DH/CT/699

LA CORRUPTION ET LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE PRINCIPAUX OBSTACLES À LA CONSOLIDATION DES INSTITUTIONS DE L’EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE

26/03/2008
Assemblée généraleDH/CT/699
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Pacte international relatif

aux droits civils et politiques

Comité des droits de l’homme

Quatre-vingt-douzième session                              

2523e et 2524e séances – matin et après-midi


LA CORRUPTION ET LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE PRINCIPAUX OBSTACLES À LA CONSOLIDATION DES INSTITUTIONS DE L’EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE


L’ex-République yougoslave de Macédoine a présenté aujourd’hui son deuxième rapport périodique aux experts du Comité des droits de l’homme, chargés de surveiller la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  Ils se sont dits préoccupés par les dangers que font courir aux institutions du pays une corruption persistante et la criminalité organisée, en particulier la traite des êtres humains.  Les experts se sont aussi inquiétés de la situation des minorités. 


Le Ministre de la justice et chef de délégation, Mihaylo Manevski, dont le pays a ratifié le Pacte en janvier 1994, a particulièrement évoqué les réformes judiciaires lancées depuis la présentation du précédent rapport.  Le Gouvernement a créé un mécanisme de contrôle impartial qui peut être saisi par tout citoyen estimant que ses droits ont été violés ou que la police n’a pas fait son travail.  La corruption et la criminalité organisée sont devenues, a affirmé le Ministre, une priorité pour son pays qui applique en la matière le principe de tolérance zéro. 


Conscient de la dimension transnationale de la traite des migrants, le Gouvernement, a expliqué le Ministre, a adopté une loi pour prévenir ces phénomènes, ainsi que les activités terroristes, avec pour priorité la protection des enfants, souvent les premières victimes des « passeurs ». 


Le manque de visibilité des minorités a fait l’objet de nombreux commentaires de la part des experts.  Les Roms, en particulier, ne représentent certes que 2,66% de la population, mais sont mal intégrés au sein des institutions de l’État et continuent de faire l’objet de discriminations, ont relevé les experts.  La délégation a expliqué que la possibilité pour eux de faire une demande de droit d’asile, voire de citoyenneté selon les cas, est compliquée par la difficulté à faire connaître leurs droits à ces populations nomades.  En revanche, la représentation des Albanais, minorité la plus importante du pays avec 26% de la population, a progressé de 20% dans l’administration publique depuis l’Accord-cadre de 2001.


Par ailleurs, l’experte américaine s’est interrogée sur le nombre important de détenus qui vont bénéficier de la nouvelle loi d’amnistie, dont un certain nombre ont été condamnés pour incitation à la haine raciale ou religieuse ou pour leur participation à des réseaux de criminalité organisée.  Aucun des ressortissants macédoniens jugés par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ne sera amnistié, a précisé la délégation. 


Dans ses remarques finales, le Président du Comité a félicité l’ex-République yougoslave de Macédoine pour sa volonté de mettre en œuvre les dispositions du Pacte en dépit des stigmates laissés par la guerre.  Il a cependant souligné que l’existence d’un Bureau de l’Ombudsman dans le pays n’excluait pas la création d’une commission nationale des droits de l’homme à l’avenir.


EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE


Examen du deuxième rapport périodique de l’ex-République yougoslave de Macédoine (CCPR/C/MKD/2)


Déclaration liminaire


M. MIHAYLO MANEVSKI, Ministre de la justice de l’ex-République yougoslave de Macédoine, a déclaré que son pays avait, depuis la présentation de son rapport précédent, ratifié le Protocole n°12 sur la lutte contre la discrimination et le Protocole n°14 de la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi qu’un certain nombre d’autres instruments internationaux pour améliorer la situation des droits de l’homme au niveau national.  Au cours de la période à l’examen, l’ex-République yougoslave de Macédoine a lancé plusieurs réformes afin de mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. 


Son pays a notamment établi un Comité national de protection des droits de l’enfance, auquel contribuent les organisations non gouvernementales.  En outre, la scolarité a été rendue obligatoire jusqu’à la fin du cycle secondaire et une éducation primaire d’une durée de neuf ans a été introduite.  Une attention toute particulière a été accordée, dans le cadre de ce processus, à l’intégration des groupes marginalisés, a souligné le Ministre.  Par ailleurs, une loi sur la formation continue est en cours d’élaboration, de même qu’une autre sur la non-discrimination.


Le Ministre a ensuite expliqué que la justice de son pays était engagée dans une vaste réforme, qui vise à garantir les droits et libertés de ses citoyens.  Les secteurs les plus directement concernés sont ceux du Code pénal, du système judiciaire, de la police, de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, y compris la traite des êtres humains et la protection des groupes minoritaires.  M. Manevski a tout particulièrement insisté sur la lutte contre la criminalité organisée, une priorité pour son pays, qui applique le principe de tolérance zéro en matière de corruption. 


Des amendements ont été introduits dans la loi sur la corruption, comme par exemple celui qui concerne la prévention des conflits d’intérêts.  Le pays s’efforce par ailleurs d’harmoniser sa législation avec les normes internationales en matière de criminalité organisée.  Le Code pénal a été amendé en conséquence et, depuis cette année, une loi sur la protection a été adoptée pour prévenir la traite des êtres humains et des migrants et les activités terroristes, l’accent ayant été mis sur les enfants, souvent les premières victimes des trafiquants.


Le chef de la délégation a indiqué qu’après les amendements apportés à la Constitution de 2000 et en général, après la mise en œuvre de l’Accord-cadre, des réformes ambitieuses avaient été entreprises dans le domaine de la protection et de la promotion des droits des « membres des communautés non majoritaires ».  Ainsi, une Stratégie pour une représentation équitable et appropriée et un Plan d’action adopté en 2007 sont en train d’être finalisés.  Le Gouvernement a, en 2007, consacré trois fois plus de fonds que par le passé à la création d’emplois pour les minorités, ce qui a permis à 545 personnes de trouver un travail.  La représentation de ces minorités au sein de l’État est actuellement de 20,72%, dont 15,96% d’Albanais, ce qui représente une augmentation de 4% par rapport à l’année précédente. 


Par ailleurs, M. Manevski a attiré l’attention sur l’établissement d’un Comité chargé des relations entre les communautés de Macédoine.  En 2007, un Institut pour l’héritage culturel des Albanais a été également créé. 


Réponses aux questions écrites (CCPR/C/MKD/Q/2)


Cadre constitutionnel et juridique de l’application du Pacte (article 2)


La délégation a souligné qu’un Bureau national de l’Ombudsman avait été établi sur la base des Statuts de Paris sur les institutions des droits de l’homme.  En 2006, a été également créé un organe interministériel des droits de l’homme pour consolider la coordination entre les ministères et les organes pertinents du Gouvernement et mettre en œuvre les recommandations des commissions pertinentes des Nations Unies et du Conseil des droits de l’homme.


Par ailleurs, la lutte contre la corruption et le crime organisé constitue les priorités les plus importantes du Gouvernement, a assuré la délégation.  L’objectif ultime du Gouvernement est de créer un environnement de « tolérance zéro » de la corruption.  Le Programme gouvernemental 2006-2010 envisage ainsi une série de mesures et d’actions anticorruption.


Dans ce contexte, le pays a ratifié en mars 2007 la Convention des Nations Unies contre la corruption.  La lutte contre ce fléau, fruit d’une véritable volonté politique soutenue par l’opinion publique, a donné des résultats satisfaisants, a expliqué la délégation.


Discrimination à l’égard des femmes et violence domestique (articles 2, par.1, articles 3, 7 et 26)


En mai 2006, le Parlement a voté une loi sur l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, et ce dans tous les domaines de la vie sociale.  L’article 4 de la loi définit le traitement égal, la discrimination directe et indirecte et le harcèlement sexuel.  Les articles 7, 8, 9 et 10 concernent l’adoption de mesures spéciales pour l’établissement d’opportunités égales pour les hommes et les femmes dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, de la vie professionnelle, de l’activité publique et politique.  S’agissant de la représentation politique, les femmes occupent 33 des 120 sièges du Parlement.


En 2006, des amendements à la loi sur la famille ont été adoptés en vue d’accorder des compétences à certaines institutions, comme le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la santé ou les tribunaux, pour mettre en œuvre des mesures de protection contre la violence domestique.  En 2007, de nouveaux amendements à cette loi ont été rédigés en vue d’harmoniser la définition de la violence domestique avec le Code pénal et donner la possibilité à des associations de citoyens de mettre en place des mesures de protection pour les victimes de la violence domestique.  En outre un centre des victimes de la violence domestique est prévu dans des amendements à la loi sur la protection adoptée en 2004.  Ce centre est censé fournir des abris et des soins aux victimes pendant une période de six mois renouvelable.


En 2005, 146 personnes ont été accusées d’actes liés à la violence domestique.  Parmi elles, 30 ont été reconnues coupables, dont 25 ont été condamnées à des peines de prison de 3 à 5 ans.  En 2006, 132 personnes ont été poursuivies, 89 reconnues coupables et 16 condamnées à des peines de prison.


Obligations et responsabilités, droit à la vie et interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants (articles 2, 6 et 7)


La délégation a expliqué que le Secteur pour le contrôle interne et des normes professionnelles du Ministère de l’intérieur n’exerçait aucune discrimination dans la conduite de ses activités et que toutes les situations étaient traitées sur un pied d’égalité.  S’agissant du processus de réforme de la police, des changements ont été apportés dans l’organisation du travail au sein des commissariats et dans le recrutement des policiers.  Ceux-ci ont désormais la responsabilité de respecter les droits et les libertés humains dans l’accomplissement de leur mandat.  Des programmes de formation ont été mis en place pour sensibiliser les agents aux situations à risque.  En outre un Plan d’action a été lancé en début d’année pour mettre en œuvre les recommandations de la Convention européenne pour la prévention de la torture.


Le verdict rendu par la chambre d’appel a confirmé le jugement de la chambre de première instance et l’accusé a été acquitté faute de preuves.  La Cour suprême a reconnu qu’il y avait eu des vices de procédures dans le prononcé du jugement rendu par ces deux chambres, mais qu’ils n’affectaient pas le jugement dans le fond.


Concernant les allégations d’enlèvement de 13 Macédoniens, l’affaire est aujourd’hui devant le Procureur de la République.  Quant aux six Albanais et au Bulgare disparus, sur requête du Ministère de l’intérieur, un juge d’instruction a établi que les corps retrouvés au bord d’une route en mai 2004 étaient ceux de trois des Albanais et du Bulgare disparus.  Une enquête est en cours pour déterminer les circonstances de leur mort.


S’agissant de la législation sur l’amnistie, une loi a été adoptée en 2002, la délégation ayant expliqué que le nombre de personnes actuellement incarcérées et qui peuvent bénéficier d’une amnistie s’élève à 898.


Interdiction de l’esclavage et de la servitude (article 8)


Depuis septembre 2005, il existe un Bureau de coordination des mécanismes nationaux pour lutter contre la traite d’êtres humains et faciliter la réinsertion de ses victimes.  Des ateliers ont été organisés pour former des milliers de professionnels, qui sont désormais chargés de s’occuper des groupes vulnérables et de les sensibiliser aux dangers de la traite.  Ce programme national prévoit également des procédures selon lesquelles le secteur public et la société civile doivent agir de concert lorsqu’ils sont confrontés au problème de la traite.


Liberté et sécurité de la personne et traitement des prisonniers (articles 9 et 10)


De nombreuses mesures ont été prises pour garantir les droits des personnes en détention provisoire, en particulier des campagnes d’information et d’affichage dans tous les commissariats.


La délégation a expliqué que le Ministère de l’intérieur n’avait pas exercé de pression à l’encontre du ressortissant allemand, Khaled al-Masri, et qu’il n’avait à aucun moment été détenu par la Police nationale.  Cette dernière n’est pas soupçonnée d’avoir violé les droits fondamentaux de cet individu.


La délégation a indiqué qu’une réforme du système pénitentiaire était en cours pour améliorer les conditions de détention et permettre une application des peines conforme aux normes internationales en vigueur.  Un programme de financement et de construction de nouvelles prisons a été adopté en 2007 et renforcé par l’adoption d’un second plan en 2008, a-t-elle annoncé.  Ces plans visent également à rénover les établissements pénitentiaires existants.  De nombreuses mesures ont également été prises pour veiller au respect des règles d’hygiène des prisonniers et prévenir les mauvais traitements.  En outre, jusqu’en 2005, les communications entre le Ministère de l’intérieur et le Bureau de l’Ombudsman étaient défaillantes, mais elles se sont améliorées depuis, a précisé la délégation.


Questions orales des experts


Mme IULIA ANTOANELLA MOTOC, experte de la Roumanie, a demandé si le Bureau de l’Ombudsman respectait en partie ou en totalité les Principes de Paris sur les institutions des droits de l’homme.  L’experte a également voulu connaître les résultats obtenus grâce aux nouvelles règles et mesures contre la corruption.  Par ailleurs, Mme Motoc, qui a regretté le manque de femmes au sein des institutions, a demandé des précisions sur leur place dans le secteur privé.  Elle a en outre noté des différences de traitement entre les femmes d’origine macédonienne et les femmes de la minorité rom.  De même a-t-elle demandé des informations concernant les violences policières à l’égard des Rom, souhaitant savoir en particulier si des condamnations avaient été prononcées.


Mme RUTH WEDGWOOD, experte des États-Unis, a mis l’accent sur le problème des personnes disparues, commun aux pays de l’ex-Yougoslavie, a-t-elle précisé.  Elle s’est aussi interrogée sur le nombre important de personnes actuellement emprisonnées et susceptibles de bénéficier de l’amnistie générale, dont certaines ont notamment été condamnées pour incitation à la haine raciale ou religieuse ou pour des faits de criminalité organisée.  Quelles sont les conditions qui ont conduit à l’amnistie?  Comment s’est articulé le débat public sur cette question?, a-t-elle en particulier demandé.  Elle a en outre voulu des renseignements sur le traitement des violences policières.


M. MICHAEL O’FLAHERTY, expert de l’Irlande, s’est penché sur le problème de la traite, s’interrogeant sur le hiatus entre l’engagement sérieux affiché par l’État dans ce domaine et les perceptions devant la conduite des fonctionnaires les plus concernés, comme la police et les autorités judiciaires.  L’expert a en outre demandé si la police bénéficiait d’une formation spécifique pour le traitement des suspects.  Il a souhaité obtenir des informations complémentaires sur le cas de Khaled al-Masri, en demandant si cet Allemand d’origine libanaise soupçonné de terrorisme avait reçu des indemnités à la suite des mauvais traitements subis en détention.


M. EDWIN JOHNSON LOPEZ, expert de l’Équateur, a regretté le peu de place accordé dans le rapport aux Rom, qui représentent pourtant 3% de la population totale du pays.  Des informations font état de discrimination à l’égard de cette minorité, a-t-il souligné.  Il a également demandé des renseignements sur les questions portant sur les demandes d’asile.


M. ABDELFATTAH AMOR, expert de la Tunisie, a abordé la question de la perception des femmes dans la société, se déclarant en particulier choqué par le traitement du viol.  Y a-t-il eu des études portant sur l’image des femmes dans la société et sur certains aspects de misogynie?  Que fait l’éducation?, a-t-il demandé.


Réponses de la délégation aux questions orales des experts


La délégation a indiqué que la seule partie des Principes de Paris, qui n’avait pas été appliquée dans le cas du Bureau de l’Ombudsman concerne la question du financement de ce Bureau.


Répondant à Mme Motoc, la délégation a expliqué que la corruption était traitée comme telle, qu’il s’agisse de celle, banalisée, qui se fait sous la forme de bakchichs, ou de la corruption à plus grande échelle.  Nous ne faisons aucune différence entre les deux et nous nous efforçons d’y mettre fin par tous les moyens.


Il y a un nombre de femmes insuffisant au Gouvernement, a reconnu la délégation.  Dans ce domaine, le Gouvernement a appliqué en juin 2007 un Plan d’action dont les priorités sont de faire respecter la parité entre hommes et femmes et renforcer la participation de ces dernières aux processus de prise de décisions.  Nous sommes fiers de pouvoir dire que le nombre de femmes occupant des postes de responsabilité dans la société macédonienne est en hausse.  Malheureusement, les stéréotypes pesant sur les femmes et leur place dans la société ne peuvent pas disparaître en 10 ou 15 ans, s’est défendue la délégation.  Le pays s’efforce pour sa part d’incorporer pleinement le principe d’égalité entre les sexes dans tous les programmes et toutes les campagnes d’information et de sensibilisation. 


S’agissant de la question de M. Amor sur l’éducation, la délégation a répondu que l’article 10 de la loi pertinente du Ministère du travail est en conformité avec les législations dans les domaines de l’éducation.  Depuis 2007, un projet vise à renforcer la présence des femmes dans le corps professoral et à effacer les stéréotypes qui encombrent les programmes scolaires, a ajouté un des représentants.


Par ailleurs, l’inspection de la police est menée sans aucune approche discriminatoire ou sélective et tout agent de police qui s’est rendu coupable d’un comportement répréhensible est sanctionné, en particulier dans les cas d’utilisation non autorisée de la force.  L’an dernier, 38 officiers ont été démis de leurs fonctions, 134 autres ont reçu un avertissement, 48 ont été déclassés et 86 ont été suspendus jusqu’à ce que l’enquête dont ils font l’objet soit menée à son terme, a précisé la délégation.


Répondant à l’experte américaine, la délégation a reconnu qu’il existait dans son pays une communauté Rom ainsi que des réfugiés en provenance du Kosovo.  Dès que les conditions permettront un retour en toute sécurité, ces réfugiés pourront être rapatriés, a-t-elle précisé.  Par ailleurs, aucune discrimination fondée sur l’appartenance ethnique ou la nationalité n’est exercée à l’encontre des demandeurs d’asile.  S’agissant de Khaled al-Masri, la délégation a indiqué que l’enquête menée au sujet des mauvais traitements que ce ressortissant allemand aurait subis en détention n’avait abouti à rien.


Le simple fait que nous ayons préparé ce plan d’action pour les Rom indique la volonté du Gouvernement de s’occuper d’eux, a assuré la délégation.  La police opère en général conformément aux règlements qui sont les siens.  À ce titre, elle n’opère pas de façon sélective et vient en aide à tous les citoyens, quelle que soit leur appartenance ethnique ou religieuse.  D’ailleurs la semaine prochaine, a poursuivi la délégation, des organisations non gouvernementales seront invitées à venir évaluer par elles-mêmes le travail des forces de l’ordre.


Répondant aux experts de la Roumanie et de la Tunisie au sujet de la définition juridique du viol, également soulevée par certains groupes activistes des droits de l’homme, la délégation a expliqué que le Code pénal allait être amendé pour prendre en compte les arguments défendus aujourd’hui par les experts du Comité.  Elle a ensuite garanti qu’à chaque fois qu’un citoyen n’est pas satisfait de la manière dont la police fait son travail, il a la possibilité de recourir au mécanisme de contrôle de la police. 


Concernant la formation de la police, la délégation a indiqué que depuis 1992, l’Académie de police a introduit un cours sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales.  Enfin, dans le cadre de la collaboration avec le Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), des juges et des procureurs ont fait un voyage d’étude à La Haye pour se familiariser avec les mécanismes de justice internationale.


M. MICHAEL O’FLAHERTY, expert de l’Irlande, s’est dit déçu par la réponse apportée par la délégation sur le cas de Khaled al-Masri.  La délégation, a-t-il estimé, s’est contentée de dire qu’une enquête avait été menée et que rien n’avait été trouvé, ce qui n’est pas satisfaisant.


L’expert de la Tunisie a affirmé que la délégation n’avait pu, probablement faute de temps, lui fournir des précisions sur la mise en œuvre de l’article 11 du Pacte, demandant une réponse écrite dans les délais prévus.  L’article 11 du Pacte stipule que nul ne peut être emprisonné pour la seule raison qu’il n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle.  En réponse, la délégation a promis qu’elle fournira des explications par écrit.


Réponses aux questions écrites des experts


Liberté de circulation et protection contre l’expulsion (articles 12 et 13)


Citant des chiffres du Ministère du travail et de la politique sociale, la délégation a indiqué que le nombre des personnes déplacées à l’intérieur du pays s’établissait, au 7 mars 2008, à 778 soit 257 familles.  Le Gouvernement continue d’aider ces personnes, a-t-elle souligné, précisant que cette assistance n’était pas seulement financière.


Droit à un procès équitable (article 14)


La délégation a évoqué les différentes améliorations apportées pour lutter contre la corruption dans l’appareil judiciaire et pour combler le retard important accumulé dans le traitement des affaires.  Le nombre de cas en attente a diminué, a-t-elle souligné, précisant que le nombre d’affaires résolues avait augmenté de 6,4% en 2006 par rapport à 2005.


Liberté de religion (article 18)


Le 20 septembre 2007, l’Assemblée nationale a adopté la loi sur le statut juridique des églises, laquelle est conforme à l’article 9 de la Convention européenne sur la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales.  Tous les groupes religieux appuient cette loi, a précisé la délégation.  L’ex-République yougoslave de Macédoine garantit à tous le droit d’exercer une religion, a-t-elle précisé.


Droit de prendre part à la direction des affaires publiques (article 25)


La délégation a écarté les allégations de fraude qui ont pesé sur les élections locales.  Aucune inculpation n’a donc été prononcée dans ce contexte.  Aucune pression ou discrimination n’a été exercée à l’encontre de personnes appartenant à des minorités dans le cadre des différents scrutins.


L’Accord-cadre de 2001 a permis de mettre en œuvre les principes relatifs à une représentation équitable des minorités ethniques au sein de l’administration de l’État.  Ainsi 545 nouveaux postes ont été créés l’an dernier au sein de l’administration pour des personnes issues de minorités, ce qui n’est pas négligeable au regard de la taille de l’État, a fait observer la délégation.  La participation des Albanais a augmenté de 20% depuis le début de l’application de l’Accord-cadre.  Des amendements récents à la législation ont permis aussi aux communautés non majoritaires d’accéder progressivement aux postes de responsabilité, y compris au sein de l’appareil judiciaire.


Droit à l’égalité devant la loi et à une égale protection (articles  2 et 26)


En ce qui concerne les mesures prises par l’État pour délivrer à tous les Roms qui en font la demande des documents personnels leur garantissant l’exercice en toute légalité des droits fondamentaux et l’accès aux services médicaux, la délégation a estimé que beaucoup était fait pour régulariser leur situation.  Mais elle a fait état des difficultés à faire connaître aux Roms, une population nomade, la possibilité pour eux de faire une demande de citoyenneté.


Droits des personnes appartenant à des minorités (article 27)


S’agissant des langues, il n’y pas eu de plaintes concernant la possibilité d’utiliser des langues non majoritaires dans l’administration.  La délégation a expliqué que le Ministère de l’éducation et des sciences avait mis au point des programmes afin d’améliorer la qualité des cours et des enseignements destinés aux Roms.  Cette année, le Ministère de l’éducation nationale a lancé un Plan d’action décennal intitulé « Roma » et qui couvre la période 2005-2015.  Ce Plan prévoit de faciliter l’accès des Roms au cycle secondaire.  En outre, une initiative a été mise en place dans cinq écoles publiques secondaires de la capitale pour dispenser des cours en rom et mieux intégrer ses locuteurs.


Diffusion d’une information concernant le Pacte et le Protocole facultatif (article 2)


La délégation a expliqué que des brochures contenant des informations relatives au Pacte avaient été diffusées dans les langues officielles.  En outre, un groupe d’ONG et de représentants gouvernementaux a pu procéder au contrôle de l’application des observations et conclusions faites par le Comité des droits de l’homme à l’issue de la présentation du rapport précédent.


Questions des experts


L’experte des États-Unis a demandé des précisions sur les preuves que doivent apporter les Roms pour justifier leur nationalité.  Elle a en outre demandé si des journaux étaient publiés ou des émissions de télévision diffusées en langue rom.


M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI, expert de l’Inde, a demandé si les informations faisant état d’accrochages entre étudiants macédoniens et albanais à propos d’une augmentation des cours en albanais et du fonctionnement des écoles ethniquement mixtes étaient avérées.  Il a également souhaité connaître les mesures prises pour remédier à la pénurie des enseignements en langue rom.  Quelles mesures de discrimination positive ont été prises pour assurer une répartition équitable au sein de l’enseignement supérieur pour les Roms ou les autres communautés minoritaires?, a-t-il également demandé.


L’expert de l’Irlande a demandé des compléments d’informations sur les juges accusés de corruption dont avait parlé plus tôt le chef de la délégation.  L’expert s’est de même déclaré troublé par le niveau de mauvais traitements sur les enfants roms de la part d’autres enfants ou de professeurs eux-mêmes.  Quelles mesures sont prises pour faire face à ce problème?, a-t-il demandé.


L’experte de la Roumanie a souhaité des précisions concernant les irrégularités constatées lors des élections d’avril 2005.  Les enquêtes menées ont-elles donné des résultats?


Réponses de la délégation


La délégation a indiqué que la reconstruction des logements détruits lors de la crise de 2001 n’était pas liée à la compensation financière que reçoivent mensuellement les personnes déplacées.


Le Ministère du travail et des affaires sociales a entamé la rédaction d’une législation antidiscrimination.  Un projet de texte sera ensuite présenté au Gouvernement qui l’examinera à son tour.  Il devrait être adopté à la fin de l’année 2008, a précisé la délégation. 


Le Gouvernement ne demande pas la preuve du lieu de naissance des membres de la communauté rom pour régler leur statut.  Ce sont des citoyens, a souligné la délégation, s’interrogeant néanmoins sur les moyens à développer pour encourager les Roms à se présenter sur une base volontaire auprès des organes compétents pour régler leur statut.  La délégation a également confirmé l’existence de programmes de télévision dans les langues minoritaires.


De même, le Ministère de l’éducation a commencé, il y a deux ans, à donner des cours d’éducation civique aux élèves roms de la dernière année du primaire et de la première année du secondaire.  La délégation a, plus généralement, mis l’accent sur la nécessité de faire participer les enfants roms au système éducatif.  Il convient de réaliser l’éducation pour tous, a-t-elle souligné, précisant que les efforts entrepris en ce sens bénéficiaient de l’appui de l’UNICEF.


S’agissant de la liberté religieuse, la délégation a indiqué qu’un amendement à la Constitution stipulait que les différentes religions étaient séparées de l’État et égales devant la loi. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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