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FEM/1670

CONDITION DE LA FEMME: LE BILAN DU RÔLE JOUÉ PAR LES FEMMES EN APPLICATION DE LA RÉSOLUTION 1325 SUR LES FEMMES, LA PAIX ET LA SÉCURITÉ EST MITIGÉ

29/02/2008
Conseil économique et socialFEM/1670
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Commission de la condition de la femme

Cinquante-deuxième session

10e séance – matin


CONDITION DE LA FEMME: LE BILAN DU RÔLE JOUÉ PAR LES FEMMES EN APPLICATION DE LA RÉSOLUTION 1325 SUR LES FEMMES, LA PAIX ET LA SÉCURITÉ EST MITIGÉ


Des responsables de l’ONU et des ONG déplorent que la violence sexuelle systématique utilisée comme arme de guerre ne soit toujours pas perçue comme une menace à la paix


Les lacunes et défis qui se posent à la participation des femmes à la prévention, à la gestion et à la résolution des conflits, ainsi qu’à la consolidation de la paix, ont été au centre du débat interactif que tenait ce matin la Commission de la condition de la femme.


En ouvrant ce dialogue, Mme Carolyn McAskie, Sous-Secrétaire générale pour l’appui à la consolidation de la paix, a dressé un bilan mitigé des réalisations de la communauté internationale concernant l’égalité de participation des femmes à la gestion du retour à la paix et à la reconstruction postconflit, notamment dans le cadre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, qui porte sur les femmes, la paix et la sécurité.  Elle a regretté que ce texte, qui appelle à une participation égale des femmes à tous les niveaux de la consolidation de la paix, ne fournisse pas systématiquement cette possibilité aux femmes.  Pourtant, l’inclusion systématique des femmes et de l’analyse « genre » dans le cadre de la consolidation de la paix est intrinsèque à la reconstruction des structures juridiques, politiques et économiques, et à la promotion de l’égalité, a fait remarquer Mme McAskie.


Cette analyse a été partagée par Mme Anne-Marie Goetz du Fonds des Nations Unies pour le développement de la femme (UNIFEM), qui a estimé que la communauté internationale était encore bien loin d’avoir traduit les termes de la résolution dans les faits comme le montre un certain nombre d’indicateurs.  Le nombre de femmes aux négociations de paix reste faible, a-t-elle indiqué, en soulignant aussi que les processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, ne tiennent pas compte des besoins des femmes qui ont été associées ou ont fait partie de groupes de combat ou autres forces armées.  Le financement et la planification en faveur des femmes restent faibles, a fait observer Mme Goetz.  Elle a tout particulièrement regretté que la violence sexuelle utilisée de manière systématique comme une arme de guerre, ne soit pas considérée comme une menace à la paix ou comme un élément qui devrait déclencher la prise de mesures sécuritaires significatives de la part de la communauté internationale. 


La Porte-parole du Groupe de travail des ONG sur les femmes, la paix et la sécurité, Mme Gina Torry, a elle aussi relevé les limites que connaissent les missions politiques de l’ONU, à l’instar de celles déployées au Népal et à Fidji, ou des missions de consolidation de la paix comme celle présente au Burundi, ou encore des missions de maintien de paix, comme on le voit au Darfour.  L’ONU, ne dispose toujours pas de mécanisme ou de système lui permettant de clairement identifier les cas d’échecs et de prendre les mesures qui s’imposent pour pouvoir assurer une participation égale des femmes aux efforts de prévention, de gestion et de résolution de conflits, a déploré ce matin Mme Torry. 


La prochaine réunion de la Commission de la condition de la femme sera annoncée dans le Journal.



SUIVI DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET DE LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE »: RÉALISATION DES OBJECTIFS STRATÉGIQUES ET MESURES À PRENDRE DANS LES DOMAINES CRITIQUES ET NOUVELLES MESURES ET INITIATIVES: ÉVALUATION DES PROGRÈS RÉALISÉS DANS LA MISE EN ŒUVRE DES CONCLUSIONS CONCERTÉES DE LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME SUR L’ÉGALITÉ DE PARTICIPATION DES FEMMES À LA PRÉVENTION, À LA GESTION ET À LA RÉSOLUTION DES CONFLITS ET À LA CONSOLIDATION DE LA PAIX APRÈS LES CONFLITS


Dialogue visant à évaluer les progrès réalisés dans la mise en œuvre des conclusions concertées sur l’égalité de participation des femmes à la prévention, à la gestion et à la résolution des conflits et à la consolidation de la paix après les conflits


Présentation et dialogue


Mme CAROLYN MCASKIE, Sous-Secrétaire générale du Bureau d’appui à la consolidation de la paix des Nations Unies, a indiqué qu’un développement clef depuis l’adoption en 2004 des conclusions concertées sur l’intégration des sexospécificités dans les processus de consolidation de la paix a été l’établissement d’une architecture de la consolidation de la paix.  Lors du Sommet de 2005, les États Membres et leurs gouvernements ont appelé à la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.  Ces gouvernements ont conclu que le développement, la paix et la sécurité étaient étroitement liés, et ils se sont engagés à adopter une démarche intégrée en matière de consolidation de la paix, a indiqué Mme McAskie. 


La Commission de consolidation de la paix, a rappelé Carolyn McAskie, a été créée en tant qu’organe consultatif dont le mandat est d’intégrer les capacités et expériences des Nations Unies en matière de consolidation de la paix, droits de l’homme, primauté du droit, aide humanitaire, reconstruction, ainsi qu’en matière de développement sur le long terme.  Les résolutions fondatrices du Fonds de consolidation de la paix précisent que le Fonds doit développer et promouvoir des stratégies intégrées.  L’égalité entre les sexes constitue le seul mandat thématique du Fonds, a rappelé la Sous-Secrétaire générale.  Il a fallu 50 ans à la communauté internationale pour reconnaître que les différences basées sur le sexe étaient un élément intégral d’un travail efficace à mener en matière de maintien de la paix.  La résolution 1325 appelle à une participation égale des femmes à tous les niveaux de la consolidation de la paix.  Toutefois elle ne fournit pas systématiquement une telle possibilité.  L’inclusion systématique des femmes et de l’analyse « genre » dans le cadre de la consolidation de la paix est intrinsèque à la reconstruction des structures juridiques, politiques et économiques, et à la promotion de l’égalité.


Le Fonds de consolidation de la paix a commencé à traduire la théorie dans la pratique au niveau des pays que sont le Burundi et la Sierra Leone, a indiqué Mme McAskie.  Ainsi, au Burundi les femmes ont participé au processus de paix et elles sont désormais bien représentées au Gouvernement.  Trente pour cent de parlementaires du Burundi sont des femmes, qui représentent aussi 20% des ministres dans ce pays.  Toutefois, la faiblesse des pays en capacités peut constituer un frein, tandis que malgré sa présence, le Fonds des Nations Unies pour le développement de la femme (UNIFEM) a un impact très limité.  D’autre part, aucun des conseillers en parité travaillant dans les Bureaux intégrés en Sierra Leone et au Burundi ne dispose du soutien prévisible dont ils auraient pourtant besoin.


La Sous-secrétaire générale a rappelé quelles étaient les conclusions du Groupe de travail de la Commission de consolidation de la paix, qui a tenu ses travaux le 28 janvier 2008.  Il a été recommandé de promouvoir les capacités de recherche, d’identifier les cas de progression des femmes en politique, d’identifier les possibilités d’emploi qui s’offrent aux femmes après les conflits et d’intégrer l’accès des femmes à la justice aux efforts d’édification de la primauté du droit.


MmeGINATORRY, Porte-parole du Groupe de travail des ONG sur les femmes, la paix et la sécurité, a reconnu que depuis l’adoption de la résolution 1325 en 2000 et des conclusions agréées de la Commission de la condition de la femme en 2004, des mesures importantes ont été prises par les acteurs étatiques, les femmes, les organisations de femmes et la société civile, pour renforcer le rôle des femmes et la perspective sexospécifique dans les efforts de consolidation de la paix et de prévention des conflits.  Des progrès ont été enregistrés au sein des Nations Unies, comme la formulation de plans d’action sensibles au genre dans les domaines du désarmement, des affaires politiques et humanitaires, ainsi que de la paix et de la sécurité.  En outre, certains États Membres ont mis au point les plans et stratégies requis.


Si ces avancées sont importantes, il faut néanmoins reconnaître que les Nations Unies et les gouvernements ne peuvent pas travailler seuls.  Ces dernières années, les acteurs étatiques et les réseaux de femmes ont commencé à travailler ensemble pour rendre plus efficaces et plus durables les efforts de consolidation de la paix, a indiqué Mme Torry.  Ce sont en effet les réseaux de femmes qui jouent un rôle crucial aux niveaux local et international, a-t-elle souligné.  En se regroupant, ces réseaux et coalitions sont mieux positionnés pour faire entendre les voix et les préoccupations des femmes au plus haut niveaux des processus nationaux et internationaux de prise de décisions. 


L’intervenante a relevé les lacunes et les défis qui se posent aux missions politiques de l’ONU, comme au Népal et à Fidji; aux missions de consolidation de la paix, comme au Burundi; et aux missions de maintien de paix, comme au Darfour.  L’ONU, a-t-elle dit, n’a toujours pas de mécanisme ou de système pour identifier les échecs et prendre les mesures qui s’imposent pour assurer une participation égale des femmes aux efforts de prévention, de gestion et de résolution de conflit.  Elle a donc appelé l’ONU et les gouvernements à reconnaître le sous-financement grave dont souffrent les entités pertinentes de l’ONU.  L’allocation de fonds extrabudgétaires ne suffit pas, a-t-elle estimé, en indiquant qu’il faut reconnaître la nécessité d’inscrire les fonds nécessaires dans le budget ordinaire pour renforcer la capacité des femmes dans les processus de consolidation de la paix. 


La représentante a aussi lancé un appel pour que soient améliorées la collecte et l’analyse des informations sur les femmes et les questions sexospécifiques.  Cette mesure serait partie intégrante de la prévention des conflits et de la promotion des efforts de création de système d’alerte rapide.  Mme Torry a aussi appuyé la recommandation du Secrétaire général visant à ce que le Conseil de sécurité mette en place un mécanisme pour mesurer plus efficacement la participation égale des femmes à la prévention des conflits, aux efforts de consolidation de la paix et à la lutte contre la violence sexuelle pendant les conflits armés.  Elle a aussi appuyé l’appel à la création d’une architecture d’égalité des sexes plus forte au sein de l’ONU.


Mme ANNE–MARIE GOETZ, Fonds des Nations Unies pour le développement de la femme (UNIFEM), a indiqué que le Fonds appuyait fermement la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.  Elle a toutefois estimé que la communauté internationale était encore bien loin d’avoir traduit les termes de la résolution dans les faits comme le montrent un certain nombre d’indicateurs: le nombre de femmes aux négociations de paix reste faible, les processus de désarmement, de démobilisation, de réinsertion ne tiennent pas compte des besoins des femmes ayant été associées à des forces armées, le financement et la planification en faveur des femmes restent faibles.  Cette situation est d’autant plus visible dans les pays où la violence sexuelle systématique est utilisée comme une arme de guerre.  Mme Goetz a toutefois fait remarquer que la violence sexuelle n’est pas considérée comme une menace à la paix ou comme un élément déclenchant la prise de mesures significatives en matière de sécurité.  Les efforts de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des soldats, ex-soldats auteurs de violence sexuelle incluent rarement une intervention psychologique.  Une fois de retour dans leur communauté d’origine, ces personnes continuent de poser une menace permanente à la sécurité des femmes et des enfants.  Il faut que les processus de règlement des conflits, de consolidation de la paix et de réhabilitation adoptent une perspective sensible au rôle des femmes.


Répondant à cette première série de questions, Mme McASKIE, la Sous-Secrétaire générale au Bureau d’appui à la consolidation de la paix, a estimé qu’une des façons dont la communauté internationale pourrait contribuer au renforcement de la participation des femmes dans les efforts de paix serait d’obtenir un appel de la Commission de condition de la femme.  Vous pouvez, a-t-elle dit aux délégations, faire entendre votre voix pour obtenir l’élan et les ressources nécessaires.  Sinon, a-t-elle prévenu, notre rôle se limitera à faire de la sensibilisation au détriment de l’action.  Au Burundi et en Sierra Leone, a-t-elle expliqué, le mécanisme de suivi implique que toutes les parties se réunissent pour présenter leurs résultats.  Ce qui est important, a souligné la Sous-Secrétaire générale, c’est la coordination des actions que ce type de réunions permet.  Cette coordination agit alors comme un véritable levier.  Mais, a-t-elle prévenu, ce levier ne servira à rien si les ressources nécessaires à la participation des femmes ne sont pas mobilisées.  C’est là que la Commission de la condition de la femme peut jouer un rôle, a conclu la Sous-Secrétaire générale.


Prenant la parole, Mme TORRY a pour sa part estimé que même si elle émettait une opinion, la voix de la Commission de la condition de la femme ne changerait rien.  Ce ne sont pas les femmes présentes ici qui peuvent faire la différence, mais plutôt celles qui participent sur le terrain aux négociations, a-t-elle dit.  La meilleure manière de renforcer leur rôle est de demander au Conseil de sécurité de créer un mécanisme efficace de suivi de sa résolution 1325, a proposé Mme Torry.  Il faut inscrire les financements requis dans le budget ordinaire, a insisté la porte-parole du Groupe de travail des ONG.  Au niveau national, elle s’est félicitée des Plans d’action adoptés par les Pays-Bas et la Norvège.  Elle a rappelé que lorsque les ONG se sont aperçues que les femmes étaient tenues à l’écart du Comité directeur de consolidation de la paix au Burundi, elles avaient pu faire appel à la Norvège pour financer leur participation.


Intervenant une nouvelle fois, la Sous-Secrétaire générale a jugé encourageant qu’il n’existe aucun conflit dans le monde qui ne fasse l’objet de négociations.  Mme McAskie a, à cet égard, préconisé la création au sein du système de l’ONU d’un mécanisme chargé de donner des directives sur la manière de mener des pourparlers de paix et de veiller à ce que la composante « égalité des sexes » y soit présente.  Elle a appelé la Commission de la condition de la femme à adopter des textes en ce sens.  Si le Conseil de sécurité a reconnu la dimension politique des questions humanitaires, il devrait pouvoir en faire de même sur la question de la sexospécificité, a-t-elle espéré.  La Commission peut, par exemple, demander que les présentations que fait le secrétariat au Conseil de sécurité sur certaines situations de conflit ou de reconstruction postconflit incluent une analyse de l’impact de la participation des femmes aux efforts de paix, a suggéré Mme McAskie.


À son tour, Mme TORRY, Porte-parole du Groupe de travail des ONG, a abondé en ce sens en rappelant que lorsque le Conseil de sécurité a rencontré en juin 2006, des groupes de femmes au Darfour, il ne s’est plus simplement contenté de mentionner la résolution 1325 dans la résolution qui a suivi.  Il a plutôt formellement appelé à sa mise en œuvre.  Voilà l’impact, a-t-elle dit, de la mise en œuvre de la participation des femmes au centre des efforts de paix.  Mais, a-t-elle prévenu, si on n’y met pas les ressources adéquates, cet effort ne mènera à rien.


Mme McASKIE, qui répondait à la question de savoir comment les gouvernements pourraient faire en sorte que la société civile soit présente à la table des négociations, a précisé que les gouvernements étaient maîtres de leur destinée et qu’il leur appartenait par conséquent de décider dans quelle mesure ils voulaient partager le fardeau de la consolidation de la paix avec la société civile.  Le Conseil pourrait ajouter sa propre évaluation des sexospécificités à tous les aspects de ces travaux, mais là aussi il s’agit d’une décision qui revient aux États Membres, a indiqué Mme McAskie.  Il faudrait que cette dimension soit intégrée à tous les aspects de notre travail, a-t-elle recommandé, en notant qu’il faut aussi comprendre que les conditions particulièrement difficiles qui règnent autour de la question fournissent une occasion d’apprendre et d’agir.


Pour sa part, Mme TORRY a évoqué les modalités de coopération entre les gouvernements et la société civile, notamment en ce qui concerne le cas du Kazakhstan, où une référence est faite à la résolution 1325 et à ses dispositions dans le Plan d’action national révisé que ce pays a adopté sur les femmes.  Il s’agit d’un moyen de faire preuve de dynamisme en temps de paix, a estimé Mme Torry.  Elle a dit qu’il fallait débloquer des fonds supplémentaires pour pouvoir mettre en place une architecture de la sexospécifité qui soit plus solide qu’actuellement.  La représentante de l’UNIFEM a déclaré que le traitement des cas d’exploitation sexuelle, dont ont été accusés des acteurs du maintien de la paix, a montré le rôle que peuvent jouer d’autres institutions.  Il faut donc tirer profit de l’expérience acquise dans ce cadre.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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