DH/4949

L’INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES EXAMINE LES VIOLATIONS ACTUELLES DES DROITS DE L’HOMME ET LES MÉCANISMES PERMETTANT DE LES ÉVITER

28/04/2008
Conseil économique et socialDH/4949
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Instance permanente sur les questions autochtones

Septième session

8e & 9e séances – matin & après-midi


L’INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES EXAMINE LES VIOLATIONS ACTUELLES DES DROITS DE L’HOMME ET LES MÉCANISMES PERMETTANT DE LES ÉVITER


Malgré une étape historique franchie en septembre 2007 avec l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, ceux-ci souffrent toujours d’un déni et de violations de ces droits, ont constaté aujourd’hui de nombreux participants aux travaux de l’Instance permanente sur les questions autochtones.  Après des exemples concrets fournis par les représentants autochtones aujourd’hui, l’Instance permanente a dialogué avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones, Rodolfo Stavenhagen, et examiné les mécanismes renforçant la protection de ces droits.


L’amélioration de la santé des autochtones constitue un droit aux termes de l’article 21 de la Déclaration, mais ce droit n’est pas encore pleinement respecté pour de nombreux autochtones, a-t-on notamment constaté.  Le cas du peuple Yuqi a été mentionné, car ce peuple de la Bolivie est encore ravagé par la tuberculose.  Au Brésil, les autochtones sont menacés par des maladies liées aux activités des entreprises, en particulier l’hépatite, et souffrent de l’insuffisance de soins.


Le respect des terres autochtones et de leurs régimes fonciers étant aussi prévu par la Déclaration, plusieurs représentants comme ceux du Cambodge où le processus d’enregistrement des propriétés foncières autochtones est encore lent, ont espéré voir leur situation s’améliorer.  Le peuple Guarani, en Amérique du Sud, connaît aussi des problèmes fonciers, a-t-il été signalé.  De leur côté, les Sioux de l’État du Dakota du Sud, aux États-Unis, se sont plaints des dégradations écologiques de leurs terres résultant de leur exploitation par des compagnies privées.


D’autres représentants des peuples autochtones ont réaffirmé leur droit à l’autodétermination.  C’est le cas pour les habitants d’Hawaii qui se considèrent exclus du processus de décolonisation.  Pour sa part, la représentante du Grand Conseil des Mi’kmaq a regretté que le Gouvernement canadien considère que la Déclaration des Nations Unies ne s’applique pas au Canada.  Nous sommes en faveur de la protection des droits de l’homme des autochtones, a cependant assuré le délégué canadien.  M. Willie Littlechild, de l’Assemblée des Premières Nations, a invité le Gouvernement canadien à entendre la voix de son parlement qui, le 8 avril, a souhaité l’adhésion à la Déclaration.


Pour le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones, on peut toutefois se féliciter des très grands progrès réalisés dans le domaine de la législation dans de nombreux pays.  Rodolfo Stavenhagen, qui achève son mandat dans deux jours, a présenté les activités menées par son bureau.  Il a cité 11 visites officielles menées dans le cadre de son mandat depuis 2001, dont les dernières en Bolivie, au Mexique, ainsi qu’en Norvège et en Finlande pour suivre la situation du peuple saami.


L’adoption de la Déclaration de l’ONU en septembre dernier permet d’établir un nouveau cadre normatif et offre un immense potentiel pour les droits des autochtones, a estimé le Rapporteur spécial.  James Anaya, qui est le prochain Rapporteur spécial, a rappelé que cette Déclaration avait été adoptée par une majorité écrasante des États Membres de l’ONU.  M. Stavenhagen a aussi souligné le principe de coopération entre les gouvernements, l’ONU et les autochtones en matière de droits de l’homme.  L’experte de la Chine et membre de l’Instance, a pour sa part insisté sur l’importance de la coopération entre tous les acteurs en matière des droits de l’homme aux Nations Unies, afin d’éviter les doubles emplois.


Les membres de l’Instance, qui sont au nombre de 16, étaient saisis d’une étude sur les structures, procédures et mécanismes existant ou pouvant être mis en place pour examiner efficacement la situation des droits de l’homme des peuples autochtones*.  À ce sujet, les intervenants ont rappelé les trois mécanismes qui permettent actuellement de promouvoir et faire respecter ces droits.  Outre l’Instance permanente et le Rapporteur spécial, il y a aussi le nouveau mécanisme d’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme, créé en décembre dernier.  Une représentante du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a encouragé tous les représentants de communautés autochtones présents à y contribuer.


L’Instance permanente poursuivra ses travaux demain, mardi 29 avril, à 10 heures.


*E/C.19/2008/2


DROITS DE L’HOMME: DIALOGUE AVEC LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES DES PEUPLES AUTOCHTONES ET AVEC LES AUTRES RAPPORTEURS SPÉCIAUX


Déclarations


Lisant une déclaration commune aux Organisations autochtones du bassin de l’Amazonie, M. EGBERTO TABO CHIPUNAVI, s’est inquiété de la situation d’isolement que connaissent les peuples autochtones du bassin et a estimé qu’il était insupportable que cette situation soit connue depuis de nombreuses années sans que l’on ait pu obtenir le moindre appui pour la protection de ces peuples.  Il a souhaité que l’on invite les États à adopter des lois et à assurer une réelle protection juridique pour ces peuples.  Le représentant s’est inquiété de l’impact des activités de multinationales sur la vie des autochtones en citant l’exemple de populations qui, au Brésil, sont menacées par diverses maladies liées aux activités de telles entreprises.  Il a aussi mis l’accent sur les difficultés que rencontrent les autochtones en raison des activités de la guérilla, notamment en Colombie.


M. KYAW TINT SWE (Myanmar) a souhaité que l’on accorde une attention particulière au développement des peuples autochtones.  Le Gouvernement du Myanmar a mis en place en 1992 un ministère spécialement chargé d’assurer le développement des ethnies nationales.  De grandes transformations ont ainsi été obtenues par le biais de l’amélioration des infrastructures sociales et économiques.  Citant les progrès de son pays en matière de santé, il a mis l’accent sur le Programme national contre la tuberculose, établi en 1966, qui a permis depuis d’améliorer la détection de la maladie.  Le représentant a aussi signalé la diminution de l’incidence du VIH/sida depuis 2005.


Mme PAULINE KINGI, Ministère pour le développement des Maoris de la Nouvelle-Zélande, a abordé la politique suivie par son pays en faveur des Maoris.  Elle a mentionné l’approche intégrée adoptée qui fait partie d’une stratégie visant à assurer le développement des Maoris.  Cette stratégie se base sur le principe qu’il faut investir dans ce peuple car il représente le succès de la Nouvelle-Zélande.  Les Maoris représentent 15% de la population, a-t-elle précisé.  Le principe de la distinction culturelle qui est appliqué reconnaît les traditions des Maoris comme participant à l’enrichissement de la société tout entière.  Un autre principe prévoit que les Maoris décident de toutes les actions qui les concernent.  Le Gouvernement continuera d’aborder les disparités entres Maoris et le reste de la population, l’objectif étant que les Maoris réalisent pleinement leur potentiel économique et culturel.  La représentante a terminé son intervention par une chanson de son pays.


Mme CHERYL MALONEY, Grand Conseil des Mi’kmaq, s’est félicitée de l’intention du Gouvernement canadien de soutenir la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, mais a regretté qu’il considère qu’elle ne s’applique pas au Canada.  Elle a aussi évoqué les difficultés rencontrées lors des négociations ayant mené à l’adoption de la Déclaration, qui ont révélé l’ampleur de la discrimination dont fait encore preuve le Canada.  Elle a demandé à l’Instance que les mécanismes de l’ONU disposent de mécanismes spéciaux pour la protection des autochtones et de leurs droits.  L’ONU ne devrait pas permettre à certains États de saper le consensus international, en déclarant que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ne s’applique pas à eux, a-t-elle estimé.


Mme JOENIA CARVALHO, Coalition des peuples du Brésil, a rappelé que bien que 13% du territoire du Brésil était occupé et géré par les autochtones, aucune information sur le statut de ces autochtones ne circulait.  Il est important que l’Instance suive l’évolution de cette situation sur le plan de la diversité et de la situation socioéconomique, a-t-elle dit.  Elle a estimé que le statut des terres des peuples autochtones était une question très importante dans un contexte marqué par de nombreuses violations.  Nous avons saisi la Cour de cassation du Brésil pour nous entendre dire que les terres autochtones constituaient une atteinte à l’intégrité du Brésil et une menace au développement économique, a-t-elle dénoncé.  Elle a dénoncé les menaces sur la survie des peuples autochtones en raison de l’absence d’accès aux soins de santé ainsi que les assassinats de dirigeants autochtones, vraisemblablement commis par des chercheurs d’or.  Nous sommes venus pour que cela soit porté à l’attention des instances des droits de l’homme, a-t-elle insisté, en exhortant l’Instance à demander au Gouvernement du Brésil de consulter les autochtones pour la présentation de son rapport national.


Mme MACKENZIE, Caucus des femmes autochtones, a demandé la mise en œuvre des recommandations de l’atelier qui s’est tenu à Genève sur les peuples autochtones et la migration, notamment en ce qui concerne les violences à l’égard des femmes et la traite humaine.  Elle a invité le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et les autres organismes des Nations Unies à continuer de produire des données ventilées en tenant compte des femmes autochtones.  Elle a encouragé les États Membres à faire rapport sur les cas de violence à l’égard des femmes autochtones.  Elle a recommandé aux organismes de l’ONU que tous les efforts soient faits pour préserver l’intégrité des familles autochtones, en dénonçant le déplacement forcé des enfants sous prétexte de service militaire ou de scolarisation forcés.


Mme YUKI HASAGAWA, Caucus asiatique, a été encouragée par le soutien exprimé par le Cambodge en faveur de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, mais s’est dite préoccupée de voir que le processus d’enregistrement des propriétés foncières des peuples autochtones est encore lent dans ce pays.  Cela peut saper le principe des terres communautaires et peut entraîner, selon elle, la disparition des peuples autochtones.  Or, cela serait contraire à l’article 26 de la Déclaration.  La représentante a jugé approprié d’harmoniser les procédures des titres de propriété foncière avec l’article 19 de la Déclaration.  Elle a recommandé à l’instance qu’elle engage le Gouvernement cambodgien à lancer des consultations sur le processus d’enregistrement des terres appartenant aux peuples autochtones, et qu’il harmonise les procédures des titres fonciers avec l’article 19.


Mme LUCIA FERNANDA KAINGANG, Caucus des Caraïbes, a expliqué que les peuples de cette région ne disposent pas de programmes d’appui au développement des ressources naturelles.  Il a mis en cause le développement des biocombustibles et les méga-projets mis en œuvre dans ces territoires qui entraînent plus de pauvreté et mettent en péril les droits fondamentaux des autochtones.  Il a insisté sur le fait que la reconnaissance de ces droits est une condition de la préservation de la biodiversité.  Il a recommandé à l’Instance d’engager les parties à la Convention sur la diversité biologique à assurer le développement sui generis et la préservation des pratiques des autochtones.  Enfin, il a appelé à reconnaître les droits collectifs des autochtones et leurs systèmes culturels propres.


Intervenant au nom de 20 organisations autochtones du Pacifique et des Caraïbes, Mme. MILILANI TRASK, Association rurale internationale, a regretté que les efforts en matière de droits des autochtones soient entravés par un manque de clarté.  Elle a déclaré que cette situation n’était plus acceptable depuis l’adoption de la Déclaration de l’ONU sur les peuples autochtones.  Elle a estimé que l’Instance avait l’obligation de s’assurer que la Déclaration était intégrée à tous les travaux de l’Organisation.  Elle a souhaité un examen technique de cette Déclaration pour faire en sorte qu’elle soit mise sur pied d’égalité avec les autres traités.  Un examen technique, a-t-elle ajouté, serait un outil pédagogique très important pour les autochtones.


Mme MARIA SARAVIA Comité international pour la défense des peuples autochtones (CPRC), s’est dite préoccupée par la situation de tous les autochtones qui vivent dans l’isolement le plus total.  Elle a invité les gouvernements de tous les pays à respecter l’intégrité des territoires autochtones qui, chaque jour, sont exploités par des compagnies qui exploitent le bois.  En matière de santé, elle a souhaité que des mesures urgentes soient prises en faveur du peuple Yuqi de Bolivie qui est ravagé par la tuberculose.  Elle a aussi mis l’accent sur l’impact de l’hépatite sur des populations autochtones du Brésil.  Dans l’est du Paraguay, a-t-elle encore dénoncé, les habitats des populations autochtones sont menacés par les sociétés d’abattage de bois.


M. FYFE, Fondation Kaoni, qui s’exprimait au nom du Caucus Hawaii, a rappelé qu’après la création d’un royaume à Hawaii, les États-Unis avaient perpétré un acte de guerre qui a en 1893 débouché sur l’occupation militaire de l’île.  En 1946, Hawaii a été inscrite sur la liste des Nations Unies des territoires non autonomes et, en 1949, les résidents ont voté en faveur d’un État d’Hawaii.  Mais, en 1959, l’ONU a retiré ce territoire de la liste des territoires non autonomes après avoir été induites en erreur par les États-Unis, a expliqué le représentant.  Le peuple autochtone d’Hawaii ne peut donc pas jouir de ses droits et ses revendications n’ont pas encore été réglées, a-t-il ajouté.  Il s’est demandé pourquoi l’Alaska et Hawaii avaient été exclus du processus de décolonisation.  Ces peuples ont le droit à l’autodétermination, à son avis, et il faut leur permettre d’exercer ce droit par le biais de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.


Mme ANDREA CARMEN, Conseil du traité indien et du Réseau environnemental des autochtones, a parlé de la situation au Dakota.  Les Sioux dénoncent des violations de leurs droits, notamment par rapport à un traité passé entre eux et l’État du Dakota du Sud, a-t-elle expliqué.  La représentante a évoqué des dégradations environnementales qui résultent de certaines exploitations sur ce territoire.  Elle a dénoncé la répression qui empêche toute protestation de la part des autochtones, notamment les arrestations de personnes âgées.  Elle a rappelé que les États-Unis ont signé la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et que la Constitution américaine reconnaît la valeur suprême des traités.  Elle a donc demandé que l’Instance transmette sans délai au  Haut Commissariat aux droits de l’homme un rapport sur les violations des droits des peuples autochtones de cette région.


M RODOLFO STAVENHAGEN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones, a présenté les activités menées par son bureau depuis la précédente session.  Il a indiqué que son rapport comportait une documentation relevant diverses pratiques qui ont permis d’intégrer les droits et intérêts des autochtones dans des domaines comme le développement, l’appropriation des droits et le renforcement des capacités de cette population à défendre leurs droits.  Parmi ses récents déplacements, il a cité une mission de travail en Bolivie du 27 novembre au 7 décembre 2007, un déplacement au Mexique en septembre 2007, en compagnie du Rapporteur spécial sur les questions de droit à un logement adéquat dans le cadre des problèmes liés au projet hydroélectrique de la province de Guerrero, ou encore une mission en Norvège et Finlande pour suivre la situation du peuple saami.


La situation des droits des peuples autochtones a connu de grands progrès au cours de la décennie écoulée, même si il y a eu quelques revers, a-t-il estimé, en citant des activités minières ou forestières qui sont venues affecter négativement la vie des autochtones.  Il s’est félicité des très grands progrès réalisés dans beaucoup de pays en matière législative.  Il a souhaité que seul un développement reposant sur le respect des droits de l’homme soit pris en compte par les institutions publiques.  Il a cité 11 visites officielles menées dans le cadre de son mandat depuis 2001 et les comptes rendus figurent tous à son rapport.  Il a indiqué que depuis 2001, il avait transmis 200 communications à différents gouvernements, parmi lesquelles des communications conjointes avec d’autres rapporteurs spéciaux ou experts indépendants du Conseil des droits de l’homme dont les mandats avaient en commun les droits des autochtones, y compris les droits au logement, à la santé et à l’alimentation.  Il s’est félicité de l’adoption de la Déclaration de l’ONU en septembre dernier qui établit un nouveau cadre normatif.  Elle dispose d’un immense potentiel en ce qu’elle crée un cadre de coopération entre les gouvernements, l’ONU et les peuples autochtones en matière de droits de l’homme.


M. JAMES ANAYA, professeur de droit dans l’État de l’Arizona et prochain Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones, qui occupera ses fonctions à partir du 1er mai, a rendu hommage à M. Stavenhagen pour son travail accompli.  Il rappelé que les autochtones sont les pauvres parmi les plus pauvres et qu’ils sont souvent privés de leurs terres.  La responsabilité de préserver leurs droits est une tâche énorme, a-t-il relevé.  Mais notre ère est tournée vers le dialogue et le futur en vue d’améliorer l’exercice de ces droits, a-t-il noté.


Mme XIAOMEI QIN,experte de la Chine et membre de l’Instance, a estimé que l’Instance devrait renforcer sa coopération avec tous les acteurs en matière de droits de l’homme aux Nations Unies afin d’éviter les doubles emplois.  Nous espérons que les contributions de l’Instance aideront le Rapporteur spécial, et réciproquement, a-t-elle dit.  Elle a estimé qu’il faudrait peut-être intégrer les travaux de l’Instance dans les mécanismes du Conseil des droits de l’homme, afin de mieux appliquer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.


Tout en se félicitant du succès que représente l’adoption de la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, M. HASSAN ID BALKASSM, expert marocain et membre de l’Instance, a prévenu qu’il était encore nécessaire de défendre les droits économiques et sociaux de nombreux autochtones dans de nombreuses régions et de tout mettre en œuvre pour permettre leur participation à la prise de décisions.  Il a estimé que cela exigeait un réexamen des politiques gouvernementales qui isolent les peuples autochtones.


M. ALLAN TORBITT (Canada) a déclaré que son pays avait toujours apporté le plus grand soutien à la mission du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones.  Il a précisé que son pays avait soutenu la résolution du Conseil des droits de l’homme qui avait prolongé son mandat et coparrainé la résolution qui établit un nouveau mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones.


M. CARLOS MAMANI CONDORI, expert bolivien et membre de l’Instance, a demandé au Rapporteur spécial de suivre l’application des droits des autochtones en Bolivie et dans la région.  Il a mentionné en particulier l’existence de groupes locaux qui méconnaissent les droits des peuples autochtones.  L’expert a soulevé la situation du peuple guarani en Amérique du Sud dont les droits sont méconnus et violés de manière permanente.  Il a demandé d’examiner leur cas et en particulier les problèmes fonciers qu’ils rencontrent.


Mme MARIA FERNANDA ESPINOSA (Équateur) a indiqué que son pays avait été coauteur de la résolution nécessaire à l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  L’engagement de son pays à l’égard de ces peuples repose sur le travail commun accompli par l’État et les peuples autochtones ces dernières années.  Le fruit de ce travail a été l’incorporation des droits des peuples autochtones dans la Constitution, ainsi que la ratification de la Convention 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) relative à ces peuples.  L’Équateur se félicite que le Conseil des droits de l’homme ait créé le mécanisme de Rapporteur sur les droits des peuples autochtones, a indiqué la représentante.  Elle s’est aussi félicitée que le Conseil ait décidé de proroger pour trois ans le mandat de ce Rapporteur spécial.  L’Équateur vient de faire l’objet d’un examen dans le cadre du Conseil des droits de l’homme, après sa visite officielle en 2006, a-t-elle rappelé.


La représentante a expliqué quels efforts son pays avait déployés pour donner suite à la recommandation du Conseil des droits de l’homme de mieux coordonner les institutions relatives aux autochtones.  La représentante a aussi parlé de la politique nationale de protection des peuples isolés volontairement.  Pour améliorer la qualité de vie des autochtones, l’État a financé des mesures en leur faveur en canalisant l’excédent des prix du pétrole, afin notamment d’encourager des investissements en matière de santé et d’éducation.  La représentante a enfin parlé de la recommandation du Rapporteur spécial à l’égard de la Colombie, afin que celle-ci ne procède plus à des fumigations aériennes anticocaïne qui affectent les droits des Équatoriens, notamment la santé des paysans et des autochtones et l’environnement.


M. ADEL G. M. ALAKHDER (Jamahirya arabe libyenne) a remercié le Rapporteur spécial pour le travail réalisé et a souhaité une action urgente pour que l’on cesse « d’être sur le chemin et les terres des peuples autochtones du monde entier ».


M. BARTOLOME CLAVERO SALVADOR, expert de l’Espagne et membre de l’Instance, a souligné l’importance du rôle du Rapporteur spécial dans le cadre du fonctionnement du mécanisme d’experts chargé des questions autochtones.  Il a suggéré que la Déclaration sur les droits des peuples autochtones serve de cadre normatif pour la formulation des rapports périodiques sur la situation de ces autochtones.


Mme PAIMANEH HASTEH, experte de la République islamique d’Iran et membre de l’Instance, a émis l’espoir que, pour mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, les questions essentielles relatives à ces peuples soient examinées par les États lors de la première étape du mécanisme d’examen universel par le Conseil des droits de l’homme.  Elle a aussi souhaité que l’on discute des incidents violents qui ont lieu au sein de la jeunesse autochtone et suggéré que le Rapporteur spécial en rende compte dans son rapport annuel ou dans le cadre de visites de pays.  Elle a demandé au Rapporteur en fonction et au prochain comment cette question était intégrée dans les examens en cours ou prévus.


M. CARSTEN SMITH, expert de la Norvège et membre de l’Instance, a relevé que, pour le Rapporteur spécial en exercice, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones fait déjà partie du cadre international des règles juridiques applicables aux autochtones.  L’Instance se doit d’organiser ses travaux en vue de faire de cette déclaration un instrument non seulement vivant, mais aussi un instrument dont la signification ne fera que croître, a-t-il aussi noté.  Il a demandé à M. Stavenhagen s’il avait des conseils à formuler pour que l’Instance mène au mieux sa mission.


Répondant aux questions qui lui ont été posées, M. STAVENHAGEN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones, a déclaré que la fin de son mandat ne signifiait pas qu’il allait cesser de s’occuper des questions autochtones.  Il a formé le vœu de contribuer aux travaux du Conseil des droits de l’homme et de l’Instance permanente sur les questions autochtones.  Il s’est dit convaincu que l’examen périodique universel commencé par le Conseil des droits de l’homme au cours de sa session récente est très important.  Il a estimé que le Rapporteur spécial, tout comme le mécanisme spécial créé par le Conseil des droits de l’homme, devraient mettre en commun leurs efforts avec les gouvernements et les organisations des peuples autochtones pour s’assurer que le droit des peuples autochtones soit présent constamment dans tous les débats.  Il s’est dit surpris de constater l’absence de coopération entre les organes en charge des questions autochtones dans certains pays, en citant en exemple la coopération observée au niveau international au sein de l’Instance.  Il a recommandé au Conseil des droits de l’homme de renforcer l’unité des mécanismes traitant de la question des peuples autochtones au sein du Bureau du  Haut Commissariat aux droits de l’homme en intégrant la référence que constitue la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, nouvelle référence internationale en matière de droits fondamentaux.  Il a regretté que certains pays aient déclaré ne pas se sentir liés par ce texte, arguant du fait qu’elle n’est pas applicable à leur situation particulière.


M. JAMES ANAYA, futur Rapporteur spécial, a relevé des lacunes dans la mise en œuvre de la Déclaration sur les droits des autochtones et les écarts entre les souhaits exprimés et les réalisations sur le terrain.  Il a rappelé que cette Déclaration était un guide pour toutes les actions qui seront prises par tous les organes des Nations Unies concernant toutes les questions relatives aux autochtones.  Malgré des oppositions, il a rappelé que cette Déclaration avait été adoptée par une majorité écrasante des États Membres de l’ONU.  Il a mis l’accent sur l’importance du principe du consentement préalable et informé.  En examinant la Déclaration des droits des peuples autochtones, a-t-il ajouté, nous devons prendre en compte les autres instruments qui peuvent concerner d’une manière ou d’une autre les droits des autochtones.  Il s’est félicité de la mise en place d’un processus d’examen périodique universel au sein du Conseil des droits de l’homme en souhaitant un dialogue qui s’appuie sur le contenu de la Déclaration.  Il a estimé qu’un tel dialogue ne pouvait être que prometteur et devrait conduire à des stratégies de mise en œuvre de la Déclaration.


M. SIRAMIN BOEGKIN, Caucus des peuples du Pacifique, a recommandé que l’Assemblée générale adopte une résolution détaillée pour encourager les États Membres à mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Le Caucus demande que tous les États du Pacifique travaillent à mettre en œuvre cette Déclaration, en mettant l’accent sur l’exercice du droit à l’autodétermination.  Il a invité le nouveau Rapporteur spécial à rendre visite à sa région et à étudier cette question particulière.  Le représentant s’est félicité de la décision de l’Australie de soutenir la Déclaration et a demandé que son gouvernement présente une déclaration à l’Assemblée générale à cet égard.  Il a appelé le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande et d’autres gouvernements de la région à suivre le mouvement donné par l’Australie et à affirmer aussi leur soutien à la Déclaration.  Le représentant a ensuite regretté que le Canada ne respecte pas les intérêts des autochtones du Pacifique.  Considérant que ce pays ne présente pas le caractère objectif nécessaire à sa participation au Conseil des droits de l’homme, il a demandé que l’on considère que les candidatures de pays soutenant la Déclaration.  Enfin, le représentant a lancé un appel aux États pour qu’ils contribuent financièrement à aider les peuples autochtones du Pacifique, s’adressant particulièrement à la France, pour qu’elle fournisse des fonds afin de s’assurer que la langue française et les francophones soient intégrés dans les réunions du Caucus pacifique.


M. PHEAP SOCHEA, Caucus asiatique, a réitéré les recommandations formulées lors de la sixième session de l’Instance.  Il a recommandé par exemple la création d’un mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, l’adoption de directives des Nations Unies sur les peuples autochtones, et la ratification de la Convention 169 de l’OIT par le Népal.  Il a attiré l’attention de l’Instance sur la non-reconnaissance de certains peuples autochtones par des gouvernements, la non-reconnaissance des droits protégeant les peuples autochtones et les déplacements de personnes en raison de projets économiques.  Il a aussi noté les assassinats extrajudiciaires qui sont encore perpétrés au Myanmar, au Bangladesh et aux Philippines.  Il a demandé à l’Instance de veiller à ce que les experts soient vraiment d’origine autochtone et qu’ils proviennent de régions où les droits de l’homme sont violés de façon systématique.


M. MATTIAS ARWEN, Caucus de l’Arctique, a défendu le droit des peuples à disposer du droit à l’autodétermination.  Estimant que ce droit était une condition préalable à la mise en œuvre de la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, il a suggéré que l’autodétermination soit le thème des travaux de l’Instance permanente pour 2009.  Il a invité le Canada à changer sa position et à appuyer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Il a demandé des informations aux Gouvernements du Danemark, Finlande, Norvège, Suède et de la Fédération de Russie au sujet d’activités menées allant à l’encontre des droits des peuples autochtones.


Exerçant un droit de réponse à la suite d’une assertion du représentant de l’Équateur, M. CARLOS SUAREZ(Colombie) a rappelé combien l’exploitation de la drogue avait contribué à la destruction de forêts.  Il a précisé que la Colombie avait pris des mesures pour éradiquer des cultures spécifiques, par le biais de saupoudrages aériens et de cultures alternatives.  Les saupoudrages de zones frontalières avec l’Équateur, a-t-il précisé, ont été suspendus en février dernier comme signe de bonne volonté du Gouvernement colombien, même s’ils ont dû reprendre en raison de l’augmentation des cultures illicites dans la zone frontalière.  Nous avons décidé d’intensifier la destruction de cultures illicites par voie manuelle pour éviter les saupoudrages, a-t-il précisé, en assurant l’Instance de la détermination de la Colombie à mener ce travail de destruction de cultures illicites en coopération bilatérale avec l’Équateur.


Mme IDA NICOLAISEN, Rapporteure spéciale et coauteur de l’Étude menée sur les structures, procédures et mécanismes existant ou pouvant être mis en place pour examiner la situation des droits de l’homme des peuples autochtones, a expliqué que l’Instance permanente avait été créée pour faire des recommandations sur les questions autochtones, avec pour objectif principal d’examiner, au sein des Nations Unies, les droits de ces peuples.  Par conséquent, les droits de ces peuples font partie intégrante des efforts des Nations Unies, a-t-elle déduit.  L’Instance a mis au point des recommandations relatives aux droits de l’homme, dès la première session, et elle a mis en place une collaboration avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones.  Mme Nicolaisen a noté qu’un certain nombre de recommandations relatives aux peuples autochtones avaient été examinées par le Conseil des droits de l’homme depuis la création de celui-ci.


L’étude, a précisé Mme Nicolaisen, comprend notamment un descriptif des travaux de l’Instance permanente depuis sa création.  Mme Nicolaisen a aussi expliqué avoir traité elle-même de l’impact de la Déclaration des Nations Unies sur les travaux de l’Instance et de l’interaction du Conseil des droits de l’homme avec l’Instance.  L’étude aborde aussi le mécanisme d’experts créé par le Conseil.  Une création dont Mme Nicolaisen s’est félicitée.  L’Instance permanente a pu prouver qu’elle pouvait renforcer l’élan des Nations Unies et celui des peuples autochtones pour améliorer les situations sur le terrain, s’est-elle réjouie.  Elle a précisé que l’étude recommande à l’Instance que la Déclaration sur les droits des peuples autochtones soit intégrée dans toutes ses recommandations et dans les travaux de ses différentes sessions.  Elle propose également la création d’une chambre au sein de l’Instance permanente relative à la Déclaration de 2007.  Pour conclure, Mme Nicolaisen a cité Thomas Jefferson qui, dans la Déclaration d’indépendance des États-Unis, affirmait que nous sommes créés égaux et indépendants, ce qui implique des droits inaliénables pour tous.


Dans ses commentaires relatifs au Rapport concernant la mise en œuvre de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, M. WILLIE LITTLECHILD, coauteur de l’Étude, s’est dit heureux d’avoir coprésidé la session extraordinaire de l’Instance permanente à Genève, aux côtés de l’Ambassadeur de Bolivie.


Mme KIRSTI GUVSÁM, Caucus des jeunes autochtones, a insisté sur la nécessité de reconnaître la contribution et l’héritage que nous ont fait nos ancêtres.  Elle a encouragé les États qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à la Déclaration de l’ONU sur le droit des peuples autochtones.  Elle a déclaré que les jeunes étaient particulièrement vulnérables à toutes les mesures d’oppression, précisant que leur malaise social les menaient à l’alcoolisme et au suicide.  Elle a fustigé les gouvernements qui, selon elle, cherchent à étouffer la voix des jeunes.  Elle a appelé les dirigeants du monde à travailler avec la jeunesse.  Elle a aussi mis l’accent sur l’importance des articles 7 et 8 de la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones en souhaitant que l’on fasse en sorte que les gouvernements diffusent le texte de cette déclaration.


Mme SAMIA SLIMANE, Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a félicité le Rapporteur spécial, M. Stavenhagen, pour sa contribution pendant ses deux mandats.  Elle a encouragé tous les représentants de communautés autochtones présents à contribuer à l’examen périodique universel à venir.  Elle a salué le nouveau mécanisme d’experts, sollicité depuis longtemps par les autochtones et que l’ONU vient de mettre en place.  Elle a en mis l’accent sur la nécessité de voir comment utiliser au mieux cette nouvelle occasion offerte aux autochtones.  Elle a ajouté que le Haut Commissariat estimait qu’il avait une responsabilité particulière en matière de mise en œuvre de la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones.


M. ALAKHDER (Jamahirya arabe libyenne) a précisé que son pays a appuyé la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Il a exprimé son sentiment d’optimisme à la vue de l’enthousiasme des jeunes pour la cause des peuples autochtones, mais a contesté le fait que les jeunes autochtones de son pays n’avaient pas le droit d’utiliser leur langue.  Seulement, a-t-il précisé, la langue arabe a un rang de priorité pour tout ce qui a trait à la religion.  Les droits de l’homme commencent par le droit à la santé et à l’eau, avant même le droit à l’éducation, selon lui.  Il a émis l’espoir que la jeunesse ne sera pas induite en erreur.


M. HILL MICHAEL PAUL, au nom de plusieurs Communautés apaches, a indiqué s’opposer à la construction du mur érigé par les États-Unis à la frontière avec le Mexique.  Il a aussi demandé à l’Instance de s’opposer à la militarisation des terres traditionnelles.  Alors que des soldats américains sont postés à la frontière mexicaine pour la construction du mur, on note que de nombreuses femmes autochtones ont disparu.  Une autre conséquence de cette intervention est la disparition des plantes qui sont utilisées à des fins médicinales et la destruction de l’habitat et de l’environnement en général.  Le représentant a donc demandé à l’Instance de s’intéresser à la dégradation écologique de cette région.


M. LLYOD BUSHEY (Nicaragua) a indiqué que son pays appliquait à l’heure actuelle la décision de la Cour internationale des droits de l’homme de l’Amérique latine en procédant à une nouvelle ligne de délimitation et à la remise des titres de propriété de la communauté autochtone lésée.  Il est nécessaire de reformer la loi électorale pour clarifier la forme que prendra la participation des autochtones aux futures élections nationales, a-t-il estimé, avant d’assurer que les autochtones participaient au Gouvernement actuel.


L’expert marocain et membre de l’Instance, M. ID BALKASSM, a mis l’accent sur la situation de la langue autochtone amazir dans le nord de l’Afrique et notamment en Libye.  Il a indiqué qu’il y avait une confusion entre l’arabe et l’islam qui crée une confusion entre l’arabisme et le non-arabisme.  Soulignant que la langue amazir était reconnue par la Constitution algérienne et par une loi au Maroc, il a invité le Gouvernement libyen à adopter une démarche juridique similaire.


Mme CLAUDIA PEREZ (Cuba) a dit apprécier l’Étude approfondie présentée sur les structures et mécanismes d’examen des droits de l’homme des autochtones.  Elle s’est posée des questions sur la façon dont le Conseil des droits de l’homme pourra travailler pour suivre l’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de tous les autres instruments contraignants relatifs aux droits de l’homme, avec l’examen périodique universel mis en place.  Comment est-ce que l’information sur les droits des autochtones pourra figurer dans ce mécanisme ? s’est-elle interrogée.  Elle a toutefois soutenu ce mécanisme qui place tous les États Membres sur un pied d’égalité.  L’élection des États Membres au Conseil des droits de l’homme se fait selon leur degré d’implication en faveur des droits des autochtones, a-t-elle rappelé, avant de se demander comment il était possible de vérifier si ces pays respectaient leurs engagements. 


M. STEPHEN ROSS, au nom des aborigènes d’Australie, a noté l’écart qui existe entre les droits des autochtones et leur réalisation effective.  Le processus de développement devrait prendre en compte l’indivisibilité des droits de l’homme, a-t-il estimé.  Les principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones complètent ce qui est déjà prévu par les autres instruments juridiques, comme la Convention 169 de l’Organisation internationale du Travail.  Il a salué James Anaya, nouveau Rapporteur spécial, et l’a invité à se rendre en Australie pour aider à faire avancer la cause des peuples autochtones dans ce pays.


Répondant à la question du représentant de Cuba, M. LITTLECHILD, Rapporteur spécial de l’Instance, a indiqué que celle-ci faisait rapport en tant qu’organe consultatif au Conseil économique et social et au nouveau mécanisme d’experts relevant du Conseil des droits de l’homme qui sont complémentaires.  Il a indiqué qu’il était très important que les questions autochtones soient traitées sur le terrain au niveau des collectivités et des communautés en s’appuyant sur la nouvelle Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones qui constitue désormais une référence.  S’agissant de l’examen universel périodique, il a estimé que les questions autochtones n’y seront pas automatiquement intégrées.  Il a qualifié de réaliste le rôle de suivi de l’Instance comme prévu au titre de l’article 42 de la Déclaration qui lui confère la responsabilité de rassembler toutes les parties concernées par les questions autochtones.  Tous les mécanismes mentionnés par le délégué de Cuba sont importants au sens où ils convergent tous vers une meilleure défense des droits et intérêts des autochtones, a-t-il encore insisté.


Mme MARIA XINENA FIGUEROA, ONIC, s’est inquiétée des incidences sur les droits des peuples autochtones des activités menées par les groupes paramilitaires en Colombie, en dénonçant la militarisation des territoires autochtones.  Nous sommes préoccupés par la criminalisation dont fait l’objet la population autochtone en Colombie, a-t-elle ajouté, en s’inquiétant des conséquences des fumigations aériennes destinées à lutter contre les cultures illégales, mais qui ont des conséquences sur la santé des peuples autochtones.


Mme HILARIA SUPU HUAMAN, parlementaire représentante du peuple quechua, a dénoncé les entreprises qui polluent les fleuves, les lacs et les terres essentielles pour son peuple.  Au Pérou, des multinationales exploitent la jungle et, outre la pollution qu’elles causent, persécutent nos dirigeants en les accusant de terrorisme.  Or ces peuples ne font que défendre leur mode de vie et leurs territoires où ils vivent depuis des milliers d’années.  Depuis 1995, les femmes autochtones sont stérilisées au Pérou dans le but de lutter contre la pauvreté, mais elles sont aujourd’hui plus pauvres que jamais.  Nous ne voulons pas que ceci se reproduise dans un autre pays du monde, a expliqué la représentante.  Elle a regretté que le Gouvernement n’ait rien fait pour contrecarrer ces mesures et n’accorde aucune importance à leur revendication.  Elle a donc invité l’Instance à recommander que les États-Unis et le Canada, ainsi que les autres pays ne l’ayant pas signée, deviennent partie à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Elle a aussi indiqué avoir proposé dans son pays que cette déclaration soit traduite en loi nationale.


M. JEAN-DANIEL VIGNY (Suisse) a rappelé quelles étaient les trois instances qui doivent promouvoir, respecter et faire respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, chacun dans leurs mandats respectifs afin d’éviter les doubles emplois.  Il s’agit de l’Instance permanente, du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones et du mécanisme d’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme.  Il a considéré tout d’abord que l’Instance pourrait intégrer la Déclaration dans ses six domaines d’activité, ainsi que dans ses activités relatives aux thèmes de chaque session.  Le Rapporteur spécial, dont le mandat a été prolongé de trois ans par le Conseil des droits de l’homme, a pour sa part un rôle important à jouer pour promouvoir les droits des autochtones ainsi que la Déclaration.  Quant au nouveau mécanisme de cinq experts indépendants, créé en décembre dernier, il peut proposer au Conseil d’apporter sa contribution dans l’application de la Déclaration, a rappelé le délégué suisse.  Pour M. Vigny, chaque mécanisme peut apporter sa contribution à la  mise en œuvre des droits de l’homme des peuples autochtones.


L’expert espagnol et membre de l’Instance, M. CLAVERO SALVADOR, a déclaré que les informations et témoignages entendus aujourd’hui concernant la Colombie semblaient démontrer une attitude négative de son gouvernement à l’égard des populations autochtones, une attitude qui est en contradiction avec les engagements pris envers la Convention 169 de l’Organisation internationale du Travail.  Par ailleurs, il a noté des contradictions entre les affirmations du représentant du Nicaragua et les faits notant qu’il semblait que la situation juridique d’une certaine communauté autochtone dans le pays était pire aujourd’hui qu’elle ne l’était en 2001.


M. LITTLECHILD, Assemblée des Premières Nations, a exhorté  le Canada à tenir compte des conséquences et des effets négatifs de sa position à l’égard des autochtones. Il a invité le Gouvernement canadien à entendre la voie exprimée par son parlement le 8 avril.  Celui-ci avait en effet souhaité l’adhésion à la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones.  Insistant sur les difficultés économiques et sociales des Premières Nations canadiennes, il a indiqué que les conditions de vie des peuples autochtones étaient proches de celles des populations des pays en développement.  


Répondant au Caucus de l’Arctique, Mme MARIANNE THOMSEN (Danemark) a indiqué qu’une commission judiciaire a achevé ses travaux qui visent à réformer le Code pénal.  La réforme qui comprend l’élaboration d’un code de procédure, entrera en vigueur en 2010.  L’objectif est de transférer la responsabilité du système judiciaire au Groenland.  Elle a également mentionné un accord pour une large autonomie du Groenland qui doit encore être signé par les Premiers-Ministres du Groenland et du Danemark.  Cet accord devrait entrer en vigueur en 2009.  Un département spécial entreprendra une campagne d’information à ce sujet, a précisé la représentante.  Enfin, elle a indiqué que plusieurs ministères du pays s’intéressent à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.


Mme MIRIAN SANCHEZ, Caucus autochtone de ABya Yala, a noté les effets négatifs de l’exploitation des territoires autochtones sur les populations, comme c’est le cas des installations hydroélectriques en territoire Changinola qui portent atteinte aux droits des autochtones Ngobe.  Elle a demandé au Rapporteur spécial de vérifier les allégations de violations qui ont lieu sur ce territoire, en particulier s’agissant des femmes et enfants autochtones.  Parmi les autres recommandations proposées, elle a souhaité que l’Instance invite le Gouvernement mexicain à enquêter sur la mort de deux personnes de la nation Triqui travaillant à la radio communautaire La Voz que Rompe el Silencio, dans l’État de Oaxaca, qui ont eu lieu le 7 avril dernier.


M. SAMUEL CARPINTERO, Association internationale des avocats (CEDONG), a dénoncé les conséquences de concessions hydroélectriques faites par le Gouvernement du Panama sur des terres autochtones.  Il a notamment mis l’accent sur trois projets réalisés par la « Société transnationale » nord-américaine, en contradiction totale avec les législations internationale et nationale.  C’est à tort que ces barrages sont présentés comme des projets « propres » de développement économique, a-t-il ajouté, en dénonçant des destructions orchestrées sans tenir compte des normes environnementales et lois de protection archéologique.  Il a précisé que l’énergie produite est exportée vers le nord de l’Amérique, ce qui ne présente aucun intérêt pour le développement durable local.  Il a indiqué que des manifestations se sont soldées par des violences policières, des intimidations, des mauvais traitements et des menaces de morts à l’encontre des dirigeants autochtones.  La communauté Gnobe, victime de cette exploitation, espère une visite du Rapporteur spécial et demande la cessation immédiate des violences policières et la tenue d’une consultation immédiate avec les autorités et les promoteurs de projets industriels.  Il a précisé que le Comité des droits de l’homme avait saisi le Gouvernement le 24 mars 2008.


Répondant aux questions du Caucus de l’Arctique, Mme CHARLOTTA SCHLYTER (Suède) a indiqué que son gouvernement n’estimait pas possible la ratification de la Convention 169 de l’OIT, en raison d’un conflit avec la loi et les droits fonciers suédois.  Elle a précisé que les terres concernées représentaient un tiers du territoire suédois.


Mme ANA MARIA GUACHO, Caucus de l’Équateur, a rappelé que les peuples autochtones de la région devaient subir de fortes pluies, le déboisement incontrôlé, les éruptions volcaniques et autres phénomènes.  Elle a donc fait un lien entre le développement, l’autodétermination et l’exercice des droits de l’homme de ces peuples.  La disparition de la flore et de la faune constitue une attaque contre l’environnement et une violation des droits de l’homme des autochtones, a-t-elle dit.  La représentante a aussi insisté sur l’importance du principe de consentement préalable, libre et informé.  Il faut aussi promouvoir la santé des autochtones et contrôler les maladies contagieuses, a-t-elle encore dit.  La représentante a encore appelé à favoriser l’éducation bilingue pour ne pas perdre la pratique des langues maternelles autochtones.  Le Gouvernement doit respecter l’identité des autochtones et ne pas chercher à les assimiler, a-t-elle ensuite signalé.  Elle a aussi dénoncé les pratiques du Gouvernement colombien qui détériore l’environnement.


En réponse au Caucus de l’arctique, M. SVEIN MICHELSEN (Norvège) a expliqué qu’il n’existe pas de convention nordique négociée entre les États.  Il existe seulement un document élaboré par un groupe d’experts et il est prématuré de parler de ratification.  Des négociations vont s’ouvrir avec le Parlement saami de la Norvège, a-t-il assuré.


M. SANDRO CRUZ, Institut autochtone du Brésil, a expliqué que de nombreuses violations des droits de l’homme des autochtones au Brésil avaient lieu, comme des aspersions de pesticides, la malnutrition des enfants et l’absence de soins médicaux.  Beaucoup sont touchés par l’hépatite, a-t-il précisé.  Il a aussi parlé d’assassinats de dirigeants autochtones.  Il a dénoncé l’absence de mesures de la part de l’État pour faire respecter les droits fondamentaux des autochtones.  Il a demandé l’envoi sur le terrain  dans les prochains mois du Rapporteur spécial.


Répondant à une question du Caucus de l’Arctique, Mme SATO SISTONEN (Finlande) s’est félicitée du cadre complet de coopération offert par la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones entre les gouvernements et les peuples autochtones.  S’agissant de l’exploitation forestière sur des lieux d’élevage des rennes, elle a précisé que toutes les consultations avaient été menées en accord avec la législation nationale et avec les associations d’éleveurs de rennes.  Elle a souligné que pour des activités de ce type, le Gouvernement tient compte des conséquences négatives et positives de tout projet.  Elle a précisé que les saamis n’étaient pas les seuls éleveurs de rennes, et qu’il y avait de nombreux éleveurs de rennes non saamis et qu’il n’y avait pas de différence de traitement entre eux.


Intervenant au nom d’une fédération d’associations autochtones de Bolivie, M. THOMAS HUANACU a précisé que les 16 peuples autochtones des hautes terres et 33 peuples des terres basses se félicitaient tous de l’adhésion de la Bolivie à la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones.  Il a souhaité un débat philosophique au sein de l’Instance qui permette de comparer les philosophies occidentales et autres et les modes de pensée autochtones, pour voir lesquelles étaient le plus aptes à favoriser la durabilité de la vie.


Pour répondre au Caucus de l’Arctique, M. BORIS V. CHERNENKO (Fédération de Russie) a expliqué que la Constitution de son pays a lié la protection des droits des peuples autochtones à celle des droits aux ressources naturelles.  La Russie mène un travail d’analyse de la corrélation entre les mesures prises dans le domaine industriel et le mode de vie des autochtones, a-t-il ajouté.  Avec le soutien d’une association des peuples autochtones, deux grands événements destinés à renforcer la protection des autochtones en Russie ont eu lieu.  Le représentant a ainsi indiqué qu’en juillet 2006 un séminaire international sur les peuples autochtones a été organisé, au cours duquel la question de l’exploitation des ressources minières sur les territoires des peuples autochtones a été débattue.  En outre, un autre séminaire s’est tenu sur la protection des droits des autochtones et la protection de l’environnement.


M. DAMIAN CONDORI, peuples autochtones de la Bolivie, a demandé que cessent les crimes de génocide et la violation des droits de l’homme, comme la spoliation de terres.  Il a aussi dénoncé le fait qu’en Bolivie des millions d’hectares sont aux mains de quelques familles seulement.  Il en résulte qu’on ne peut donner des terres aux autochtones qui voient de fait leurs droits à l’éducation et à la santé violés.


Mme CHANDA PUN, peuples autochtones du Népal, s’est félicitée du processus de démocratisation en cours au Népal qui verra les parties politiques nommer un certain nombre de représentants émanant des peuples autochtones.  Tout en saluant cette représentation des peuples autochtones au sein de la future Assemblée constituante, elle a regretté que cette représentation ne soit pas directe.  Elle a rappelé que le non-respect des droits des peuples autochtones était une violation claire de la Convention sur les droits civils et politiques et la Convention 169 de l’OIT.  Elle a demandé au Gouvernement du Népal de permettre une représentativité directe des représentants du Népal au travers de procédures de sélection qui leur sont propres.


Mme JOAN CARLING, Groupe de travail international sur les affaires autochtones, a rappelé que la première session du mécanisme d’examen universel périodique avait eu lieu au mois d’avril.  Elle a précisé qu’au vu des rapports présentés par les États Membres au cours de cette session d’examen périodique, les recommandations relatives aux droits des peuples autochtones ont à peine été mentionnées.  Certains États continuent de nier l’existence même des peuples autochtones dans leur pays, a-t-elle regretté, en insistant sur l’importance de l’examen périodique universel comme procédure visant à amener les États Membres à reconnaître les peuples autochtones, leurs droits et libertés fondamentales.


Mme BEVERLY JACOBS, Association canadienne des femmes autochtones, a rappelé que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones établit des droits minimums.  Son article 22 demande d’accorder une attention particulière aux femmes autochtones, a-t-elle signalé, notant que le Rapporteur spécial a constaté des discriminations et une marginalisation de ces femmes.  Elle a plaidé notamment en faveur de l’accès aux services sociaux et à la justice pour les femmes autochtones.  Il y a aussi une certaine victimisation des femmes et des filles autochtones qui se traduit par une forte prostitution et un taux élevé d’infection par le VIH/sida parmi elles.  La représentante a considéré que les gouvernements n’avaient pas protégé suffisamment cette portion vulnérable de la population.  Elle a aussi mentionné la résolution du Conseil de sécurité qui a fait état de l’impact des conflits armés sur les femmes.  Parmi ses recommandations, elle a souhaité que les institutions accordent une attention particulière à ces femmes.


Pour répondre à certaines questions posées à sa délégation, M. PAUL GIBRARD (Canada) a reconnu qu’il fallait prendre des mesures concrètes sur des questions affectant les droits des autochtones, comme les changements climatiques.  Le Canada n’a pas appuyé la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, a-t-il rappelé, précisant toutefois qu’il n’a pas l’intention d’empêcher les autres gouvernements d’aller dans la direction qu’ils veulent prendre.  Nous sommes en faveur de la protection des droits de l’homme des autochtones, a-t-il aussi assuré.


Mme CELESTE MCKAY, Caucus des Amériques, a évoqué la onzième session de réflexion organisée par l’Organisation des États américains pour la mise au point d’une déclaration sur les droits de trois groupes autochtones des Amériques.  Une telle déclaration ne peut pas être en-deçà des normes minimales de l’ONU.  Elle a précisé que le 8 avril 2008, la Chambre des communes du Canada avait demandé au Gouvernement canadien d’adhérer à la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones.  Elle a noté que la plupart des États américains s’étaient dits favorables à l’adoption d’une déclaration de l’Organisation des États américains lors d’une réunion en novembre 2007.


Répondant à une question de l’expert Bartolomeo Clavero Salvador, le représentant du Nicaragua a assuré que le Gouvernement actuel faisait de grands efforts pour appliquer l’avis rendu par la Cour permanente interaméricaine des droits de l’homme.  Il a souligné la nécessite de s’assurer que les droits fonciers d’une communauté ne viennent violer les droits d’une autre communauté.


Dans des remarques de clôture, Mme NICOLAISEN, Rapporteure spéciale de l’Instance permanente, a déclaré que les interventions de cet après-midi mettaient en évidence la nécessité de concertation pour permettre la meilleure mise en œuvre de la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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