanzanie se dote de statistiques sur la violence, ventilées par âge et par sexe. Elle a souligné la nécessité de mettre en place des moyens d’aider les femmes les plus démunies à cesser d’être battues. Elle a demandé ce que la Tanzanie faisait en matière de coopération avec les pays où des femmes tanzaniennes étaient des victimes de la traite des êtres humains.
La délégation a reconnu qu’il conviendrait d’être en mesure d’établir des catégories parmi les femmes victimes de violence. Il faut agir avec les responsables communautaires pour modifier les comportements sans attendre que les pratiques et traditions changent d’elles-mêmes. Les meurtres de femmes âgées représentent un phénomène particulièrement attristant dans une société où on aime et respecte les anciens. Le Gouvernement tanzanien travaille avec des ONG sur ce problème précis.
La traite qui existe en Tanzanie est plutôt interne, depuis les zones rurales vers les zones urbaines, pour envoyer des fillettes travailler en ville dans des maisons, a expliqué la délégation. Les parents agissent ainsi pour tenter de lutter contre la pauvreté en espérant que ces fillettes censées être employées dans les maisons pourront leur envoyer de l’argent. Il faut donc que ces fillettes puissent être employées normalement contre un salaire et, si elles sont encore en âge scolaire, renvoyées dans leur famille pour étudier. À Zanzibar, des enfants, garçons comme filles, pratiquent de multiples petits travaux en général sous-payés. Le Gouvernement a lancé des programmes, un sur le continent, un autre à Zanzibar. Avec l’aide de l’Organisation internationale du Travail (OIT), des programmes sont en place pour aider les familles et les inciter à renvoyer leurs enfants à l’école. La traite internationale est dissimulée et le Gouvernement n’a pas de chiffres à fournir. Il faudrait faire une étude pour mieux comprendre le phénomène et prendre en charge les victimes, a observé la délégation.
Questions portant sur l’article 7
Rappelant que la Tanzanie a ratifié sans aucune réserve la Convention et le Protocole facultatif, Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a estimé que la représentation des femmes dans les institutions électives a atteint des taux élevés et a souhaité qu’il en soit de même dans les postes administratifs où elles pourraient être nommées. Elle a en revanche jugé contraire à l’article 9 de la Convention la législation sur la nationalité qui ne permet pas à une Tanzanienne mariée à un étranger de donner sa nationalité à son enfant.
Se réjouissant, elle aussi, de la forte augmentation du nombre de femmes élues au Parlement Mme VIOLETA NEUBAUER, experte de la Slovénie, a souhaité qu’à l’avenir, le rapport indique si une évolution comparable est notable dans divers autres secteurs comme la santé, l’économie et en particulier les postes de direction dans le secteur privé, ou encore dans les services diplomatiques.
La délégation a reconnu qu’actuellement la mère tanzanienne ne peut transmettre sa nationalité à son enfant. Cependant, le Gouvernement recueille actuellement des avis auprès du public en vue d’une nouvelle loi sur la double nationalité.
Jusqu’en 2005, le corps diplomatique tanzanien ne comptait qu’une ou deux ambassadrices. Depuis cette date, elles sont cinq. En outre, a rappelé la délégation, la Tanzanie avait pour Ministre des affaires étrangères une femme, Mme Asha-Rose Migiro, avant que celle-ci ne soit nommée Vice-Secrétaire générale de l’ONU. Le nombre de femmes présentes à des postes de haut niveau dans l’administration a augmenté depuis 2002 et l’objectif officiel pour 2010 est de 50%.
Questions complémentaires
L’expert des Pays-Bas s’est demandé si l’ampleur de l’interdiction de la discrimination prévue par la Constitution tanzanienne est bien compatible avec les dispositions de la Convention. Il a donc de nouveau demandé si cette interdiction concernait bien les discriminations directes et indirectes, intentionnelles ou non intentionnelles. Il a aussi demandé s’il était possible aux ONG de lancer devant la Haute Cour de justice, en formation de cour constitutionnelle, des procédures à l’encontre de lois jugées incompatibles avec la Convention.
La délégation a répondu que les ONG pouvaient en effet se pourvoir devant la Haute Cour de justice, en formation de cour constitutionnelle, et allaient le faire. La délégation a estimé que la définition de discrimination est claire mais n’a pu répondre plus précisément à la question de l’expert des Pays-Bas.
L’experte de Maurice a fait référence à une récente affaire de meurtre d’enfants albinos et demandé comment le Gouvernement tanzanien agissait pour lutter contre de telles pratiques.
Répondant à cette série de questions, la délégation a précisé que le Comité fournissait une aide juridique gratuite non seulement aux femmes mais à tous les groupes marginalisés. Elle a déclaré que le projet de réforme du secteur judiciaire en coopération avec la société était parvenu à la mise en place d’un réseau d’assistance juridique qui recevra des fonds.
Concernant la question sur les discriminations dont sont victimes les albinos, la délégation a indiqué que le Ministère de l’intérieur avait pris des mesures pour veiller à ce que les auteurs de crimes et discriminations à l’encontre des albinos soient punis. Elle a souligné la nécessité de sensibiliser les communautés, avec l’appui des médias, pour promouvoir les droits des albinos. Elle a indiqué que le Président avait pris une décision symbolique en nommant une femme albinos au sein du Parlement.
Questions de suivi
Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne,tout en se félicitant des efforts réalisés par la Tanzanie concernant la présence des femmes au Parlement, a demandé s’il y avait une base juridique pour des mesures temporaires spéciales afin d’accélérer la réalisation de cette égalité de facto.
Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie,a demandé si les partis politiques étaient subventionnés par le Gouvernement et si, dans ce cas, le Gouvernement comptait à l’avenir associer cette subvention à une obligation des partis de présenter des femmes sur leurs listes aux élections. En matière de formation du personnel juridique, elle a insisté sur la nécessité de former les avocats à la réalité de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
Mme FERDOUS ARA BEGUM, experte du Bangladesh,a demandé des précisions sur la manière dont les cas de viol étaient traités et la manière dont leur suivi était assuré.
La délégation a confirmé les efforts déployés par le Gouvernement pour que les magistrats maîtrisent le contenu de la Convention.
Questions portant sur l’article 10
Mme ZOU XIAOQIAO, experte de la Chine, a demandé des précisions sur les objectifs de la Tanzanie en matière d’éducation pour les filles. Elle a demandé si les filles qui quittaient l’école en raison du mariage ou d’une grossesse précoce étaient encouragées à y retourner. Elle a demandé également des précisions sur les initiatives du Gouvernement en matière de santé reproductive de ces jeunes filles. Elle a demandé ce que le gouvernement comptait entreprendre pour réduire la différence de taux d’analphabétisme entre hommes et femmes.
Mme NAELA MOHAMED GABRE, experte de l’Égypte,a abordé la question de l’éducation sous l’angle du développement en soulignant l’importance de budgets conséquents pour les services sociaux de base, comme l’école. Elle a rappelé que l’éducation des enfants était un point essentiel pour parvenir à l’émancipation des femmes. Elle a insisté sur le respect de l’âge minimum du mariage de 18 ans comme moyen de lutter contre l’abandon précoce des études. Elle a demandé comment le Gouvernement traitait la question de l’éducation informelle et l’assistance des familles pauvres qui imposent des activités de subsistance aux jeunes filles.
La délégation a précisé que l’éducation était la priorité numéro un du Gouvernement qui y accordait 18% de son budget. Elle a assuré que, dans le cadre de la décentralisation, des ressources financières et humaines étaient transférées vers les régions. Une représentante du Ministère de l’éducation a mentionné la présence de programmes qui permettent aux jeunes filles de familles pauvres d’aller à l’école. Elle a cité la construction d’écoles plus proches des populations défavorisées et l’organisation de formations informelles à destination de ceux qui n’ont pas pu aller à l’école. Pour ce qui est de la santé procréative, la délégation a cité l’existence de cours aux niveaux primaire et secondaire destinés aux filles et aux garçons.
Questions portant sur l’article 11
Mme MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, experte de Cuba,a noté que la Tanzanie travaillait à la promulgation de la loi sur l’égalité de l’homme et de la femme sur le lieu de travail. Elle a demandé ce qu’il en était de la loi sur les biens fonciers de 2004 et de son impact sur la question de la propriété individuelle ou collective pour la femme. Elle a demandé des précisions sur les conséquences de cette loi de 2004 en matière d’accès à la propriété foncière des femmes. Elle a souhaité des informations sur l’évolution de l’accès des femmes au microcrédit. Elle a demandé ce que la Tanzanie entreprenait pour intégrer les femmes des communautés nomades dans des activités économiques.
L’experte de la Chine a demandé des informations sur l’emploi des femmes et leurs revenus: y a-t-il un principe établi de salaire égal pour un travail égal? Y a-t-il en Tanzanie des cas de discrimination à l’emploi? L’experte a également demandé si le Gouvernement donne des conseils juridiques aux victimes de telles discriminations. Qu’est-il fait contre le harcèlement sexuel sur les lieux de travail? L’experte a demandé de préciser les mesures temporaires spéciales qui ont été prises par le Gouvernement
L’experte de Maurice a demandé comment le Gouvernement traite la question des femmes travaillant dans l’économie informelle, notamment le travail domestique et dans l’agriculture. Comment le Gouvernement cherche-t-il à réglementer ce secteur informel et à mettre un terme à ces emplois toujours précaires?
La délégation a répondu que, pour aider les familles les plus défavorisées, le Gouvernement a mis en place une politique de microfinancement. Il existe ainsi un projet pour faciliter les prêts aux petits entrepreneurs mis en place dans 14 des 20 régions, qui accorde la priorité aux femmes, lesquelles représentent 63% des bénéficiaires. Un autre projet permet d’autonomiser les femmes par la création de microentreprises dans l’artisanat. Il existe aussi un projet pilote pour l’horticulture, les cultures vivrières ou l’élevage, qui bénéficie là encore surtout aux femmes. De manière générale, la notion d’égalité entre les sexes a été intégrée dans l’ensemble des programmes nationaux de lutte contre la pauvreté mais il est vrai aussi que la plupart des projets mis en œuvre sont d’assez petite taille et fragmentés. Le Gouvernement cherche aussi à développer des coopératives au sein des communautés locales pour inciter les femmes à épargner. Le Gouvernement cherche à mettre en place un fonds de développement destiné aux femmes mais il ne faut pas se limiter aux microentreprises car il existe aussi des femmes en mesure de créer des entreprises de plus grande taille.
La délégation a précisé que le rapport inclut les statistiques disponibles au moment de sa compilation. Dans des domaines comme les violences faites aux femmes, il faudrait effectuer des études spécialisées et la Tanzanie s’y efforce.
En matière d’emploi, la politique nationale d’emploi et de recrutement, confirmée par une loi de 2005, exclut la discrimination, a affirmé la délégation. La loi interdit aussi le harcèlement sexuel. L’expérience montre qu’à compétence égale, on recrute plutôt les femmes. Les efforts entrepris font que la proportion des femmes qui arrivent dans le secteur formel est en hausse. L’emploi dans le secteur informel n’est hélas pas suivi par le Gouvernement et il est vrai que les femmes occupent souvent les emplois les moins rémunérés. Le Gouvernement essaie de rééquilibrer la situation en rendant moins difficile qu’actuellement l’accès des jeunes femmes à l’université.
Il existe des écoles réservées pour les filles de familles nomades. Quant aux femmes nomades elles-mêmes, elles sont mobilisées par des responsables de programmes communautaires et par les ONG. Le Gouvernement ne dispose pas de centres pour aider les victimes de discriminations sexuelles et ce sont le plus souvent les ONG qui fournissent l’essentiel de l’assistance aux victimes.
Questions portant sur les articles 12 et 13
Mme SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil,s’est inquiétée d’un très fort taux de mortalité maternelle auprès des femmes de 20 à 34 ans. C’est pourquoi, elle a demandé des informations complémentaires sur les orientations de la stratégie 2006-2010 de réduction de la mortalité maternelle. Elle a souhaité des précisions sur le cours dispensé aux étudiants en matière de santé reproductive. Elle s’est interrogée sur les efforts du Gouvernement pour s’assurer que toutes les femmes pauvres et vulnérables aient accès gratuitement aux services de santé et, notamment, de prévention du VIH/sida. Elle a demandé des précisions sur l’accès à la santé pour les femmes enceintes dans les prisons.
Mme FERDOUS ARA BEGUM, experte du Bangladesh, a demandé des précisions sur les aides accordées aux orphelins et les actions menées en faveur des personnes touchés par le VIH/sida.
Mme MARY SHANTHI DAIRIAM, experte de la Malaisie,a demandé si les femmes pouvaient réellement exercer leurs droits en matière d’accès à la santé. Elle a demandé s’il existait aux Nations Unies un mécanisme qui permettait de s’assurer que les communautés les plus vulnérables aient bien accès gratuitement aux médicaments. Elle a souhaité savoir si les personnes intervenant dans le domaine de la santé avaient bien été formées à la dimension sexospécifique.
M. CORNELIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas,s’est dit impressionné par les activités de microfinance existant en Tanzanie. Il a demandé si le projet de banque pour les femmes était devenu une réalité. Il a demandé des précisions sur la composition du Conseil d’émancipation économique. Il a demandé également des précisions sur les efforts de la Tanzanie pour favoriser la participation des fillettes aux activités sportives sur le continent comme à Zanzibar.
La délégation a cité des mesures de formation des sages-femmes traditionnelles. Elle a indiqué que l’accent avait été mis sur la sensibilisation des familles pour que les femmes aillent dans les cliniques pour tous les examens nécessaires. Le Gouvernement a créé la fonction d’agent des communautés dont le mandat est d’informer les communautés sur l’application des mesures prises en la matière.
Pour ce qui est de l’émancipation des femmes et du VIH/sida, elle a fait remarquer que les attitudes et mentalités sont difficiles à changer et que cela prend du temps. Elle a reconnu le problème de l’insuffisance de médicaments, notamment dans les zones rurales. Elle a indiqué que des services chargés des questions de maladies sexuellement transmissibles ont été mis en place et qu’ils fonctionnent efficacement. Il y a un seul centre d’État, à Dar es-Salaam, chargé de l’accueil des orphelins, a-t-elle ajouté, en citant néanmoins l’existence de nombreux centres de ce type dirigés par des ONG. « Nous évitons d’envoyer des enfants dans de tels centres en préférant qu’ils soient pris en charge par leur famille », a-t-elle insisté.
Par ailleurs, la délégation a indiqué que le Conseil national de l’émancipation était composé de sept membres dont trois sont des femmes. La Tanzanie a créé des banques communautaires et un système de garanties visant à encourager le secteur privé à participer à des activités de microcrédit. Elle a précisé que des activités sportives étaient organisées et dispensées à tous les élèves dans le cadre de l’enseignement dans les écoles primaire et secondaire. Elle a également indiqué que la banque des femmes n’avait pas encore obtenu la licence ni les fonds nécessaires à son fonctionnement.
Sachant que le secteur rural est le principal secteur de l’économie tanzanienne et que les femmes y jouent un rôle crucial, l’experte de l’Égypte a observé qu’en cette période de crise alimentaire, le Gouvernement devrait accorder une attention spéciale à ce secteur. Elle a demandé en quoi consistaient les propositions de la réforme législative en matière d’héritage et de propriété foncière, notamment au regard des restrictions imposées par la charia.
L’experte de Singapour a noté que plus de 15 millions de femmes travaillent en zone rurale et contribuent à 70% de la production alimentaire en Tanzanie. Elle a demandé s’il existe un calendrier pour l’ouverture de la banque des femmes et comment le Gouvernement comptait l’aider. Par ailleurs, combien de femmes rurales ont pu bénéficier des prêts à taux préférentiels des institutions et pour quel montant? Quelle est la proportion des 300 000 femmes qui viennent de zones rurales qui ont obtenu des prêts et pour quel montant?
Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a jugé que le rapport manque de statistiques sur le taux d’analphabétisme des fillettes vivant dans les zones rurales et a demandé s’il existe des stratégies ciblées d’alphabétisation en faveur des femmes rurales adultes. Elle a demandé d’indiquer le taux des femmes qui sont aujourd’hui propriétaires de terres et comment elles ont acquis ces terres. Quels sont les critères d’attribution de telles terres? Elle s’est aussi interrogée sur les tabous alimentaires.
L’experte de la Jamaïque s’est elle aussi inquiétée de l’impact de l’insécurité alimentaire mondiale. Elle a souhaité la mise à profit des pratiques culturelles positives comme le respect des anciens ou l’assistance de la famille élargie et observé que c’est en milieu rural que ces pratiques sont les mieux conservées.
En matière de microfinancement, l’experte de Malaisie a rappelé que toutes les dispositions de la Convention supposent une mise en œuvre à égalité avec les hommes. Elle a voulu savoir s’il existe des données comparatives des prêts consentis aux femmes et ceux octroyés aux hommes ainsi que les résultats obtenus par les uns et par les autres. N’y a-t-il pas des éléments discriminatoires aux dépens des femmes dans les conditions de prêts? Les fournisseurs de prêts font-ils l’objet d’une réglementation qui évite de perpétrer les discriminations envers les femmes. L’experte a demandé si les femmes ont des moyens de recours lorsqu’elles s’estiment défavorisées par rapport aux hommes, les femmes ont-elles des moyens de recours?
La délégation a déclaré que la loi sur la propriété foncière de 1999 intègre parfaitement les dispositions de la Convention sur l’égalité des femmes, qui doivent obligatoirement siéger dans les conseils. En revanche, bien qu’adoptés en 1999, ces textes commencent en fait seulement à être appliqués et on n’en voit pas encore les résultats. Il existe un système national de suivi de la pauvreté, assorti d’indicateurs à plusieurs niveaux permettant d’évaluer l’impact des diverses initiatives. Le Gouvernement facilitera le fonctionnement de la future « banque des femmes » mais il ne sera pas majoritaire au sein du conseil d’administration. La délégation n’a pu donner de statistiques concernant l’analphabétisme des adultes et notamment des femmes. Les meurtres d’albinos sont un phénomène récent en Tanzanie associé à la sorcellerie.
Questions portant sur les articles 15 et 16
Mme RUTH HALPERIN-KADDARI, experte d’Israël, a regretté les réponses apportées par la délégation sur la polygamie, dont elle a estimé que la Convention ne peut qu’aboutir à son élimination. Or, la Tanzanie a ratifié la Convention sans réserve. De même, comment se fait-il que la répudiation soit encore permise? La loi sur le mariage continue-t-elle à ne pas exiger, dans tous les cas, le consentement de la future épouse? De même, le Gouvernement doit agir pour lutter contre les viols domestiques. L’experte a jugé trop vagues les réponses fournies et a souhaité un calendrier concret. Elle a demandé des précisions sur les droits des femmes sur les biens du couple et la garde des enfants en cas de divorce. Il semble que ce soit la tradition de la communauté qui décide, en contradiction tant avec la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes qu’avec la Convention des droits de l’enfant, qui exigent que l’intérêt de l’enfant soit pris en compte de manière prioritaire.
L’experte du Ghana a elle aussi demandé quand le Gouvernement entendait demander les lois discriminatoires en matière de mariage, divorce ou héritage.
L’experte de l’Algérie a regretté que, sur les questions de l’âge du mariage et de l’héritage, la Tanzanie semble faire preuve de peu de volonté politique et continue d’être en infraction avec la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ou la Convention des droits de l’enfant. Pourtant, la Haute Cour de justice a rendu, plusieurs fois dans le passé, des jugements conformes à la Convention. Mais on ne sait pas s’ils ont été exécutés. Il n’est pas possible que les femmes de Tanzanie puissent accéder aux plus hautes fonctions et en même temps avoir si peu de droits dans leur vie privée, a-t-elle estimé.
L’experte de Singapour a demandé si, en cas de violation de la loi sur le mariage, des sanctions sont prévues. Les mariages doivent-ils tous être enregistrés? Quand la loi sur le mariage sera-t-elle pleinement appliquée? Concernant les veuves, l’experte a rappelé qu’une loi de 1963 basée, sur le droit coutumier, interdit aux veuves d’hériter de la terre du mari décédé. Elle s’est aussi inquiétée des pratiques de funérailles dégradantes contre les défuntes qui étaient atteintes du VIH/sida. Elle a demandé s’il existait des aides juridiques pour les femmes pauvres.
L’experte de Croatie a demandé si la Tanzanie avait l’intention d’intégrer formellement la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dans son système juridique, selon quelles modalités et avec quels effets.
Notant que la législation tanzanienne ne prévoit de congé de maternité que tous les trois ans, l’experte de Maurice a demandé si la Tanzanie réalise que cette mesure est discriminatoire à l’égard des femmes.
La délégation s’est dite confiante sur l’échéancier pour l’intégration des conventions dans le droit interne mais a ajouté qu’elle ne pouvait pas être plus précise à ce stade. Concernant les viols conjugaux, la délégation a reconnu n’avoir pas de données. Les femmes ne parlent en général pas de ce qui se passe dans leur ménage. Il faudra faire des campagnes de sensibilisation.
La loi sur le mariage est discriminatoire. Pour l’instant, un projet de loi est en cours d’élaboration. En cas de divorce, on reconnaît à la femme des droits si elle peut démontrer sa contribution à la vie du ménage, comme pour l’homme. La jurisprudence considère l’entretien du ménage comme une contribution. La garde des enfants se fait en fonction de l’intérêt de l’enfant.
La Convention doit s’intégrer dans la législation locale mais n’aura pas la primauté sur la Constitution.
La loi de 2003 sur le travail prévoit 84 jours de congé maternel aux femmes qui accouchent. La restriction à un congé tous les trois ans a été ajoutée dans le cadre d’une stratégie de lutte contre une démographie galopante et pour assurer le bien-être de l’enfant et la santé de la mère, menacée par les grossesses multiples, a expliqué la délégation. Toutefois, a-t-elle précisé, en cas de nouvelle naissance dans un délai de trois ans, la mère peut toutefois prendre son congé annuel et, si le médecin certifie que ce n’est pas suffisant, la mère restera à la maison et touchera son salaire intégralement.
Informations de base
Adoptée le 18 décembre 1979, la Convention, à laquelle 185 États sont aujourd’hui parties, est considérée comme une véritable Charte des droits de la femme. Son préambule et ses 30 articles définissent ce qui constitue la discrimination à l’égard des femmes. Chaque État partie doit, tous les quatre ans, présenter au Comité les mesures qu’il a prises pour mettre en œuvre les articles de la Convention. Son Protocole facultatif permet aux femmes ou à des groupes de femmes de saisir le Comité s’ils estiment que leurs droits ont été violés et si tous les recours sur le plan national ont été épuisés.
Les 23 experts indépendants du Comité sont les suivants: Mmes Ferdous Ara Begum (Bangladesh), Magalys Arocha Dominguez (Cuba), Meriem Belmihoub-Zerdani (Algérie), Saisuree Chutikul (Thaïlande), Dorcas Coker-Appiah (Ghana), Mary Shanthi Dairiam (Rapporteur) (Malaisie), Naela Mohamed Gabre (Vice-Présidente) (Égypte), Françoise Gaspard (Vice-Présidente) (France), Ruth Halperin-Kaddari (Israël), Tiziana Maiolo (Italie), Violeta Neubauer (Slovénie), Pramila Patten (Maurice), Silvia Pimentel (Brésil), Yoko Hayashi (Japon), Hanna Beate Schöpp-Schilling (Allemagne), Heisoo Shin (République de Corée), Glenda P. Simms (Vice-Présidente) (Jamaïque), Dubravka Šimonović (Présidente) (Croatie), Anamah Tan (Singapour), Maria Regina Tavares da Silva (Portugal), Zou Xiaoqiao (Chine) et M. Cornelis Flinterman (Pays-Bas). Le vingt-troisième membre doit être nommé par l’Afrique du Sud, en remplacement de Mme Hazel Gumede Shelton dont le mandat allait jusqu’au 31 décembre 2010, mais qui a donné sa démission en 2007.
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